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Ateliers constituants en Gironde le 13 avril

Ateliers constituants en Gironde le 13 avril

Je serai à Gra­di­gnan, en Gironde, le 13 avril pro­chain pour des ate­liers consti­tuants d’un genre nou­veau en mati­née, sui­vis d’une confé­rence sur le thème de l’ins­tau­ra­tion d’une pre­mière démo­cra­tie. 5 tables de 10 per­sonnes réflé­chi­ront sur un sujet don­né pour rédi­ger un article de la Consti­tu­tion. Soyez acteur (assis aux tables) ou réac­teur pou­vant cir­cu­ler autour des dif­fé­rentes tables, prendre des notes et sou­mettre des idées pen­dant la res­ti­tu­tion. Un food truck sera pré­sent pour un repas…

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DÉSOBÉISSANCE : POURQUOI OBÉIT-ON ? Étienne Chouard à Antibes, 18 nov 2023, anniv. Gilets jaunes

DÉSOBÉISSANCE : POURQUOI OBÉIT-ON ? Étienne Chouard à Antibes, 18 nov 2023, anniv. Gilets jaunes

Ouvrir la vidéo sur You­Tube https://www.youtube.com/watch?v=9‑LZdJbRiiw « La déso­béis­sance civile […] n’est pas un pro­blème, quoi qu’en disent ceux qui pré­tendent qu’elle menace l’ordre social et conduit droit à l’anarchie. Le vrai dan­ger, c’est l’obéissance civile, la sou­mis­sion de la conscience indi­vi­duelle à l’autorité gou­ver­ne­men­tale. » Howard Zin, L’Impossible Neu­tra­li­té (1994). TYRANNIE DE LA MAJORITÉ « Je regarde comme impie et détes­table cette maxime, qu’en matière de gou­ver­ne­ment la…

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Pour Ainsi Dire : Discussion 1, 2 et 3

Pour Ainsi Dire : Discussion 1, 2 et 3

Mer­ci à Laurent Sei­ter – Pour Ain­si Dire – pour ses invi­ta­tions sur sa chaine You­Tube 3. Les spé­cu­la­teurs « Reve­nons sur l’im­por­tance des prin­cipes, en tant que fon­da­tion d’une éthique mini­male. Les spé­cu­la­teurs : para­sites ou sym­biotes ? Pro­prié­té, prin­cipes de non-agres­sion et autres consi­dé­ra­tions sur le contrôle du pou­voir. » https://​www​.you​tube​.com/​w​a​t​c​h​?​v​=​i​l​H​p​H​N​t​w​kuY 2. Pro­prié­té, capi­ta­lisme « Pour­sui­vons la dis­cus­sion : ne pas confondre Droit, morale et éco­no­mie pour par­ler sainement…

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For­mat grille – For­mat articles complets

[« Réforme » = CRIME RÉGRESSIF en novlangue] L’ARME DES FAIBLES : #49al3, par Le Pixel Mort

Mon com­men­taire :

Le régime Macron avait PROMIS — pour être élu — de ne PAS aug­men­ter l’âge de départ à la retraite et de ne PAS bais­ser les pen­sions. Une fois par­ve­nu au pou­voir, cette bande de men­teurs fait les deux (!) et pire encore (!!) : Macron a déjà osé (en douce, en août 2018) dés­in­dexer les retraites, ce qui condamne méca­ni­que­ment, inévi­ta­ble­ment, sour­noi­se­ment, à la baisse de toutes les pen­sions jus­qu’à la mort. Rien que ça, c’est impar­don­nable, c’est du vol, et c’est voler les plus faibles, c’est révoltant.

Et en 2020, il va conti­nuer à nous vio­ler (aug­men­ter l’âge de départ à la retraite et bais­ser les pensions)
• sans même avouer l’é­ten­due de la dévas­ta­tion qu’il va encore impo­ser (en plus de la dés­in­dexa­tion des retraites),
• sans prou­ver l’ur­gence ni la néces­si­té de ce bouleversement,
• sans avouer sa hideuse et évi­dente cor­rup­tion par les géants de « la finance »,
• sans aucun débat digne de ce nom, ni au par­le­ment ni ailleurs,
• sans aucune pos­si­bi­li­té pour les citoyens de se défendre contre ce mau­vais coup impré­vu par référendum,
• et même sans parlement,
tout ça grâce à la com­pli­ci­té répu­gnante des godillots indignes qui consti­tuent ce qu’on appelle frau­du­leu­se­ment « la majo­ri­té » (frau­du­leu­se­ment car la majo­ri­té des Fran­çais est MUSELÉE)…

En plus, expert en nov­langue, le régime ose appe­ler cette félo­nie « réforme », alors que le mot « réforme » signi­fie « chan­ge­ment en bien, amé­lio­ra­tion ». Tout ça relève du men­songe chi­mi­que­ment pur du début à la fin, c’est une haute tra­hi­son, un juste motif d’in­sur­rec­tion : Article 35 de la Décla­ra­tion des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1793 : « Quand le gou­ver­ne­ment viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque por­tion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indis­pen­sable des devoirs. »


En fait de réforme, on signale au régime Macron une pro­po­si­tion de vraie amé­lio­ra­tion (qui serait plus intel­li­gente, plus oppor­tune et moins scan­da­leu­se­ment dévas­ta­trice que son hold-up de 320 mil­liards à des­ti­na­tion de ses copains ultra-riches finan­ciers) : le régime ferait mieux de contrô­ler la fraude (MASSIVE) à la Sécu­ri­té sociale, par exemple lut­ter contre la fraude docu­men­taire… Voyez ça, c’est incroyable :

#Par­RI­Cen­Tou­tes­Ma­tiè­res­Nou­sEm­pê­che­rions­Nos­Pré­ten­dus­Re­pré­sen­tants­De­Dé­trui­re­No­sAs­su­ran­ces­So­ciales

#Grè­ve­Gé­né­ra­le­CONS­TI­TUANTE

Étienne.

Fil Face­book cor­res­pon­dant à ce billet : 

https://​www​.face​book​.com/​e​t​i​e​n​n​e​.​c​h​o​u​a​r​d​/​p​o​s​t​s​/​1​0​1​5​7​9​6​5​1​7​9​3​5​7​317

Julian Assange bientôt Genevois ?

#Lon­dres­Ca­pi­ta­le­Mon­dia­le­Du­Cri­meEt­De­LAr­bi­traire
#FreeAs­sange

Fil Face­book cor­res­pon­dant à ce billet : 

https://​www​.face​book​.com/​e​t​i​e​n​n​e​.​c​h​o​u​a​r​d​/​p​o​s​t​s​/​1​0​1​5​7​9​6​4​9​6​5​1​0​7​317

Excellent Mélenchon, sur le crime abject du 49.3 sur les retraites

Je trouve Mélen­chon très bon, là.

Mais j’ai quand même deux pro­blèmes avec l’op­po­si­tion de LFI :

1) La motion de cen­sure est un leurre, une oppo­si­tion contrô­lée (© Orwell 1984), c’est-à-dire une oppo­si­tion dont le pou­voir n’a rien à craindre (puis­qu’il dis­pose d’une majo­ri­té de ser­pillières indignes). Je m’é­tonne que LFI REFUSE de lan­cer la pro­cé­dure de des­ti­tu­tion de Macron.

2) Un oppo­sant « radi­cal » qui REFUSE de sor­tir du car­can ultra­li­bé­ral de l’UE n’est pas du tout radi­cal : il n’est qu’une oppo­si­tion contrô­lée, c’est-à-dire trom­peuse (comme celle du traître Tsi­pras en Grèce).


Marianne encore vio­lée, cette fois sous bâillon sanitaire

Bernard Friot : “Si la bourgeoisie est la classe dirigeante, c’est parce qu’elle dirige le travail, et non pas parce qu’elle est riche”

Bernard Friot : “Si la bourgeoisie est la classe dirigeante, c’est parce qu’elle dirige le travail, et non pas parce qu’elle est riche” Deuxième partie

Source : Frus­tra­tion Maga­zine, https://​www​.frus​tra​tion​ma​ga​zine​.fr/​s​i​–​l​a​–​b​o​u​r​g​e​o​i​s​i​e​–​e​s​t​–​l​a​–​c​l​a​s​s​e​–​d​i​r​i​g​e​a​n​t​e​–​c​e​s​t​–​p​a​r​c​e​–​q​u​e​l​l​e​–​d​i​r​i​g​e​–​l​e​–​t​r​a​v​a​i​l​–​e​n​t​r​e​t​i​e​n​–​a​v​e​c​–​b​e​r​n​a​r​d​–​f​r​i​o​t​–​p​a​r​t​i​e​–​ii/

On a tous quelque chose en nous de com­mu­niste. Et même que ce quelque chose réside dans des ins­ti­tu­tions que nous connais­sons très bien, dont la plu­part du temps nous nous féli­ci­tons de leur exis­tence. Les­quelles ? Le sta­tut de la fonc­tion publique et le régime géné­ral de la sécu­ri­té social, bien sûr ! C’est ce que nous explique de manière évi­dente non sans une cer­taine pug­na­ci­té l’économiste et socio­logue du tra­vail Ber­nard Friot, que nous avons ren­con­tré. En plein mou­ve­ment social his­to­rique contre la réforme des retraites et de débats par­le­men­taires cette semaine, il nous sem­blait plus que néces­saire de dia­lo­guer avec lui, qu’il nous insuffle ce “Désir de com­mu­nisme” face au “rou­leau com­pres­seur du capi­ta­lisme néo­li­bé­ral”, concré­ti­sé dans son der­nier livre co-écrit avec Judith Ber­nard. L’occasion de se deman­der pour­quoi la ques­tion du tra­vail, si cen­trale pour­tant, est si peu ou mal abor­dée à gauche et même au sein de la gauche dite “radi­cale”, com­ment retrou­ver un second souffle de mobi­li­sa­tion face à la régres­sion des retraites, et qu’est-ce qu’apporte le mou­ve­ment des Gilets jaunes au com­bat social ? Par­tie II.

Entre­tien, par Selim Der­kaoui et Nico­las Framont

Le mou­ve­ment des gilets jaunes a un peu fait voler en éclat tout ça, non ?

Toute cette conjonc­tion de la science sociale cri­tique et des direc­tions poli­tiques est sur la défen­sive, et en assez grande dif­fi­cul­té pour pro­po­ser une alter­na­tive. Cette impuis­sance de ceux qui ont orga­ni­sé les conquêtes dont j’ai par­lé et qui aujourd’hui se révèlent inca­pables de les pro­mou­voir, inca­pables de les voir même, fait qu’ont com­men­cé à pros­pé­rer d’autres formes de dis­cours et d’action comme les gilets jaunes, qui sont un mou­ve­ment de fond ins­crit dans la durée.

Les gilets jaunes, à tra­vers des formes d’organisation beau­coup plus hori­zon­tales, rejoignent d’autres formes de mobi­li­sa­tions nou­velles, toute cette jeu­nesse sou­vent diplô­mée qui crée des alter­na­tives “ici et main­te­nant”, dans des tas de champs de la pro­duc­tion. On a main­te­nant toute une marge alter­na­tive, com­mu­niste à mon sens, de gens qui se des­tinent à maî­tri­ser leur tra­vail. Cela a tou­jours exis­té mais à l’échelle atteinte aujourd’hui, c’est tout à fait nou­veau. Cela vient de la crise du capi­ta­lisme qui est tel­le­ment avan­cé dans l’élimination du tra­vail vivant par le tra­vail mort des machines qu’il se heurte à de graves pro­blèmes de valo­ri­sa­tion qu’il ne par­vient pas à jugu­ler par la fuite en avant qu’il pra­tique à grande échelle.

Quelle en serait la suite logique ?

La rup­ture de tous ces alter­na­tifs avec la logique capi­ta­liste du tra­vail me semble durable. Avec ses ambi­guï­tés certes. Ils ont ten­dance à confondre le mar­ché du tra­vail et les employeurs et avec les conquêtes du sala­riat : “la retraite, on n’en aura pas”, “non non sur­tout pas de CDI, je veux res­ter flexible” … Avec l’illusion que sur les pla­te­formes col­la­bo­ra­tives, on va être dans l’horizontalité, on va faire ce que l’on veut… Et la ten­ta­tion d’adhérer au pro­jet capi­ta­liste qui se sub­sti­tue au salaire à la qua­li­fi­ca­tion per­son­nelle : nos per­sonnes ne peuvent pas être titu­laires d’un salaire, mais elles pour­raient dis­po­ser d’un reve­nu de base. Il y a donc des illu­sions mais il y a quelque chose de magni­fique à refu­ser d’être le jouet du capital.

Ces alter­na­tifs sont dans cette situa­tion ambi­guë d’une adhé­sion de fait à une flexi­bi­li­té recher­chée par la bour­geoi­sie capi­ta­liste, mais pour poser des actes de pro­duc­tions com­mu­nistes, c’est-à-dire sur des pro­duits qui aient du sens, qui ne soient pas faits pour mettre en valeur du capi­tal, etc. Le dépas­se­ment de cette contra­dic­tion, ce n’est pas que ces pro­duc­teurs deviennent des employés, avec un emploi stable auprès d’employeurs, mais qu’ils soient pro­prié­taire de leur qua­li­fi­ca­tion et donc titu­laires d’un salaire à vie.

Qu’est ce que cela signifie ?

Que l’enjeu pour les livreurs de Deli­ve­roo n’est pas qu’ils deviennent employés de la pla­te­forme mais qu’ils soient titu­laires de leur salaire et copro­prié­taires d’usage de la pla­te­forme, sous une forme coopé­ra­tive ou autre. Une des choses les plus dif­fi­ciles vient de ce que la bour­geoi­sie, qui s’emploie en per­ma­nence à dis­qua­li­fier les ins­ti­tu­tions qui la mettent en dif­fi­cul­té, a tout fait pour que nous conno­tions néga­ti­ve­ment le salaire et posi­ti­ve­ment le reve­nu de base. Certes ils ont pour point com­mun de faire de la res­source un droit poli­tique de la per­sonne. Mais il y a un gouffre entre le pou­voir d’achat mini­mum que la bour­geoi­sie est tou­jours prête à accor­der à qui­conque dans un reve­nu de base (sur­tout s’il est payé par l’impôt, c’est-à-dire assez peu par elle), et la recon­nais­sance incon­di­tion­nelle, dans un salaire à la qua­li­fi­ca­tion per­son­nelle, de la capa­ci­té de tout adulte à pro­duire de la valeur. Un tel droit poli­tique au salaire pose les per­sonnes comme les seules pro­duc­trices de valeur et donc can­di­dates légi­times à ravir à la bour­geoi­sie son mono­pole sur la valeur éco­no­mique, qui est le fon­de­ment de sa puissance.

Si la bour­geoi­sie est la classe diri­geante c’est parce qu’elle dirige le tra­vail, et non pas parce qu’elle est riche. C’est le tra­vail qui est le cœur de la lutte de classes, ce n’est pas l’argent, l’argent c’est la consé­quence du tra­vail. Donc la classe diri­geante n’a de pou­voir sur l’argent que parce qu’elle a le pou­voir sur le tra­vail, et c’est son pou­voir sur le tra­vail qu’il faut lui ravir. Et pour le lui ravir il faut d’abord que nous sor­tions de l’aléa de notre recon­nais­sance comme tra­vailleur selon le bon vou­loir de l’employeur ou selon notre per­for­mance sur les mar­chés sur les­quels nous n’avons aucun pou­voir en réa­li­té. La bour­geoi­sie tient ces mar­chés, soit du tra­vail soit des biens et ser­vices, et si nos per­sonnes sont niées comme pro­duc­trices et que nous ne sommes recon­nus comme pro­duc­teur qu’à la mesure de nos per­for­mances sur les mar­chés qu’elle tient, elle a de longs jours devant elle. Mais elle n’en a pas parce qu’une classe révo­lu­tion­naire est en cours de consti­tu­tion depuis plus d’un siècle et ins­ti­tue l’alternative.

Vous pen­sez que la gauche a aban­don­né la ques­tion du tra­vail ? Est-ce parce qu’elle est deve­nue un peu bour­geoise elle aussi ?

Deve­nir bour­geois c’est quand même pré­cis : c’est être pro­prié­taire de l’outil de tra­vail, déci­der l’investissement, déci­der de ce qui vaut, par exemple arbi­trer entre la route et le fer pour les trans­ports. La gauche n’est pas deve­nue bourgeoise.

Mais qu’elle ait aban­don­né la ques­tion du tra­vail, oui. Pour moi, c’est un manque tout à fait consi­dé­rable. Aug­men­té encore par cette espèce de fas­ci­na­tion pour la finan­cia­ri­sa­tion du capi­tal dans laquelle on nous fait croire qu’il se crée de la valeur dans la sphère de la finance, que fina­le­ment le capi­ta­lisme n’a plus besoin du tra­vail, que tout ça va pou­voir être fait par des robots, que c’est la fin du tra­vail… c’est dans l’air du temps, bien sûr.

Le mot « argent » l’emporte dans le débat public sur le mot « tra­vail » : on a l’impression que l’argent fait des petits tout seul et que le capi­ta­lisme serait en mesure de se pas­ser du tra­vail et donc, qu’il faut lui prendre son pou­voir sur l’argent, que c’est ça qui est déci­sif. Quand on regarde les pro­po­si­tions alter­na­tives, par exemple à pro­pos de la retraite, elles portent sur le finan­ce­ment des pen­sions : on peut prendre l’argent là où il est car de toute façon « de l’argent, il y en a ». Mais il est mal répar­ti, il y a un coût du capi­tal, … c’est ça le fond de l’argumentaire du mou­ve­ment pro­gres­siste. La solu­tion, c’est une « bonne » fis­ca­li­té… Alors voi­là le constat : la prise du pou­voir sur le tra­vail n’est pas à l’ordre du jour glo­ba­le­ment, sauf chez ces jeunes alter­na­tifs… chez eux oui, c’est très puis­sant. Mais dans les orga­ni­sa­tions qui ont été por­teuses des conquêtes du sala­riat, ce qu’on asso­cie à « tra­vail » c’est « souf­france ». Et c’est « réduction ».

Ce sont les mots les plus asso­ciés au tra­vail aujourd’hui chez les militants ?

Je n’ai pas fait de lexi­co­mé­trie à ce pro­pos, mais je pense que les mots les plus asso­ciés au tra­vail aujourd’hui, dans les milieux pro­gres­sistes, ce sont en effet bien eux. Il s’agit de réduire le temps de tra­vail et il y a de la souf­france au tra­vail. C’est-à-dire que le mot tra­vail est conno­té néga­ti­ve­ment. C’est assez rare qu’il soit conno­té posi­ti­ve­ment. Y com­pris chez les alter­na­tifs qui, jus­te­ment, parce qu’ils ne veulent pas faire du tra­vail comme leurs aînés, en accep­tant des tra­vaux avec les­quels ils seraient en désac­cord, vont dire qu’ils ne tra­vaillent pas, vont dire qu’ils sont dans l’activité.

Ça cor­res­pond à une vision elle aus­si péjo­ra­tive du tra­vail chez ceux qui aspirent à se libé­rer du tra­vail, à réduire le temps de tra­vail, et vivent le tra­vail comme de la souf­france qu’il faut gérer. Il faut donc « pré­ve­nir la souf­france au tra­vail », faire condam­ner les employeurs qui génèrent de la souf­france au tra­vail. Mais la souf­france au tra­vail c’est un concept qui est accep­té. C’est une sorte de caté­go­rie qui médi­ca­lise une vio­lence sociale qui n’est pas dénon­cée comme telle. Ce qu’on va condam­ner, c’est la souf­france qu’elle génère, comme si c’était natu­rel que le tra­vail génère de la souf­france. Et pour­tant les ori­gines de la souf­france au tra­vail sont claires : c’est l’absence de la maî­trise du tra­vail. Donc tant qu’il n’y aura pas déter­mi­na­tion à construire les ins­ti­tu­tions de pou­voir sur le tra­vail, concret, dans l’entreprise, on va conti­nuer à cher­cher à gérer la souf­france au tra­vail et à cher­cher à réduire le temps de travail.

Est-ce que ça vient d’un manque de cou­rage à affron­ter cette question ?

Je sais que c’est dur d’être mili­tant, d’être syn­di­ca­liste, j’ai le plus grand res­pect pour tous ceux qui se battent. C’est plu­tôt qu’il n’y a pas de tra­di­tion de maî­trise col­lec­tive du tra­vail… On dit, « c’est nous qui pro­dui­sons, c’est nous qui déci­dons », mais un peu comme un man­tra, c’est comme le « tous ensemble tous ensemble hé » dans les manifs, quand on sait bien qu’on n’est pas tous ensemble et que trop d’organisations se tirent les unes sur les autres …

Rien de concret n’est fait dans les entre­prises par les orga­ni­sa­tions de tra­vailleurs pour qu’ils décident. Parce que déci­der, ça veut dire s’opposer aux direc­tions. Et s’opposer aux direc­tions ça ne se fait pas par la grève. La grève, c’est un temps pra­ti­que­ment inexis­tant dans le sec­teur pri­vé et très inter­mit­tent dans le sec­teur public. Donc non, ce n’est pas par la grève qu’on s’oppose aux direc­tions, et comme aujourd’hui il n’y a que ça comme moyen d’action, la grève comme absence de tra­vail, on ne mobi­lise pas toute l’organisation – les mili­tants, les ins­ti­tu­tions, les pro­tec­tions (par exemple la pro­tec­tion contre le licen­cie­ment des délé­gués syn­di­caux), on ne mobi­lise pas toute cette orga­ni­sa­tion pour dire « ah non non, nous allons nous auto-orga­­ni­­ser dans ce que nous fai­sons au travail ».

C’est ça la réponse à la souf­france au tra­vail. Il n’y a aucune rai­son que le tra­vail soit source de souf­france, aucune. Au contraire, c’est une source de liber­té. Le dépla­ce­ment à opé­rer dans l’action col­lec­tive est autour de « nous nous auto-orga­­ni­­sons ». Mais si la maî­trise du tra­vail est aban­don­née aux employeurs et que le temps de tra­vail devient insup­por­table, toute la mili­tance se consacre à la réduc­tion du temps de tra­vail, heb­do­ma­daire et sur le cycle de vie, avec la retraite comme fin du tra­vail. Alors que la retraite, rap­­pe­­lons-le, a été construite en 1946 par les com­mu­nistes comme la fin de l’obligation d’aller sur le mar­ché du tra­vail pour avoir un salaire. Un retrai­té ce n’est pas quelqu’un qui ne tra­vaille plus, c’est quelqu’un qui n’a plus besoin de qué­man­der son salaire auprès d’un employeur parce qu’il est deve­nu titu­laire de son salaire. C’est pour cela que vous avez une telle déter­mi­na­tion de Macron : « non, entrer en retraite c’est être béné­fi­ciaire du dif­fé­ré de ses coti­sa­tions, on ne peut jamais être titu­laire de son salaire ». La bour­geoi­sie a abso­lu­ment besoin que nous soyons à poil pour que sa domi­na­tion sur nos vies soit pos­sible, pour que nous ne puis­sions pas lui ravir le mono­pole sur la pro­duc­tion de valeur qui est la source de son pouvoir.

Pour autant, cette ques­tion est tota­le­ment absente du débat public sur la réforme des retraites en ce moment …

Vous avez rai­son, et c’est parce que le tra­vail, conno­té néga­ti­ve­ment, est absent du débat public. Cela dit, je suis opti­miste sur le fait que le tra­vail vienne sur le devant de la scène. La prise de conscience que la maî­trise du tra­vail concret doit deve­nir le cœur de l’activité col­lec­tive, ça je suis convain­cu que ça va mon­ter. Déjà, il y a tous les alter­na­tifs qui en sont por­teurs, et tous les mili­tants syn­di­caux qui voient bien qu’on ne peut pas se conten­ter de réduire le temps de tra­vail et d’attendre la retraite comme la fin du tra­vail, et qu’il faut com­men­cer à se poser la ques­tion de la conquête des outils de l’affrontement aux direc­tions sur le conte­nu du travail.

Que pen­ser du trai­te­ment média­tique du travail ?

