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Excellent Mélenchon, sur le crime abject du 49.3 sur les retraites
« L'objectif reste le retrait de votre réforme et nous allons y arriver. Ça prendra le temps qu’il faut mais nous allons y arriver. En toute hypothèse, quoi qu'il arrive, si jamais nous venions à trébucher, alors, dès 2022, nous annulerons tout ce que vous avez fait. » pic.twitter.com/x4GCwBvTlv
— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) March 3, 2020
Je trouve Mélenchon très bon, là.
Mais j’ai quand même deux problèmes avec l’opposition de LFI :
1) La motion de censure est un leurre, une opposition contrôlée (© Orwell 1984), c’est-à-dire une opposition dont le pouvoir n’a rien à craindre (puisqu’il dispose d’une majorité de serpillières indignes). Je m’étonne que LFI REFUSE de lancer la procédure de destitution de Macron.
2) Un opposant « radical » qui REFUSE de sortir du carcan ultralibéral de l’UE n’est pas du tout radical : il n’est qu’une opposition contrôlée, c’est-à-dire trompeuse (comme celle du traître Tsipras en Grèce).
Bernard Friot : “Si la bourgeoisie est la classe dirigeante, c’est parce qu’elle dirige le travail, et non pas parce qu’elle est riche”
Bernard Friot : “Si la bourgeoisie est la classe dirigeante, c’est parce qu’elle dirige le travail, et non pas parce qu’elle est riche” Deuxième partie
Source : Frustration Magazine, https://www.frustrationmagazine.fr/si-la-bourgeoisie-est-la-classe-dirigeante-cest-parce-quelle-dirige-le-travail-entretien-avec-bernard-friot-partie-ii/
On a tous quelque chose en nous de communiste. Et même que ce quelque chose réside dans des institutions que nous connaissons très bien, dont la plupart du temps nous nous félicitons de leur existence. Lesquelles ? Le statut de la fonction publique et le régime général de la sécurité social, bien sûr ! C’est ce que nous explique de manière évidente non sans une certaine pugnacité l’économiste et sociologue du travail Bernard Friot, que nous avons rencontré. En plein mouvement social historique contre la réforme des retraites et de débats parlementaires cette semaine, il nous semblait plus que nécessaire de dialoguer avec lui, qu’il nous insuffle ce “Désir de communisme” face au “rouleau compresseur du capitalisme néolibéral”, concrétisé dans son dernier livre co-écrit avec Judith Bernard. L’occasion de se demander pourquoi la question du travail, si centrale pourtant, est si peu ou mal abordée à gauche et même au sein de la gauche dite “radicale”, comment retrouver un second souffle de mobilisation face à la régression des retraites, et qu’est-ce qu’apporte le mouvement des Gilets jaunes au combat social ? Partie II.
Entretien, par Selim Derkaoui et Nicolas Framont
Le mouvement des gilets jaunes a un peu fait voler en éclat tout ça, non ?
Toute cette conjonction de la science sociale critique et des directions politiques est sur la défensive, et en assez grande difficulté pour proposer une alternative. Cette impuissance de ceux qui ont organisé les conquêtes dont j’ai parlé et qui aujourd’hui se révèlent incapables de les promouvoir, incapables de les voir même, fait qu’ont commencé à prospérer d’autres formes de discours et d’action comme les gilets jaunes, qui sont un mouvement de fond inscrit dans la durée.
Les gilets jaunes, à travers des formes d’organisation beaucoup plus horizontales, rejoignent d’autres formes de mobilisations nouvelles, toute cette jeunesse souvent diplômée qui crée des alternatives “ici et maintenant”, dans des tas de champs de la production. On a maintenant toute une marge alternative, communiste à mon sens, de gens qui se destinent à maîtriser leur travail. Cela a toujours existé mais à l’échelle atteinte aujourd’hui, c’est tout à fait nouveau. Cela vient de la crise du capitalisme qui est tellement avancé dans l’élimination du travail vivant par le travail mort des machines qu’il se heurte à de graves problèmes de valorisation qu’il ne parvient pas à juguler par la fuite en avant qu’il pratique à grande échelle.

Quelle en serait la suite logique ?
La rupture de tous ces alternatifs avec la logique capitaliste du travail me semble durable. Avec ses ambiguïtés certes. Ils ont tendance à confondre le marché du travail et les employeurs et avec les conquêtes du salariat : “la retraite, on n’en aura pas”, “non non surtout pas de CDI, je veux rester flexible” … Avec l’illusion que sur les plateformes collaboratives, on va être dans l’horizontalité, on va faire ce que l’on veut… Et la tentation d’adhérer au projet capitaliste qui se substitue au salaire à la qualification personnelle : nos personnes ne peuvent pas être titulaires d’un salaire, mais elles pourraient disposer d’un revenu de base. Il y a donc des illusions mais il y a quelque chose de magnifique à refuser d’être le jouet du capital.
Ces alternatifs sont dans cette situation ambiguë d’une adhésion de fait à une flexibilité recherchée par la bourgeoisie capitaliste, mais pour poser des actes de productions communistes, c’est-à-dire sur des produits qui aient du sens, qui ne soient pas faits pour mettre en valeur du capital, etc. Le dépassement de cette contradiction, ce n’est pas que ces producteurs deviennent des employés, avec un emploi stable auprès d’employeurs, mais qu’ils soient propriétaire de leur qualification et donc titulaires d’un salaire à vie.
Qu’est ce que cela signifie ?
Que l’enjeu pour les livreurs de Deliveroo n’est pas qu’ils deviennent employés de la plateforme mais qu’ils soient titulaires de leur salaire et copropriétaires d’usage de la plateforme, sous une forme coopérative ou autre. Une des choses les plus difficiles vient de ce que la bourgeoisie, qui s’emploie en permanence à disqualifier les institutions qui la mettent en difficulté, a tout fait pour que nous connotions négativement le salaire et positivement le revenu de base. Certes ils ont pour point commun de faire de la ressource un droit politique de la personne. Mais il y a un gouffre entre le pouvoir d’achat minimum que la bourgeoisie est toujours prête à accorder à quiconque dans un revenu de base (surtout s’il est payé par l’impôt, c’est-à-dire assez peu par elle), et la reconnaissance inconditionnelle, dans un salaire à la qualification personnelle, de la capacité de tout adulte à produire de la valeur. Un tel droit politique au salaire pose les personnes comme les seules productrices de valeur et donc candidates légitimes à ravir à la bourgeoisie son monopole sur la valeur économique, qui est le fondement de sa puissance.
Si la bourgeoisie est la classe dirigeante c’est parce qu’elle dirige le travail, et non pas parce qu’elle est riche. C’est le travail qui est le cœur de la lutte de classes, ce n’est pas l’argent, l’argent c’est la conséquence du travail. Donc la classe dirigeante n’a de pouvoir sur l’argent que parce qu’elle a le pouvoir sur le travail, et c’est son pouvoir sur le travail qu’il faut lui ravir. Et pour le lui ravir il faut d’abord que nous sortions de l’aléa de notre reconnaissance comme travailleur selon le bon vouloir de l’employeur ou selon notre performance sur les marchés sur lesquels nous n’avons aucun pouvoir en réalité. La bourgeoisie tient ces marchés, soit du travail soit des biens et services, et si nos personnes sont niées comme productrices et que nous ne sommes reconnus comme producteur qu’à la mesure de nos performances sur les marchés qu’elle tient, elle a de longs jours devant elle. Mais elle n’en a pas parce qu’une classe révolutionnaire est en cours de constitution depuis plus d’un siècle et institue l’alternative.

Vous pensez que la gauche a abandonné la question du travail ? Est-ce parce qu’elle est devenue un peu bourgeoise elle aussi ?
Devenir bourgeois c’est quand même précis : c’est être propriétaire de l’outil de travail, décider l’investissement, décider de ce qui vaut, par exemple arbitrer entre la route et le fer pour les transports. La gauche n’est pas devenue bourgeoise.
Mais qu’elle ait abandonné la question du travail, oui. Pour moi, c’est un manque tout à fait considérable. Augmenté encore par cette espèce de fascination pour la financiarisation du capital dans laquelle on nous fait croire qu’il se crée de la valeur dans la sphère de la finance, que finalement le capitalisme n’a plus besoin du travail, que tout ça va pouvoir être fait par des robots, que c’est la fin du travail… c’est dans l’air du temps, bien sûr.
Le mot « argent » l’emporte dans le débat public sur le mot « travail » : on a l’impression que l’argent fait des petits tout seul et que le capitalisme serait en mesure de se passer du travail et donc, qu’il faut lui prendre son pouvoir sur l’argent, que c’est ça qui est décisif. Quand on regarde les propositions alternatives, par exemple à propos de la retraite, elles portent sur le financement des pensions : on peut prendre l’argent là où il est car de toute façon « de l’argent, il y en a ». Mais il est mal réparti, il y a un coût du capital, … c’est ça le fond de l’argumentaire du mouvement progressiste. La solution, c’est une « bonne » fiscalité… Alors voilà le constat : la prise du pouvoir sur le travail n’est pas à l’ordre du jour globalement, sauf chez ces jeunes alternatifs… chez eux oui, c’est très puissant. Mais dans les organisations qui ont été porteuses des conquêtes du salariat, ce qu’on associe à « travail » c’est « souffrance ». Et c’est « réduction ».