Je suis peu au fait du trai­te­ment média­tique, mais ce qui me frappe c’est la mon­tée au cours des trente der­nières années, dans l’opinion cou­rante, de la conno­ta­tion péjo­ra­tive du tra­vail. Jusqu’à son éty­mo­lo­gie, avec l’invention d’une éty­mo­lo­gie fausse, le fameux « tri­pa­lium », cet ins­tru­ment de tor­ture. Est tout à fait signi­fi­ca­tive la façon dont Han­nah Arendt, dans son essai sur La condi­tion de l’homme moderne, pro­lon­gé par Domi­nique Méda dans la Fin du tra­vail ?, reprend le trip­tyque aris­to­té­li­cien sur tra­vail, action, œuvre : le tra­vail ce sont les esclaves, l’œuvre ce sont les arti­sans et l’action ce sont les citoyens libres, c’est la poli­tique. Ce bou­quin a eu un très grand suc­cès, et les années 90 sont des années où dans l’opinion culti­vée s’exprime cette déva­lo­ri­sa­tion du tra­vail qui natu­ra­lise l’état déplo­rable dans lequel la logique du pro­fit met le tra­vail. Et c’est une saga qui, là encore, écrit ce dont la bour­geoi­sie a besoin.

Cette dis­qua­li­fi­ca­tion du tra­vail vient de la crise du capi­ta­lisme : la bour­geoi­sie n’est plus capable de gérer le tra­vail de façon à ce qu’il soit anthro­po­lo­gi­que­ment, éco­lo­gi­que­ment, ter­ri­to­ria­le­ment humain. Inca­pable de nous mobi­li­ser posi­ti­ve­ment sur le tra­vail, elle nous mobi­lise sur des coli­fi­chets de la consom­ma­tion et s’emploie à ce que nous consi­dé­rions comme natu­rel que le tra­vail, c’est de la merde. Rai­son de plus pour nous appuyer sur le déjà-là com­mu­niste pour sou­te­nir l’action col­lec­tive de conquête de la sou­ve­rai­ne­té sur le tra­vail afin de le tirer de ce mau­vais pas. Nous dis­po­sons, avec la sécu­ri­té sociale de la pro­duc­tion de soins que le régime géné­ral a su mettre en place de la fin des années 1950 au milieu des années 1970, d’un dis­po­si­tif que nous pou­vons trans­po­ser à toute la pro­duc­tion. Une hausse du taux et un élar­gis­se­ment de l’assiette de la coti­sa­tion à l’assurance-maladie ont per­mis d’une part de sub­ven­tion­ner l’investissement hos­pi­ta­lier, d’inclure dans son sein les hôpi­taux psy­chia­triques, de trans­for­mer les hos­pices en hôpi­taux locaux, et d’autre part de conven­tion­ner les soins de ville. Et ça s’est fait sur un mode que je qua­li­fie de com­mu­niste : salaire à la qua­li­fi­ca­tion per­son­nelle des soi­gnants, fonc­tion­naires hos­pi­ta­liers ou libé­raux conven­tion­nés, sub­ven­tion de l’investissement ôtant toute place à la pro­prié­té lucra­tive de l’outil.

Je crois que vous avez des pro­po­si­tions qui s’appuient sur cet exis­tant ?

Oui, l’application d’une telle sécu­ri­té sociale à l’alimentation (SSA) par exemple est un ter­rain d’autant plus pro­pice qu’il y a déjà des alter­na­tifs à tous les niveaux : de la pro­duc­tion des biens bruts comme le lait ou le blé, à la pro­duc­tion des biens éla­bo­rés, la dis­tri­bu­tion, la res­tau­ra­tion, la pro­duc­tion d’outils agri­coles : tout cela aujourd’hui est inves­ti par des alter­na­tifs qui ne sont plus quan­ti­té négli­geable, même s’ils res­tent mar­gi­na­li­sables ou récu­pé­rables… Le levier serait une coti­sa­tion qui pour­rait être de 8% de la valeur ajou­tée mar­chande, soit 120 mil­liards, ce qui cor­res­pond en gros à la moi­tié des dépenses de consom­ma­tion ali­men­taire aujourd’hui – ce qui n’est pas rien, et qui serait une opé­ra­tion blanche à l’échelle macro pour les entre­prises, puisqu’à ces 120 mil­liards de coti­sa­tion cor­res­pon­dront 120 mil­liards de non rem­bour­se­ment de dettes, ou de non-ver­­se­­ment de divi­dendes. Ça sup­pose toute une bataille poli­tique sur l’illégitimité du crédit…

On n’affecterait pas la tota­li­té de ces 120 mil­liards à sol­va­bi­li­ser la popu­la­tion, parce que les alter­na­tifs ne peuvent pas aujourd’hui assu­rer la moi­tié des besoins d’alimentation. Disons pour lan­cer le débat qu’on peut pro­po­ser d’affecter les 23 des 120 mil­liards aux consommateurs/usagers, soit 100€ par per­sonne et par mois, sur la carte vitale. Un foyer de 3 per­sonnes per­çoit dont 300€ par mois, ça ne couvre pas la tota­li­té de la dépense en ali­men­ta­tion, mais c’est quand même très signi­fi­ca­tif. Et cette carte vitale, elle ne pour­ra être pré­sen­tée que chez des pro­fes­sion­nels conven­tion­nés– exac­te­ment comme pour les hôpi­taux et les méde­cins libé­raux. On ne va évi­dem­ment pas conven­tion­ner la grande dis­tri­bu­tion, l’agrobusiness etc. Et il fau­dra aller loin dans le refus du conven­tion­ne­ment : un des ensei­gne­ments qu’on peut tirer de l’assurance mala­die, c’est qu’on a conven­tion­né les pro­duc­teurs de soins en conser­vant un mode capi­ta­liste de pro­duc­tion du médi­ca­ment, moyen­nant quoi on a four­ni un mar­ché public incroyable aux groupes capi­ta­listes comme Sano­fi qui ont inves­ti, et en par­tie pour­ri, la pra­tique du soin… Il ne s’agit pas qu’on fasse la même chose dans l’alimentation en four­nis­sant un mar­ché public à Mas­sey Fer­gu­son ou à Bayer ! Il faut que ne soient conven­tion­nés que les pro­duc­teurs qui ne font pas appel à des four­nis­seurs capi­ta­listes, qui pro­duisent bio en res­pec­tant le droit du tra­vail (ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui), des entre­prises dont les tra­vailleurs sont les pro­prié­taires d’usage de leur outil de travail…

Quant au tiers res­tant des 120 mil­liards, il serait consa­cré au sou­tien des pro­duc­teurs alter­na­tifs. Il faut ache­ter des terres, notam­ment : il faut arra­cher la terre à la logique mar­chande et en faire un bien com­mun, et ça aus­si c’est un tra­vail consi­dé­rable. Il faut payer les tra­vailleurs conven­tion­nés à la qua­li­fi­ca­tion per­son­nelle. Il faut sub­ven­tion­ner l’investissement de pro­duc­teurs agri­coles alter­na­tifs, il faut aider les agri­cul­teurs qui vou­draient pas­ser au bio à le faire –il y en a pour quatre ou cinq ans, avant que ce soit ren­table, et pen­dant ces quatre ou cinq ans il faut qu’ils soient sou­te­nus ; il faut sou­te­nir la pro­duc­tion de machines nou­velles, etc.

Et je vou­drais conclure sur le fait que nous créons là une ins­ti­tu­tion macroé­co­no­mique qui pour­rait être arti­cu­lée avec cette autre ins­ti­tu­tion macro qu’est la retraite, enten­due comme l’âge où l’on devient titu­laire de son salaire sans plus pas­ser par le mar­ché du tra­vail. On pour­rait la fixer à l’âge cri­tique sur le mar­ché du tra­vail, 50 ans. Les quin­qua­gé­naires retrai­tés, dotés de leur salaire et d’une res­pon­sa­bi­li­té d’auto-organisation des tra­vailleurs, pour­ront évi­dem­ment inves­tir mas­si­ve­ment ces entre­prises alter­na­tives dont l’activité va être consi­dé­ra­ble­ment aug­men­tée.  Et ce qu’on vient de dire sur l’alimentation, on pour­rait le trans­po­ser sur la pro­duc­tion de loge­ment, sur le trans­port de proxi­mi­té, sur l’énergie, la culture, l’accès à la jus­tice… Retrou­ver la dyna­mique com­mu­niste rend inven­tif et joyeux !

Ber­nard Friot

Pre­mière par­tie de l’entretien ici

Pho­tos de Serge d’Ignazio

Source : Frus­tra­tion Maga­zine, https://​www​.frus​tra​tion​ma​ga​zine​.fr/​s​i​–​l​a​–​b​o​u​r​g​e​o​i​s​i​e​–​e​s​t​–​l​a​–​c​l​a​s​s​e​–​d​i​r​i​g​e​a​n​t​e​–​c​e​s​t​–​p​a​r​c​e​–​q​u​e​l​l​e​–​d​i​r​i​g​e​–​l​e​–​t​r​a​v​a​i​l​–​e​n​t​r​e​t​i​e​n​–​a​v​e​c​–​b​e​r​n​a​r​d​–​f​r​i​o​t​–​p​a​r​t​i​e​–​ii/

Fil Face­book cor­res­pon­dant à ce billet :

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Formidable Pepe Escobar sur Sputnik France : Procès de Julian Assange : « C’est un tribunal stalinien »

Avec des pas­sages enthou­siastes sur le (très inté­res­sant) livre de Juan Bran­co, « Assange : l’antisouverain ».

Pro­cès de Mos­cou, désor­mais à Londres et Washing­ton, capi­tales du crime :

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[Free Assange] Craig Murray : la cage de verre blindée est un instrument de torture

Craig MURRAY : La cage de verre blindée est un instrument de torture


pho­to : illus­tra­tion par la rédac­tion du Grand Soir (source indéterminée)

Lors de l’audience sépa­rée de jeu­di sur l’autorisation don­née à Assange de sor­tir de la cage blin­dée pour s’asseoir avec son équipe d’avocats, j’ai pu consta­ter direc­te­ment que la déci­sion de Barait­ser contre Assange a été pré­sen­tée par elle au tri­bu­nal AVANT qu’elle n’ait enten­du l’avocat de la défense pré­sen­ter les argu­ments, et qu’elle les a pré­sen­tés sans aucune modification.

Je pour­rais com­men­cer par vous expli­quer ma posi­tion dans la tri­bune publique par rap­port au juge. Toute la semaine, je me suis déli­bé­ré­ment assis à l’avant, sur le siège de droite. La gale­rie donne sur une fenêtre en verre blin­dé à une hau­teur d’environ 2 mètres au-des­­sus de la salle d’audience. Elle des­cend d’un côté du tri­bu­nal, et l’extrémité droite de la gale­rie publique se trouve au-des­­sus du banc du juge, qui est assis en des­sous per­pen­di­cu­lai­re­ment à celui-ci. Depuis les sièges de droite de la gale­rie publique, vous avez donc une vue plon­geante directe sur le banc du juge, et que vous pou­vez voir tous ses docu­ments et son écran d’ordinateur.

L’avocat Mark Sum­mers a sou­li­gné que dans l’affaire Belou­sov contre la Rus­sie, la Cour euro­péenne des droits de l’homme de Stras­bourg a sta­tué contre l’État de Rus­sie parce que Belou­sov avait été jugé dans une cage de verre pra­ti­que­ment iden­tique dans sa construc­tion et sa posi­tion à celle dans laquelle se trouve pré­sen­te­ment Assange. Cette situa­tion a entra­vé sa par­ti­ci­pa­tion au pro­cès et son libre accès à un avo­cat, et l’a pri­vé de sa digni­té humaine en tant qu’accusé.

Sum­mers pour­suit en disant qu’il est nor­mal que cer­taines caté­go­ries de pri­son­niers non condam­nés soient libé­rés du banc des accu­sés pour s’asseoir avec leurs avo­cats. Le tri­bu­nal dis­po­sait de rap­ports psy­chia­triques sur l’extrême dépres­sion cli­nique d’Assange et, en fait, le guide des meilleures pra­tiques du minis­tère bri­tan­nique de la jus­tice à l’intention des tri­bu­naux indi­quait que les per­sonnes vul­né­rables devraient être libé­rées pour s’asseoir aux côtés de leurs avo­cats. Un trai­te­ment spé­cial n’était pas deman­dé pour Assange – il deman­dait à être trai­té comme toute autre per­sonne vulnérable.

La défense a été entra­vée par son inca­pa­ci­té à com­mu­ni­quer confi­den­tiel­le­ment avec son client pen­dant la pro­cé­dure. Dans la phase sui­vante du pro­cès, où les témoins seront inter­ro­gés, il est essen­tiel de com­mu­ni­quer en temps utile. En outre, ils ne pou­vaient par­ler avec lui que par une fente dans la vitre, à por­tée d’oreille des agents de sécu­ri­té de la socié­té pri­vée qui le sur­veillaient (il a été pré­ci­sé qu’il s’agissait de Ser­co, et non du groupe 4 comme l’avait dit Barait­ser la veille), et en pré­sence de microphones.

Barait­ser s’est mise de mau­vaise humeur à ce moment-là et a par­lé avec un réel tran­chant de voix. « Qui sont ces gens der­rière vous, au der­nier rang », a‑t‑elle deman­dé avec sar­casme à Sum­mers – une ques­tion à laquelle elle connais­sait pra­fai­te­ment la réponse. Sum­mers a répon­du qu’ils fai­saient par­tie de l’équipe juri­dique de la défense. Barait­ser a dit qu’Assange pou­vait les contac­ter s’il avait un point à faire valoir. Sum­mers répon­dit qu’il y avait une allée et un muret entre la cage de verre et leur posi­tion, et que tout ce qu’Assange pou­vait voir par-des­­sus le mur était le haut de l’arrière de leur tête. Barait­ser a dit qu’elle avait vu Assange crier. Sum­mers a décla­ré que crier à tra­vers la salle d’audience n’était ni confi­den­tiel ni satisfaisant.

On m’a main­te­nant infor­mé que c’est un délit de publier la pho­to de Julian dans sa cage de verre, même si je ne l’ai pas prise et qu’elle est abso­lu­ment par­tout sur Inter­net. Il convient éga­le­ment de noter que je suis de retour dans mon pays, l’Écosse, où se trouve mon blog, et que ni l’un ni l’autre ne relève de la juri­dic­tion du tri­bu­nal anglais. Mais je tiens à ne pas leur don­ner d’excuse pour m’exclure de l’audience du tri­bu­nal, c’est pour­quoi je l’ai sup­pri­mée, mais vous pou­vez la voir ici (en illus­tra­tion du pré­sent article – NdT).

C’est la pho­to prise illé­ga­le­ment (pas par moi) d’Assange au tri­bu­nal. Si vous regar­dez atten­ti­ve­ment, vous pou­vez voir qu’il y a un pas­sage et un muret en bois entre lui et la der­nière ran­gée d’avocats. Vous pou­vez voir l’un des deux agents de la pri­son de Ser­co qui le sur­veille à l’intérieur de la cage.

Barait­ser a dit qu’Assange pou­vait pas­ser des notes, et qu’elle l’avait vu pas­ser des notes. Sum­mers a répon­du que les offi­ciers de jus­tice avaient désor­mais inter­dit la trans­mis­sion de notes. Barait­ser a dit qu’ils pou­vaient en par­ler à Ser­co, que c’était une ques­tion qui rele­vait des auto­ri­tés de la prison.

Sum­mers a affir­mé que, contrai­re­ment à ce que Barait­ser avait décla­ré la veille, elle était effec­ti­ve­ment com­pé­tente pour sor­tir Assange de la cage. Barait­ser est inter­ve­nue pour dire qu’elle était d’accord avec ça. Sum­mers a ensuite décla­ré qu’il avait pro­duit un cer­tain nombre d’éléments pour mon­trer que Barait­ser avait éga­le­ment eu tort de dire qu’être en garde à vue ne pou­vait que signi­fier être enfer­mé dans la cage. Vous pou­vez être en garde à vue n’importe où dans l’enceinte du tri­bu­nal, ou même à l’extérieur. Barait­ser en est deve­nue très contra­riée et a décla­ré qu’elle avait seule­ment dit que la garde dans tri­bu­nal devait être égale à la garde dans la cage.

Ce à quoi Sum­mers a répon­du de façon mémo­rable, main­te­nant très contra­rié : « Eh bien, c’est faux aus­si, et c’est faux depuis ces huit der­nières années. »

Met­tant un terme à son argu­men­ta­tion, Barait­ser a don­né son avis sur cette ques­tion. Voi­ci main­te­nant ce qui est inté­res­sant, et je suis un témoin ocu­laire direct. Elle a lu son juge­ment, qui était écrit à la main sur plu­sieurs pages. Elle l’avait appor­té avec elle au tri­bu­nal sous forme de liasse, et elle n’y a appor­té aucune modi­fi­ca­tion. Elle avait rédi­gé son juge­ment avant même d’avoir enten­du Mark Summers.

Ses prin­ci­paux points étaient qu’Assange était capable de com­mu­ni­quer avec ses avo­cats en criant depuis la cage. Elle l’avait vu pas­ser des notes. Elle était prête à ajour­ner le tri­bu­nal à tout moment pour qu’Assange puisse des­cendre avec ses avo­cats pour dis­cu­ter dans les cel­lules, et si cela allon­geait la durée de l’audience de trois à six semaines, cela pour­rait prendre autant de temps que nécessaire.

Barait­ser a décla­ré qu’aucun des rap­ports psy­chia­triques qu’elle avait devant elle n’indiquait qu’il était néces­saire pour Assange de quit­ter la cage. Comme aucun des psy­chiatres n’avait été inter­ro­gé à ce sujet – et très pro­ba­ble­ment aucun ne connais­sait la dis­po­si­tion de la salle d’audience – cela n’est guère surprenant.

Je me suis deman­dé pour­quoi il est si impor­tant pour le gou­ver­ne­ment bri­tan­nique de main­te­nir Assange dans cette cage, inca­pable d’entendre les pro­cé­dures ou de com­mu­ni­quer avec ses avo­cats, même lorsque les avo­cats du gou­ver­ne­ment amé­ri­cain ont décla­ré qu’ils n’avaient aucune objec­tion à ce qu’Assange siège avec ses avocats.

La réponse se trouve dans l’évaluation psy­chia­trique d’Assange don­née à la cour par le très dis­tin­gué pro­fes­seur Michael Kopel­man (qui est fami­lier à tous ceux qui ont lu Mur­der in Samar­kand) :

« M. Assange montre pra­ti­que­ment tous les fac­teurs de risque que les cher­cheurs d’Oxford ont décrit des pri­son­niers qui se sui­cident ou font des ten­ta­tives mor­telles. …
Je suis aus­si sûr qu’un psy­chiatre peut l’être que, si l’extradition vers les États-Unis deve­nait immi­nent, M. Assange trou­ve­rait un moyen de se suicider ».

Le fait que Kopel­man ne déclare pas spé­ci­fi­que­ment, comme l’a dit Barait­ser, que la cage de verre blin­dée est mau­vaise pour Assange ne reflète rien d’autre que le fait qu’on ne lui a pas posé cette ques­tion. Tout être humain ayant la moindre décence serait en mesure d’en tirer la conclu­sion. Le point de vue étroit de Barait­ser, selon lequel aucun psy­chiatre n’a spé­ci­fi­que­ment décla­ré qu’il devrait être libé­ré de la cage blin­dée, est à cou­per le souffle, mal­hon­nête et inhu­main. Il est presque cer­tain qu’aucun psy­chiatre n’avait ima­gi­né qu’elle déter­mi­ne­rait l’application d’une telle torture.

Alors pour­quoi Barait­ser le fait-elle ?

Je crois que l’enfermement d’Assange, ce geek intel­lec­tuel de l’informatique, à la manière d’Hannibal Lec­ter et qui n’a aucun fon­de­ment ration­nel, est une ten­ta­tive déli­bé­rée de pous­ser Julian au sui­cide. Le tri­bu­nal anti-ter­­ro­­riste de haute sécu­ri­té se trouve phy­si­que­ment dans l’enceinte de la for­te­resse qui abrite la pri­son de haute sécu­ri­té. Il est ame­né, menot­té et sous forte escorte, de sa cel­lule d’isolement à la cage blin­dée, via un tun­nel sou­ter­rain. Dans ces cir­cons­tances, quel est le besoin éven­tuel pour lui d’être fouillé à nu en per­ma­nence ? Pour­quoi n’est-il pas auto­ri­sé à avoir ses docu­ments sur lui ? Le plus révé­la­teur pour moi est le fait qu’il n’est pas auto­ri­sé à ser­rer la main ou à tou­cher ses avo­cats par la fente de la cage blindée.

Ils appliquent sans relâche le déni sys­té­ma­tique de tout récon­fort humain de base, comme le fait de tou­cher le bout des doigts d’un ami ou d’empêcher le sou­la­ge­ment qu’il pour­rait res­sen­tir sim­ple­ment en étant aux côtés d’un ami. Ils assurent la pour­suite des effets psy­cho­lo­giques extrêmes de l’isolement d’une année par un iso­le­ment vir­tuel. Un tout petit peu de confort humain pour­rait faire énor­mé­ment de bien à sa san­té men­tale et à sa rési­lience. Ils sont déter­mi­nés à y mettre fin à tout prix. Ils tentent de le pous­ser à se sui­ci­der – ou de créer en lui la condi­tion dans laquelle sa mort accé­lé­rée pour­rait être expli­quée comme un suicide.

C’est aus­si la seule expli­ca­tion que je puisse trou­ver pour expli­quer pour­quoi ils risquent de créer des condi­tions aus­si évi­dentes d’annulation de pro­cès. Les morts ne peuvent pas faire appel.

Je vous rap­pelle que Julian est un pré­ve­nu qui a pur­gé sa peine d’une durée sans pré­cé­dent pour avoir vio­lé sa liber­té sous cau­tion. Son sta­tut est cen­sé être actuel­le­ment celui d’un inno­cent accu­sé. Ces accu­sa­tions n’ont aucun fon­de­ment, si ce n’est la publi­ca­tion des révé­la­tions de Chel­sea Man­ning sur les crimes de guerre.

Il me semble cer­tain que Barait­ser agit selon des ins­truc­tions. Tout au long du pro­cès, elle a cher­ché déses­pé­ré­ment à sai­sir toute occa­sion de nier toute res­pon­sa­bi­li­té dans ce qui arrive à Julian. Elle a décla­ré qu’elle n’avait aucune com­pé­tence sur son trai­te­ment en pri­son, et même lorsque la défense et l’accusation se sont unies pour affir­mer qu’il était nor­mal que les magis­trats trans­mettent des ins­truc­tions ou des demandes à l’administration péni­ten­tiaire, elle a refu­sé de l’admettre.

Barait­ser tente mani­fes­te­ment de se dis­tan­cer psy­cho­lo­gi­que­ment de toute res­pon­sa­bi­li­té dans ce qui est fait. À cette fin, elle a mul­ti­plié les dénis de com­pé­tence ou de capa­ci­té à influen­cer les évé­ne­ments. Elle a décla­ré qu’elle n’avait pas com­pé­tence pour inter­fé­rer avec la fouille à nu, le menot­tage et la confis­ca­tion des papiers d’Assange ou son main­tien en iso­le­ment. Elle a décla­ré qu’elle n’était pas com­pé­tente pour deman­der que les avo­cats de la défense aient davan­tage accès à leur client en pri­son pour pré­pa­rer sa défense. Elle a décla­ré qu’elle n’avait pas com­pé­tence pour s’occuper de sa posi­tion dans la salle d’audience. Elle a sug­gé­ré à plu­sieurs reprises que c’est à la socié­té Ser­co de déci­der s’il peut trans­mettre des notes à ses avo­cats et au Groupe 4 de déci­der s’il peut être libé­ré de la cage blin­dée. Les moments où elle semble la plus satis­faite en écou­tant les argu­ments, sont ceux où l’avocat de l’accusation James Lewis affirme qu’elle n’a pas d’autre déci­sion à prendre que de signer l’extradition parce qu’elle est en bonne et due forme et que l’article 4 du trai­té n’a aucune valeur juridique.

Un membre de la famille Assange m’a fait remar­quer, à la fin de la pre­mière semaine, qu’elle semble très pares­seuse et qu’elle est donc ravie d’accepter tout argu­ment qui réduit la quan­ti­té de tra­vail qu’elle doit faire. Je pense qu’il s’agit d’autre chose. Je pense qu’il y a un coin de l’esprit de cette fille de dis­si­dents de l’apartheid qui rejette son propre rôle dans la tor­ture d’Assange, et qui ne cesse de répé­ter « Je n’avais pas le choix, je n’avais pas d’autorité ». Ceux qui suc­combent au mal doivent trou­ver le récon­fort inté­rieur qu’ils peuvent.

Avec nos remer­cie­ments à ceux qui ont fait des dons ou qui se sont abon­nés pour rendre ce repor­tage pos­sible. Je tiens à sou­li­gner à nou­veau que je ne veux abso­lu­ment pas que qui­conque donne quoi que ce soit si cela lui cause la moindre pos­si­bi­li­té de contrainte financière.

Cet article est entiè­re­ment libre de repro­duc­tion et de publi­ca­tion, y com­pris en tra­duc­tion, et j’espère vive­ment que les gens le feront acti­ve­ment. La véri­té nous ren­dra libres.

Craig Mur­ray

Tra­duc­tion « c’est bien une course contre la montre » par VD pour le Grand Soir avec pro­ba­ble­ment toutes les fautes et coquilles habituelles

Source : Le Grand Soir, https://​www​.legrand​soir​.info/​l​a​–​c​a​g​e​–​d​e​–​v​e​r​r​e​–​b​l​i​n​d​e​e​–​e​s​t​–​u​n​–​i​n​s​t​r​u​m​e​n​t​–​d​e​–​t​o​r​t​u​r​e​.​h​tml

Fil Face­book cor­res­pon­dant à ce billet :

https://​www​.face​book​.com/​e​t​i​e​n​n​e​.​c​h​o​u​a​r​d​/​p​o​s​t​s​/​1​0​1​5​7​9​6​2​1​8​8​8​0​2​317

Parallèle intéressant entre le Caracazo vénézuélien et les Gilets jaunes français, par Romain Migus

Pas­sion­nant Romain Migus 🙂

https://​you​tu​.be/​v​H​c​R​R​M​I​T​mgI

Paral­lèle inté­res­sant entre le Cara­ca­zo véné­zué­lien (1989) et les Gilets jaunes fran­çais (2018−2020), révoltes popu­laires à visées ins­ti­tu­tion­nelles contre les poli­tiques néo­li­bé­rales d’in­sé­cu­ri­té sociale, d’i­né­ga­li­tés criantes et de misère.

Viva la revolucion ! 🙂

#mémoi­re­des­luttes

#Grè­ve­Gé­né­ra­le­Cons­ti­tuante

Étienne.

Fil Face­book cor­res­pon­dant à ce billet :
https://​face​book​.com/​s​t​o​r​y​.​p​h​p​?​s​t​o​r​y​_​f​b​i​d​=​1​0​1​5​7​9​6​1​7​3​8​3​2​2​3​1​7​&​i​d​=​6​0​0​9​2​2​316

Julian Assange (WikiLeaks), entretien en 2014 pour « le grand journal »

Que c’est bien, d’é­cou­ter cet homme par­ler, calme et bon, comme s’il était libre… 

L’en­tre­tien date de 2014, dans les locaux de l’am­bas­sade d’É­qua­teur, où il est pri­son­nier depuis deux ans à l’époque. 

La fin est par­ti­cu­liè­re­ment intéressante. 

#FreeAs­sange

Étienne.

Fil Face­book cor­res­pon­dant à ce billet :
https://​face​book​.com/​s​t​o​r​y​.​p​h​p​?​s​t​o​r​y​_​f​b​i​d​=​1​0​1​5​7​9​5​8​9​6​9​6​4​7​3​1​7​&​i​d​=​6​0​0​9​2​2​316

[Procès stalinien à Londres, capitale du crime] Compte-rendu du Procès Assange, 4ème jour, par Craig MURRAY

Julian Assange Prison de Belmarsh 24 février 2020

Craig Mur­ray : « S’il vous plaît, ten­tez cette expé­rience pour moi.
Posez cette ques­tion à haute voix, sur un ton d’encouragement et de curio­si­té intel­lec­tuelle : « Sug­­gé­­rez-vous que les deux ont le même effet ? ».

Posez main­te­nant cette ques­tion à voix haute, sur un ton d’hostilité et d’incrédulité fri­sant le sar­casme : « Sug­­gé­­rez-vous que les deux ont le même effet ? ».

Tout d’abord, féli­ci­ta­tions pour vos talents d’acteur ; vous pre­nez très bien la direc­tion des opé­ra­tions. Deuxiè­me­ment, n’est-il pas fas­ci­nant de voir com­ment les mêmes mots peuvent pré­ci­sé­ment trans­mettre le sens oppo­sé en fonc­tion de la modu­la­tion du stress, de la hau­teur et du volume ?

Hier, l’accusation a pour­sui­vi son argu­ment selon lequel la dis­po­si­tion du trai­té d’extradition entre le Royaume-Uni et les États-Unis de 2007 qui inter­dit l’extradition pour des délits poli­tiques est lettre morte, et que les objec­tifs de Julian Assange ne sont de toute façon pas poli­tiques. James Lewis avo­cat pour l’accusation a par­lé pen­dant envi­ron une heure, et Edward Fitz­ge­rald a répon­du pour la défense pen­dant envi­ron le même temps. Au cours de la pré­sen­ta­tion de Lewis, il a été inter­rom­pu par le juge Barait­ser, pré­ci­sé­ment une fois. Pen­dant la réponse de Fitz­ge­rald, Barait­ser l’a inter­rom­pu dix-sept fois.

Dans la trans­crip­tion, ces inter­rup­tions n’auront pas l’air déraisonnables :
« Pour­­riez-vous pré­ci­ser le pour moi, M. Fitzgerald… »
« Alors, com­ment faites-vous face au point de vue de M. Lewis selon lequel… »
« Mais c’est sûre­ment un argu­ment circulaire… »
« Mais il n’est pas incor­po­ré, n’est-ce pas ?… »

Toutes ces inter­rup­tions et les douze autres ont été conçues pour mon­trer que le juge tente de cla­ri­fier l’argument de la défense dans un esprit de test intel­lec­tuel. Mais si vous avez enten­du le ton de la voix de Barait­ser, vu son lan­gage cor­po­rel et ses expres­sions faciales, c’était tout sauf cela.

L’image fausse qu’une trans­crip­tion pour­rait don­ner est exa­cer­bée par le fait que la cour Fitz­ge­rald répond conti­nuel­le­ment à chaque har­cè­le­ment évident par « Mer­ci Madame, c’est très utile », ce qui, encore une fois, si vous étiez là, signi­fiait clai­re­ment le contraire. Mais ce que la trans­crip­tion mon­tre­ra uti­le­ment, c’est la tac­tique de Barait­ser qui consiste à inter­rompre Fitz­ge­rald encore et encore, à mini­mi­ser ses argu­ments et à l’empêcher déli­bé­ré­ment d’entrer dans le vif du sujet. Le contraste avec son trai­te­ment de Lewis ne pour­rait être plus prononcé.

Nous allons donc main­te­nant pré­sen­ter les argu­ments juri­diques eux-mêmes.

James Lewis pour l’accusation, pour­sui­vant ses argu­ments de la veille, a décla­ré que le Par­le­ment n’avait pas inclus dans la loi de 2003 une inter­dic­tion d’extradition pour des infrac­tions poli­tiques. Elle ne peut donc pas être réin­tro­duite dans la loi par un trai­té. « Intro­duire une inter­dic­tion des infrac­tions poli­tiques par une voie détour­née serait sub­ver­tir l’intention du Parlement ».

Lewis a éga­le­ment fait valoir qu’il ne s’agissait pas de délits poli­tiques. Au Royaume-Uni, la défi­ni­tion d’un délit poli­tique se limi­tait à un com­por­te­ment visant à « ren­ver­ser ou chan­ger un gou­ver­ne­ment ou à l’inciter à modi­fier sa poli­tique ». En outre, l’objectif doit être de chan­ger de gou­ver­ne­ment ou de poli­tique à court terme, et non pas dans un ave­nir indéterminé.

Lewis a décla­ré qu’en outre, le terme « infrac­tion poli­tique » ne pou­vait être appli­qué qu’aux infrac­tions com­mises sur le ter­ri­toire où l’on ten­tait d’opérer le chan­ge­ment. Ain­si, pour être qua­li­fié de délit poli­tique, Assange aurait dû les com­mettre sur le ter­ri­toire des États-Unis, mais il ne l’a pas fait.

Si Barait­ser déci­dait que l’interdiction des infrac­tions poli­tiques s’appliquait, le tri­bu­nal devrait déter­mi­ner la signi­fi­ca­tion de l’expression « infrac­tion poli­tique » dans le trai­té d’extradition entre le Royaume-Uni et les États-Unis et inter­pré­ter le sens des para­graphes 4.1 et 4.2 du trai­té. L’interprétation des termes d’un trai­té inter­na­tio­nal dépas­sait les pou­voirs de la cour.

Lewis a décla­ré que la conduite de Julian Assange ne pou­vait pas être qua­li­fiée de délit poli­tique. « Il est impos­sible de pla­cer Julian Assange dans la posi­tion d’un réfu­gié poli­tique ». L’activité dans laquelle Wiki­leaks était enga­gé n’était pas dans son sens propre une oppo­si­tion poli­tique à l’administration amé­ri­caine ou une ten­ta­tive de ren­ver­ser cette admi­nis­tra­tion. Par consé­quent, l’infraction n’était pas politique.

Pour la défense, Edward Fitz­ge­rald a répon­du que la loi sur l’extradition de 2003 était une loi d’habilitation en ver­tu de laquelle les trai­tés pou­vaient s’appliquer. Le Par­le­ment s’est sou­cié de sup­pri­mer toute menace d’abus de l’interdiction des infrac­tions poli­tiques pour cou­vrir les actes ter­ro­ristes de vio­lence contre des civils inno­cents. Mais il reste une pro­tec­tion claire, accep­tée dans le monde entier, pour la dis­si­dence poli­tique paci­fique. Le trai­té d’extradition sur la base duquel la cour agis­sait en tient compte.

M. Barait­ser inter­rompt la séance en indi­quant que le trai­té d’extradition entre le Royaume-Uni et les États-Unis n’a pas été inté­gré au droit anglais.

Fitz­ge­rald répond que l’ensemble de la demande d’extradition est basée sur le trai­té. C’est un abus de pro­cé­dure pour les auto­ri­tés de s’appuyer sur le trai­té pour la demande mais de pré­tendre ensuite que ses dis­po­si­tions ne s’appliquent pas.

« À pre­mière vue, c’est un argu­ment très bizarre qu’un trai­té qui donne lieu à l’extradition, sur lequel l’extradition est fon­dée, puisse être igno­ré dans ses dis­po­si­tions. À pre­mière vue, c’est absurde » a dit Edward Fitz­ge­rald pour la défense

Fitz­ge­rald a ajou­té que les tri­bu­naux anglais inter­prètent les trai­tés tout le temps. Il a don­né des exemples.

Fitz­ge­rald a pour­sui­vi en disant que la défense n’acceptait pas que la tra­hi­son, l’espionnage et la sédi­tion ne soient pas consi­dé­rés comme des délits poli­tiques en Angle­terre. Mais même si l’on accep­tait la défi­ni­tion trop étroite de Lewis de l’infraction poli­tique, le com­por­te­ment d’Assange répon­dait quand même au cri­tère. Quel pour­rait être le motif de la publi­ca­tion des preuves des crimes de guerre et de la cor­rup­tion du gou­ver­ne­ment, si ce n’est de chan­ger la poli­tique du gou­ver­ne­ment ? En effet, les preuves prou­ve­raient que Wiki­leaks a effec­ti­ve­ment chan­gé la poli­tique du gou­ver­ne­ment amé­ri­cain, en par­ti­cu­lier sur l’Irak.

Barait­ser a inter­fé­ré en disant que dénon­cer les méfaits du gou­ver­ne­ment n’était pas la même chose que d’essayer de chan­ger la poli­tique du gou­ver­ne­ment. Fitz­ge­rald lui a deman­dé, fina­le­ment exas­pé­ré après d’innombrables inter­rup­tions, quel autre inté­rêt il y aurait à expo­ser les méfaits du gou­ver­ne­ment que d’induire un chan­ge­ment de poli­tique gouvernementale.

C’est ain­si que se ter­minent les plai­doi­ries d’ouverture de l’accusation et de la défense.

MON COMMENTAIRE PERSONNEL

Per­­met­­tez-moi d’être aus­si neutre que pos­sible. Si vous pou­viez affir­mer avec jus­tesse que l’argument de Lewis était beau­coup plus logique, ration­nel et intui­tif que celui de Fitz­ge­rald, vous pour­riez com­prendre pour­quoi Lewis n’avait pas besoin d’être inter­rom­pu alors que Fitz­ge­rald devait être conti­nuel­le­ment inter­rom­pu pour « cla­ri­fi­ca­tion ». Mais en fait, c’est Lewis qui a fait valoir que les dis­po­si­tions du trai­té même en ver­tu duquel l’extradition est effec­tuée ne s’appliquent pas, une étape logique qui, à mon avis, deman­de­rait un peu plus d’explications que l’argumentaire contraire de Fitz­ge­rald. Le har­cè­le­ment que Barait­ser a fait subir à Fitz­ge­rald lorsqu’il a mis l’accusation dans les cordes est tout droit sor­ti du livre de recettes des pro­cès staliniens.

La défense ne l’a pas men­tion­né, et je ne sais pas si cela figure dans leurs argu­ments écrits, mais j’ai trou­vé que l’argument de Lewis selon lequel il ne pou­vait s’agir de délits poli­tiques, parce que Julian Assange n’était pas aux États-Unis lorsqu’il les a com­mis, était d’une mal­hon­nê­te­té à cou­per le souffle. Les États-Unis reven­diquent une com­pé­tence uni­ver­selle. Assange est accu­sé de crimes de publi­ca­tion com­mis alors qu’il se trou­vait en dehors des États-Unis. Les États-Unis reven­diquent le droit d’inculper toute per­sonne de toute natio­na­li­té, par­tout dans le monde, qui nuit aux inté­rêts amé­ri­cains. En outre, ils affirment ici que, comme les docu­ments pou­vaient être vus sur Inter­net aux États-Unis, il y a eu infrac­tion aux États-Unis. En même temps, pré­tendre que cela ne pour­rait pas être un délit poli­tique puisque le crime a été com­mis en dehors des États-Unis est, comme Edward Fitz­ge­rald pour­rait le dire, à pre­mière vue absurde. Ce que, curieu­se­ment, Barait­ser n’a pas relevé.

L’argument de Lewis selon lequel le trai­té n’a aucune valeur en droit anglais n’est pas une inven­tion de sa part. Nigel Farage ne s’est pas maté­ria­li­sé de nulle part. Il existe en véri­té une longue tra­di­tion dans le droit anglais selon laquelle même un trai­té signé et rati­fié avec un pays étran­ger quel­conque, ne peut en aucun cas lier un tri­bu­nal anglais. Lewis pou­vait, et il l’a fait, faire jaillir des pages et des pages de juge­ments de juges à la face de bet­te­rave qui s’efforcent de dire exac­te­ment cela à la Chambre des Lords, avant d’aller tirer sur du gibier et don­ner la fes­sée au fils du valet. Lewis était par­ti­cu­liè­re­ment atta­ché à l’affaire du Tin Coun­cel [Ndt : Maclaine Wat­son and Co Ltd contre Inter­na­tio­nal Tin Coun­cil : HL 2 janv. 1989. Le Tin Coun­cil était un organe consti­tué par un trai­té inter­na­tio­nal non incor­po­ré dans la légis­la­tion du Royaume-Uni. … Un trai­té non incor­po­ré ne peut créer aucun droit ou obli­ga­tion dans le droit natio­nal. (Wiki­pe­dia)]

Il existe bien sûr une tra­di­tion contraire et plus éclai­rée, et un cer­tain nombre de juge­ments qui disent exac­te­ment le contraire, pour la plu­part plus récents. C’est la rai­son pour laquelle les argu­ments étaient si répé­ti­tifs, chaque par­tie ayant accu­mu­lé de plus en plus de volumes d’« auto­ri­tés » pour défendre son point de vue.

La dif­fi­cul­té pour Lewis – et pour Barait­ser – est que cette affaire n’est pas com­pa­rable au fait que j’achète une barre de cho­co­lat et que je me rende ensuite au tri­bu­nal parce qu’un trai­té inter­na­tio­nal sur les barres de cho­co­lat dit que la mienne est trop petite.

La loi sur l’extradition de 2003 est plu­tôt une loi d’habilitation dont dépendent ensuite les trai­tés d’extradition. Vous ne pou­vez donc pas extra­der en ver­tu de la loi de 2003 sans le trai­té. Le trai­té d’extradition de 2007 devient donc, dans un sens très réel, un ins­tru­ment exé­cu­tif léga­le­ment néces­saire pour auto­ri­ser l’extradition. Pour que les auto­ri­tés d’exécution enfreignent les termes de l’instrument exé­cu­tif néces­saire en ver­tu duquel elles agissent, il faut sim­ple­ment qu’il y ait un abus de pro­cé­dure. Ain­si, le trai­té d’extradition, en rai­son de sa nature et de la néces­si­té d’une action en jus­tice, est en fait inté­gré au droit anglais par la loi sur l’extradition de 2003 dont il dépend.

Le trai­té d’extradition est une condi­tion préa­lable néces­saire à l’extradition, alors qu’un trai­té sur les barres de cho­co­lat n’est pas une condi­tion préa­lable néces­saire à l’achat d’une barre de chocolat.

Je ne peux pas être plus clair. J’espère que c’est compréhensible.

Il est bien sûr dif­fi­cile pour Lewis que le même jour, la Cour d’appel se soit pro­non­cée contre la construc­tion de la troi­sième piste d’Heathrow, en par­tie à cause de son incom­pa­ti­bi­li­té avec l’Accord de Paris de 2016, bien que ce der­nier ne soit pas entiè­re­ment inté­gré au droit anglais par la loi sur le chan­ge­ment cli­ma­tique de 2008.

UNE EXPÉRIENCE PERSONNELLE ESSENTIELLE

Il est extrê­me­ment embar­ras­sant pour le Forei­gn and Com­mon­wealth Office (FCO) qu’un tri­bu­nal anglais répu­die l’application d’un trai­té que le Royaume-Uni a rati­fié avec un ou plu­sieurs États étran­gers. C’est pour­quoi, dans le monde moderne, des pro­cé­dures et des pré­cau­tions très sérieuses ont été mises en place pour s’assurer que cela ne puisse pas se pro­duire. Par consé­quent, l’argument de l’accusation selon lequel toutes les dis­po­si­tions du trai­té d’extradition entre le Royaume-Uni et les États-Unis de 2007 ne peuvent pas être mises en œuvre en ver­tu de la loi sur l’extradition de 2003, devrait être impossible.

Je dois expli­quer que j’ai moi-même négo­cié et super­vi­sé l’entrée en vigueur des trai­tés au sein du FCO. Le der­nier pour lequel j’ai per­son­nel­le­ment noué le ruban et oppo­sé le sceau de cire (lit­té­ra­le­ment) était le trai­té anglo-belge sur le pla­teau conti­nen­tal de 1991, mais j’ai par­ti­ci­pé à la négo­cia­tion d’autres trai­tés et le sys­tème que je vais décrire était tou­jours en place lorsque j’ai quit­té le FCO en tant qu’ambassadeur en 2005, et je crois qu’il n’a pas chan­gé aujourd’hui (et sou­­ve­­nez-vous que la loi sur l’extradition date de 2003 et que le trai­té d’extradition amé­­ri­­ca­­no-bri­­tan­­nique a été rati­fié en 2007, donc mes connais­sances ne sont pas dépas­sées). Les nomen­cla­tures minis­té­rielles changent de temps en temps, de même que l’organisation struc­tu­relle. Mais les bureaux et les fonc­tions que je vais décrire res­tent les mêmes, même si les noms peuvent être différents.

Tous les trai­tés inter­na­tio­naux com­portent un pro­ces­sus en deux étapes. Tout d’abord, ils sont signés pour mon­trer que le gou­ver­ne­ment est d’accord avec le trai­té. Puis, après un cer­tain délai, ils sont rati­fiés. Cette deuxième étape a lieu lorsque le gou­ver­ne­ment a auto­ri­sé la légis­la­tion et les autres orga­nismes requis à appli­quer le trai­té. C’est la réponse à l’observation de Lewis sur les rôles de l’exécutif et du légis­la­tif. La phase de rati­fi­ca­tion n’a lieu qu’après toute action légis­la­tive requise. C’est là toute la question.

C’est ain­si que cela se passe au FCO. Les fonc­tion­naires négo­cient le trai­té d’extradition. Il est signé pour le Royaume-Uni. Le trai­té signé est ensuite ren­voyé aux conseillers juri­diques du FCO, au dépar­te­ment de la natio­na­li­té et des trai­tés, au dépar­te­ment consu­laire, au dépar­te­ment nord-amé­­ri­­cain et à d’autres, puis il est envoyé aux avo­cats du Tré­sor et du Cabi­net, au minis­tère de l’Intérieur, au Par­le­ment et à tout autre dépar­te­ment gou­ver­ne­men­tal dont le domaine est concer­né par le trai­té en question.

Le trai­té fait l’objet d’un exa­men appro­fon­di afin de véri­fier qu’il peut être plei­ne­ment appli­qué dans toutes les juri­dic­tions du Royaume-Uni. Si ce n’est pas le cas, des modi­fi­ca­tions doivent être appor­tées à la loi pour qu’elle puisse être appli­quée. Ces modi­fi­ca­tions peuvent être appor­tées par une loi du Par­le­ment ou, plus géné­ra­le­ment, par une légis­la­tion secon­daire en uti­li­sant les pou­voirs confé­rés au secré­taire d’État par une loi. S’il existe déjà une loi du Par­le­ment en ver­tu de laquelle le trai­té peut être mis en œuvre, aucune loi d’habilitation ne doit être adop­tée. Les accords inter­na­tio­naux ne sont pas tous incor­po­rés indi­vi­duel­le­ment dans les lois anglaises ou écos­saises par une nou­velle légis­la­tion spécifique.

Il s’agit d’un pro­ces­sus très minu­tieux, mené étape par étape par des juristes et des fonc­tion­naires du FCO, du Tré­sor, du Cabi­net Office [dépar­te­ment exé­cu­tif du … Gou­ver­ne­ment bri­tan­nique – NdT], du Minis­tère de l’Intérieur, du Par­le­ment et d’autres ins­tances. Cha­cun exa­mi­ne­ra en paral­lèle chaque clause du trai­té et véri­fie­ra qu’elle peut être appli­quée. Toutes les modi­fi­ca­tions néces­saires pour don­ner effet au trai­té doivent ensuite être appor­tées – modi­fi­ca­tion de la légis­la­tion et démarches admi­nis­tra­tives néces­saires. Les conseillers juri­diques du FCO ne don­ne­ront le feu vert à la rati­fi­ca­tion du trai­té que lorsque tous les obs­tacles auront été levés, y com­pris la légis­la­tion, et que les fonc­tion­naires du Par­le­ment, du Tré­sor, du Cabi­net Office, du Minis­tère de l’Intérieur et du FCO auront tous cer­ti­fié que le trai­té est appli­cable au Royaume-Uni. Vous ne pou­vez abso­lu­ment pas rati­fier le trai­té avant que les conseillers juri­diques du FCO n’aient don­né cette autorisation.

Il s’agit d’un pro­ces­sus sérieux. C’est pour­quoi le trai­té d’extradition entre les États-Unis et le Royaume-Uni a été signé en 2003 et rati­fié en 2007. Il ne s’agit pas d’un retard anormal.

Je sais donc avec cer­ti­tude que TOUS les ser­vices juri­diques com­pé­tents du gou­ver­ne­ment bri­tan­nique DOIVENT avoir conve­nu que l’article 4.1 du trai­té d’extradition entre le Royaume-Uni et les États-Unis pou­vait être mis en œuvre en ver­tu de la loi sur l’extradition de 2003. Cette cer­ti­fi­ca­tion doit avoir eu lieu, sinon le trai­té n’aurait jamais pu être ratifié.

Il s’ensuit néces­sai­re­ment que le gou­ver­ne­ment bri­tan­nique, en cher­chant à faire valoir main­te­nant que l’article 4.1 est incom­pa­tible avec la loi de 2003, ment sciem­ment. [gras ajou­té par le tra­duc­teur] Il ne pour­rait y avoir d’abus de pro­cé­dure plus flagrant.

J’ai tenu à ce que l’audition sur ce point par­ti­cu­lier se ter­mine afin de pou­voir vous faire béné­fi­cier de mon expé­rience. Je vais me repo­ser pour l’instant, mais plus tard dans la jour­née, j’espère pou­voir conti­nuer à m’exprimer sur l’échange d’hier au tri­bu­nal concer­nant la libé­ra­tion de Julian du sa cage blin­dée antiterroriste.