Ce sont les mots les plus associés au travail aujourd’hui chez les militants ?
Je n’ai pas fait de lexicométrie à ce propos, mais je pense que les mots les plus associés au travail aujourd’hui, dans les milieux progressistes, ce sont en effet bien eux. Il s’agit de réduire le temps de travail et il y a de la souffrance au travail. C’est-à-dire que le mot travail est connoté négativement. C’est assez rare qu’il soit connoté positivement. Y compris chez les alternatifs qui, justement, parce qu’ils ne veulent pas faire du travail comme leurs aînés, en acceptant des travaux avec lesquels ils seraient en désaccord, vont dire qu’ils ne travaillent pas, vont dire qu’ils sont dans l’activité.
Ça correspond à une vision elle aussi péjorative du travail chez ceux qui aspirent à se libérer du travail, à réduire le temps de travail, et vivent le travail comme de la souffrance qu’il faut gérer. Il faut donc « prévenir la souffrance au travail », faire condamner les employeurs qui génèrent de la souffrance au travail. Mais la souffrance au travail c’est un concept qui est accepté. C’est une sorte de catégorie qui médicalise une violence sociale qui n’est pas dénoncée comme telle. Ce qu’on va condamner, c’est la souffrance qu’elle génère, comme si c’était naturel que le travail génère de la souffrance. Et pourtant les origines de la souffrance au travail sont claires : c’est l’absence de la maîtrise du travail. Donc tant qu’il n’y aura pas détermination à construire les institutions de pouvoir sur le travail, concret, dans l’entreprise, on va continuer à chercher à gérer la souffrance au travail et à chercher à réduire le temps de travail.
Est-ce que ça vient d’un manque de courage à affronter cette question ?
Je sais que c’est dur d’être militant, d’être syndicaliste, j’ai le plus grand respect pour tous ceux qui se battent. C’est plutôt qu’il n’y a pas de tradition de maîtrise collective du travail… On dit, « c’est nous qui produisons, c’est nous qui décidons », mais un peu comme un mantra, c’est comme le « tous ensemble tous ensemble hé » dans les manifs, quand on sait bien qu’on n’est pas tous ensemble et que trop d’organisations se tirent les unes sur les autres …
Rien de concret n’est fait dans les entreprises par les organisations de travailleurs pour qu’ils décident. Parce que décider, ça veut dire s’opposer aux directions. Et s’opposer aux directions ça ne se fait pas par la grève. La grève, c’est un temps pratiquement inexistant dans le secteur privé et très intermittent dans le secteur public. Donc non, ce n’est pas par la grève qu’on s’oppose aux directions, et comme aujourd’hui il n’y a que ça comme moyen d’action, la grève comme absence de travail, on ne mobilise pas toute l’organisation – les militants, les institutions, les protections (par exemple la protection contre le licenciement des délégués syndicaux), on ne mobilise pas toute cette organisation pour dire « ah non non, nous allons nous auto-organiser dans ce que nous faisons au travail ».
C’est ça la réponse à la souffrance au travail. Il n’y a aucune raison que le travail soit source de souffrance, aucune. Au contraire, c’est une source de liberté. Le déplacement à opérer dans l’action collective est autour de « nous nous auto-organisons ». Mais si la maîtrise du travail est abandonnée aux employeurs et que le temps de travail devient insupportable, toute la militance se consacre à la réduction du temps de travail, hebdomadaire et sur le cycle de vie, avec la retraite comme fin du travail. Alors que la retraite, rappelons-le, a été construite en 1946 par les communistes comme la fin de l’obligation d’aller sur le marché du travail pour avoir un salaire. Un retraité ce n’est pas quelqu’un qui ne travaille plus, c’est quelqu’un qui n’a plus besoin de quémander son salaire auprès d’un employeur parce qu’il est devenu titulaire de son salaire. C’est pour cela que vous avez une telle détermination de Macron : « non, entrer en retraite c’est être bénéficiaire du différé de ses cotisations, on ne peut jamais être titulaire de son salaire ». La bourgeoisie a absolument besoin que nous soyons à poil pour que sa domination sur nos vies soit possible, pour que nous ne puissions pas lui ravir le monopole sur la production de valeur qui est la source de son pouvoir.

Pour autant, cette question est totalement absente du débat public sur la réforme des retraites en ce moment …
Vous avez raison, et c’est parce que le travail, connoté négativement, est absent du débat public. Cela dit, je suis optimiste sur le fait que le travail vienne sur le devant de la scène. La prise de conscience que la maîtrise du travail concret doit devenir le cœur de l’activité collective, ça je suis convaincu que ça va monter. Déjà, il y a tous les alternatifs qui en sont porteurs, et tous les militants syndicaux qui voient bien qu’on ne peut pas se contenter de réduire le temps de travail et d’attendre la retraite comme la fin du travail, et qu’il faut commencer à se poser la question de la conquête des outils de l’affrontement aux directions sur le contenu du travail.
Que penser du traitement médiatique du travail ?
Je suis peu au fait du traitement médiatique, mais ce qui me frappe c’est la montée au cours des trente dernières années, dans l’opinion courante, de la connotation péjorative du travail. Jusqu’à son étymologie, avec l’invention d’une étymologie fausse, le fameux « tripalium », cet instrument de torture. Est tout à fait significative la façon dont Hannah Arendt, dans son essai sur La condition de l’homme moderne, prolongé par Dominique Méda dans la Fin du travail ?, reprend le triptyque aristotélicien sur travail, action, œuvre : le travail ce sont les esclaves, l’œuvre ce sont les artisans et l’action ce sont les citoyens libres, c’est la politique. Ce bouquin a eu un très grand succès, et les années 90 sont des années où dans l’opinion cultivée s’exprime cette dévalorisation du travail qui naturalise l’état déplorable dans lequel la logique du profit met le travail. Et c’est une saga qui, là encore, écrit ce dont la bourgeoisie a besoin.
Cette disqualification du travail vient de la crise du capitalisme : la bourgeoisie n’est plus capable de gérer le travail de façon à ce qu’il soit anthropologiquement, écologiquement, territorialement humain. Incapable de nous mobiliser positivement sur le travail, elle nous mobilise sur des colifichets de la consommation et s’emploie à ce que nous considérions comme naturel que le travail, c’est de la merde. Raison de plus pour nous appuyer sur le déjà-là communiste pour soutenir l’action collective de conquête de la souveraineté sur le travail afin de le tirer de ce mauvais pas. Nous disposons, avec la sécurité sociale de la production de soins que le régime général a su mettre en place de la fin des années 1950 au milieu des années 1970, d’un dispositif que nous pouvons transposer à toute la production. Une hausse du taux et un élargissement de l’assiette de la cotisation à l’assurance-maladie ont permis d’une part de subventionner l’investissement hospitalier, d’inclure dans son sein les hôpitaux psychiatriques, de transformer les hospices en hôpitaux locaux, et d’autre part de conventionner les soins de ville. Et ça s’est fait sur un mode que je qualifie de communiste : salaire à la qualification personnelle des soignants, fonctionnaires hospitaliers ou libéraux conventionnés, subvention de l’investissement ôtant toute place à la propriété lucrative de l’outil.
Je crois que vous avez des propositions qui s’appuient sur cet existant ?
Oui, l’application d’une telle sécurité sociale à l’alimentation (SSA) par exemple est un terrain d’autant plus propice qu’il y a déjà des alternatifs à tous les niveaux : de la production des biens bruts comme le lait ou le blé, à la production des biens élaborés, la distribution, la restauration, la production d’outils agricoles : tout cela aujourd’hui est investi par des alternatifs qui ne sont plus quantité négligeable, même s’ils restent marginalisables ou récupérables… Le levier serait une cotisation qui pourrait être de 8% de la valeur ajoutée marchande, soit 120 milliards, ce qui correspond en gros à la moitié des dépenses de consommation alimentaire aujourd’hui – ce qui n’est pas rien, et qui serait une opération blanche à l’échelle macro pour les entreprises, puisqu’à ces 120 milliards de cotisation correspondront 120 milliards de non remboursement de dettes, ou de non-versement de dividendes. Ça suppose toute une bataille politique sur l’illégitimité du crédit…
On n’affecterait pas la totalité de ces 120 milliards à solvabiliser la population, parce que les alternatifs ne peuvent pas aujourd’hui assurer la moitié des besoins d’alimentation. Disons pour lancer le débat qu’on peut proposer d’affecter les 2/3 des 120 milliards aux consommateurs/usagers, soit 100€ par personne et par mois, sur la carte vitale. Un foyer de 3 personnes perçoit dont 300€ par mois, ça ne couvre pas la totalité de la dépense en alimentation, mais c’est quand même très significatif. Et cette carte vitale, elle ne pourra être présentée que chez des professionnels conventionnés– exactement comme pour les hôpitaux et les médecins libéraux. On ne va évidemment pas conventionner la grande distribution, l’agrobusiness etc. Et il faudra aller loin dans le refus du conventionnement : un des enseignements qu’on peut tirer de l’assurance maladie, c’est qu’on a conventionné les producteurs de soins en conservant un mode capitaliste de production du médicament, moyennant quoi on a fourni un marché public incroyable aux groupes capitalistes comme Sanofi qui ont investi, et en partie pourri, la pratique du soin… Il ne s’agit pas qu’on fasse la même chose dans l’alimentation en fournissant un marché public à Massey Ferguson ou à Bayer ! Il faut que ne soient conventionnés que les producteurs qui ne font pas appel à des fournisseurs capitalistes, qui produisent bio en respectant le droit du travail (ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui), des entreprises dont les travailleurs sont les propriétaires d’usage de leur outil de travail…
Quant au tiers restant des 120 milliards, il serait consacré au soutien des producteurs alternatifs. Il faut acheter des terres, notamment : il faut arracher la terre à la logique marchande et en faire un bien commun, et ça aussi c’est un travail considérable. Il faut payer les travailleurs conventionnés à la qualification personnelle. Il faut subventionner l’investissement de producteurs agricoles alternatifs, il faut aider les agriculteurs qui voudraient passer au bio à le faire –il y en a pour quatre ou cinq ans, avant que ce soit rentable, et pendant ces quatre ou cinq ans il faut qu’ils soient soutenus ; il faut soutenir la production de machines nouvelles, etc.
Et je voudrais conclure sur le fait que nous créons là une institution macroéconomique qui pourrait être articulée avec cette autre institution macro qu’est la retraite, entendue comme l’âge où l’on devient titulaire de son salaire sans plus passer par le marché du travail. On pourrait la fixer à l’âge critique sur le marché du travail, 50 ans. Les quinquagénaires retraités, dotés de leur salaire et d’une responsabilité d’auto-organisation des travailleurs, pourront évidemment investir massivement ces entreprises alternatives dont l’activité va être considérablement augmentée. Et ce qu’on vient de dire sur l’alimentation, on pourrait le transposer sur la production de logement, sur le transport de proximité, sur l’énergie, la culture, l’accès à la justice… Retrouver la dynamique communiste rend inventif et joyeux !
Bernard Friot
Première partie de l’entretien ici
Photos de Serge d’Ignazio
Source : Frustration Magazine, https://www.frustrationmagazine.fr/si-la-bourgeoisie-est-la-classe-dirigeante-cest-parce-quelle-dirige-le-travail-entretien-avec-bernard-friot-partie-ii/
Fil Facebook correspondant à ce billet:
https://www.facebook.com/etienne.chouard/posts/10157960207567317
Formidable Pepe Escobar sur Sputnik France : Procès de Julian Assange : « C’est un tribunal stalinien »
[Free Assange] Craig Murray : la cage de verre blindée est un instrument de torture
Craig MURRAY : La cage de verre blindée est un instrument de torture
photo : illustration par la rédaction du Grand Soir (source indéterminée)
Lors de l’audience séparée de jeudi sur l’autorisation donnée à Assange de sortir de la cage blindée pour s’asseoir avec son équipe d’avocats, j’ai pu constater directement que la décision de Baraitser contre Assange a été présentée par elle au tribunal AVANT qu’elle n’ait entendu l’avocat de la défense présenter les arguments, et qu’elle les a présentés sans aucune modification.
Je pourrais commencer par vous expliquer ma position dans la tribune publique par rapport au juge. Toute la semaine, je me suis délibérément assis à l’avant, sur le siège de droite. La galerie donne sur une fenêtre en verre blindé à une hauteur d’environ 2 mètres au-dessus de la salle d’audience. Elle descend d’un côté du tribunal, et l’extrémité droite de la galerie publique se trouve au-dessus du banc du juge, qui est assis en dessous perpendiculairement à celui-ci. Depuis les sièges de droite de la galerie publique, vous avez donc une vue plongeante directe sur le banc du juge, et que vous pouvez voir tous ses documents et son écran d’ordinateur.
L’avocat Mark Summers a souligné que dans l’affaire Belousov contre la Russie, la Cour européenne des droits de l’homme de Strasbourg a statué contre l’État de Russie parce que Belousov avait été jugé dans une cage de verre pratiquement identique dans sa construction et sa position à celle dans laquelle se trouve présentement Assange. Cette situation a entravé sa participation au procès et son libre accès à un avocat, et l’a privé de sa dignité humaine en tant qu’accusé.
Summers poursuit en disant qu’il est normal que certaines catégories de prisonniers non condamnés soient libérés du banc des accusés pour s’asseoir avec leurs avocats. Le tribunal disposait de rapports psychiatriques sur l’extrême dépression clinique d’Assange et, en fait, le guide des meilleures pratiques du ministère britannique de la justice à l’intention des tribunaux indiquait que les personnes vulnérables devraient être libérées pour s’asseoir aux côtés de leurs avocats. Un traitement spécial n’était pas demandé pour Assange – il demandait à être traité comme toute autre personne vulnérable.
La défense a été entravée par son incapacité à communiquer confidentiellement avec son client pendant la procédure. Dans la phase suivante du procès, où les témoins seront interrogés, il est essentiel de communiquer en temps utile. En outre, ils ne pouvaient parler avec lui que par une fente dans la vitre, à portée d’oreille des agents de sécurité de la société privée qui le surveillaient (il a été précisé qu’il s’agissait de Serco, et non du groupe 4 comme l’avait dit Baraitser la veille), et en présence de microphones.
Baraitser s’est mise de mauvaise humeur à ce moment-là et a parlé avec un réel tranchant de voix. « Qui sont ces gens derrière vous, au dernier rang », a-t-elle demandé avec sarcasme à Summers – une question à laquelle elle connaissait prafaitement la réponse. Summers a répondu qu’ils faisaient partie de l’équipe juridique de la défense. Baraitser a dit qu’Assange pouvait les contacter s’il avait un point à faire valoir. Summers répondit qu’il y avait une allée et un muret entre la cage de verre et leur position, et que tout ce qu’Assange pouvait voir par-dessus le mur était le haut de l’arrière de leur tête. Baraitser a dit qu’elle avait vu Assange crier. Summers a déclaré que crier à travers la salle d’audience n’était ni confidentiel ni satisfaisant.
On m’a maintenant informé que c’est un délit de publier la photo de Julian dans sa cage de verre, même si je ne l’ai pas prise et qu’elle est absolument partout sur Internet. Il convient également de noter que je suis de retour dans mon pays, l’Écosse, où se trouve mon blog, et que ni l’un ni l’autre ne relève de la juridiction du tribunal anglais. Mais je tiens à ne pas leur donner d’excuse pour m’exclure de l’audience du tribunal, c’est pourquoi je l’ai supprimée, mais vous pouvez la voir ici (en illustration du présent article – NdT).
C’est la photo prise illégalement (pas par moi) d’Assange au tribunal. Si vous regardez attentivement, vous pouvez voir qu’il y a un passage et un muret en bois entre lui et la dernière rangée d’avocats. Vous pouvez voir l’un des deux agents de la prison de Serco qui le surveille à l’intérieur de la cage.
Baraitser a dit qu’Assange pouvait passer des notes, et qu’elle l’avait vu passer des notes. Summers a répondu que les officiers de justice avaient désormais interdit la transmission de notes. Baraitser a dit qu’ils pouvaient en parler à Serco, que c’était une question qui relevait des autorités de la prison.
Summers a affirmé que, contrairement à ce que Baraitser avait déclaré la veille, elle était effectivement compétente pour sortir Assange de la cage. Baraitser est intervenue pour dire qu’elle était d’accord avec ça. Summers a ensuite déclaré qu’il avait produit un certain nombre d’éléments pour montrer que Baraitser avait également eu tort de dire qu’être en garde à vue ne pouvait que signifier être enfermé dans la cage. Vous pouvez être en garde à vue n’importe où dans l’enceinte du tribunal, ou même à l’extérieur. Baraitser en est devenue très contrariée et a déclaré qu’elle avait seulement dit que la garde dans tribunal devait être égale à la garde dans la cage.
Ce à quoi Summers a répondu de façon mémorable, maintenant très contrarié : « Eh bien, c’est faux aussi, et c’est faux depuis ces huit dernières années. »
Mettant un terme à son argumentation, Baraitser a donné son avis sur cette question. Voici maintenant ce qui est intéressant, et je suis un témoin oculaire direct. Elle a lu son jugement, qui était écrit à la main sur plusieurs pages. Elle l’avait apporté avec elle au tribunal sous forme de liasse, et elle n’y a apporté aucune modification. Elle avait rédigé son jugement avant même d’avoir entendu Mark Summers.
Ses principaux points étaient qu’Assange était capable de communiquer avec ses avocats en criant depuis la cage. Elle l’avait vu passer des notes. Elle était prête à ajourner le tribunal à tout moment pour qu’Assange puisse descendre avec ses avocats pour discuter dans les cellules, et si cela allongeait la durée de l’audience de trois à six semaines, cela pourrait prendre autant de temps que nécessaire.
Baraitser a déclaré qu’aucun des rapports psychiatriques qu’elle avait devant elle n’indiquait qu’il était nécessaire pour Assange de quitter la cage. Comme aucun des psychiatres n’avait été interrogé à ce sujet – et très probablement aucun ne connaissait la disposition de la salle d’audience – cela n’est guère surprenant.