Avec mes remer­cie­ments à ceux qui ont fait des dons ou qui se sont ins­crits pour rendre ce repor­tage pos­sible. Je tiens à sou­li­gner une fois de plus que je ne veux abso­lu­ment pas que qui­conque donne quoi que ce soit si cela lui cause le moindre pro­blème financier.

Cet article est entiè­re­ment libre de repro­duc­tion et de publi­ca­tion, y com­pris en tra­duc­tion, et j’espère vive­ment que les gens le feront acti­ve­ment. La véri­té nous ren­dra libres.

Craig MURRAY

Tra­duc­tion « Ils jouent à la jus­tice comme on joue à la dinette : en fai­sant sem­blant » par Vik­tor Dedaj pour Le Grand Soir avec pro­ba­ble­ment toutes les fautes et coquilles habituelles

https://​www​.legrand​soir​.info/​c​o​m​p​t​e​–​r​e​n​d​u​–​d​u​–​p​r​o​c​e​s​–​a​s​s​a​n​g​e​–​4​e​m​e​–​j​o​u​r​.​h​tml

Fil Face­book cor­res­pon­dant à ce billet :

https://​www​.face​book​.com/​e​t​i​e​n​n​e​.​c​h​o​u​a​r​d​/​p​o​s​t​s​/​1​0​1​5​7​9​5​7​7​1​0​6​4​2​317

Formidable coup de gueule de Virginie Despentes : Césars : « Désormais on se lève et on se barre »

« Désormais on se lève et on se barre »

Vir­gi­nie Des­pentes : « Que ça soit à l’Assemblée natio­nale ou dans la culture, vous, les puis­sants, vous exi­gez le res­pect entier et constant. Ça vaut pour le viol, les exac­tions de votre police, les césars, votre réforme des retraites. En prime, il vous faut le silence de victimes. »

Tri­bune. Je vais com­men­cer comme ça : soyez ras­su­rés, les puis­sants, les boss, les chefs, les gros bon­nets : ça fait mal. On a beau le savoir, on a beau vous connaître, on a beau l’avoir pris des dizaines de fois votre gros pou­voir en tra­vers de la gueule, ça fait tou­jours aus­si mal. Tout ce week-end à vous écou­ter geindre et chia­ler, vous plaindre de ce qu’on vous oblige à pas­ser vos lois à coups de 49.3 et qu’on ne vous laisse pas célé­brer Polans­ki tran­quilles et que ça vous gâche la fête mais der­rière vos jéré­miades, ne vous en faites pas : on vous entend jouir de ce que vous êtes les vrais patrons, les gros caïds, et le mes­sage passe cinq sur cinq : cette notion de consen­te­ment, vous ne comp­tez pas la lais­ser pas­ser. Où serait le fun d’appartenir au clan des puis­sants s’il fal­lait tenir compte du consen­te­ment des domi­nés ? Et je ne suis cer­tai­ne­ment pas la seule à avoir envie de chia­ler de rage et d’impuissance depuis votre belle démons­tra­tion de force, cer­tai­ne­ment pas la seule à me sen­tir salie par le spec­tacle de votre orgie d’impunité.

Il n’y a rien de sur­pre­nant à ce que l’académie des césars élise Roman Polans­ki meilleur réa­li­sa­teur de l’année 2020. C’est gro­tesque, c’est insul­tant, c’est ignoble, mais ce n’est pas sur­pre­nant. Quand tu confies un bud­get de plus de 25 mil­lions à un mec pour faire un télé­film, le mes­sage est dans le bud­get. Si la lutte contre la mon­tée de l’antisémitisme inté­res­sait le ciné­ma fran­çais, ça se ver­rait. Par contre, la voix des oppri­més qui prennent en charge le récit de leur cal­vaire, on a com­pris que ça vous soû­lait. Alors quand vous avez enten­du par­ler de cette sub­tile com­pa­rai­son entre la pro­blé­ma­tique d’un cinéaste cha­hu­té par une cen­taine de fémi­nistes devant trois salles de ciné­ma et Drey­fus, vic­time de l’antisémitisme fran­çais de la fin du siècle der­nier, vous avez sau­té sur l’occasion. Vingt-cinq mil­lions pour ce paral­lèle. Superbe. On applau­dit les inves­tis­seurs, puisque pour ras­sem­bler un tel bud­get il a fal­lu que tout le monde joue le jeu : Gau­mont Dis­tri­bu­tion, les cré­dits d’impôts, France 2, France 3, OCS, Canal +, la RAI… la main à la poche, et géné­reux, pour une fois. Vous ser­rez les rangs, vous défen­dez l’un des vôtres. Les plus puis­sants entendent défendre leurs pré­ro­ga­tives : ça fait par­tie de votre élé­gance, le viol est même ce qui fonde votre style. La loi vous couvre, les tri­bu­naux sont votre domaine, les médias vous appar­tiennent. Et c’est exac­te­ment à cela que ça sert, la puis­sance de vos grosses for­tunes : avoir le contrôle des corps décla­rés subal­ternes. Les corps qui se taisent, qui ne racontent pas l’histoire de leur point de vue. Le temps est venu pour les plus riches de faire pas­ser ce beau mes­sage : le res­pect qu’on leur doit s’étendra désor­mais jusqu’à leurs bites tachées du sang et de la merde des enfants qu’ils violent. Que ça soit à l’Assemblée natio­nale ou dans la culture – marre de se cacher, de simu­ler la gêne. Vous exi­gez le res­pect entier et constant. Ça vaut pour le viol, ça vaut pour les exac­tions de votre police, ça vaut pour les césars, ça vaut pour votre réforme des retraites. C’est votre poli­tique : exi­ger le silence des vic­times. Ça fait par­tie du ter­ri­toire, et s’il faut nous trans­mettre le mes­sage par la ter­reur vous ne voyez pas où est le pro­blème. Votre jouis­sance mor­bide, avant tout. Et vous ne tolé­rez autour de vous que les valets les plus dociles. Il n’y a rien de sur­pre­nant à ce que vous ayez cou­ron­né Polans­ki : c’est tou­jours l’argent qu’on célèbre, dans ces céré­mo­nies, le ciné­ma on s’en fout. Le public on s’en fout. C’est votre propre puis­sance de frappe moné­taire que vous venez adu­ler. C’est le gros bud­get que vous lui avez octroyé en signe de sou­tien que vous saluez – à tra­vers lui c’est votre puis­sance qu’on doit respecter.

Il serait inutile et dépla­cé, dans un com­men­taire sur cette céré­mo­nie, de sépa­rer les corps de cis mecs aux corps de cis meufs. Je ne vois aucune dif­fé­rence de com­por­te­ments. Il est enten­du que les grands prix conti­nuent d’être exclu­si­ve­ment le domaine des hommes, puisque le mes­sage de fond est : rien ne doit chan­ger. Les choses sont très bien telles qu’elles sont. Quand Fores­ti se per­met de quit­ter la fête et de se décla­rer « écœu­rée », elle ne le fait pas en tant que meuf – elle le fait en tant qu’individu qui prend le risque de se mettre la pro­fes­sion à dos. Elle le fait en tant qu’individu qui n’est pas entiè­re­ment assu­jet­ti à l’industrie ciné­ma­to­gra­phique, parce qu’elle sait que votre pou­voir n’ira pas jusqu’à vider ses salles. Elle est la seule à oser faire une blague sur l’éléphant au milieu de la pièce, tous les autres bot­te­ront en touche. Pas un mot sur Polans­ki, pas un mot sur Adèle Hae­nel. On dîne tous ensemble, dans ce milieu, on connaît les mots d’ordre : ça fait des mois que vous vous aga­cez de ce qu’une par­tie du public se fasse entendre et ça fait des mois que vous souf­frez de ce qu’Adèle Hae­nel ait pris la parole pour racon­ter son his­toire d’enfant actrice, de son point de vue.

Alors tous les corps assis ce soir-là dans la salle sont convo­qués dans un seul but : véri­fier le pou­voir abso­lu des puis­sants. Et les puis­sants aiment les vio­leurs. Enfin, ceux qui leur res­semblent, ceux qui sont puis­sants. On ne les aime pas mal­gré le viol et parce qu’ils ont du talent. On leur trouve du talent et du style parce qu’ils sont des vio­leurs. On les aime pour ça. Pour le cou­rage qu’ils ont de récla­mer la mor­bi­di­té de leur plai­sir, leur pul­sion débile et sys­té­ma­tique de des­truc­tion de l’autre, de des­truc­tion de tout ce qu’ils touchent en véri­té. Votre plai­sir réside dans la pré­da­tion, c’est votre seule com­pré­hen­sion du style. Vous savez très bien ce que vous faites quand vous défen­dez Polans­ki : vous exi­gez qu’on vous admire jusque dans votre délin­quance. C’est cette exi­gence qui fait que lors de la céré­mo­nie tous les corps sont sou­mis à une même loi du silence. On accuse le poli­ti­que­ment cor­rect et les réseaux sociaux, comme si cette omer­ta datait d’hier et que c’était la faute des fémi­nistes mais ça fait des décen­nies que ça se gou­pille comme ça : pen­dant les céré­mo­nies de ciné­ma fran­çais, on ne blague jamais avec la sus­cep­ti­bi­li­té des patrons. Alors tout le monde se tait, tout le monde sou­rit. Si le vio­leur d’enfant c’était l’homme de ménage alors là pas de quar­tier : police, pri­son, décla­ra­tions toni­truantes, défense de la vic­time et condam­na­tion géné­rale. Mais si le vio­leur est un puis­sant : res­pect et soli­da­ri­té. Ne jamais par­ler en public de ce qui se passe pen­dant les cas­tings ni pen­dant les pré­pas ni sur les tour­nages ni pen­dant les pro­mos. Ça se raconte, ça se sait. Tout le monde sait. C’est tou­jours la loi du silence qui pré­vaut. C’est au res­pect de cette consigne qu’on sélec­tionne les employés.

Et bien qu’on sache tout ça depuis des années, la véri­té c’est qu’on est tou­jours sur­pris par l’outrecuidance du pou­voir. C’est ça qui est beau, fina­le­ment, c’est que ça marche à tous les coups, vos sale­tés. Ça reste humi­liant de voir les par­ti­ci­pants se suc­cé­der au pupitre, que ce soit pour annon­cer ou pour rece­voir un prix. On s’identifie for­cé­ment – pas seule­ment moi qui fais par­tie de ce sérail mais n’importe qui regar­dant la céré­mo­nie, on s’identifie et on est humi­lié par pro­cu­ra­tion. Tant de silence, tant de sou­mis­sion, tant d’empressement dans la ser­vi­tude. On se recon­naît. On a envie de cre­ver. Parce qu’à la fin de l’exercice, on sait qu’on est tous les employés de ce grand mer­dier. On est humi­lié par pro­cu­ra­tion quand on les regarde se taire alors qu’ils savent que si Por­trait de la jeune fille en feu ne reçoit aucun des grands prix de la fin, c’est uni­que­ment parce qu’Adèle Hae­nel a par­lé et qu’il s’agit de bien faire com­prendre aux vic­times qui pour­raient avoir envie de racon­ter leur his­toire qu’elles feraient bien de réflé­chir avant de rompre la loi du silence. Humi­lié par pro­cu­ra­tion que vous ayez osé convo­quer deux réa­li­sa­trices qui n’ont jamais reçu et ne rece­vront pro­ba­ble­ment jamais le prix de la meilleure réa­li­sa­tion pour remettre le prix à Roman fucking Polans­ki. Him­self. Dans nos gueules. Vous n’avez déci­dé­ment honte de rien. Vingt-cinq mil­lions, c’est-à-dire plus de qua­torze fois le bud­get des Misé­rables, et le mec n’est même pas fou­tu de clas­ser son film dans le box-office des cinq films les plus vus dans l’année. Et vous le récom­pen­sez. Et vous savez très bien ce que vous faites – que l’humiliation subie par toute une par­tie du public qui a très bien com­pris le mes­sage s’étendra jusqu’au prix d’après, celui des Misé­rables, quand vous convo­quez sur la scène les corps les plus vul­né­rables de la salle, ceux dont on sait qu’ils risquent leur peau au moindre contrôle de police, et que si ça manque de meufs par­mi eux, on voit bien que ça ne manque pas d’intelligence et on sait qu’ils savent à quel point le lien est direct entre l’impunité du vio­leur célé­bré ce soir-là et la situa­tion du quar­tier où ils vivent. Les réa­li­sa­trices qui décernent le prix de votre impu­ni­té, les réa­li­sa­teurs dont le prix est taché par votre igno­mi­nie – même com­bat. Les uns les autres savent qu’en tant qu’employés de l’industrie du ciné­ma, s’ils veulent bos­ser demain, ils doivent se taire. Même pas une blague, même pas une vanne. Ça, c’est le spec­tacle des césars. Et les hasards du calen­drier font que le mes­sage vaut sur tous les tableaux : trois mois de grève pour pro­tes­ter contre une réforme des retraites dont on ne veut pas et que vous allez faire pas­ser en force. C’est le même mes­sage venu des mêmes milieux adres­sé au même peuple : « Ta gueule, tu la fermes, ton consen­te­ment tu te le carres dans ton cul, et tu sou­ris quand tu me croises parce que je suis puis­sant, parce que j’ai toute la thune, parce que c’est moi le boss. »

Alors quand Adèle Hae­nel s’est levée, c’était le sacri­lège en marche. Une employée réci­di­viste, qui ne se force pas à sou­rire quand on l’éclabousse en public, qui ne se force pas à applau­dir au spec­tacle de sa propre humi­lia­tion. Adèle se lève comme elle s’est déjà levée pour dire voi­là com­ment je la vois votre his­toire du réa­li­sa­teur et son actrice ado­les­cente, voi­là com­ment je l’ai vécue, voi­là com­ment je la porte, voi­là com­ment ça me colle à la peau. Parce que vous pou­vez nous la décli­ner sur tous les tons, votre imbé­cil­li­té de sépa­ra­tion entre l’homme et l’artiste – toutes les vic­times de viol d’artistes savent qu’il n’y a pas de divi­sion mira­cu­leuse entre le corps vio­lé et le corps créa­teur. On trim­balle ce qu’on est et c’est tout. Venez m’expliquer com­ment je devrais m’y prendre pour lais­ser la fille vio­lée devant la porte de mon bureau avant de me mettre à écrire, bande de bouffons.

Adèle se lève et elle se casse. Ce soir du 28 février on n’a pas appris grand-chose qu’on igno­rait sur la belle indus­trie du ciné­ma fran­çais par contre on a appris com­ment ça se porte, la robe de soi­rée. A la guer­rière. Comme on marche sur des talons hauts : comme si on allait démo­lir le bâti­ment entier, com­ment on avance le dos droit et la nuque rai­die de colère et les épaules ouvertes. La plus belle image en qua­­rante-cinq ans de céré­mo­nie – Adèle Hae­nel quand elle des­cend les esca­liers pour sor­tir et qu’elle vous applau­dit et désor­mais on sait com­ment ça marche, quelqu’un qui se casse et vous dit merde. Je donne 80 % de ma biblio­thèque fémi­niste pour cette image-là. Cette leçon-là. Adèle je sais pas si je te male gaze ou si je te female gaze mais je te love gaze en boucle sur mon télé­phone pour cette sor­­tie-là. Ton corps, tes yeux, ton dos, ta voix, tes gestes tout disait : oui on est les connasses, on est les humi­liées, oui on n’a qu’à fer­mer nos gueules et man­ger vos coups, vous êtes les boss, vous avez le pou­voir et l’arrogance qui va avec mais on ne res­te­ra pas assis sans rien dire. Vous n’aurez pas notre res­pect. On se casse. Faites vos conne­ries entre vous. Célé­­brez-vous, humi­­liez-vous les uns les autres tuez, vio­lez, exploi­tez, défon­cez tout ce qui vous passe sous la main. On se lève et on se casse. C’est pro­ba­ble­ment une image annon­cia­trice des jours à venir. La dif­fé­rence ne se situe pas entre les hommes et les femmes, mais entre domi­nés et domi­nants, entre ceux qui entendent confis­quer la nar­ra­tion et impo­ser leurs déci­sions et ceux qui vont se lever et se cas­ser en gueu­lant. C’est la seule réponse pos­sible à vos poli­tiques. Quand ça ne va pas, quand ça va trop loin ; on se lève on se casse et on gueule et on vous insulte et même si on est ceux d’en bas, même si on le prend pleine face votre pou­voir de merde, on vous méprise on vous dégueule. Nous n’avons aucun res­pect pour votre mas­ca­rade de res­pec­ta­bi­li­té. Votre monde est dégueu­lasse. Votre amour du plus fort est mor­bide. Votre puis­sance est une puis­sance sinistre. Vous êtes une bande d’imbéciles funestes. Le monde que vous avez créé pour régner des­sus comme des minables est irres­pi­rable. On se lève et on se casse. C’est ter­mi­né. On se lève. On se casse. On gueule. On vous emmerde.

Vir­gi­nie DESPENTES.

Source : « Libé­ra­tion », https://​www​.libe​ra​tion​.fr/​d​e​b​a​t​s​/​2​0​2​0​/​0​3​/​0​1​/​c​e​s​a​r​s​–​d​e​s​o​r​m​a​i​s​–​o​n​–​s​e​–​l​e​v​e​–​e​t​–​o​n​–​s​e​–​b​a​r​r​e​_​1​7​8​0​212

Fil Face­book cor­res­pon­dant à ce billet :
https://​face​book​.com/​s​t​o​r​y​.​p​h​p​?​s​t​o​r​y​_​f​b​i​d​=​1​0​1​5​7​9​5​7​1​1​9​9​4​2​3​1​7​&​i​d​=​6​0​0​9​2​2​316

[Injustice chimiquement pure] Le journaliste Ami du peuple Julian Assange est torturé à mort par nos prétendus « représentants » dans le secret des geôles londoniennes alors qu’il n’est ACCUSÉ DE RIEN. Viktor Dedaj

Vik­tor Dedaj explique bien les men­songes mains­tream sur le cas Assange : 

JULIAN ASSANGE N’EST ACCUSÉ DE RIEN

Abon­­nez-vous au site de Vik­tor, Le Grand Soir, c’est un des meilleurs sites du pays pour se dés­in­toxi­quer des bobards des dominants.

#FreeAs­sange

Étienne.

Fil Face­book cor­res­pon­dant à ce billet :
https://​face​book​.com/​s​t​o​r​y​.​p​h​p​?​s​t​o​r​y​_​f​b​i​d​=​1​0​1​5​7​9​5​7​0​8​7​2​2​7​3​1​7​&​i​d​=​6​0​0​9​2​2​316

Doc RT 1h sur Julian ASSANGE : « LE COURAGE EST CONTAGIEUX »

J’aime cet homme. Il incarne pour moi le bien ; je le trouve exem­plaire de l’i­dée que je me fais du jour­na­liste : « sen­ti­nelle du peuple », vigi­lant et cou­ra­geux, inquié­tant vrai­ment les pou­voirs en révé­lant leurs intrigues et leurs crimes.

Le contraire de tous les pour­ris ven­dus « main­tream », qui pro­tègent les pou­voirs exploi­teurs et mar­ty­risent les lan­ceurs d’alerte.

Et la tor­ture à mort que lui infligent les cri­mi­nels dont il a pré­ci­sé­ment dévoi­lé les odieux for­faits n’en est que plus révoltante.

#FreeAs­sange

Julian Assange

Étienne.

Fil Face­book cor­res­pon­dant à ce billet :
https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=10157955587812317&id=600922316

Rendez-vous à Longuyon (54) le 7 mars 2020 : quelle démocratie pour demain ? Représentative ? Directe ? Quelle place pour le RIC dans notre constitution ?

La pers­pec­tive d’un débat loyal avec un élu m’en­chante. Je me sou­viens d’une soi­rée pas­sion­nante sur ce for­mat, pen­dant une tour­née en Bre­tagne l’an passé :
[IMPORTANT]Soirée mémo­rable, le 8 février 2019, avec Paul Molac (dépu­té LREM) et Cédric André, et plein de gilets jaunes bre­tons : « LA BRETAGNE VEUT LE RIC »

Je ne doute pas que ce pro­chain échange avec Xavier Palusz­kie­wicz sera à nou­veau très éclai­rant pour tout le monde.

Au plai­sir de vous y retrouver.

Étienne.

Annonce et réser­va­tion sur Facebook :
www​.face​book​.com/​e​v​e​n​t​s​/​3​5​2​2​9​6​1​0​3​4​4​4​3​798

Fil Face­book cor­res­pon­dant à ce billet : 

https://​www​.face​book​.com/​e​t​i​e​n​n​e​.​c​h​o​u​a​r​d​/​p​o​s​t​s​/​1​0​1​5​7​9​5​4​0​9​1​6​6​7​317

« Presque toutes les guerres sont le résultat de mensonges médiatiques. » Julian Assange, martyr du journalisme pour avoir créé WIKILEAKS, UN OUTIL POPULAIRE CONTRE LES GUERRES

« Presque toutes les guerres sont le résul­tat de men­songes média­tiques. » Julian Assange

Écou­tez Julian parler :

Ils ont men­ti sur le Vietnam,
Ils ont men­ti sur l’Afghanistan,
Ils ont men­ti sur l’I­rak (2 fois),
Ils ont men­ti sur la Libye,
Ils ont men­ti sur la Syrie,
Ils ont men­ti sur le Yémen,
etc. !

Ils mentent tout le temps.
Impu­né­ment.

ASSANGE A CRÉÉ UNE SOLUTION PUISSANTE ET SOLIDE !
C’est LA cause de sa tor­ture depuis 10 ans, tor­ture à mort menée en notre nom (!) par les cri­mi­nels qu’il dénonce !!!

#FreeAs­sange

Étienne.

[Projet d’expérimentation démocratique] Élaborer ensemble le RÈGLEMENT INTÉRIEUR de nos prochaines assemblées démocratiques, avec Maxime Péroud (suite)

Chers amis,

Je vous recom­mande  de vous inté­res­ser à au pro­jet pré­sen­té par Maxime Péroud dans une longue vidéo qu’il a réa­li­sée et qui est acces­sible sur le site www​.exp​-demo​.jim​do​.com  .


https://​exp​-demo​.jim​do​.com/

Et de vous inté­res­ser à son invi­ta­tion à le ren­con­trer pour par­ler du pro­jet avec lui et voir, à la fin de cette réunion, si vous pour­riez être un coéqui­pier / une coéqui­pière de qua­li­té (il cherche 5 à 10 coéqui­piers sup­plé­men­taires sur ce pro­jet en cours).

Adresse de son invi­ta­tion sur Face­book : https://​www​.face​book​.com/​e​v​e​n​t​s​/​1​3​8​5​2​5​7​5​1​1​6​3​4​7​03/

J’ai ren­con­tré Maxime et nous avons eu éga­le­ment plu­sieurs longues conver­sa­tions télé­pho­niques. Il est l’initiateur de ce grand pro­jet, très orga­ni­sé, cohé­rent avec nos tra­vaux sur la Consti­tu­tion. Ce pro­jet consiste à simu­ler (dans plus d’un an, quand tout sera prêt), avec au maxi­mum 30 à 40 par­ti­ci­pants, une assem­blée démo­cra­tique déli­bé­rante comme il en sera pré­vu cer­tai­ne­ment dans la future Consti­tu­tion. Au cours de ces tra­vaux par­le­men­taires simu­lés, l’équipe de ce pro­jet éla­bo­re­ra le règle­ment inté­rieur de cette assem­blée tout en res­pec­tant ce règle­ment dans sa ver­sion en cours d’élaboration.

Le règle­ment inté­rieur pour­ra ser­vir à des assem­blées dites « auto­nomes » (pour l’instant sans rela­tion avec d’autres ins­tances de pou­voir) et sans com­mis­sion (pour sim­pli­fier dans un pre­mier temps). Un pro­jet ulté­rieur abou­ti­ra à un règle­ment pré­voyant des commissions.

Pour le moment, l’équipe actuelle en est à la phase de pré­pa­ra­tion. Ils ont fort à faire et ils ont besoin de ren­fort.

Voi­ci ce que Maxime m’a écrit pour me pré­sen­ter la rai­son d’être de son projet :

1. Nous vou­lons qu’un jour – appe­­lons-le le jour J – notre pays devienne une démo­cra­tie pour la pre­mière fois de son his­toire. Les pou­voirs seront orga­ni­sés de manière à ser­vir dura­ble­ment l’intérêt géné­ral et, pour ce faire, seront entre les mains du peuple ou sous son contrôle effectif.