Je me suis demandé pourquoi il est si important pour le gouvernement britannique de maintenir Assange dans cette cage, incapable d’entendre les procédures ou de communiquer avec ses avocats, même lorsque les avocats du gouvernement américain ont déclaré qu’ils n’avaient aucune objection à ce qu’Assange siège avec ses avocats.
La réponse se trouve dans l’évaluation psychiatrique d’Assange donnée à la cour par le très distingué professeur Michael Kopelman (qui est familier à tous ceux qui ont lu Murder in Samarkand) :
« M. Assange montre pratiquement tous les facteurs de risque que les chercheurs d’Oxford ont décrit des prisonniers qui se suicident ou font des tentatives mortelles. …
Je suis aussi sûr qu’un psychiatre peut l’être que, si l’extradition vers les États-Unis devenait imminent, M. Assange trouverait un moyen de se suicider ».
Le fait que Kopelman ne déclare pas spécifiquement, comme l’a dit Baraitser, que la cage de verre blindée est mauvaise pour Assange ne reflète rien d’autre que le fait qu’on ne lui a pas posé cette question. Tout être humain ayant la moindre décence serait en mesure d’en tirer la conclusion. Le point de vue étroit de Baraitser, selon lequel aucun psychiatre n’a spécifiquement déclaré qu’il devrait être libéré de la cage blindée, est à couper le souffle, malhonnête et inhumain. Il est presque certain qu’aucun psychiatre n’avait imaginé qu’elle déterminerait l’application d’une telle torture.
Alors pourquoi Baraitser le fait-elle ?
Je crois que l’enfermement d’Assange, ce geek intellectuel de l’informatique, à la manière d’Hannibal Lecter et qui n’a aucun fondement rationnel, est une tentative délibérée de pousser Julian au suicide. Le tribunal anti-terroriste de haute sécurité se trouve physiquement dans l’enceinte de la forteresse qui abrite la prison de haute sécurité. Il est amené, menotté et sous forte escorte, de sa cellule d’isolement à la cage blindée, via un tunnel souterrain. Dans ces circonstances, quel est le besoin éventuel pour lui d’être fouillé à nu en permanence ? Pourquoi n’est-il pas autorisé à avoir ses documents sur lui ? Le plus révélateur pour moi est le fait qu’il n’est pas autorisé à serrer la main ou à toucher ses avocats par la fente de la cage blindée.
Ils appliquent sans relâche le déni systématique de tout réconfort humain de base, comme le fait de toucher le bout des doigts d’un ami ou d’empêcher le soulagement qu’il pourrait ressentir simplement en étant aux côtés d’un ami. Ils assurent la poursuite des effets psychologiques extrêmes de l’isolement d’une année par un isolement virtuel. Un tout petit peu de confort humain pourrait faire énormément de bien à sa santé mentale et à sa résilience. Ils sont déterminés à y mettre fin à tout prix. Ils tentent de le pousser à se suicider – ou de créer en lui la condition dans laquelle sa mort accélérée pourrait être expliquée comme un suicide.
C’est aussi la seule explication que je puisse trouver pour expliquer pourquoi ils risquent de créer des conditions aussi évidentes d’annulation de procès. Les morts ne peuvent pas faire appel.
Je vous rappelle que Julian est un prévenu qui a purgé sa peine d’une durée sans précédent pour avoir violé sa liberté sous caution. Son statut est censé être actuellement celui d’un innocent accusé. Ces accusations n’ont aucun fondement, si ce n’est la publication des révélations de Chelsea Manning sur les crimes de guerre.
Il me semble certain que Baraitser agit selon des instructions. Tout au long du procès, elle a cherché désespérément à saisir toute occasion de nier toute responsabilité dans ce qui arrive à Julian. Elle a déclaré qu’elle n’avait aucune compétence sur son traitement en prison, et même lorsque la défense et l’accusation se sont unies pour affirmer qu’il était normal que les magistrats transmettent des instructions ou des demandes à l’administration pénitentiaire, elle a refusé de l’admettre.
Baraitser tente manifestement de se distancer psychologiquement de toute responsabilité dans ce qui est fait. À cette fin, elle a multiplié les dénis de compétence ou de capacité à influencer les événements. Elle a déclaré qu’elle n’avait pas compétence pour interférer avec la fouille à nu, le menottage et la confiscation des papiers d’Assange ou son maintien en isolement. Elle a déclaré qu’elle n’était pas compétente pour demander que les avocats de la défense aient davantage accès à leur client en prison pour préparer sa défense. Elle a déclaré qu’elle n’avait pas compétence pour s’occuper de sa position dans la salle d’audience. Elle a suggéré à plusieurs reprises que c’est à la société Serco de décider s’il peut transmettre des notes à ses avocats et au Groupe 4 de décider s’il peut être libéré de la cage blindée. Les moments où elle semble la plus satisfaite en écoutant les arguments, sont ceux où l’avocat de l’accusation James Lewis affirme qu’elle n’a pas d’autre décision à prendre que de signer l’extradition parce qu’elle est en bonne et due forme et que l’article 4 du traité n’a aucune valeur juridique.
Un membre de la famille Assange m’a fait remarquer, à la fin de la première semaine, qu’elle semble très paresseuse et qu’elle est donc ravie d’accepter tout argument qui réduit la quantité de travail qu’elle doit faire. Je pense qu’il s’agit d’autre chose. Je pense qu’il y a un coin de l’esprit de cette fille de dissidents de l’apartheid qui rejette son propre rôle dans la torture d’Assange, et qui ne cesse de répéter « Je n’avais pas le choix, je n’avais pas d’autorité ». Ceux qui succombent au mal doivent trouver le réconfort intérieur qu’ils peuvent.
Avec nos remerciements à ceux qui ont fait des dons ou qui se sont abonnés pour rendre ce reportage possible. Je tiens à souligner à nouveau que je ne veux absolument pas que quiconque donne quoi que ce soit si cela lui cause la moindre possibilité de contrainte financière.
Cet article est entièrement libre de reproduction et de publication, y compris en traduction, et j’espère vivement que les gens le feront activement. La vérité nous rendra libres.
Craig Murray
Traduction « c’est bien une course contre la montre » par VD pour le Grand Soir avec probablement toutes les fautes et coquilles habituelles
Source : Le Grand Soir, https://www.legrandsoir.info/la-cage-de-verre-blindee-est-un-instrument-de-torture.html
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Parallèle intéressant entre le Caracazo vénézuélien et les Gilets jaunes français, par Romain Migus
Passionnant Romain Migus 🙂
https://youtu.be/vHcRRMITmgI
Parallèle intéressant entre le Caracazo vénézuélien (1989) et les Gilets jaunes français (2018-2020), révoltes populaires à visées institutionnelles contre les politiques néolibérales d’insécurité sociale, d’inégalités criantes et de misère.
Viva la revolucion ! 🙂
#mémoiredesluttes
#GrèveGénéraleConstituante
Étienne.
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Julian Assange (WikiLeaks), entretien en 2014 pour « le grand journal »
Que c’est bien, d’écouter cet homme parler, calme et bon, comme s’il était libre…
L’entretien date de 2014, dans les locaux de l’ambassade d’Équateur, où il est prisonnier depuis deux ans à l’époque.
La fin est particulièrement intéressante.
#FreeAssange
Étienne.
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[Procès stalinien à Londres, capitale du crime] Compte-rendu du Procès Assange, 4ème jour, par Craig MURRAY
Craig Murray : « S’il vous plaît, tentez cette expérience pour moi.
Posez cette question à haute voix, sur un ton d’encouragement et de curiosité intellectuelle : « Suggérez-vous que les deux ont le même effet ? ».
Posez maintenant cette question à voix haute, sur un ton d’hostilité et d’incrédulité frisant le sarcasme : « Suggérez-vous que les deux ont le même effet ? ».
Tout d’abord, félicitations pour vos talents d’acteur ; vous prenez très bien la direction des opérations. Deuxièmement, n’est-il pas fascinant de voir comment les mêmes mots peuvent précisément transmettre le sens opposé en fonction de la modulation du stress, de la hauteur et du volume ?
Hier, l’accusation a poursuivi son argument selon lequel la disposition du traité d’extradition entre le Royaume-Uni et les États-Unis de 2007 qui interdit l’extradition pour des délits politiques est lettre morte, et que les objectifs de Julian Assange ne sont de toute façon pas politiques. James Lewis avocat pour l’accusation a parlé pendant environ une heure, et Edward Fitzgerald a répondu pour la défense pendant environ le même temps. Au cours de la présentation de Lewis, il a été interrompu par le juge Baraitser, précisément une fois. Pendant la réponse de Fitzgerald, Baraitser l’a interrompu dix-sept fois.
Dans la transcription, ces interruptions n’auront pas l’air déraisonnables :
« Pourriez-vous préciser le pour moi, M. Fitzgerald… »
« Alors, comment faites-vous face au point de vue de M. Lewis selon lequel… »
« Mais c’est sûrement un argument circulaire… »
« Mais il n’est pas incorporé, n’est-ce pas ?… »
Toutes ces interruptions et les douze autres ont été conçues pour montrer que le juge tente de clarifier l’argument de la défense dans un esprit de test intellectuel. Mais si vous avez entendu le ton de la voix de Baraitser, vu son langage corporel et ses expressions faciales, c’était tout sauf cela.
L’image fausse qu’une transcription pourrait donner est exacerbée par le fait que la cour Fitzgerald répond continuellement à chaque harcèlement évident par « Merci Madame, c’est très utile », ce qui, encore une fois, si vous étiez là, signifiait clairement le contraire. Mais ce que la transcription montrera utilement, c’est la tactique de Baraitser qui consiste à interrompre Fitzgerald encore et encore, à minimiser ses arguments et à l’empêcher délibérément d’entrer dans le vif du sujet. Le contraste avec son traitement de Lewis ne pourrait être plus prononcé.
Nous allons donc maintenant présenter les arguments juridiques eux-mêmes.
James Lewis pour l’accusation, poursuivant ses arguments de la veille, a déclaré que le Parlement n’avait pas inclus dans la loi de 2003 une interdiction d’extradition pour des infractions politiques. Elle ne peut donc pas être réintroduite dans la loi par un traité. « Introduire une interdiction des infractions politiques par une voie détournée serait subvertir l’intention du Parlement ».
Lewis a également fait valoir qu’il ne s’agissait pas de délits politiques. Au Royaume-Uni, la définition d’un délit politique se limitait à un comportement visant à « renverser ou changer un gouvernement ou à l’inciter à modifier sa politique ». En outre, l’objectif doit être de changer de gouvernement ou de politique à court terme, et non pas dans un avenir indéterminé.
Lewis a déclaré qu’en outre, le terme « infraction politique » ne pouvait être appliqué qu’aux infractions commises sur le territoire où l’on tentait d’opérer le changement. Ainsi, pour être qualifié de délit politique, Assange aurait dû les commettre sur le territoire des États-Unis, mais il ne l’a pas fait.
Si Baraitser décidait que l’interdiction des infractions politiques s’appliquait, le tribunal devrait déterminer la signification de l’expression « infraction politique » dans le traité d’extradition entre le Royaume-Uni et les États-Unis et interpréter le sens des paragraphes 4.1 et 4.2 du traité. L’interprétation des termes d’un traité international dépassait les pouvoirs de la cour.
Lewis a déclaré que la conduite de Julian Assange ne pouvait pas être qualifiée de délit politique. « Il est impossible de placer Julian Assange dans la position d’un réfugié politique ». L’activité dans laquelle Wikileaks était engagé n’était pas dans son sens propre une opposition politique à l’administration américaine ou une tentative de renverser cette administration. Par conséquent, l’infraction n’était pas politique.
Pour la défense, Edward Fitzgerald a répondu que la loi sur l’extradition de 2003 était une loi d’habilitation en vertu de laquelle les traités pouvaient s’appliquer. Le Parlement s’est soucié de supprimer toute menace d’abus de l’interdiction des infractions politiques pour couvrir les actes terroristes de violence contre des civils innocents. Mais il reste une protection claire, acceptée dans le monde entier, pour la dissidence politique pacifique. Le traité d’extradition sur la base duquel la cour agissait en tient compte.
M. Baraitser interrompt la séance en indiquant que le traité d’extradition entre le Royaume-Uni et les États-Unis n’a pas été intégré au droit anglais.
Fitzgerald répond que l’ensemble de la demande d’extradition est basée sur le traité. C’est un abus de procédure pour les autorités de s’appuyer sur le traité pour la demande mais de prétendre ensuite que ses dispositions ne s’appliquent pas.
« À première vue, c’est un argument très bizarre qu’un traité qui donne lieu à l’extradition, sur lequel l’extradition est fondée, puisse être ignoré dans ses dispositions. À première vue, c’est absurde » a dit Edward Fitzgerald pour la défense
Fitzgerald a ajouté que les tribunaux anglais interprètent les traités tout le temps. Il a donné des exemples.
Fitzgerald a poursuivi en disant que la défense n’acceptait pas que la trahison, l’espionnage et la sédition ne soient pas considérés comme des délits politiques en Angleterre. Mais même si l’on acceptait la définition trop étroite de Lewis de l’infraction politique, le comportement d’Assange répondait quand même au critère. Quel pourrait être le motif de la publication des preuves des crimes de guerre et de la corruption du gouvernement, si ce n’est de changer la politique du gouvernement ? En effet, les preuves prouveraient que Wikileaks a effectivement changé la politique du gouvernement américain, en particulier sur l’Irak.
Baraitser a interféré en disant que dénoncer les méfaits du gouvernement n’était pas la même chose que d’essayer de changer la politique du gouvernement. Fitzgerald lui a demandé, finalement exaspéré après d’innombrables interruptions, quel autre intérêt il y aurait à exposer les méfaits du gouvernement que d’induire un changement de politique gouvernementale.
C’est ainsi que se terminent les plaidoiries d’ouverture de l’accusation et de la défense.
MON COMMENTAIRE PERSONNEL
Permettez-moi d’être aussi neutre que possible. Si vous pouviez affirmer avec justesse que l’argument de Lewis était beaucoup plus logique, rationnel et intuitif que celui de Fitzgerald, vous pourriez comprendre pourquoi Lewis n’avait pas besoin d’être interrompu alors que Fitzgerald devait être continuellement interrompu pour « clarification ». Mais en fait, c’est Lewis qui a fait valoir que les dispositions du traité même en vertu duquel l’extradition est effectuée ne s’appliquent pas, une étape logique qui, à mon avis, demanderait un peu plus d’explications que l’argumentaire contraire de Fitzgerald. Le harcèlement que Baraitser a fait subir à Fitzgerald lorsqu’il a mis l’accusation dans les cordes est tout droit sorti du livre de recettes des procès staliniens.
La défense ne l’a pas mentionné, et je ne sais pas si cela figure dans leurs arguments écrits, mais j’ai trouvé que l’argument de Lewis selon lequel il ne pouvait s’agir de délits politiques, parce que Julian Assange n’était pas aux États-Unis lorsqu’il les a commis, était d’une malhonnêteté à couper le souffle. Les États-Unis revendiquent une compétence universelle. Assange est accusé de crimes de publication commis alors qu’il se trouvait en dehors des États-Unis. Les États-Unis revendiquent le droit d’inculper toute personne de toute nationalité, partout dans le monde, qui nuit aux intérêts américains. En outre, ils affirment ici que, comme les documents pouvaient être vus sur Internet aux États-Unis, il y a eu infraction aux États-Unis. En même temps, prétendre que cela ne pourrait pas être un délit politique puisque le crime a été commis en dehors des États-Unis est, comme Edward Fitzgerald pourrait le dire, à première vue absurde. Ce que, curieusement, Baraitser n’a pas relevé.
L’argument de Lewis selon lequel le traité n’a aucune valeur en droit anglais n’est pas une invention de sa part. Nigel Farage ne s’est pas matérialisé de nulle part. Il existe en vérité une longue tradition dans le droit anglais selon laquelle même un traité signé et ratifié avec un pays étranger quelconque, ne peut en aucun cas lier un tribunal anglais. Lewis pouvait, et il l’a fait, faire jaillir des pages et des pages de jugements de juges à la face de betterave qui s’efforcent de dire exactement cela à la Chambre des Lords, avant d’aller tirer sur du gibier et donner la fessée au fils du valet. Lewis était particulièrement attaché à l’affaire du Tin Councel [Ndt : Maclaine Watson and Co Ltd contre International Tin Council : HL 2 janv. 1989. Le Tin Council était un organe constitué par un traité international non incorporé dans la législation du Royaume-Uni. … Un traité non incorporé ne peut créer aucun droit ou obligation dans le droit national. (Wikipedia)]
Il existe bien sûr une tradition contraire et plus éclairée, et un certain nombre de jugements qui disent exactement le contraire, pour la plupart plus récents. C’est la raison pour laquelle les arguments étaient si répétitifs, chaque partie ayant accumulé de plus en plus de volumes d’ »autorités » pour défendre son point de vue.
La difficulté pour Lewis – et pour Baraitser – est que cette affaire n’est pas comparable au fait que j’achète une barre de chocolat et que je me rende ensuite au tribunal parce qu’un traité international sur les barres de chocolat dit que la mienne est trop petite.
La loi sur l’extradition de 2003 est plutôt une loi d’habilitation dont dépendent ensuite les traités d’extradition. Vous ne pouvez donc pas extrader en vertu de la loi de 2003 sans le traité. Le traité d’extradition de 2007 devient donc, dans un sens très réel, un instrument exécutif légalement nécessaire pour autoriser l’extradition. Pour que les autorités d’exécution enfreignent les termes de l’instrument exécutif nécessaire en vertu duquel elles agissent, il faut simplement qu’il y ait un abus de procédure. Ainsi, le traité d’extradition, en raison de sa nature et de la nécessité d’une action en justice, est en fait intégré au droit anglais par la loi sur l’extradition de 2003 dont il dépend.
Le traité d’extradition est une condition préalable nécessaire à l’extradition, alors qu’un traité sur les barres de chocolat n’est pas une condition préalable nécessaire à l’achat d’une barre de chocolat.