Cela signi­fie que, le jour J, ces pou­voirs auront été orga­ni­sés sous forme pro­vi­soire par une Pré-Consti­­tu­­tion rédi­gée néces­sai­re­ment avant le jour J par des citoyens volon­taires. Cette Pré-Consti­­tu­­tion pré­voi­ra cer­tai­ne­ment une Assem­blée Consti­tuante qui, après le jour J, repar­ti­ra de cette Pré-Consti­­tu­­tion pro­vi­soire pour éta­blir la 1ère Consti­tu­tion (réel­le­ment) démocratique.

2. Pour pou­voir ser­vir, cette Pré-Consti­­tu­­tion devra obli­ga­toi­re­ment être consi­dé­rée comme légi­time par la majeure par­tie des forces démo­crates du moment. Or, il existe déjà de nom­breuses variantes de pro­jets de Consti­tu­tion et, chaque année, il en émerge de nou­velles. Aucune d’entre elles ne peut cor­res­pondre à la future Pré-Consti­­tu­­tion car elle pro­vient d’un petit groupe et sera contes­tée par les autres groupes.

La seule solu­tion pour éla­bo­rer une Pré-Consti­­tu­­tion suf­fi­sam­ment légi­time pour pou­voir orga­ni­ser pro­vi­soi­re­ment les pou­voirs le jour J est de l’élaborer en Assem­blée Pré-Consti­­tuante, une assem­blée cer­tai­ne­ment com­po­sée de plu­sieurs cen­taines de citoyens volon­taires issus des dif­fé­rents mou­ve­ments (asso­cia­tions, par­tis, groupes, …) se reven­di­quant ou pas « démocrates ».

3. La pre­mière ques­tion que se pose­ra cette Assem­blée Consti­tuante sera la sui­vante : « com­ment allons-nous tra­vailler, selon quelles règles du jeu : règles pour les débats, les vota­tions, règles de com­por­te­ments, etc. ? »

Ces règles feront l’objet d’un docu­ment essen­tiel : le règle­ment inté­rieur de cette Assem­blée Pré-Consti­­tuante. Sans ce règle­ment, pas de tra­vaux possibles !

4. Nous devons dès main­te­nant réflé­chir à ces règles de fonc­tion­ne­ment d’une grande assem­blée démo­cra­tique de manière à pou­voir livrer à la Pré-Consti­­tuante une ver­sion avan­cée d’un règle­ment inté­rieur. La Pré-Consti­­tuante n’aura plus qu’à le fina­li­ser pen­dant les pre­mières semaines de son exis­tence, après quoi elle sera « opérationnelle ».

Lui livrer ce règle­ment inté­rieur lui fera gagner un temps consi­dé­rable car l’élaboration de ce règle­ment n’est pas simple et va prendre beau­coup de temps : il n’aura rien à voir avec le « petit pro­to­cole de socio­cra­tie déli­bé­ra­tive » uti­li­sé actuel­le­ment dans les ate­liers consti­tuants. Ce pro­to­cole ne peut ser­vir qu’à des petits groupes de tra­vail. Il est tota­le­ment inadap­té à des assem­blées déli­bé­rantes de plu­sieurs cen­taines de citoyens ! Il suf­fit d’imaginer à quel point ces assem­blées seraient inef­fi­caces si les débats y avaient lieu en levant la main pour par­ta­ger une idée spontanée.

Une assem­blée déli­bé­rante de plu­sieurs cen­taines de citoyens ne pour­ra éla­bo­rer effi­ca­ce­ment des textes com­plexes que si les débats portent sur des pro­po­si­tions et des amen­de­ments rédi­gés et mis à la dis­po­si­tion de tous les par­le­men­taires. Un peu à la manière de notre Assem­blée Natio­nale actuelle, à ceci près (et la nuance est de taille !) que le règle­ment inté­rieur garan­ti­ra la stricte éga­li­té poli­tique des par­le­men­taires et les obli­ge­ra à des débats ration­nels ser­vant l’intérêt géné­ral. Le règle­ment inté­rieur à éla­bo­rer sera donc lui-même un texte complexe.

5. Le pro­jet en cours et dont nous cher­chons à ren­for­cer l’équipe actuel­le­ment vise à éta­blir une ver­sion sim­pli­fiée d’un tel règle­ment inté­rieur mais aus­si de l’expérimenter pour en garan­tir la per­ti­nence. L’idée est de conduire ces tra­vaux en simu­lant, à effec­tif réduit, les tra­vaux d’une telle assem­blée qui met­trait au point son propre règle­ment inté­rieur, tra­vaux qui seront eux-mêmes régis par le règle­ment inté­rieur en cours d’élaboration.

Nous en sommes pour le moment à la phase de pré­pa­ra­tion et, du fait du départ d’un nombre impor­tant des membres de l’équipe (prin­ci­pa­le­ment des départs volon­taires et des exclu­sions du fait de l’absence de contri­bu­tions), nous sou­hai­tons ren­for­cer l’équipe de 5 à 10 membres. Par la suite, un peu avant le début des simu­la­tions, nous ferons à nou­veau appel à des volon­taires car nous aurons besoin d’être plus nombreux.

Ce pro­jet est tota­le­ment indé­pen­dant de l’écriture de la Consti­tu­tion mais, en même temps, il lui est com­plé­men­taire. Il s’annonce comme une véri­table aven­ture poli­tique pas­sion­nante mais aus­si exigeante.

Pour bien le com­prendre, il faut prendre le temps de se docu­men­ter à son sujet.
Une vidéo très didac­tique en 10 par­ties explique le dérou­le­ment et les atten­dus du pro­jet à l’aide de nom­breux sché­mas. Elle se trouve dans la page vidéo du site dédié au pro­jet : www​.exp​-demo​.jim​do​.com

Pour ceux que le pro­jet inté­resse ou inter­pelle, des Mumble d’information (réunions d’information) auront lieu régu­liè­re­ment dans les semaines à venir pour leur per­mettre de poser leurs ques­tions et pré­sen­ter leurs com­men­taires et objec­tions qui leur seront venus à l’esprit pen­dant le vision­nage de cette vidéo. Maxime Péroud ani­me­ra ces réunions et répon­dra à chaque fois aus­si clai­re­ment que pos­sible à ces ques­tions et objections.

Les Mumble seront annon­cés en tant qu’événement sur Face­book pos­tés sur la page FB de Maxime.

L’avenir ne se construit pas seule­ment dans les ate­liers consti­tuants et assez peu en dis­cu­tant de l’actualité. Nous devons aus­si éla­bo­rer les textes de demain et nous orga­ni­ser pour être capables de le faire en grand nombre, en com­plé­ment de nos actions dites « de terrain ».

Maxime Per­oud.

 
Je cau­tionne autant que je le peux ce pro­jet qui m’apparaît comme abso­lu­ment néces­saire pour pré­pa­rer la démo­cra­tie de demain.

Je vous encou­rage à vous y inté­res­ser et, pour com­men­cer, à regar­der cette vidéo puis à par­ti­ci­per à l’un des pro­chains Mumble d’information.


https://​exp​-demo​.jim​do​.com/

Étienne.

PS : je vous ai déjà par­lé, en 2017, du tra­vail démo­cra­tique impres­sion­nant de Maxime Péroud : https://​www​.chouard​.org/​2​0​1​7​/​0​9​/​0​9​/​p​r​o​j​e​t​–​d​e​x​p​e​r​i​m​e​n​t​a​t​i​o​n​–​d​e​m​o​c​r​a​t​i​q​u​e​–​e​l​a​b​o​r​e​r​–​e​n​s​e​m​b​l​e​–​l​e​–​r​e​g​l​e​m​e​n​t​–​i​n​t​e​r​i​e​u​r​–​d​e​–​n​o​s​–​p​r​o​c​h​a​i​n​e​s​–​a​s​s​e​m​b​l​e​e​s​–​d​e​m​o​c​r​a​t​i​q​u​e​s​–​a​v​e​c​–​m​a​x​i​m​e​–​p​e​r​oud

 

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La juge Emma Arbuthnot refuse de se récuser dans le simulacre de procès de Julian Assange ! La séparation des pouvoirs ne suffit pas pour garantir les Droits de l’Homme ! il faut instituer UN POUVOIR POPULAIRE au-dessus de TOUS les pouvoirs.

La juge Emma Arbuthnot refuse de se récuser dans le simulacre de procès de Julian Assange

Par Thomas Scripps
12 juillet 2019

La juge Emma Arbuth­not a refu­sé de se récu­ser des audiences d’extradition de Julian Assange, le fon­da­teur de Wiki­Leaks. Voi­là à quoi res­semble la « jus­tice de classe ».

Arbuth­not, magis­trat en chef et juge de dis­trict supé­rieur pour l’Angleterre et le Pays de Galles, bafoue les prin­cipes juri­diques fon­da­men­taux pour s’assurer qu’elle pré­side un simu­lacre de pro­cès contre Assange. Le pro­cès doit reprendre au Tri­bu­nal de pre­mière ins­tance à West­mins­ter le 24 février pro­chain. En cas d’extradition, Assange fait face à des accu­sa­tions en ver­tu de la Loi sur l’espionnage aux États-Unis et encourt une peine d’emprisonnement de 175 ans. D’autres accu­sa­tions sont en ins­tance, qui pour­raient inclure la peine de mort.

La juge Emma Arbuthnot, magistrat en chef et juge de district supérieur pour l’Angleterre et le Pays de Galles.

La juge Emma Arbuth­not, magis­trat en chef et juge de dis­trict supé­rieur pour l’Angleterre et le Pays de Galles.

Le « Guide sur la conduite des juges » (« Guide to Judi­cial Conduct) en Angle­terre et au Pays de Galles, publié en 2018, sti­pule que « l’indépendance judi­ciaire est une pierre angu­laire de notre sys­tème de gou­ver­ne­ment dans une socié­té démo­cra­tique et une pro­tec­tion de la liber­té et des droits du citoyen dans le cadre de l’État de droit. La magis­tra­ture doit être per­çue comme indé­pen­dante des organes légis­la­tif et exé­cu­tif du gou­ver­ne­ment, tant à titre indi­vi­duel que dans son ensemble ».

Arbuth­not aurait dû se récu­ser d’office sur cette base.

Son mari, James Nor­wich Arbuth­not, est un membre conser­va­teur de la Chambre des Lords. Il est inti­me­ment lié aux forces armées et aux ser­vices de sécu­ri­té bri­tan­niques, dont les opé­ra­tions cri­mi­nelles ont été expo­sées par WikiLeaks.

En tant que dépu­té conser­va­teur, Lord Arbuth­not a pré­si­dé, entre 2005 et 2014, le Comi­té spé­cial de la défense, l’organe qui super­vise le minis­tère de la Défense et les forces armées bri­tan­niques. Il était en poste lors des opé­ra­tions mili­taires en cours en Afgha­nis­tan et en Irak, ain­si que des guerres pour le chan­ge­ment de régime en Libye et en Syrie.

Il est actuel­le­ment copré­sident du conseil consul­ta­tif du fabri­cant bri­tan­nique de maté­riel de défense Thales et membre du conseil consul­ta­tif de l’Institut royal des ser­vices unis pour les études de défense et de sécu­ri­té (RUSI). Lord Arbuth­not est éga­le­ment un ancien direc­teur d’une socié­té de conseil en sécu­ri­té et en ren­sei­gne­ment, SC Stra­te­gy, où il a tra­vaillé pen­dant deux ans aux côtés des codi­rec­teurs Lord Car­lile et Sir John Scarlett.

Car­lile est un émi­nent défen­seur du MI5 qui a sou­te­nu la Loi sur les pou­voirs d’enquête de 2016 (sur­nom­mée la « Charte des foui­neurs ») qui per­met à l’État bri­tan­nique d’accéder aux dos­siers de connexion Inter­net sans man­dat. Il a fait valoir que les révé­la­tions d’Edward Snow­den sur la sur­veillance de masse per­pé­trée illé­ga­le­ment par l’État « équi­va­laient à un acte cri­mi­nel ». Il a super­vi­sé la mise en œuvre de la légis­la­tion anti­ter­ro­riste et exa­mi­né les pro­cé­dures de sécu­ri­té natio­nale en Irlande du Nord.

Scar­lett est l’ancien direc­teur du MI6 et l’ancien pré­sident du Comi­té mixte du ren­sei­gne­ment (JIC) du gou­ver­ne­ment. Il a super­vi­sé la pro­duc­tion d’un rap­port qui plaide en faveur du droit des ser­vices secrets à « col­lec­ter des don­nées de com­mu­ni­ca­tion en masse ». Enfin, il a eu la res­pon­sa­bi­li­té de com­pi­ler le « dos­sier dou­teux » sur les armes de des­truc­tion mas­sive en Irak.

Les acti­vi­tés de Lord Arbuth­not et de ses col­lègues ont fait l’objet de mil­liers de révé­la­tions de Wiki­Leaks. La base de don­nées de Wiki­Leaks contient près de 2.000 réfé­rences à Thales et près de 450 à RUSI. Lord Arbuth­not lui-même peut être trou­vé dans plus de 50 entrées.

Comme l’ont fait valoir l’équipe juri­dique d’Assange et le rap­por­teur de l’ONU sur la tor­ture, Nils Mel­zer, ce « conflit d’intérêts grave » oblige Lady Arbuth­not à se reti­rer de l’affaire Assange. Son mari a consa­cré toute sa vie poli­tique à écra­ser la trans­pa­rence et la res­pon­sa­bi­li­té pré­co­ni­sées par WikiLeaks.

Le « Guide sur la conduite des juges » sti­pule expli­ci­te­ment que « Lorsqu’un proche membre de la famille d’un juge est poli­ti­que­ment actif, le juge doit gar­der à l’esprit la pos­si­bi­li­té que, dans cer­taines pro­cé­dures, cette acti­vi­té poli­tique puisse sou­le­ver des pré­oc­cu­pa­tions quant à l’impartialité du juge et son déta­che­ment du pro­ces­sus poli­tique et doit agir en conséquence ».

De plus, « une ani­mo­si­té per­son­nelle à l’égard d’un par­ti est aus­si une rai­son impé­rieuse de disqualification ».

L’animosité d’Arbuthnot envers Assange a été ren­due publique.

Aucun argu­ment juri­dique ne convain­cra Arbuth­not de se récu­ser. Ses liens fami­liaux avec les ser­vices de sécu­ri­té sont la rai­son pour laquelle elle a été choi­sie pour super­vi­ser cette affaire. La classe diri­geante bri­tan­nique exige qu’un fonc­tion­naire approuve le trans­fert d’Assange aux États-Unis, ce qui équi­vaut à une res­ti­tu­tion extraordinaire.

Deux pré­cé­dents cas de juges qui se sont récu­sés d’affaires judi­ciaires anglaises offrent un contraste frap­pant avec l’affaire du fon­da­teur de WikiLeaks.

La pre­mière concerne Arbuth­not elle-même. En août 2018, elle a été contrainte de se reti­rer d’un pro­cès contre Uber après que l’Observateur eut révé­lé que son mari avait un inté­rêt com­mer­cial dans la socié­té de trans­port via SC Stra­te­gy et son client, la Qatar Invest­ment Autho­ri­ty. Un porte-parole judi­ciaire a décla­ré : « Dès que ce lien lui a été signa­lé, elle a confié l’affaire à un autre juge. C’est essen­tiel que les juges soient non seule­ment abso­lu­ment impar­tiaux, mais qu’ils soient per­çus comme tels. »

Ces pré­oc­cu­pa­tions ne semblent pas exis­ter dans le cas d’Assange. Aucun article dans les médias grand public n’a fait état de la contra­dic­tion fla­grante entre les actions d’Arbuthnot en 2018 et celles d’aujourd’hui.

Le deuxième cas est celui d’un juge qui ne s’est pas récu­sé en 1998. Il s’agissait de la ten­ta­tive d’extradition de l’ancien dic­ta­teur, tor­tion­naire et bour­reau chi­lien Augus­to Pino­chet pour faire face à des accu­sa­tions pénales en Espagne.

Lord Hoff­mann a été sévè­re­ment atta­qué pour ne pas avoir éta­bli clai­re­ment ses liens avec le groupe de défense des droits humains Amnes­ty Inter­na­tio­nal, qui était une par­tie dans l’affaire. Il a été pré­sident du ser­vice de col­lecte de fonds de l’organisme de bien­fai­sance à titre béné­vole. Hoff­mann avait été l’un des trois juges sur cinq (Lords juristes) à voter en faveur de l’annulation d’une déci­sion de la Haute Cour qui confir­mait l’immunité de Pino­chet contre les pour­suites judi­ciaires en rai­son de son sta­tut de chef d’État au moment de ses crimes. Dans un geste sans pré­cé­dent, le ver­dict de la Chambre des Lords contre Pino­chet (impli­quant Hoff­mann) a été annu­lé par cinq juges et n’a été recon­fir­mé qu’un an plus tard, la plu­part des accu­sa­tions por­tées contre Pino­chet ayant été inva­li­dées par d’importantes réserves.

Les Lords juristes, diri­gés par Lord Browne-Wil­­kin­­son, ont déve­lop­pé des argu­ments qui exi­ge­raient abso­lu­ment qu’Arbuthnot se récuse dans l’affaire Assange. Aupa­ra­vant, pour qu’un juge soit auto­ma­ti­que­ment dis­qua­li­fié d’une affaire, il fal­lait qu’il ait un inté­rêt finan­cier dans son issue. La déci­sion de Lord Browne-Wil­­kin­­son a éten­du le prin­cipe de la dis­qua­li­fi­ca­tion auto­ma­tique aux caté­go­ries beau­coup plus larges d’«intérêts » non finan­ciers ou de sou­tien à des « causes ».

Le ver­dict d’annulation a accep­té l’affirmation de Pino­chet selon laquelle le droit à un pro­cès équi­table lui avait été refu­sé en ver­tu de l’article 6 de la Conven­tion euro­péenne des droits de l’homme, qui sti­pule que « tout juge pour lequel il y aurait rai­son légi­time de craindre un manque d’impartialité doit se retirer ».

Les dénon­cia­tions d’Hoffmann ont été bru­tales. Le Guar­dian a rap­por­té le 16 jan­vier 1999 que cinq Lords juristes avaient « cri­ti­qué Lord Hoff­mann pour avoir bafoué le prin­cipe fon­da­men­tal selon lequel “la jus­tice ne doit pas seule­ment être ren­due, mais doit être vue comme telle”. Cette cri­tique dévas­ta­trice a jeté le doute sur l’avenir de Lord Hoff­mann en tant que Lord juriste ».

Le Guar­dian pour­suit : « Les juges accusent Lord Hoff­mann d’avoir igno­ré un prin­cipe judi­ciaire de base appris par chaque étu­diant en pre­mière année de droit. La règle est si bien connue, a décla­ré Lord Hope, qu’aucun tri­bu­nal civil du Royaume-Uni n’a vu son juge­ment annu­lé pour une vio­la­tion de cette règle au cours de ce siècle… “Les juges sont bien conscients qu’ils ne devraient pas sié­ger dans une affaire dans laquelle ils ont le moindre inté­rêt per­son­nel, que ce soit comme défen­deur ou comme pro­cu­reur”, a décla­ré Lord Hope. »

« Lord Hut­ton a dit que la confiance du public dans l’intégrité de l’administration de la jus­tice serait ébran­lée si le vote déci­sif de Lord Hoff­mann selon lequel le géné­ral Pino­chet pour­rait être pour­sui­vi était maintenu. »

En jan­vier 2000, le ministre de l’Intérieur du gou­ver­ne­ment tra­vailliste de Blair, Jack Straw, est inter­ve­nu pour pro­té­ger le meur­trier de masse, en annu­lant la déci­sion de la Chambre des Lords et insis­tant pour que les pro­cé­dures d’extradition soient sus­pen­dues en rai­son de la mau­vaise san­té pré­su­mée de Pino­chet. Pino­chet est reve­nu au Chi­li le 3 mars, atter­ris­sant à l’aéroport de San­tia­go où il s’est levé de son fau­teuil rou­lant aux accla­ma­tions de ses par­ti­sans fascisants.

De toute évi­dence, « l’impartialité judi­ciaire » signi­fie une chose lorsqu’il s’agit de défendre un dic­ta­teur bru­tal et allié de longue date de l’impérialisme amé­ri­cain et bri­tan­nique. C’en est une autre quand il s’agit de per­sé­cu­ter un jour­na­liste de renom­mée mon­diale qui a dénon­cé les crimes de la classe dirigeante.

Du point vue de l’impérialisme, le scalp d’Assange est abso­lu­ment néces­saire pour pour­suivre ses guerres de conquête de style colo­nial et la guerre mon­diale contre les droits sociaux et démo­cra­tiques de la classe ouvrière. Pour le faire taire à jamais, non seule­ment le pou­voir judi­ciaire, mais aus­si l’appareil d’État tout entier et ses défen­seurs dans les médias se débar­rassent de toute pré­ten­tion démo­cra­tique et libérale.

Le Par­ti de l’é­ga­li­té socia­liste sou­tient les reven­di­ca­tions des par­ti­sans d’As­sange qui demandent à Arbuth­not de se récu­ser. Mais nous lan­çons l’avertissement que la seule force capable de libé­rer Assange est la classe ouvrière inter­na­tio­nale mobi­li­sée dans une lutte poli­tique col­lec­tive contre la classe diri­geante et son appa­reil judiciaire.

(Article paru en anglais le 11 juillet 2019)

Source : WSWS juillet 2019

https://​www​.wsws​.org/​f​r​/​a​r​t​i​c​l​e​s​/​2​0​1​9​/​0​7​/​1​2​/​a​r​b​u​–​j​1​2​.​h​tml

Mon com­men­taire :

Cette enquête sur les gra­vis­simes conflits d’in­té­rêts des juges en train de mar­ty­ri­ser Assange en toute impu­ni­té est consternante.

1) Wiki­leaks ou RSF ou WSWS ne pour­­raient-ils pas enquê­ter et publier le cv com­plet (avec pho­to et adresse) de la juge Vanes­sa Barait­ser, pour faire connaître aux citoyens les conflits d’in­té­rêts et rai­sons per­son­nelles d’être aus­si par­tiale et injuste de ce « juge » stalinien ?

2) Cette totale impu­ni­té d’une injus­tice criante pousse à réflé­chir en amont aux ins­ti­tu­tions mêmes de la justice.

Nous n’a­vons pas de constitution.

À l’é­vi­dence, la sépa­ra­tion des pou­voirs ne suf­fit pas pour garan­tir les Droits de l’Homme ! il faut ins­ti­tuer UN POUVOIR POPULAIRE au-des­­sus de TOUS les pouvoirs.

Ce pou­voir popu­laire s’exer­ce­rait à tra­vers des Chambres de contrôle, tirées au sort et for­mées pour bien jouer leur rôle, dédiées à chaque pou­voir : Chambre de contrôle des juges, Chambre de contrôle des forces armées, Chambre de contrôle des élus, Chambre de contrôle des banques, Chambre de contrôle de l’in­for­ma­tion (médias, ins­ti­tuts de son­dages et de sta­tis­tiques, infor­ma­tion sur le pro­ces­sus élec­to­ral), etc.

La for­ma­tion des magis­trats et leur indé­pen­dance doit abso­lu­ment être recon­si­dé­rée par leurs vic­times, les citoyens qui les paient pour rendre la Justice.

SEULS les citoyens eux-mêmes (direc­te­ment) sont LÉGITIMES (et APTES) à écrire puis défendre une vraie consti­tu­tion (digne de ce nom).

Voi­là un beau sujet pour vos pro­chains ate­liers consti­tuants per­son­nels : le pou­voir judi­ciaire, nomi­na­tion et contrôle des magistrats.

#FreeAs­sange
#Grè­ve­Gé­né­ra­le­Cons­ti­tuante

Étienne.

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[Procès stalinien de Moscou à Londres, suite] Compte-rendu du Procès Assange, 3eme jour (26 fév 2020), par Craig Murray

[Pro­cès sta­li­nien de Mos­cou à Londres, suite]
Compte-ren­­du du Pro­cès Assange, 3eme jour
Craig MURRAY

Julian Assange Prison de Belmarsh 24 février 2020
pho­to : illus­tra­tion par la rédac­tion du Grand Soir (source indéterminée)

Lors de la pro­cé­dure d’hier au tri­bu­nal, l’accusation a adop­té des argu­ments si caté­go­riques et appa­rem­ment dérai­son­nables que je me suis deman­dé com­ment les rédi­ger d’une manière qui ne semble pas être une cari­ca­ture ou une exa­gé­ra­tion injuste de ma part. Ce à quoi on assiste dans ce tri­bu­nal a depuis long­temps dépas­sé le stade de la cari­ca­ture. Tout ce que je peux faire, c’est vous don­ner l’assurance per­son­nelle que ce que je raconte est conforme à la réalité.