Je ne peux pas être plus clair. J’espère que c’est compréhensible.
Il est bien sûr difficile pour Lewis que le même jour, la Cour d’appel se soit prononcée contre la construction de la troisième piste d’Heathrow, en partie à cause de son incompatibilité avec l’Accord de Paris de 2016, bien que ce dernier ne soit pas entièrement intégré au droit anglais par la loi sur le changement climatique de 2008.
UNE EXPÉRIENCE PERSONNELLE ESSENTIELLE
Il est extrêmement embarrassant pour le Foreign and Commonwealth Office (FCO) qu’un tribunal anglais répudie l’application d’un traité que le Royaume-Uni a ratifié avec un ou plusieurs États étrangers. C’est pourquoi, dans le monde moderne, des procédures et des précautions très sérieuses ont été mises en place pour s’assurer que cela ne puisse pas se produire. Par conséquent, l’argument de l’accusation selon lequel toutes les dispositions du traité d’extradition entre le Royaume-Uni et les États-Unis de 2007 ne peuvent pas être mises en œuvre en vertu de la loi sur l’extradition de 2003, devrait être impossible.
Je dois expliquer que j’ai moi-même négocié et supervisé l’entrée en vigueur des traités au sein du FCO. Le dernier pour lequel j’ai personnellement noué le ruban et opposé le sceau de cire (littéralement) était le traité anglo-belge sur le plateau continental de 1991, mais j’ai participé à la négociation d’autres traités et le système que je vais décrire était toujours en place lorsque j’ai quitté le FCO en tant qu’ambassadeur en 2005, et je crois qu’il n’a pas changé aujourd’hui (et souvenez-vous que la loi sur l’extradition date de 2003 et que le traité d’extradition américano-britannique a été ratifié en 2007, donc mes connaissances ne sont pas dépassées). Les nomenclatures ministérielles changent de temps en temps, de même que l’organisation structurelle. Mais les bureaux et les fonctions que je vais décrire restent les mêmes, même si les noms peuvent être différents.
Tous les traités internationaux comportent un processus en deux étapes. Tout d’abord, ils sont signés pour montrer que le gouvernement est d’accord avec le traité. Puis, après un certain délai, ils sont ratifiés. Cette deuxième étape a lieu lorsque le gouvernement a autorisé la législation et les autres organismes requis à appliquer le traité. C’est la réponse à l’observation de Lewis sur les rôles de l’exécutif et du législatif. La phase de ratification n’a lieu qu’après toute action législative requise. C’est là toute la question.
C’est ainsi que cela se passe au FCO. Les fonctionnaires négocient le traité d’extradition. Il est signé pour le Royaume-Uni. Le traité signé est ensuite renvoyé aux conseillers juridiques du FCO, au département de la nationalité et des traités, au département consulaire, au département nord-américain et à d’autres, puis il est envoyé aux avocats du Trésor et du Cabinet, au ministère de l’Intérieur, au Parlement et à tout autre département gouvernemental dont le domaine est concerné par le traité en question.
Le traité fait l’objet d’un examen approfondi afin de vérifier qu’il peut être pleinement appliqué dans toutes les juridictions du Royaume-Uni. Si ce n’est pas le cas, des modifications doivent être apportées à la loi pour qu’elle puisse être appliquée. Ces modifications peuvent être apportées par une loi du Parlement ou, plus généralement, par une législation secondaire en utilisant les pouvoirs conférés au secrétaire d’État par une loi. S’il existe déjà une loi du Parlement en vertu de laquelle le traité peut être mis en œuvre, aucune loi d’habilitation ne doit être adoptée. Les accords internationaux ne sont pas tous incorporés individuellement dans les lois anglaises ou écossaises par une nouvelle législation spécifique.
Il s’agit d’un processus très minutieux, mené étape par étape par des juristes et des fonctionnaires du FCO, du Trésor, du Cabinet Office [département exécutif du … Gouvernement britannique – NdT], du Ministère de l’Intérieur, du Parlement et d’autres instances. Chacun examinera en parallèle chaque clause du traité et vérifiera qu’elle peut être appliquée. Toutes les modifications nécessaires pour donner effet au traité doivent ensuite être apportées – modification de la législation et démarches administratives nécessaires. Les conseillers juridiques du FCO ne donneront le feu vert à la ratification du traité que lorsque tous les obstacles auront été levés, y compris la législation, et que les fonctionnaires du Parlement, du Trésor, du Cabinet Office, du Ministère de l’Intérieur et du FCO auront tous certifié que le traité est applicable au Royaume-Uni. Vous ne pouvez absolument pas ratifier le traité avant que les conseillers juridiques du FCO n’aient donné cette autorisation.
Il s’agit d’un processus sérieux. C’est pourquoi le traité d’extradition entre les États-Unis et le Royaume-Uni a été signé en 2003 et ratifié en 2007. Il ne s’agit pas d’un retard anormal.
Je sais donc avec certitude que TOUS les services juridiques compétents du gouvernement britannique DOIVENT avoir convenu que l’article 4.1 du traité d’extradition entre le Royaume-Uni et les États-Unis pouvait être mis en œuvre en vertu de la loi sur l’extradition de 2003. Cette certification doit avoir eu lieu, sinon le traité n’aurait jamais pu être ratifié.
Il s’ensuit nécessairement que le gouvernement britannique, en cherchant à faire valoir maintenant que l’article 4.1 est incompatible avec la loi de 2003, ment sciemment. [gras ajouté par le traducteur] Il ne pourrait y avoir d’abus de procédure plus flagrant.
J’ai tenu à ce que l’audition sur ce point particulier se termine afin de pouvoir vous faire bénéficier de mon expérience. Je vais me reposer pour l’instant, mais plus tard dans la journée, j’espère pouvoir continuer à m’exprimer sur l’échange d’hier au tribunal concernant la libération de Julian du sa cage blindée antiterroriste.
Avec mes remerciements à ceux qui ont fait des dons ou qui se sont inscrits pour rendre ce reportage possible. Je tiens à souligner une fois de plus que je ne veux absolument pas que quiconque donne quoi que ce soit si cela lui cause le moindre problème financier.
Cet article est entièrement libre de reproduction et de publication, y compris en traduction, et j’espère vivement que les gens le feront activement. La vérité nous rendra libres.
Craig MURRAY
Traduction « Ils jouent à la justice comme on joue à la dinette : en faisant semblant » par Viktor Dedaj pour Le Grand Soir avec probablement toutes les fautes et coquilles habituelles
https://www.legrandsoir.info/compte-rendu-du-proces-assange-4eme-jour.html
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Formidable coup de gueule de Virginie Despentes : Césars : «Désormais on se lève et on se barre»
«Désormais on se lève et on se barre»
Virginie Despentes : « Que ça soit à l’Assemblée nationale ou dans la culture, vous, les puissants, vous exigez le respect entier et constant. Ça vaut pour le viol, les exactions de votre police, les césars, votre réforme des retraites. En prime, il vous faut le silence de victimes. »
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Tribune. Je vais commencer comme ça : soyez rassurés, les puissants, les boss, les chefs, les gros bonnets : ça fait mal. On a beau le savoir, on a beau vous connaître, on a beau l’avoir pris des dizaines de fois votre gros pouvoir en travers de la gueule, ça fait toujours aussi mal. Tout ce week-end à vous écouter geindre et chialer, vous plaindre de ce qu’on vous oblige à passer vos lois à coups de 49.3 et qu’on ne vous laisse pas célébrer Polanski tranquilles et que ça vous gâche la fête mais derrière vos jérémiades, ne vous en faites pas : on vous entend jouir de ce que vous êtes les vrais patrons, les gros caïds, et le message passe cinq sur cinq : cette notion de consentement, vous ne comptez pas la laisser passer. Où serait le fun d’appartenir au clan des puissants s’il fallait tenir compte du consentement des dominés ? Et je ne suis certainement pas la seule à avoir envie de chialer de rage et d’impuissance depuis votre belle démonstration de force, certainement pas la seule à me sentir salie par le spectacle de votre orgie d’impunité.