Comme d’habitude, je trai­te­rai d’abord des ques­tions de pro­cé­dure et du trai­te­ment réser­vé à Julian, avant d’exposer clai­re­ment les argu­ments juri­diques avancés.

Vanes­sa Barait­ser a pour ins­truc­tion claire de faire sem­blant d’être inquiète en deman­dant, vers la fin de chaque séance, juste avant la pause de toute façon, si Julian se sent bien et s’il sou­haite une pause. Elle ignore alors sys­té­ma­ti­que­ment sa réponse. Hier, il a répon­du assez lon­gue­ment qu’il n’entendait pas bien dans sa boîte de verre et qu’il ne pou­vait pas com­mu­ni­quer avec ses avo­cats (à un cer­tain moment hier, ils avaient com­men­cé à l’empêcher de pas­ser des notes à son avo­cat, ce qui, j’apprends, a été le contexte de la pré­ven­tion agres­sive de sa poi­gnée de main d’adieu à Garzon).

Barait­ser a insis­té sur le fait qu’il ne pou­vait être enten­du que par ses avo­cats, ce qui, étant don­né qu’on l’avait empê­ché de leur don­ner des ins­truc­tions, était plu­tôt osé de sa part. Ceci dit, nous avons eu un ajour­ne­ment de dix minutes pen­dant que Julian et son avo­cat étaient auto­ri­sés à par­ler dans les cel­lules – pro­ba­ble­ment là où ils pour­raient être à nou­veau mis sur écoute de façon plus pratique.

Au retour, Edward Fitz­ge­rald a fait une demande for­melle pour que Julian soit auto­ri­sé à s’asseoir à côté de ses avo­cats dans la cour. Julian était « un homme doux et intel­lec­tuel » et non un ter­ro­riste. Barait­ser répon­dit que la libé­ra­tion d’Assange du banc des accu­sés dans le corps du tri­bu­nal signi­fie­rait qu’il était libre. Pour y par­ve­nir, il fau­drait deman­der une mise en liber­té sous caution.

Une fois de plus, l’avocat de l’accusation James Lewis est inter­ve­nu du côté de la défense pour ten­ter de rendre le trai­te­ment de Julian moins extrême. Il n’était pas, a‑t‑il sug­gé­ré avec réti­cence, tout à fait cer­tain qu’il était exact de devoir deman­der une libé­ra­tion sous cau­tion pour que Julian puisse s’asseoir dans la salle du tri­bu­nal, ou que le fait d’être dans la salle du tri­bu­nal et enca­dré d’agents de sécu­ri­té signi­fiait qu’un pri­son­nier n’était plus en déten­tion. Les pri­son­niers, même les plus dan­ge­reux des ter­ro­ristes, ont témoi­gné depuis la barre des témoins dans la salle du tri­bu­nal aux avo­cats et aux magis­trats. Au sein de la Haute Cour, les pri­son­niers s’asseyaient fré­quem­ment avec leurs avo­cats lors des audiences d’extradition, dans les cas extrêmes de cri­mi­nels vio­lents menot­tés à un agent de sécurité.

Barait­ser a répon­du qu’Assange pou­vait repré­sen­ter un dan­ger pour le public. Il s’agit d’une ques­tion de san­té et de sécu­ri­té. Com­ment Fitz­ge­rald et Lewis pen­­saient-ils qu’elle avait la capa­ci­té d’effectuer l’évaluation des risques néces­saire ? Il fau­drait que le groupe 4 décide si cela est possible.

Oui, elle a vrai­ment dit cela. Le groupe 4 devrait décider.

Barait­ser s’est mis à balan­cer du jar­gon comme un Dalek deve­nu incon­trô­lable. L’« éva­lua­tion des risques » et la « san­té et la sécu­ri­té » ont beau­coup fait par­ler d’eux. Elle a com­men­cé à res­sem­bler à quelque chose de pire qu’un Dalek, un fonc­tion­naire local par­ti­cu­liè­re­ment stu­pide et de très mau­vaise qua­li­té. « Pas de juri­dic­tion » – « Jusqu’au groupe 4 ». Se res­sai­sis­sant un peu, elle a affir­mé fer­me­ment que la remise en déten­tion ne peut signi­fier que la remise au banc des accu­sés, nulle part ailleurs dans la salle. Si la défense vou­lait qu’il soit dans la salle d’audience où il pour­rait mieux entendre la pro­cé­dure, elle ne pour­rait que deman­der la mise en liber­té sous cau­tion et sa libé­ra­tion de déten­tion en géné­ral. Elle a alors regar­dé les deux avo­cats dans l’espoir que cela les aurait fait s’asseoir, mais tous deux sont res­tés debout.

Dans sa manière réser­vée (qui, je l’avoue, com­mence à me taper sur le sys­tème), Lewis a décla­ré : « l’accusation est neutre sur cette demande, bien sûr, mais, euh, je ne pense vrai­ment pas que ce soit juste ». Il la regar­dait comme un oncle bien­veillant dont la nièce pré­fé­rée vient de com­men­cer à boire de la tequi­la à la bou­teille lors d’une fête de famille.

Barait­ser a conclu l’affaire en décla­rant que la défense devrait sou­mettre des argu­ments écrits sur ce point avant 10 heures demain matin, et qu’elle tien­drait alors une audience sépa­rée sur la ques­tion de la posi­tion de Julian au tribunal.

La jour­née avait com­men­cé avec un Magis­trat Barait­ser très en colère s’adressant à la gale­rie publique. Hier, a‑t‑elle dit, une pho­to avait été prise à l’intérieur de la salle d’audience. Prendre ou ten­ter de prendre des pho­tos à l’intérieur de la salle d’audience est un délit. Vanes­sa Barait­ser parais­sait à ce moment avoir très envie d’incarcérer quelqu’un. Elle sem­blait éga­le­ment, dans sa colère, faire l’hypothèse non fon­dée que celui qui avait pris la pho­to depuis la gale­rie publique mar­di était encore pré­sent mer­cre­di ; je pense que non. Être en colère contre le public au hasard doit être très stres­sant pour elle. Je soup­çonne qu’elle crie beau­coup dans les trains.

Mme Barait­ser n’aime pas les pho­tos – elle semble être la seule per­son­na­li­té publique en Europe occi­den­tale à ne pas avoir de pho­to d’elle sur Inter­net. En effet, n’importe quel pékin a lais­sé plus de preuves de son exis­tence et de son his­toire sur inter­net que Vanes­sa Barait­ser. Ce qui n’est pas un crime de sa part, mais je soup­çonne qu’un tel effa­ce­ment ne se fait pas sans un effort consi­dé­rable. [Ndt – Cela demande effec­ti­ve­ment soit un tra­vail consi­dé­rable soit une atten­tion de tous les ins­tants et de longue date] Quelqu’un m’a sug­gé­ré qu’elle pour­rait être un holo­gramme, mais je ne pense pas. Les holo­grammes ont plus d’empathie qu’elle.

J’ai été amu­sé par l’infraction pénale consis­tant à ten­ter de prendre des pho­tos dans la salle d’audience. Dans quelle mesure fau­­drait-il être incom­pé­tent pour ten­ter de prendre une pho­to et ne pas le faire ? Et si aucune pho­to n’a été prise, com­ment prou­ver que vous avez ten­té d’en prendre une, plu­tôt que d’envoyer un SMS à votre mère ? Je sup­pose que « ten­ter de prendre une pho­to » est un crime qui pour­rait attra­per quelqu’un arri­vant avec un grand appa­reil pho­to reflex, un tré­pied et plu­sieurs lampes d’éclairage, mais aucun ne semble avoir réus­si à se glis­ser dans la gale­rie publique.

Barait­ser n’a pas pré­ci­sé si la publi­ca­tion d’une pho­to­gra­phie prise dans une salle d’audience (ou même la ten­ta­tive de publier une pho­to­gra­phie prise dans une salle d’audience) consti­tuait un délit. Je pense que c’est le cas. Quoi qu’il en soit, Le Grand Soir a publié une tra­duc­tion de mon rap­port hier, et vous pou­vez y voir une pho­to de Julian dans sa cage anti­ter­ro­riste en verre pare-balles. Et je m’empresse d’ajouter qu’elle n’a pas été prise par moi. [et la Rédac­tion du Grand Soir s’empresse d’ajouter que cette pho­to ne nous a pas été four­nie par M. Mur­ray ni par les ser­vices de ren­sei­gne­ments russes et qu’elle cir­cule par-ci par-là sur l’internet]

Nous en arri­vons main­te­nant à l’examen des argu­ments juri­diques d’hier concer­nant la demande d’extradition elle-même. Heu­reu­se­ment, ils sont assez simples à résu­mer, car bien que nous ayons eu cinq heures de dis­cus­sions, elles ont consis­té en grande par­tie à ce que les deux par­ties s’affrontent en citant des dizaines d’« auto­ri­tés », par exemple des juges morts, pour faire valoir leur point de vue, et en répé­tant ain­si conti­nuel­le­ment les mêmes points sans grande valeur d’exégèse des innom­brables citations.

Comme l’a pré­fi­gu­ré hier le magis­trat Barait­ser, le minis­tère public sou­tient que l’article 4.1 du trai­té d’extradition entre le Royaume-Uni et les États-Unis n’a pas force de loi.

Les gou­ver­ne­ments bri­tan­nique et amé­ri­cain affirment que la Cour applique le droit natio­nal, et non le droit inter­na­tio­nal, et que le trai­té n’a donc aucune valeur. Cet argu­ment a été pré­sen­té à la Cour sous forme d’un écrit auquel je n’ai pas accès. Mais d’après les dis­cus­sions au tri­bu­nal, il est clair que le minis­tère public sou­tient que la loi sur l’extradition de 2003, en ver­tu de laquelle le tri­bu­nal fonc­tionne, ne fait pas d’exception pour les infrac­tions poli­tiques. Toutes les lois d’extradition pré­cé­dentes avaient exclu l’extradition pour des délits poli­tiques, il doit donc être dans l’intention du par­le­ment sou­ve­rain que les délin­quants poli­tiques puissent désor­mais être extradés.

En ouvrant son argu­men­ta­tion, Edward Fitz­ge­rald a fait valoir que la loi sur l’extradition de 2003 ne suf­fit pas à elle seule pour pro­cé­der à une véri­table extra­di­tion. L’extradition néces­site la mise en place de deux élé­ments : la loi géné­rale sur l’extradition et le trai­té d’extradition avec le ou les pays concer­nés. « Pas de trai­té, pas d’extradition » était une règle invio­lable. Le trai­té était la base même de la demande. Dire que l’extradition n’était pas régie par les termes du trai­té même en ver­tu duquel elle a été faite, c’était créer une absur­di­té juri­dique et donc un abus de pro­cé­dure. Il a cité des exemples de juge­ments ren­dus par la Chambre des Lords et le Pri­vy Coun­cil où les droits issus du trai­té ont été jugés exé­cu­toires mal­gré leur absence dans la légis­la­tion natio­nale, notam­ment pour empê­cher que des per­sonnes soient extra­dées vers une exé­cu­tion poten­tielle dans les colo­nies britanniques.

Fitz­ge­rald a sou­li­gné que si la loi sur l’extradition de 2003 ne contient pas d’interdiction d’extradition pour des délits poli­tiques, elle ne pré­cise pas qu’une telle inter­dic­tion ne peut pas figu­rer dans les trai­tés d’extradition. Et le trai­té d’extradition de 2007 a été rati­fié après la loi d’extradition de 2003.

A ce stade, Barait­ser l’a inter­rom­pu pour dire qu’il était clair que l’intention du Par­le­ment était qu’il puisse y avoir une extra­di­tion pour des délits poli­tiques. Sinon, il n’aurait pas sup­pri­mé l’obstacle dans la légis­la­tion pré­cé­dente. Fitz­ge­rald a refu­sé de céder, affir­mant que la loi ne disait pas que l’extradition pour des délits poli­tiques ne pou­vait pas être inter­dite par le trai­té auto­ri­sant l’extradition.

Fitz­ge­rald a pour­sui­vi en disant que la juris­pru­dence inter­na­tio­nale avait accep­té pen­dant un siècle ou plus que l’on n’extrade pas les délin­quants poli­tiques. C’est pré­ci­sé dans La Conven­tion euro­péenne d’extradition, le modèle de trai­té d’extradition des Nations unies et la Conven­tion d’Interpol sur l’extradition. C’est pré­ci­sé dans cha­cun des trai­tés d’extradition conclus par les États-Unis avec d’autres pays, et ce depuis plus d’un siècle, sur l’insistance des États-Unis. Le fait que les gou­ver­ne­ments bri­tan­nique et amé­ri­cain disent qu’il ne s’applique pas est éton­nant et crée­rait un ter­rible pré­cé­dent qui met­trait en dan­ger les dis­si­dents et les pri­son­niers poli­tiques poten­tiels de Chine, de Rus­sie et de régimes du monde entier qui se sont échap­pés vers des pays tiers.

Fitz­ge­rald a décla­ré que toutes les grandes auto­ri­tés étaient d’accord sur le fait qu’il y avait deux types de délits poli­tiques. Le délit poli­tique pur et le délit poli­tique rela­tif. Un délit poli­tique « pur » a été défi­ni comme la tra­hi­son, l’espionnage ou la sédi­tion. Un délit poli­tique « rela­tif » est un acte nor­ma­le­ment cri­mi­nel, comme l’agression ou le van­da­lisme, com­mis avec un motif poli­tique. Cha­cune des accu­sa­tions por­tées contre Assange était un délit poli­tique « pur ». Toutes sauf une étaient des accu­sa­tions d’espionnage, et l’accusation de pira­tage infor­ma­tique avait été com­pa­rée par l’accusation à la vio­la­tion de la loi sur les secrets offi­ciels pour répondre au cri­tère de double incri­mi­na­tion. L’accusation pri­mor­diale selon laquelle Assange cher­chait à nuire aux inté­rêts poli­tiques et mili­taires des États-Unis est la défi­ni­tion même d’un délit poli­tique selon toutes les autorités.

En réponse, Lewis décla­ra qu’un trai­té ne pou­vait pas être contrai­gnant en droit anglais à moins d’être spé­ci­fi­que­ment incor­po­ré dans le droit anglais par le Par­le­ment. Il s’agissait là d’une défense démo­cra­tique néces­saire. Les trai­tés étaient conclus par l’exécutif qui ne pou­vait pas faire la loi. Cela rele­vait de la sou­ve­rai­ne­té du Par­le­ment. Lewis a cité de nom­breux juge­ments décla­rant que les trai­tés inter­na­tio­naux signés et rati­fiés par le Royaume-Uni ne pou­vaient pas être appli­qués par les tri­bu­naux bri­tan­niques. « Les autres pays pour­raient être sur­pris que leurs trai­tés avec le gou­ver­ne­ment bri­tan­nique n’aient aucune force juri­dique », a‑t‑il plaisanté.

Lewis a décla­ré qu’il n’y avait pas d’abus de pro­cé­dure ici et qu’aucun droit n’était donc invo­qué au titre de la Conven­tion euro­péenne. C’était le fonc­tion­ne­ment nor­mal de la loi que la dis­po­si­tion du trai­té sur la non extra­di­tion pour des délits poli­tiques n’avait pas de valeur juridique.

Selon M. Lewis, le gou­ver­ne­ment amé­ri­cain conteste que les infrac­tions com­mises par Assange soient poli­tiques. Au Royaume-Uni, en Aus­tra­lie et aux États-Unis, la défi­ni­tion du délit poli­tique est dif­fé­rente de celle du reste du monde. Nous avons consi­dé­ré que les infrac­tions poli­tiques « pures » que sont la tra­hi­son, l’espionnage et la sédi­tion n’étaient pas des infrac­tions poli­tiques. Seules les infrac­tions poli­tiques « rela­tives » – des crimes ordi­naires com­mis avec un motif poli­tique – étaient consi­dé­rées comme des infrac­tions poli­tiques dans notre tra­di­tion. Dans cette tra­di­tion, la défi­ni­tion du terme « poli­tique » se limi­tait éga­le­ment au sou­tien d’un par­ti poli­tique concur­rent dans un État. Lewis pour­sui­vra demain avec cet argument.

Voi­là qui conclut mon compte ren­du de la pro­cé­dure. J’ai un com­men­taire impor­tant à faire à ce sujet et j’essaierai de faire un autre article plus tard dans la jour­née. Je me pré­ci­pite main­te­nant au tribunal.

Avec mes remer­cie­ments à ceux qui ont fait des dons ou qui se sont abon­nés pour rendre ce repor­tage possible.

Cet article est entiè­re­ment libre de repro­duc­tion et de publi­ca­tion, y com­pris en tra­duc­tion, et j’espère vive­ment que les gens le feront acti­ve­ment. La véri­té nous ren­dra libres.

Craig Mur­ray

Tra­duc­tion « quoi ma pho­to ? qu’est-ce qu’elle a ma pho­to ? » par VD pour le Grand Soir avec pro­ba­ble­ment toutes les fautes et coquilles habituelles

Source : Vik­tor Dedaj, Le Grand Soir,
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[Pire que les procès de Moscou : les procès de Londres et de Washington] Compte-rendu du Procès Assange, 2eme jour

Compte-rendu du Procès Assange, 2eme jour

Par Craig MURRAY

Cet après-midi, l’avocat espa­gnol de Julian, Bal­ta­sar Gar­zon, a quit­té le tri­bu­nal pour retour­ner à Madrid. En sor­tant, il s’est natu­rel­le­ment arrê­té pour ser­rer la main de son client, en fai­sant pas­ser ses doigts par l’étroite fente de la cage de verre pare-balles. Assange, à moi­tié debout, a pris la main de son avo­cat. Les deux gardes de sécu­ri­té dans la cage avec Assange se sont immé­dia­te­ment levés, met­tant la main sur Julian et le for­çant à s’asseoir, empê­chant la poi­gnée de main.

Ce n’était pas le pire aujourd’hui, loin de là, mais c’est une image frap­pante de la force brute insen­sée uti­li­sée conti­nuel­le­ment contre un homme accu­sé de publier des docu­ments. Le fait qu’un homme ne puisse même pas ser­rer la main de son avo­cat est contraire à l’esprit dans lequel les membres du sys­tème juri­dique aiment à faire sem­blant de pra­ti­quer le droit. Je vous offre ce moment éton­nant comme un résu­mé des évé­ne­ments d’hier au tribunal.

Le deuxième jour, la pro­cé­dure avait com­men­cé par une décla­ra­tion d’Edward Fitz­ge­rald, avo­cat d’Assange, qui nous a bru­ta­le­ment secoué. Il a décla­ré qu’hier, le pre­mier jour du pro­cès, Julian avait été désha­billé et fouillé à deux reprises, menot­té à onze reprises et enfer­mé cinq fois dans dif­fé­rentes cel­lules de déten­tion. De plus, tous les docu­ments judi­ciaires lui ont été reti­rés par les auto­ri­tés de la pri­son, y com­pris les com­mu­ni­ca­tions pri­vi­lé­giées entre ses avo­cats et lui-même, et il n’a pas pu se pré­pa­rer à par­ti­ci­per au pro­cès d’aujourd’hui.

La magis­trate Barait­ser a regar­dé Fitz­ge­rald et a décla­ré, d’une voix empreinte de dédain, qu’il avait déjà sou­le­vé de telles ques­tions aupa­ra­vant et qu’elle lui avait tou­jours répon­du qu’elle n’avait aucune com­pé­tence sur le domaine de la pri­son. Il devrait en par­ler avec les auto­ri­tés de la pri­son. Fitz­ge­rald res­ta sur ses posi­tions, ce qui lui valut un air très ren­fro­gné de la part de Barait­ser, et lui répon­dit qu’il allait bien sûr recom­men­cer, mais que ce com­por­te­ment répé­té des auto­ri­tés péni­ten­tiaires mena­çait la capa­ci­té de la défense à se pré­pa­rer. Il a ajou­té que, quelle que soit la juri­dic­tion, il était d’usage, selon son expé­rience, que les magis­trats et les juges trans­mettent leurs com­men­taires et leurs demandes à l’administration péni­ten­tiaire lorsque le dérou­le­ment du pro­cès en était affec­té, et que nor­ma­le­ment les pri­sons prê­taient une oreille sympathique.

Barait­ser a nié caté­go­ri­que­ment toute connais­sance d’une telle pra­tique et a décla­ré que Fitz­ge­rald devrait lui pré­sen­ter des argu­ments écrits expo­sant la juris­pru­dence en matière de com­pé­tence sur les condi­tions de déten­tion. C’en était trop même pour l’avocat de l’accusation James Lewis, qui s’est levé pour dire que l’accusation vou­drait aus­si qu’Assange ait une audience équi­table, et qu’il pou­vait confir­mer que ce que la défense sug­gé­rait était une pra­tique nor­male. Même alors, Barait­ser refu­sait tou­jours d’intervenir auprès de la pri­son. Elle a décla­ré que si les condi­tions car­cé­rales étaient si mau­vaises qu’elles ren­daient impos­sible un pro­cès équi­table, la défense devrait pré­sen­ter une motion de rejet des accu­sa­tions pour ce motif. Dans le cas contraire, elle devrait lais­ser tomber.

L’accusation et la défense ont toutes deux sem­blé sur­prises par l’affirmation de Barait­ser selon laquelle elle n’avait pas enten­du par­ler de ce qu’elles qua­li­fiaient toutes deux de pra­tique cou­rante. Lewis a peut-être été sin­cè­re­ment pré­oc­cu­pé par la des­crip­tion cho­quante du trai­te­ment de la pri­son d’Assange hier ; ou il a peut-être juste eu des alarmes qui se sont déclen­chées dans sa tête en criant « annu­la­tion du pro­cès ». Mais le résul­tat net est que Barait­ser ne fera rien pour empê­cher les abus phy­siques et men­taux de Julian en pri­son, ni pour essayer de lui don­ner la pos­si­bi­li­té de par­ti­ci­per à sa défense. La seule expli­ca­tion réa­liste qui me vienne à l’esprit est que Barait­ser a été pré­ve­nue, car ce mau­vais trai­te­ment conti­nu et la confis­ca­tion de docu­ments relèvent de la haute auto­ri­té du gouvernement.

Un der­nier petit inci­dent à rela­ter : après avoir fait la queue à nou­veau dès les pre­mières heures, j’étais dans la der­nière file d’attente avant l’entrée de la gale­rie publique, lorsque le nom de Kris­tin Hrnaf­sson, rédac­teur en chef de Wiki­leaks, avec qui j’étais en train de par­ler, a été pro­non­cé. Kris­tin s’est iden­ti­fié, et le fonc­tion­naire du tri­bu­nal lui a dit qu’il lui était inter­dit d’entrer dans la gale­rie publique.

J’étais avec Kris­tin pen­dant toute la pro­cé­dure la veille, et il n’avait rien fait de mal – c’est un homme plu­tôt calme. Lorsqu’il a été appe­lé, c’était par son nom et par son titre pro­fes­sion­nel – ils inter­di­saient spé­ci­fi­que­ment le rédac­teur en chef de Wiki­leaks de par­ti­ci­per au pro­cès. Kris­tin a deman­dé pour­quoi et on lui a répon­du que c’était une déci­sion de la Cour.
À ce stade, John Ship­ton, le père de Julian, a annon­cé que dans ce cas, les membres de la famille allaient tous par­tir aus­si, et ils l’ont fait, en sor­tant du bâti­ment. Ils ont alors com­men­cé, avec d’autres, à twee­ter la nou­velle du départ de la famille. Cela a sem­blé cau­ser une cer­taine conster­na­tion par­mi les fonc­tion­naires du tri­bu­nal, et quinze minutes plus tard, Kris­tin a été réad­mise. Nous ne savons tou­jours pas ce qui se cache der­rière tout cela. Plus tard dans la jour­née, les jour­na­listes ont été infor­més par les fonc­tion­naires que c’était sim­ple­ment pour avoir res­quillé, mais cela semble impro­bable car il a été ren­voyé par le per­son­nel qui l’a appe­lé par son nom et son titre, plu­tôt que de l’avoir repé­ré comme un resquilleur.

Aucune de ces infor­ma­tions ne concerne l’affaire offi­cielle. Tout ce qui pré­cède vous en dit plus sur la nature dra­co­nienne du simu­lacre de pro­cès poli­tique qui se déroule que sur la mas­ca­rade qui se déroule dans la salle du tri­bu­nal. Il y a eu des moments aujourd’hui où j’ai été hap­pé par l’argumentaire judi­ciaire et où sus­pen­du aux levres comme on peut l’etre au théâtre, et où j’ai com­men­cé à pen­ser « Wow, cette affaire se passe bien pour Assange ». Puis un évé­ne­ment tel que ceux rela­tés ci-des­­sus se pro­duit, une froi­deur s’empare de votre cœur, et vous vous sou­ve­nez qu’il n’y a pas de jury a convaincre. Je crois que rien de ce qui sera dit ou prou­vé dans la salle d’audience aura un impact sur le ver­dict final de ce tribunal.

Pas­sons donc à la pro­cé­dure pro­pre­ment dite.

Pour la défense, Mark Sum­mers a décla­ré que les accu­sa­tions des États-Unis dépen­daient entiè­re­ment de trois accu­sa­tions fac­tuelles de com­por­te­ment d’Assange :

1) Assange a aidé Man­ning à déco­der une clé de cryp­tage pour accé­der à du maté­riel classifié.

Sum­mers a décla­ré qu’il s’agissait d’une allé­ga­tion fausse prou­vée lors de la cour mar­tiale de Manning.

2) Assange a sol­li­ci­té le maté­riel auprès de Manning

M. Sum­mers a décla­ré que les infor­ma­tions publiques prou­vaient que cela était faux

3) Assis­ter a sciem­ment mis des vies en danger

M. Sum­mers a décla­ré qu’il était prou­vé que cela était faux, tant à par­tir d’informations acces­sibles au public qu’en rai­son de l’implication spé­ci­fique du gou­ver­ne­ment américain.

En résu­mé, M. Sum­mers a décla­ré que le gou­ver­ne­ment amé­ri­cain savait que les allé­ga­tions for­mu­lées étaient fausses quant aux faits et qu’il était prou­vé qu’elles avaient été for­mu­lées de mau­vaise foi. Il s’agit donc d’un abus de pro­cé­dure qui devrait conduire au rejet de la demande d’extradition. Il a décrit les trois chefs d’accusation ci-des­­sus comme « de la fou­taise, de la fou­taise et de la foutaise ».

Sum­mers a ensuite pas­sé en revue les faits. Il a décla­ré que les accu­sa­tions des États-Unis divisent en trois caté­go­ries les docu­ments divul­gués par Man­ning à Wiki­leaks qui sont :

a) Câbles diplo­ma­tiques
b) Les notes d’évaluation des déte­nus de Guan­ta­na­mo
c) Règles d’engagement pour la guerre en Irak
d) Jour­naux de guerre afghans et irakiens

Les Sum­mers ont ensuite métho­di­que­ment pas­sé en revue les points a), b), c) et d) en les reliant cha­cun à leur tour aux com­por­te­ments allé­gués 1), 2) et 3), en douze expli­ca­tions et démons­tra­tions en tout. Ce compte ren­du exhaus­tif a pris envi­ron quatre heures et je ne ten­te­rai pas de le repro­duire ici. Je vais plu­tôt en don­ner les grandes lignes, mais je me réfé­re­rai occa­sion­nel­le­ment au numé­ro du com­por­te­ment allé­gué et/ou à la lettre de l’allégation. J’espère que vous sui­vrez cette méthode – il m’a fal­lu un cer­tain temps pour le faire !

Pour 1) Sum­mers a démon­tré de façon concluante que Man­ning avait accès à chaque maté­riel a) b) c) d) four­ni à Wiki­leaks sans avoir besoin d’un code d’Assange, et qu’il avait cet accès avant même de contac­ter Assange. Man­ning n’avait pas non plus besoin d’un code pour dis­si­mu­ler son iden­ti­té comme l’alléguait l’accusation – la base de don­nées des ana­lystes du ren­sei­gne­ment à laquelle Man­ning pou­vait accé­der – comme des mil­liers d’autres – ne néces­si­tait pas de nom d’utilisateur ou de mot de passe pour y accé­der à par­tir d’un ordi­na­teur mili­taire pro­fes­sion­nel. Sum­mers a cité le témoi­gnage de plu­sieurs offi­ciers de la cour mar­tiale de Man­ning pour le confir­mer. Le fait de cas­ser le code d’administration du sys­tème ne don­ne­rait pas non plus à Man­ning l’accès à d’autres bases de don­nées clas­si­fiées. Sum­mers a cité le témoi­gnage de la cour mar­tiale de Man­ning, où cela avait été accep­té, selon lequel la rai­son pour laquelle Man­ning vou­lait accé­der à l’administration des sys­tèmes était de per­mettre aux sol­dats de mettre leurs jeux vidéo et leurs films sur les ordi­na­teurs por­tables du gou­ver­ne­ment, ce qui en fait se pro­dui­sait fréquemment.

Le magis­trat Barait­ser a pro­cé­dé à deux reprises à des inter­rup­tions impor­tantes. Elle a fait remar­quer que si Chel­sea Man­ning ne savait pas qu’elle ne pou­vait pas être tra­cée comme l’utilisateur qui avait télé­char­gé les bases de don­nées, elle aurait pu par igno­rance deman­der l’aide d’Assange pour cra­cker un code afin de dis­si­mu­ler son iden­ti­té ; même si elle n’avait pas besoin de le faire, l’aide d’Assange consti­tue­rait une infraction.

Sum­mers a sou­li­gné que Mme Man­ning savait qu’elle n’avait pas besoin de nom d’utilisateur et de mot de passe, car elle avait en fait accé­dé à tous les docu­ments sans en avoir. Barait­ser a répon­du que cela ne consti­tuait pas une preuve qu’elle savait qu’elle ne pou­vait pas être pis­tée. Sum­mers a décla­ré qu’il n’était pas logique de sou­te­nir qu’elle cher­chait un code pour dis­si­mu­ler son nom d’utilisateur et son mot de passe, alors qu’il n’y avait pas de nom d’utilisateur et de mot de passe. Barait­ser a répon­du à nou­veau qu’il ne pou­vait pas le prou­ver. C’est à ce moment que Sum­mers est deve­nu quelque peu irri­table avec Barait­ser, et a énu­mé­ré de nou­veau les preuves pré­sen­tées à la cour martiale.

Barait­ser a éga­le­ment fait remar­quer que même si Assange aidait Man­ning à cra­quer un code d’administrateur, même si cela ne lui per­met­tait pas d’accéder à d’autres bases de don­nées, il s’agissait tou­jours d’une uti­li­sa­tion non auto­ri­sée et cela consti­tue­rait le crime de com­pli­ci­té d’utilisation abu­sive d’un ordi­na­teur, même si dans un but innocent.

Après une brève pause, Barait­ser est reve­nue avec quelques bien bonnes. Elle a dit à Sum­mers qu’il avait pré­sen­té les conclu­sions de la cour mar­tiale amé­ri­caine de Chel­sea Man­ning comme des faits. Mais elle n’était pas d’accord avec le fait que son tri­bu­nal devait consi­dé­rer les preuves pré­sen­tées devant une cour mar­tiale amé­ri­caine, même les preuves agréées ou non contes­tées ou les preuves de l’accusation, comme des faits. Sum­mers a répon­du que les preuves conve­nues ou les preuves à charge devant la cour mar­tiale amé­ri­caine étaient clai­re­ment consi­dé­rées comme des faits par le gou­ver­ne­ment amé­ri­cain, et que la ques­tion était de savoir si le gou­ver­ne­ment amé­ri­cain lan­cait de fausses accu­sa­tions en toute connais­sance de cause. Barait­ser a décla­ré qu’elle revien­drait sur ce point une fois les témoins entendus.

Barait­ser ne cher­chait pas à dis­si­mu­ler son hos­ti­li­té envers l’argument de la défense, et sem­blait irri­tée qu’ils aient eu la témé­ri­té de le for­mu­ler. Cela paru évident lors de la dis­cus­sion sur le point c), les règles d’engagement de la guerre en Irak. Sum­mers a fait valoir que celles-ci n’avaient pas été sol­li­ci­tées auprès de Man­ning, mais qu’elles avaient plu­tôt été four­nies par Man­ning dans un dos­sier d’accompagnement avec la vidéo Col­la­te­ral Mur­der qui mon­trait le meurtre d’enfants et de jour­na­listes de Reu­ters. L’objectif de Man­ning, comme elle l’a décla­ré lors de sa cour mar­tiale, était de mon­trer que les actions visibles dans Col­la­te­ral Mur­der vio­laient les règles d’engagement, même si le minis­tère de la défense affir­mait le contraire. Sum­mers a décla­ré qu’en n’incluant pas ce contexte, la demande d’extradition amé­ri­caine ten­tait déli­bé­ré­ment de trom­per car elle ne men­tion­nait même pas du tout la vidéo Col­la­te­ral Murder.

À ce stade, Barait­ser ne pou­vait pas dis­si­mu­ler son mépris. (…) Ceci une cita­tion littérale :

« Sug­­gé­­rez-vous, M. Sum­mers, que les auto­ri­tés, le gou­ver­ne­ment, devraient four­nir le contexte de leurs accusations ? »

Un Sum­mers infa­ti­gable a répon­du par l’affirmative et a ensuite mon­tré où la Cour suprême l’avait dit dans d’autres affaires d’extradition. Barait­ser sem­blait tota­le­ment per­due devant l’idée qu’on pou­vait pré­tendre faire une dis­tinc­tion entre le gou­ver­ne­ment et Dieu.

L’essentiel de l’argumentation de Sum­mers consis­tait à réfu­ter le com­por­te­ment 3), la mise en dan­ger de vies. Cela n’a été reven­di­qué qu’en rela­tion avec les élé­ments a) et d). Sum­mers a lon­gue­ment décrit les efforts déployés par Wiki­leaks avec ses par­te­naires média­tiques pen­dant plus d’un an pour mettre en place une cam­pagne de rédac­tion mas­sive sur les câbles. Il a expli­qué que les câbles non expur­gés n’ont été dis­po­nibles qu’après que Luke Har­ding et David Leigh du Guar­dian aient publié le mot de passe de l’archive en tête du cha­pitre XI de leur livre sur Wiki­leaks, publié en février 2011.

Per­sonne n’avait n’avait fait le rap­pro­che­ment avec le mot de passe jusqu’à ce que la publi­ca­tion alle­mande Die Frei­tag le fasse et annonce en aout 2011 qu’elle avait toutes les câbles non expur­gés. Sum­mers a ensuite pré­sen­té les argu­ments les plus per­cu­tants de la journée.

Le gou­ver­ne­ment amé­ri­cain avait par­ti­ci­pé acti­ve­ment à l’exercice de rédac­tion des câbles. Ils savaient donc que les allé­ga­tions de publi­ca­tion impru­dente étaient fausses.

Une fois que Die Frei­tag a annon­cé qu’ils avaient les docu­ments non expur­gés, Julian Assange et Sara Har­ri­son ont immé­dia­te­ment télé­pho­né à la Mai­son Blanche, au Dépar­te­ment d’Etat et à l’Ambassade des Etats-Unis pour les aver­tir que les sources nom­mées pou­vaient être mises en dan­ger. Sum­mers a lu les trans­crip­tions des conver­sa­tions télé­pho­niques alors qu’Assange et Har­ri­son ten­taient de convaincre les res­pon­sables amé­ri­cains de l’urgence d’activer les pro­cé­dures de pro­tec­tion des sources – et ont expri­mé leur per­plexi­té face à l’obstruction des res­pon­sables. Ces preuves ont com­plè­te­ment miné le dos­sier du gou­ver­ne­ment amé­ri­cain et ont prou­vé la mau­vaise foi en omet­tant des faits extrê­me­ment per­ti­nents. Ce fut un moment très frappant.

En ce qui concerne le même com­por­te­ment 3) sur les docu­ments d), Sum­mers a mon­tré que la cour mar­tiale de Man­ning avait admis que ces docu­ments ne contiennent pas de noms de sources en dan­ger, mais a mon­tré que Wiki­leaks avait de toute façon acti­vé un exer­cice de rédac­tion pour une approche « cein­ture et bre­telles ». La défense a dit bien plus.

Pour l’accusation, James Lewis a indi­qué qu’il répon­drait de manière appro­fon­die plus tard dans la pro­cé­dure, mais a sou­hai­té décla­rer que l’accusation n’accepte pas les preuves de la cour mar­tiale comme des faits, et en par­ti­cu­lier n’accepte aucun des témoi­gnages « égoïstes » de Chel­sea Man­ning, qu’il a dépeint comme un cri­mi­nel condam­né se pré­va­lant à tort de nobles motifs. L’accusation a géné­ra­le­ment reje­té toute idée selon laquelle cette cour devrait exa­mi­ner la véri­té ou les faits car ceux-ci ne pou­vaient être déci­dés que lors d’un pro­cès aux États-Unis.

Ensuite, pour conclure la pro­cé­dure, Barait­ser a lan­cé une bombe. Elle a décla­ré que bien que l’article 4.1 du trai­té d’extradition entre les États-Unis et le Royaume-Uni inter­dise les extra­di­tions poli­tiques, cela ne figure que dans le trai­té. Cette exemp­tion n’apparaît pas dans la loi bri­tan­nique sur l’extradition. À pre­mière vue, l’extradition poli­tique n’est donc pas illé­gale au Royaume-Uni, car le trai­té n’a pas de force juri­dique devant la Cour. Elle a invi­té la défense à abor­der cet argu­ment dans la mati­née.
Il est main­te­nant 6h35 et je suis en retard pour com­men­cer à faire la queue…

Avec nos remer­cie­ments à ceux qui ont fait des dons ou qui se sont ins­crits pour rendre ce repor­tage possible.

Cet article est entiè­re­ment libre de repro­duc­tion et de publi­ca­tion, y com­pris en tra­duc­tion, et j’espère vive­ment que les gens le feront acti­ve­ment. La véri­té nous ren­dra libres.

Craig Mur­ray

tra­duc­tion « avec une envie de ger­ber » par VD pour le Grand Soir avec pro­ba­ble­ment toutes les fautes et coquilles habituelles

Source : Le Grand Soir, Vik­tor Dedaj,
https://​www​.legrand​soir​.info/​c​o​m​p​t​e​–​r​e​n​d​u​–​d​u​–​p​r​o​c​e​s​–​a​s​s​a​n​g​e​–​2​e​m​e​–​j​o​u​r​.​h​tml

Fil Face­book cor­res­pon­dant à ce billet :

https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=10157944718602317&id=600922316

[IMPORTANT et révoltant. Naufrage de la justice anglaise. Procès truqué du journalisme] Compte-rendu du Procès Assange à Londres, 1er jour (lundi 24 fév 2020), par Craig MURRAY

JulianAssange Belmarsh 24 fevrier 2020Source : Vik­tor Dedaj, Le Grand Soir, https://​www​.legrand​soir​.info/​c​o​m​p​t​e​–​r​e​n​d​u​–​d​u​–​p​r​o​c​e​s​–​a​s​s​a​n​g​e​–​1​e​r​–​j​o​u​r​.​h​tml

Wool­wich Crown Court est conçu pour impo­ser le pou­voir de l’État. Les tri­bu­naux nor­maux de ce pays sont des bâti­ments publics, déli­bé­ré­ment pla­cés par nos ancêtres en plein centre-villes, presque tou­jours à proxi­mi­té d’une rue prin­ci­pale. Le but prin­ci­pal de leur posi­tion­ne­ment et de leur archi­tec­ture était de faci­li­ter l’accès au public, avec la convic­tion qu’il est vital que la jus­tice soit visible par le public.

Wool­wich Crown Court, qui accueille le Bel­marsh Magis­trates Court, est construit sur un prin­cipe tota­le­ment oppo­sé. Il n’a pas d’autre but que d’exclure le public. Rat­ta­ché à une pri­son située dans un marais balayé par les vents, loin de tout centre social nor­mal, une île acces­sible uni­que­ment en navi­guant dans un laby­rinthe de routes à double voie, tout l’emplacement et l’architecture du bâti­ment sont pen­sés pour décou­ra­ger l’accès au public. Il est entou­ré par la même bar­rière de palis­sage en acier extrê­me­ment résis­tant qui cein­ture la pri­son. C’est une chose extra­or­di­naire, un palais de jus­tice qui fait par­tie du sys­tème car­cé­ral lui-même, un lieu où l’on est déjà consi­dé­ré comme cou­pable et incar­cé­ré dès son arri­vée. Le Wool­wich Crown Court n’est rien d’autre que la néga­tion phy­sique de la pré­somp­tion d’innocence, l’incarnation même de l’injustice cou­lée dans du béton, de l’acier, et des vitres blin­dées. Il a pré­ci­sé­ment la même rela­tion à la jus­tice que Guan­ta­na­mo Bay ou la Lubyan­ka. Il n’est en réa­li­té que l’aile de condam­na­tions de la pri­son de Belmarsh.

Lorsqu’il s’est ren­sei­gné sur les pos­si­bi­li­tés de par­ti­ci­pa­tion du public à l’audience, un mili­tant d’Assange s’est fait dire par un membre du per­son­nel du tri­bu­nal que nous devrions nous rendre compte que Wool­wich est un « tri­bu­nal anti­ter­ro­riste ». C’est vrai de fac­to, mais en réa­li­té, un « tri­bu­nal anti­ter­ro­riste » est une ins­ti­tu­tion incon­nue de la consti­tu­tion bri­tan­nique. En effet, il suf­fit de pas­ser une seule jour­née pas­sée au tri­bu­nal de la Cou­ronne de Wool­wich pour se rendre à l’évidence que la démo­cra­tie libé­rale est désor­mais un mensonge.

Les audiences d’extradition ne se tiennent pas à la Magis­trates Court de Bel­marsh, au sein de la Wool­wich Crown Court. Elles ont tou­jours lieu à la Magis­trates Court de West­mins­ter, car la demande est répu­tée avoir été remise au gou­ver­ne­ment à West­mins­ter. A vous de tirer les conclu­sions. Cette audience se tient à la West­mins­ter Magis­trates Court. Elle est tenue par les magis­trats de West­mins­ter et le per­son­nel de la cour de West­mins­ter, mais elle se déroule à la Magis­trates Court de Bel­marsh, à l’intérieur de la Crown Court de Wool­wich. Cette étrange convo­lu­tion a pré­ci­sé­ment pour but de leur per­mettre d’utiliser la « cour anti­ter­ro­riste » pour limi­ter l’accès au public et impo­ser la peur du pou­voir de l’État.

L’une des consé­quences est que, dans la salle d’audience elle-même, Julian Assange est confi­né au fond du tri­bu­nal der­rière un écran de verre pare-balles. Il a fait remar­quer à plu­sieurs reprises au cours de la pro­cé­dure qu’il lui était ain­si très dif­fi­cile de voir et d’entendre les débats. La magis­trate, Vanes­sa Barait­ser, a choi­si d’interpréter cela, avec une mal­hon­nê­te­té étu­diée, comme un pro­blème dû au très faible bruit des mani­fes­tants à l’extérieur (160 gilets jaunes venus de France dans la nuit], par oppo­si­tion à un pro­blème cau­sé par le fait qu’Assange est enfer­mé à l’écart dans une énorme boîte de verre pare-balles.

Or, il n’y a aucune rai­son pour qu’Assange se trouve dans cette boîte, conçue pour conte­nir des ter­ro­ristes extrê­me­ment vio­lents phy­si­que­ment. Il pour­rait sié­ger, comme le ferait nor­ma­le­ment un accu­sé à une audience, au sein du tri­bu­nal à côté de ses avo­cats. Mais la lâche et vicieuse Barait­ser a refu­sé les demandes répé­tées et per­sis­tantes de la défense pour qu’Assange soit auto­ri­sé à s’asseoir avec ses avo­cats. Barait­ser n’est bien sûr qu’une marion­nette, étant super­vi­sée par la magis­trate en chef Lady Arbuth­not, une femme tel­le­ment imbri­quée dans l’establishment des ser­vices de défense et de sécu­ri­té que son impli­ca­tion dans cette affaire ne pour­rait être plus corrompue.

Peu importe à Barait­ser ou Arbuth­not s’il est vrai­ment néces­saire d’incarcérer Assange dans une cage pare-balles, ou si cela l’empêche de suivre la pro­cé­dure judi­ciaire. L’intention de Barait­ser est d’humilier Assange, et de nous ins­pi­rer de l’horreur face à l’énorme pou­voir d’écrasement de l’État. La force inexo­rable de l’aile des condam­na­tions de la cau­che­mar­desque pri­son de Bel­marsh doit être affir­mée. Si vous êtes ici, c’est que vous êtes coupable.

C’est la Lubyan­ka. Vous ne pou­vez être qu’un pri­son­nier en déten­tion pré­ven­tive. Il ne peut s’agir que d’une audience, pas d’un pro­cès. Vous pou­vez n’avoir aucun anté­cé­dent de vio­lence et ne pas être accu­sé de vio­lence. Vous pou­vez avoir trois des plus émi­nents psy­chiatres du pays qui sou­mettent des rap­ports sur vos anté­cé­dents de dépres­sion cli­nique sévère et qui aver­tissent d’un risque de sui­cide. Mais moi, Vanes­sa Barait­ser, je vais quand même vous enfer­mer dans une boîte conçue pour le plus violent des ter­ro­ristes. Pour mon­trer ce que nous pou­vons faire aux dis­si­dents. Et si vous ne pou­vez pas suivre les pro­cé­dures judi­ciaires, tant mieux.

Vous accep­te­rez peut-être mieux ce que je dis de la Cour si je vous dis que, pour une audience sui­vie dans le monde entier, ils ont déci­dé de la tenir dans une salle d’audience qui a un nombre total de seize sièges dis­po­nibles pour les membres du public. 16. Pour être sûr d’avoir l’une de ces seize places et de pou­voir être votre témoin, je me suis pré­sen­té à l’extérieur de cette grande clô­ture de fer cade­nas­sée, à faire la queue dans le froid, l’humidité et le vent dès 6 heures du matin. À 8 heures, la porte a été déver­rouillée et j’ai pu entrer dans la clô­ture pour faire une autre queue devant la salle d’audience, où, mal­gré le fait que des avis indiquent clai­re­ment que la cour est ouverte au public à 8 heures, j’ai dû faire la queue à l’extérieur du bâti­ment pen­dant encore une heure et qua­rante minutes. Ensuite, j’ai dû pas­ser par des sas blin­dés, une sécu­ri­té de type aéro­port, et faire de nou­veau la queue der­rière deux autres portes ver­rouillées, avant d’arriver enfin à mon siège au moment où le tri­bu­nal com­men­çait à 10 heures. À ce stade, nous aurions dû être com­plè­te­ment inti­mi­dés, sans par­ler du fait d’être trem­pés et de ris­quer l’hypothermie.

Il y avait une entrée sépa­rée pour les médias et une salle de presse avec retrans­mis­sion en direct des débats dans la salle d’audience, et il y avait tel­le­ment de médias que j’ai pen­sé pou­voir me détendre et ne pas m’inquiéter car les faits le plus élé­men­taire allaient être lar­ge­ment dif­fu­sés. Gros­sière erreur. J’ai sui­vi les argu­ments très atten­ti­ve­ment à chaque minute de la jour­née, et pas un seul des faits et argu­ments les plus impor­tants aujourd’hui n’a été rap­por­té dans les médias grand public. C’est une affir­ma­tion auda­cieuse, mais je crains qu’elle ne soit par­fai­te­ment vraie. J’ai donc beau­coup de tra­vail à faire pour que le monde sache ce qui s’est réel­le­ment pas­sé. Le simple fait d’être un témoin hon­nête est sou­dain extrê­me­ment impor­tant, alors que l’ensemble des médias ont aban­don­né ce rôle.

James Lewis a fait la décla­ra­tion d’ouverture pour l’accusation. Elle était com­po­sée de deux par­ties, aus­si extra­or­di­naires l’une que l’autre. La pre­mière par­tie, la plus longue, était vrai­ment remar­quable car elle ne conte­nait aucun argu­ment juri­dique et s’adressait non pas au magis­trat mais aux médias. Il n’était pas seule­ment évident que c’était à eux que ses remarques étaient des­ti­nées, il a en fait décla­ré à deux reprises au cours de sa décla­ra­tion d’ouverture qu’il s’adressait aux médias, une fois en répé­tant une phrase et en disant spé­ci­fi­que­ment qu’il la répé­tait à nou­veau parce qu’il était impor­tant que les médias comprennent.