Il n’y a rien de surprenant à ce que l’académie des césars élise Roman Polanski meilleur réalisateur de l’année 2020. C’est grotesque, c’est insultant, c’est ignoble, mais ce n’est pas surprenant. Quand tu confies un budget de plus de 25 millions à un mec pour faire un téléfilm, le message est dans le budget. Si la lutte contre la montée de l’antisémitisme intéressait le cinéma français, ça se verrait. Par contre, la voix des opprimés qui prennent en charge le récit de leur calvaire, on a compris que ça vous soûlait. Alors quand vous avez entendu parler de cette subtile comparaison entre la problématique d’un cinéaste chahuté par une centaine de féministes devant trois salles de cinéma et Dreyfus, victime de l’antisémitisme français de la fin du siècle dernier, vous avez sauté sur l’occasion. Vingt-cinq millions pour ce parallèle. Superbe. On applaudit les investisseurs, puisque pour rassembler un tel budget il a fallu que tout le monde joue le jeu : Gaumont Distribution, les crédits d’impôts, France 2, France 3, OCS, Canal +, la RAI… la main à la poche, et généreux, pour une fois. Vous serrez les rangs, vous défendez l’un des vôtres. Les plus puissants entendent défendre leurs prérogatives : ça fait partie de votre élégance, le viol est même ce qui fonde votre style. La loi vous couvre, les tribunaux sont votre domaine, les médias vous appartiennent. Et c’est exactement à cela que ça sert, la puissance de vos grosses fortunes : avoir le contrôle des corps déclarés subalternes. Les corps qui se taisent, qui ne racontent pas l’histoire de leur point de vue. Le temps est venu pour les plus riches de faire passer ce beau message : le respect qu’on leur doit s’étendra désormais jusqu’à leurs bites tachées du sang et de la merde des enfants qu’ils violent. Que ça soit à l’Assemblée nationale ou dans la culture – marre de se cacher, de simuler la gêne. Vous exigez le respect entier et constant. Ça vaut pour le viol, ça vaut pour les exactions de votre police, ça vaut pour les césars, ça vaut pour votre réforme des retraites. C’est votre politique : exiger le silence des victimes. Ça fait partie du territoire, et s’il faut nous transmettre le message par la terreur vous ne voyez pas où est le problème. Votre jouissance morbide, avant tout. Et vous ne tolérez autour de vous que les valets les plus dociles. Il n’y a rien de surprenant à ce que vous ayez couronné Polanski : c’est toujours l’argent qu’on célèbre, dans ces cérémonies, le cinéma on s’en fout. Le public on s’en fout. C’est votre propre puissance de frappe monétaire que vous venez aduler. C’est le gros budget que vous lui avez octroyé en signe de soutien que vous saluez – à travers lui c’est votre puissance qu’on doit respecter.
Il serait inutile et déplacé, dans un commentaire sur cette cérémonie, de séparer les corps de cis mecs aux corps de cis meufs. Je ne vois aucune différence de comportements. Il est entendu que les grands prix continuent d’être exclusivement le domaine des hommes, puisque le message de fond est : rien ne doit changer. Les choses sont très bien telles qu’elles sont. Quand Foresti se permet de quitter la fête et de se déclarer «écœurée», elle ne le fait pas en tant que meuf – elle le fait en tant qu’individu qui prend le risque de se mettre la profession à dos. Elle le fait en tant qu’individu qui n’est pas entièrement assujetti à l’industrie cinématographique, parce qu’elle sait que votre pouvoir n’ira pas jusqu’à vider ses salles. Elle est la seule à oser faire une blague sur l’éléphant au milieu de la pièce, tous les autres botteront en touche. Pas un mot sur Polanski, pas un mot sur Adèle Haenel. On dîne tous ensemble, dans ce milieu, on connaît les mots d’ordre : ça fait des mois que vous vous agacez de ce qu’une partie du public se fasse entendre et ça fait des mois que vous souffrez de ce qu’Adèle Haenel ait pris la parole pour raconter son histoire d’enfant actrice, de son point de vue.
Alors tous les corps assis ce soir-là dans la salle sont convoqués dans un seul but : vérifier le pouvoir absolu des puissants. Et les puissants aiment les violeurs. Enfin, ceux qui leur ressemblent, ceux qui sont puissants. On ne les aime pas malgré le viol et parce qu’ils ont du talent. On leur trouve du talent et du style parce qu’ils sont des violeurs. On les aime pour ça. Pour le courage qu’ils ont de réclamer la morbidité de leur plaisir, leur pulsion débile et systématique de destruction de l’autre, de destruction de tout ce qu’ils touchent en vérité. Votre plaisir réside dans la prédation, c’est votre seule compréhension du style. Vous savez très bien ce que vous faites quand vous défendez Polanski : vous exigez qu’on vous admire jusque dans votre délinquance. C’est cette exigence qui fait que lors de la cérémonie tous les corps sont soumis à une même loi du silence. On accuse le politiquement correct et les réseaux sociaux, comme si cette omerta datait d’hier et que c’était la faute des féministes mais ça fait des décennies que ça se goupille comme ça : pendant les cérémonies de cinéma français, on ne blague jamais avec la susceptibilité des patrons. Alors tout le monde se tait, tout le monde sourit. Si le violeur d’enfant c’était l’homme de ménage alors là pas de quartier : police, prison, déclarations tonitruantes, défense de la victime et condamnation générale. Mais si le violeur est un puissant : respect et solidarité. Ne jamais parler en public de ce qui se passe pendant les castings ni pendant les prépas ni sur les tournages ni pendant les promos. Ça se raconte, ça se sait. Tout le monde sait. C’est toujours la loi du silence qui prévaut. C’est au respect de cette consigne qu’on sélectionne les employés.
Et bien qu’on sache tout ça depuis des années, la vérité c’est qu’on est toujours surpris par l’outrecuidance du pouvoir. C’est ça qui est beau, finalement, c’est que ça marche à tous les coups, vos saletés. Ça reste humiliant de voir les participants se succéder au pupitre, que ce soit pour annoncer ou pour recevoir un prix. On s’identifie forcément – pas seulement moi qui fais partie de ce sérail mais n’importe qui regardant la cérémonie, on s’identifie et on est humilié par procuration. Tant de silence, tant de soumission, tant d’empressement dans la servitude. On se reconnaît. On a envie de crever. Parce qu’à la fin de l’exercice, on sait qu’on est tous les employés de ce grand merdier. On est humilié par procuration quand on les regarde se taire alors qu’ils savent que si Portrait de la jeune fille en feu ne reçoit aucun des grands prix de la fin, c’est uniquement parce qu’Adèle Haenel a parlé et qu’il s’agit de bien faire comprendre aux victimes qui pourraient avoir envie de raconter leur histoire qu’elles feraient bien de réfléchir avant de rompre la loi du silence. Humilié par procuration que vous ayez osé convoquer deux réalisatrices qui n’ont jamais reçu et ne recevront probablement jamais le prix de la meilleure réalisation pour remettre le prix à Roman fucking Polanski. Himself. Dans nos gueules. Vous n’avez décidément honte de rien. Vingt-cinq millions, c’est-à-dire plus de quatorze fois le budget des Misérables, et le mec n’est même pas foutu de classer son film dans le box-office des cinq films les plus vus dans l’année. Et vous le récompensez. Et vous savez très bien ce que vous faites – que l’humiliation subie par toute une partie du public qui a très bien compris le message s’étendra jusqu’au prix d’après, celui des Misérables, quand vous convoquez sur la scène les corps les plus vulnérables de la salle, ceux dont on sait qu’ils risquent leur peau au moindre contrôle de police, et que si ça manque de meufs parmi eux, on voit bien que ça ne manque pas d’intelligence et on sait qu’ils savent à quel point le lien est direct entre l’impunité du violeur célébré ce soir-là et la situation du quartier où ils vivent. Les réalisatrices qui décernent le prix de votre impunité, les réalisateurs dont le prix est taché par votre ignominie – même combat. Les uns les autres savent qu’en tant qu’employés de l’industrie du cinéma, s’ils veulent bosser demain, ils doivent se taire. Même pas une blague, même pas une vanne. Ça, c’est le spectacle des césars. Et les hasards du calendrier font que le message vaut sur tous les tableaux : trois mois de grève pour protester contre une réforme des retraites dont on ne veut pas et que vous allez faire passer en force. C’est le même message venu des mêmes milieux adressé au même peuple : «Ta gueule, tu la fermes, ton consentement tu te le carres dans ton cul, et tu souris quand tu me croises parce que je suis puissant, parce que j’ai toute la thune, parce que c’est moi le boss.»
Alors quand Adèle Haenel s’est levée, c’était le sacrilège en marche. Une employée récidiviste, qui ne se force pas à sourire quand on l’éclabousse en public, qui ne se force pas à applaudir au spectacle de sa propre humiliation. Adèle se lève comme elle s’est déjà levée pour dire voilà comment je la vois votre histoire du réalisateur et son actrice adolescente, voilà comment je l’ai vécue, voilà comment je la porte, voilà comment ça me colle à la peau. Parce que vous pouvez nous la décliner sur tous les tons, votre imbécillité de séparation entre l’homme et l’artiste – toutes les victimes de viol d’artistes savent qu’il n’y a pas de division miraculeuse entre le corps violé et le corps créateur. On trimballe ce qu’on est et c’est tout. Venez m’expliquer comment je devrais m’y prendre pour laisser la fille violée devant la porte de mon bureau avant de me mettre à écrire, bande de bouffons.