Je suis fran­che­ment éton­né que Barait­ser ait per­mis cela. Il est tout à fait inad­mis­sible qu’un avo­cat adresse des remarques non pas à la cour mais aux médias, et il ne pour­rait y avoir de preuve plus claire qu’il s’agit d’un pro­cès poli­tique à grand spec­tacle et que Barait­ser en est com­plice. Je n’ai pas le moindre doute que la défense aurait été arrê­tée très rapi­de­ment si elle avait com­men­cé à adres­ser des remarques aux médias. Barait­ser ne pré­tend nul­le­ment être autre chose qu’une marion­nette de la Cou­ronne, et par exten­sion du gou­ver­ne­ment américain.

Les points que Lewis sou­hai­tait faire connaître aux médias étaient les sui­vants : il n’est pas vrai que les grands médias comme le Guar­dian et le New York Times sont éga­le­ment mena­cés par les accu­sa­tions por­tées contre Assange, car ce der­nier n’était pas accu­sé d’avoir publié les câbles, mais seule­ment d’avoir publié les noms des infor­ma­teurs, et d’avoir encou­ra­gé Man­ning et de l’avoir aidée à ten­ter de pira­ter les ordi­na­teurs. Seul Assange avait fait ces choses, et non les grands médias.

Lewis a ensuite lu une série d’articles des grands médias atta­quant Assange, comme preuve que les médias et Assange n’étaient pas dans le même bateau. Pen­dant toute une heure, l’accusation s’est adres­sée aux médias pour ten­ter de creu­ser un fos­sé entre les médias et Wiki­leaks et ain­si réduire leur sou­tien à Assange. Il s’agissait d’un dis­cours poli­tique, et non d’une simple sou­mis­sion juri­dique. En même temps, l’accusation avait pré­pa­ré des copies de cette par­tie de l’intervention de Lewis, qui ont été dis­tri­buées aux médias et trans­mises élec­tro­ni­que­ment pour qu’ils puissent les copier-coller.

Après un ajour­ne­ment, la magis­trate Barait­ser a inter­ro­gé l’accusation sur la véra­ci­té de cer­taines de ces affir­ma­tions. En par­ti­cu­lier, l’affirmation selon laquelle les jour­naux ne se trou­vaient pas dans la même situa­tion parce qu’Assange était accu­sé non pas de publier, mais d’avoir « aidé et encou­ra­gé » Chel­sea Man­ning à obte­nir le maté­riel, ne sem­blait pas cohé­rente avec la lec­ture que fai­sait Lewis de la loi de 1989 sur les secrets offi­ciels, selon laquelle le simple fait d’obtenir et de publier un secret gou­ver­ne­men­tal consti­tue une infrac­tion. Cela signi­fiait cer­tai­ne­ment, selon Barait­ser, que les jour­naux qui se contentent de publier les fuites de Man­ning seraient aus­si cou­pables d’un délit.

Lewis a paru com­plè­te­ment pris au dépour­vu. La der­nière chose à laquelle il s’attendait, c’était la pers­pi­ca­ci­té de Barait­ser, dont le tra­vail consis­tait sim­ple­ment à faire ce qu’il disait [dont la mis­sion conve­nue était seule­ment de lui obéir. ÉC]. Lewis a grom­me­lé, bafouillé, enle­vé et remis ses lunettes plu­sieurs fois, ajus­té son micro­phone à plu­sieurs reprises et a ramas­sé une suc­ces­sion de mor­ceaux de papier dans son dos­sier, cha­cun sem­blant le sur­prendre par son conte­nu, alors qu’il les agi­tait en l’air d’un air mal­heu­reux et disait qu’il aurait vrai­ment dû citer l’affaire Shay­ler mais qu’il ne la trou­vait pas. C’était comme regar­der un épi­sode (du feuille­ton) Colum­bo mais sans le charme et sans la ques­tion qui tue à la fin.

Sou­dain, Lewis a sem­blé prendre une déci­sion. Oui, a‑t‑il dit d’une voix beau­coup plus ferme. La loi de 1989 sur les secrets offi­ciels avait été intro­duite par le gou­ver­ne­ment That­cher après l’affaire Pon­ting, pré­ci­sé­ment pour éli­mi­ner la défense d’intérêt public et faire de la pos­ses­sion non auto­ri­sée d’un secret offi­ciel un crime de res­pon­sa­bi­li­té stricte – ce qui signi­fie que peu importe com­ment vous l’avez obte­nu, le fait de le publier et même de le pos­sé­der vous ren­dait cou­pable. Par consé­quent, en ver­tu du prin­cipe de la double incri­mi­na­tion, Assange était pas­sible d’extradition, qu’il ait ou non aidé et encou­ra­gé Man­ning. Lewis a ensuite ajou­té que tout jour­na­liste et toute publi­ca­tion qui publie­rait le secret offi­ciel com­met­trait donc éga­le­ment une infrac­tion, quelle que soit la manière dont il l’aurait obte­nu, qu’il ait ou non nom­mé des informateurs.

Lewis venait ain­si de contre­dire car­ré­ment toute sa décla­ra­tion d’ouverture aux médias en décla­rant qu’ils n’avaient pas à s’inquiéter puisque les accu­sa­tions d’Assange ne pou­vaient jamais leur être appli­quées. Et il l’a fait immé­dia­te­ment après l’ajournement, juste après que son équipe ait dis­tri­bué des copies de l’argumentation qu’il venait de contre­dire. Je ne peux pas croire qu’il soit sou­vent arri­vé au tri­bu­nal qu’un avo­cat che­vron­né se révèle de façon si évi­dente et si vite être un men­teur invé­té­ré et peu moti­vé. Ce fut sans aucun doute le moment le plus épous­tou­flant de l’audience d’aujourd’hui.

Pour­tant, il est remar­quable que je ne trouve nulle part dans les médias grand public la moindre men­tion de ce qui s’est pas­sé. Ce que je peux trou­ver, par­tout, c’est que les médias grand public rap­portent, par le biais du copier-col­­ler, la pre­mière par­tie de la décla­ra­tion de Lewis sur les rai­sons pour les­quelles l’accusation d’Assange ne consti­tue pas une menace pour la liber­té de la presse ; mais per­sonne ne semble avoir rap­por­té qu’il a tota­le­ment aban­don­né son propre argu­ment cinq minutes plus tard. Les jour­na­listes étaient-ils trop stu­pides pour com­prendre les échanges ?

L’explication est très simple. La cla­ri­fi­ca­tion pro­ve­nant d’une ques­tion que Barait­ser a posée à Lewis, il n’y a pas d’enregistrement impri­mé ou élec­tro­nique de la réponse de Lewis. Sa décla­ra­tion ori­gi­nale a été four­nie aux médias sous forme de copier-col­­ler. Sa contra­dic­tion exi­ge­rait qu’un jour­na­liste écoute ce qui a été dit au tri­bu­nal, le com­prenne et l’écrive. De nos jours, aucun pour­cen­tage signi­fi­ca­tif de jour­na­listes des médias grand public ne maî­trise cette capa­ci­té élé­men­taire. Le « jour­na­lisme » consiste à cou­per et col­ler uni­que­ment des sources approu­vées. Lewis aurait pu poi­gnar­der Assange à mort dans la salle d’audience, et cela n’aurait pas été rap­por­té à moins de figu­rer dans un com­mu­ni­qué de presse du gouvernement.

Je n’étais pas sûr de l’objectif de Barait­ser dans cette affaire. Il est clair qu’elle a très mal trai­té Lewis sur ce point, et sem­blait plu­tôt appré­cier de le faire. D’un autre côté, le point qu’elle a sou­le­vé n’est pas néces­sai­re­ment utile à la défense. Ce qu’elle a dit, c’est essen­tiel­le­ment que Julian pou­vait être extra­dé en ver­tu de la double incri­mi­na­tion, du point de vue bri­tan­nique, uni­que­ment pour avoir publié, qu’il ait ou non conspi­ré avec Chel­sea Man­ning, et que tous les jour­na­listes qui ont publié pou­vaient être incul­pés éga­le­ment. Mais ce point est cer­tai­ne­ment si extrême qu’il serait for­cé­ment inva­lide en ver­tu de la loi sur les droits de l’homme. A‑t‑elle pous­sé Lewis à for­mu­ler une posi­tion si extrême qu’elle serait inte­nable – en lui don­nant assez de corde pour se pendre – ou a‑t‑elle ali­men­té l’idée de non seule­ment extra­der Assange, mais aus­si de pour­suivre en masse les journalistes ?

La réac­tion d’un cer­tain groupe a été très inté­res­sante. Les quatre avo­cats du gou­ver­ne­ment amé­ri­cain assis juste der­rière Lewis ont eu la grâce de paraître très mal à l’aise, car Lewis a décla­ré sans ambages que tout jour­na­liste et tout jour­nal ou média qui publiait ou même pos­sé­dait un secret gou­ver­ne­men­tal com­met­tait un délit grave. Toute leur stra­té­gie avait consis­té à faire sem­blant de dire le contraire.

Lewis est ensuite pas­sé à la conclu­sion des argu­ments de l’accusation. Le tri­bu­nal n’avait aucune déci­sion à prendre, a‑t‑il décla­ré. Assange doit être extra­dé. L’infraction répon­dait au cri­tère de la double incri­mi­na­tion puisqu’il s’agissait d’un délit à la fois aux États-Unis et au Royaume-Uni. La loi bri­tan­nique sur l’extradition inter­dit expres­sé­ment au tri­bu­nal de véri­fier s’il existe des preuves à l’appui des accu­sa­tions. S’il y avait eu, comme l’a fait valoir la défense, un abus de pro­cé­dure, le tri­bu­nal devait quand même pro­cé­der à l’extradition et exa­mi­ner l’abus de pro­cé­dure comme une affaire dis­tincte. (Cet argu­ment est par­ti­cu­liè­re­ment spé­cieux car il n’est pas pos­sible pour le tri­bu­nal d’engager une action contre le gou­ver­ne­ment amé­ri­cain en rai­son de l’immunité sou­ve­raine, comme Lewis le sait bien). Enfin, Lewis a décla­ré que la loi sur les droits de l’homme et la liber­té d’expression n’étaient abso­lu­ment pas per­ti­nentes dans les pro­cé­dures d’extradition.

Edward Fitz­ge­rald s’est ensuite levé pour faire la décla­ra­tion d’ouverture pour la défense. Il a com­men­cé par décla­rer que le motif de l’accusation était entiè­re­ment poli­tique, et que les infrac­tions poli­tiques étaient spé­ci­fi­que­ment exclues en ver­tu de l’article 4.1 du trai­té d’extradition entre le Royaume-Uni et les États-Unis. Il a sou­li­gné qu’au moment du pro­cès de Chel­sea Man­ning et de nou­veau en 2013, l’administration Oba­ma avait pris des déci­sions spé­ci­fiques de ne pas pour­suivre Assange pour les fuites de Man­ning. Cette déci­sion a été annu­lée par l’administration Trump pour des rai­sons entiè­re­ment politiques.

Concer­nant l’abus de pro­cé­dure, M. Fitz­ge­rald a fait réfé­rence aux preuves pré­sen­tées devant les tri­bu­naux pénaux espa­gnols selon les­quelles la CIA avait char­gé une socié­té de sécu­ri­té espa­gnole d’espionner Julian Assange à l’ambassade, et que cet espion­nage com­pre­nait spé­ci­fi­que­ment la sur­veillance des réunions pri­vi­lé­giées d’Assange avec ses avo­cats pour dis­cu­ter de son extra­di­tion. Que l’État qui demande l’extradition espionne les consul­ta­tions client-avo­­cat de l’accusé est en soi un motif de rejet de l’affaire. (Ce point est sans aucun doute vrai. Tout juge digne de ce nom rejet­te­rait som­mai­re­ment l’affaire pour cause d’espionnage scan­da­leux des avo­cats de la défense).

Fitz­ge­rald a pour­sui­vi en disant que la défense pré­sen­te­rait des preuves que la CIA a non seule­ment espion­né Assange et ses avo­cats, mais qu’elle a acti­ve­ment envi­sa­gé de l’enlever ou de l’empoisonner, et que cela mon­trait qu’il n’y avait aucun enga­ge­ment en faveur d’un véri­table État de droit dans cette affaire.

Fitz­ge­rald a décla­ré que l’accusation avait déli­bé­ré­ment défor­mé les faits, ce qui consti­tuait éga­le­ment un abus de pro­cé­dure. Il n’est pas vrai qu’il existe des preuves de pré­ju­dice cau­sé aux infor­ma­teurs, et le gou­ver­ne­ment amé­ri­cain l’a confir­mé à d’autres occa­sions, par exemple lors du pro­cès de Chel­sea Man­ning. Il n’y a pas eu de com­plot pour pira­ter des ordi­na­teurs et Chel­sea Man­ning a été acquit­tée de cette accu­sa­tion devant la cour mar­tiale. Enfin, il est faux que Wiki­leaks soit à l’origine de la publi­ca­tion de noms d’informateurs, car d’autres orga­ni­sa­tions de médias l’avaient déjà fait avant.

Encore une fois, pour autant que je sache, si l’allégation amé­ri­caine de pré­ju­dice aux infor­ma­teurs a été lar­ge­ment dif­fu­sée, la réfu­ta­tion totale de la défense sur les faits et l’affirmation selon laquelle la fabri­ca­tion de faits équi­vaut à un abus de pro­cé­dure n’ont pas du tout été rapportées.

Fitz­ge­rald a enfin évo­qué les condi­tions de déten­tion aux États-Unis, l’impossibilité d’un pro­cès équi­table aux États-Unis et le fait que l’administration Trump a décla­ré que les res­sor­tis­sants étran­gers ne béné­fi­cie­ront pas des pro­tec­tions du pre­mier amen­de­ment, comme autant de rai­sons pour les­quelles l’extradition doit être refu­sée. Vous pou­vez lire toute la décla­ra­tion de la défense ci-des­­sous, mais à mon avis, le pas­sage le plus fort a por­té sur les rai­sons pour les­quelles il s’agit d’un pro­cès poli­tique, ce qui inter­dit l’extradition.

Aux fins de l’article 81(a), je dois ensuite abor­der la ques­tion de savoir com­ment cette pour­suite à moti­va­tion poli­tique satis­fait au cri­tère d’être diri­gée contre Julian Assange à cause de ses opi­nions poli­tiques. L’essence de ses opi­nions poli­tiques qui ont pro­vo­qué ces pour­suites sont résu­mées dans les rap­ports du pro­fes­seur Feld­stein [pièce 18], du pro­fes­seur Rogers [pièce 40], du pro­fes­seur Noam Chom­sky [pièce 39] et le pro­fes­seur Kopelman :

i. Il est l’un des prin­ci­paux par­ti­sans d’une socié­té ouverte et de la liber­té d’expression.

ii. Il est anti-guerre et anti-impérialiste.

iii. Il est un cham­pion de renom­mée mon­diale de la trans­pa­rence poli­tique et du droit du public à l’information sur des ques­tions impor­tantes – des ques­tions telles que la cor­rup­tion poli­tique, les crimes de guerre, la tor­ture et les mau­vais trai­te­ments des déte­nus à Guantanamo.

5.4 Ces croyances et ces actions le mettent inévi­ta­ble­ment en conflit avec des États puis­sants, y com­pris l’actuelle admi­nis­tra­tion amé­ri­caine, pour des rai­sons poli­tiques. Ce qui explique pour­quoi il a été dénon­cé comme ter­ro­riste et pour­quoi le pré­sident Trump a, par le pas­sé, récla­mé la peine de mort.

5.5 Mais je dois ajou­ter que ses révé­la­tions sont loin de se limi­ter aux méfaits des États-Unis. Il a dénon­cé la sur­veillance exer­cée par la Rus­sie et a publié des articles sur M. Assad en Syrie ; et on dit que les révé­la­tions de Wiki­Leaks sur la cor­rup­tion en Tuni­sie et la tor­ture en Égypte ont été le cata­ly­seur du prin­temps arabe lui-même.

5.6 Les États-Unis affirment qu’il n’est pas jour­na­liste. Mais vous trou­ve­rez un compte-ren­­du com­plet de son tra­vail dans le dos­sier M. Il est membre du syn­di­cat des jour­na­listes aus­tra­liens depuis 2009, il est membre de la NUJ et de la Fédé­ra­tion euro­péenne de jour­na­listes. Il a rem­por­té de nom­breux prix dans le domaine des médias, notam­ment la plus haute dis­tinc­tion pour les jour­na­listes aus­tra­liens. Son tra­vail a été recon­nu par The Éco­no­miste, Amnes­ty Inter­na­tio­nal et le Conseil de l’Europe. Il est le lau­réat du prix Mar­tha Gel­horn et a été nomi­né à plu­sieurs reprises pour le prix Nobel Prix de la paix, y com­pris l’année der­nière et cette année. Vous pou­vez voir qu’il a écrit des livres, des articles et des docu­men­taires. Il a eu des articles publiés dans le Guar­dian, le New York Times, le Washing­ton Post et le New Sta­tes­man, pour n’en citer que quelques-uns. Cer­taines des publi­ca­tions pour les­quelles l’extradition est deman­dée ont été évo­quées et invo­quées dans les tri­bu­naux du monde entier, y com­pris la Cour Suprême du Royaume-Uni et la Cour euro­péenne des droits de l’homme. En bref, il a défen­du la cause de la trans­pa­rence et la liber­té d’information dans le monde entier.

5.7. Le pro­fes­seur Noam Chom­sky s’exprime ain­si : – « en sou­te­nant cou­ra­geu­se­ment des opi­nions poli­tiques que la plu­part des per­sonnes déclarent par­ta­ger, il a ren­du un énorme ser­vice à tous ceux qui, dans le monde, ché­rissent les valeurs de la liber­té et la démo­cra­tie et qui réclament donc le droit de savoir ce que font leurs repré­sen­tants élus » [voir onglet 39, para­graphe 14].

L’impact posi­tif de Julian Assange sur le monde est donc indé­niable. L’hostilité qu’il a pro­vo­qué de la part de l’administration Trump est tout aus­si indéniable.

Le test juri­dique pour les « opi­nions politiques »

5.8. Je suis sûr que vous connais­sez les stan­dards en la matière, à savoir si une demande est faite en rai­son des opi­nions poli­tiques de l’accusé. Une approche large doit être adop­tée lors de l’application du test. Pour ce faire, nous nous appuyons sur l’affaire Re Asli­turk [2002] EWHC 2326 (auto­ri­tés char­gées des abus, onglet 11, para­graphes 25 – 26) qui éta­blit clai­re­ment qu’une approche aus­si large devrait être appli­quée au concept d’opinions poli­tiques. Et cela cou­vri­ra clai­re­ment les posi­tions idéo­lo­giques d’Assange. En outre, nous nous appuyons éga­le­ment sur des cas tels que Emi­lia Gomez contre SSHD [2000] INLR 549, onglet 43 du dos­sier infrac­tion poli­tique des auto­ri­tés. Celles-ci montrent que la notion d’« opi­nions poli­tiques » s’étend aux opi­nions poli­tiques impu­tées au citoyen par l’État qui le pour­suit. C’est pour­quoi la carac­té­ri­sa­tion de Julian Assange et Wiki­Leaks en tant qu’« agence de ren­sei­gne­ment hos­tile non éta­tique » par M. Pom­peo éta­blit clai­re­ment qu’il a été ciblé pour ses opi­nions poli­tiques. Tous les les experts dont vous avez les rap­ports montrent que Julian Assange a été pris pour cible en rai­son de la posi­tion poli­tique qui lui a été attri­buée par l’administration Trump – comme un enne­mi de l’Amérique qui doit tomber.

Demain, la défense pour­sui­vra. Je ne sais vrai­ment pas ce qui va se pas­ser car je me sens pour l’instant bien trop épui­sé pour être pré­sent dès 6 heures du matin et faire la queue pour entrer. Mais j’espère que d’une manière ou d’une autre, j’arriverai à rédi­ger un autre rap­port demain soir.

Je remer­cie vive­ment ceux qui ont fait des dons ou qui se sont ins­crits pour rendre ce rap­port possible.

Cet article est entiè­re­ment libre de repro­duc­tion et de publi­ca­tion, y com­pris en tra­duc­tion, et j’espère vive­ment que les gens le feront acti­ve­ment. La véri­té nous ren­dra libres.

Craig Mur­ray

Tra­duc­tion « avec plai­sir, M. Mur­ray » par VD pour le Grand Soir avec pro­ba­ble­ment toutes les fautes et coquilles habituelles

»» https://​www​.craig​mur​ray​.org​.uk/​a​r​c​h​i​v​e​s​/​2​0​2​0​/​0​2​/​y​o​u​r​–​m​a​n​–​i​n​–​t​h​e​–​p​u​b​lic…

Source : Vik­tor Dedaj, Le Grand Soir,
https://​www​.legrand​soir​.info/​c​o​m​p​t​e​–​r​e​n​d​u​–​d​u​–​p​r​o​c​e​s​–​a​s​s​a​n​g​e​–​1​e​r​–​j​o​u​r​.​h​tml

« Chapeau !» : le père de Julian Assange remercie ses soutiens français. On y retourne ce soir 😇

https://​fran​cais​.rt​.com/​f​r​a​n​c​e​/​7​1​4​9​7​–​l​e​–​p​e​r​e​–​d​e​–​j​u​l​i​a​n​–​a​s​s​a​n​g​e​–​r​e​m​e​r​c​i​e​–​s​e​s​–​s​o​u​t​i​e​n​s​–​f​r​a​n​c​a​i​s​/​a​m​p​?​_​_​t​w​i​t​t​e​r​_​i​m​p​r​e​s​s​i​o​n​=​t​r​u​e​t​rue

« Je pense qu’en France vous dites : « Cha­peau ! »», c’est par ces mots que le père de Julian Assange a tenu à remer­cier les Fran­çais, dont nombre de Gilets jaunes qui étaient venus mani­fes­ter sous les fenêtres de sa pri­son de Bel­marsh en janvier.

Inter­ro­gé à Paris le 20 février par le jour­na­liste de RT France Tho­mas Bon­net sur cette ques­tion, le père du lan­ceur d’a­lerte a expli­qué que son fils avait enten­du les cris des manifestants.

« L’autre jour, quand il y avait des Fran­çais devant la pri­son […] Julian m’a dit qu’il pou­vait entendre les mani­fes­tants depuis sa cel­lule. C’est très encou­ra­geant. La pri­son vous enlève votre indé­pen­dance et votre huma­ni­té. Cette huma­ni­té vous revient quand vous vous ren­dez compte que les gens à l’ex­té­rieur de la pri­son vous aime et vous sou­tiennent », a‑t‑il déclaré.

Et à John Ship­ton d’a­dres­ser un « Cha­peau !», en fran­çais aux Gilets jaunes ayant fait le dépla­ce­ment jus­qu’en Angle­terre pour sou­te­nir son fils.

Le père du lan­ceur d’a­lerte qui risque jus­qu’à 175 ans de pri­son aux Etats-Unis, était pré­sent en France avec d’autres défen­seurs de son fils pour faire un point sur sur sa situa­tion. Ses nou­veaux avo­cats fran­çais Eric Dupond-Moret­­ti et Antoine Vey, ont annon­cé sou­hai­ter ren­con­trer Emma­nuel Macron afin d’ob­te­nir l’a­sile poli­tique en France de Julian Assange.

Ce der­nier, âgé de 48 ans, est déte­nu dans la pri­son de haute-sécu­­ri­­té de Bel­marsh, au sud de Londres, depuis son arres­ta­tion en avril 2019 à l’am­bas­sade d’E­qua­teur où il était res­té cloî­tré pen­dant sept années. Outre-Manche, les sou­tiens de Julian Assange sont mobi­li­sés pour pous­ser le Pre­mier ministre bri­tan­nique à ne pas pro­cé­der à son extra­di­tion. Une grande mani­fes­ta­tion le same­di 22 février à cet effet a réuni plu­sieurs per­son­na­li­tés comme l’an­cien ministre grec des Finances Yanis Varou­fa­kis, l’ex-membre des Pink Floyd Roger Waters, le pro­duc­teur et musi­cien Brian Eno ou encore la créa­trice de mode Vivienne Westwood.

Source : RT, https://​fran​cais​.rt​.com/​f​r​a​n​c​e​/​7​1​4​9​7​–​l​e​–​p​e​r​e​–​d​e​–​j​u​l​i​a​n​–​a​s​s​a​n​g​e​–​r​e​m​e​r​c​i​e​–​s​e​s​–​s​o​u​t​i​e​n​s​–​f​r​a​n​c​a​i​s​/​a​m​p​?​_​_​t​w​i​t​t​e​r​_​i​m​p​r​e​s​s​i​o​n​=​t​rue