Adèle se lève et elle se casse. Ce soir du 28 février on n’a pas appris grand-chose qu’on ignorait sur la belle industrie du cinéma français par contre on a appris comment ça se porte, la robe de soirée. A la guerrière. Comme on marche sur des talons hauts : comme si on allait démolir le bâtiment entier, comment on avance le dos droit et la nuque raidie de colère et les épaules ouvertes. La plus belle image en quarante-cinq ans de cérémonie – Adèle Haenel quand elle descend les escaliers pour sortir et qu’elle vous applaudit et désormais on sait comment ça marche, quelqu’un qui se casse et vous dit merde. Je donne 80 % de ma bibliothèque féministe pour cette image-là. Cette leçon-là. Adèle je sais pas si je te male gaze ou si je te female gaze mais je te love gaze en boucle sur mon téléphone pour cette sortie-là. Ton corps, tes yeux, ton dos, ta voix, tes gestes tout disait : oui on est les connasses, on est les humiliées, oui on n’a qu’à fermer nos gueules et manger vos coups, vous êtes les boss, vous avez le pouvoir et l’arrogance qui va avec mais on ne restera pas assis sans rien dire. Vous n’aurez pas notre respect. On se casse. Faites vos conneries entre vous. Célébrez-vous, humiliez-vous les uns les autres tuez, violez, exploitez, défoncez tout ce qui vous passe sous la main. On se lève et on se casse. C’est probablement une image annonciatrice des jours à venir. La différence ne se situe pas entre les hommes et les femmes, mais entre dominés et dominants, entre ceux qui entendent confisquer la narration et imposer leurs décisions et ceux qui vont se lever et se casser en gueulant. C’est la seule réponse possible à vos politiques. Quand ça ne va pas, quand ça va trop loin ; on se lève on se casse et on gueule et on vous insulte et même si on est ceux d’en bas, même si on le prend pleine face votre pouvoir de merde, on vous méprise on vous dégueule. Nous n’avons aucun respect pour votre mascarade de respectabilité. Votre monde est dégueulasse. Votre amour du plus fort est morbide. Votre puissance est une puissance sinistre. Vous êtes une bande d’imbéciles funestes. Le monde que vous avez créé pour régner dessus comme des minables est irrespirable. On se lève et on se casse. C’est terminé. On se lève. On se casse. On gueule. On vous emmerde.
Virginie DESPENTES.
Source : « Libération », https://www.liberation.fr/debats/2020/03/01/cesars-desormais-on-se-leve-et-on-se-barre_1780212
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[Injustice chimiquement pure] Le journaliste Ami du peuple Julian Assange est torturé à mort par nos prétendus « représentants » dans le secret des geôles londoniennes alors qu’il n’est ACCUSÉ DE RIEN. Viktor Dedaj
Viktor Dedaj explique bien les mensonges mainstream sur le cas Assange :
JULIAN ASSANGE N’EST ACCUSÉ DE RIEN
Abonnez-vous au site de Viktor, Le Grand Soir, c’est un des meilleurs sites du pays pour se désintoxiquer des bobards des dominants.
#FreeAssange
Étienne.
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Doc RT 1h sur Julian ASSANGE : « LE COURAGE EST CONTAGIEUX »
J’aime cet homme. Il incarne pour moi le bien ; je le trouve exemplaire de l’idée que je me fais du journaliste : « sentinelle du peuple », vigilant et courageux, inquiétant vraiment les pouvoirs en révélant leurs intrigues et leurs crimes.
Le contraire de tous les pourris vendus « maintream », qui protègent les pouvoirs exploiteurs et martyrisent les lanceurs d’alerte.
Et la torture à mort que lui infligent les criminels dont il a précisément dévoilé les odieux forfaits n’en est que plus révoltante.
#FreeAssange
Étienne.
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Rendez-vous à Longuyon (54) le 7 mars 2020 : quelle démocratie pour demain ? Représentative ? Directe ? Quelle place pour le RIC dans notre constitution ?
La perspective d’un débat loyal avec un élu m’enchante. Je me souviens d’une soirée passionnante sur ce format, pendant une tournée en Bretagne l’an passé :
[IMPORTANT]Soirée mémorable, le 8 février 2019, avec Paul Molac (député LREM) et Cédric André, et plein de gilets jaunes bretons : « LA BRETAGNE VEUT LE RIC »
Je ne doute pas que ce prochain échange avec Xavier Paluszkiewicz sera à nouveau très éclairant pour tout le monde.
Au plaisir de vous y retrouver.
Étienne.
Annonce et réservation sur Facebook :
www.facebook.com/events/3522961034443798
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« Presque toutes les guerres sont le résultat de mensonges médiatiques. » Julian Assange, martyr du journalisme pour avoir créé WIKILEAKS, UN OUTIL POPULAIRE CONTRE LES GUERRES
« Presque toutes les guerres sont le résultat de mensonges médiatiques. » Julian Assange
Écoutez Julian parler :
"The media can stop wars, but prefers to lie" – Julian Assange
The media has the power to save Assange, but prefers to lie… pic.twitter.com/pTO584S0WV— In the NOW (@IntheNow_tweet) February 27, 2020
Ils ont menti sur le Vietnam,
Ils ont menti sur l’Afghanistan,
Ils ont menti sur l’Irak (2 fois),
Ils ont menti sur la Libye,
Ils ont menti sur la Syrie,
Ils ont menti sur le Yémen,
etc. !
Ils mentent tout le temps.
Impunément.
ASSANGE A CRÉÉ UNE SOLUTION PUISSANTE ET SOLIDE !
C’est LA cause de sa torture depuis 10 ans, torture à mort menée en notre nom (!) par les criminels qu’il dénonce !!!
#FreeAssange
Étienne.
[Projet d’expérimentation démocratique] Élaborer ensemble le RÈGLEMENT INTÉRIEUR de nos prochaines assemblées démocratiques, avec Maxime Péroud (suite)
Chers amis,
Je vous recommande de vous intéresser à au projet présenté par Maxime Péroud dans une longue vidéo qu’il a réalisée et qui est accessible sur le site www.exp-demo.jimdo.com .
Et de vous intéresser à son invitation à le rencontrer pour parler du projet avec lui et voir, à la fin de cette réunion, si vous pourriez être un coéquipier / une coéquipière de qualité (il cherche 5 à 10 coéquipiers supplémentaires sur ce projet en cours).
Adresse de son invitation sur Facebook : https://www.facebook.com/events/1385257511634703/
J’ai rencontré Maxime et nous avons eu également plusieurs longues conversations téléphoniques. Il est l’initiateur de ce grand projet, très organisé, cohérent avec nos travaux sur la Constitution. Ce projet consiste à simuler (dans plus d’un an, quand tout sera prêt), avec au maximum 30 à 40 participants, une assemblée démocratique délibérante comme il en sera prévu certainement dans la future Constitution. Au cours de ces travaux parlementaires simulés, l’équipe de ce projet élaborera le règlement intérieur de cette assemblée tout en respectant ce règlement dans sa version en cours d’élaboration.
Le règlement intérieur pourra servir à des assemblées dites « autonomes » (pour l’instant sans relation avec d’autres instances de pouvoir) et sans commission (pour simplifier dans un premier temps). Un projet ultérieur aboutira à un règlement prévoyant des commissions.
Pour le moment, l’équipe actuelle en est à la phase de préparation. Ils ont fort à faire et ils ont besoin de renfort.
Voici ce que Maxime m’a écrit pour me présenter la raison d’être de son projet :
1. Nous voulons qu’un jour – appelons-le le jour J – notre pays devienne une démocratie pour la première fois de son histoire. Les pouvoirs seront organisés de manière à servir durablement l’intérêt général et, pour ce faire, seront entre les mains du peuple ou sous son contrôle effectif.
Cela signifie que, le jour J, ces pouvoirs auront été organisés sous forme provisoire par une Pré-Constitution rédigée nécessairement avant le jour J par des citoyens volontaires. Cette Pré-Constitution prévoira certainement une Assemblée Constituante qui, après le jour J, repartira de cette Pré-Constitution provisoire pour établir la 1ère Constitution (réellement) démocratique.
2. Pour pouvoir servir, cette Pré-Constitution devra obligatoirement être considérée comme légitime par la majeure partie des forces démocrates du moment. Or, il existe déjà de nombreuses variantes de projets de Constitution et, chaque année, il en émerge de nouvelles. Aucune d’entre elles ne peut correspondre à la future Pré-Constitution car elle provient d’un petit groupe et sera contestée par les autres groupes.
La seule solution pour élaborer une Pré-Constitution suffisamment légitime pour pouvoir organiser provisoirement les pouvoirs le jour J est de l’élaborer en Assemblée Pré-Constituante, une assemblée certainement composée de plusieurs centaines de citoyens volontaires issus des différents mouvements (associations, partis, groupes, …) se revendiquant ou pas « démocrates ».
3. La première question que se posera cette Assemblée Constituante sera la suivante : « comment allons-nous travailler, selon quelles règles du jeu : règles pour les débats, les votations, règles de comportements, etc. ? »
Ces règles feront l’objet d’un document essentiel : le règlement intérieur de cette Assemblée Pré-Constituante. Sans ce règlement, pas de travaux possibles !
4. Nous devons dès maintenant réfléchir à ces règles de fonctionnement d’une grande assemblée démocratique de manière à pouvoir livrer à la Pré-Constituante une version avancée d’un règlement intérieur. La Pré-Constituante n’aura plus qu’à le finaliser pendant les premières semaines de son existence, après quoi elle sera « opérationnelle ».
Lui livrer ce règlement intérieur lui fera gagner un temps considérable car l’élaboration de ce règlement n’est pas simple et va prendre beaucoup de temps : il n’aura rien à voir avec le « petit protocole de sociocratie délibérative » utilisé actuellement dans les ateliers constituants. Ce protocole ne peut servir qu’à des petits groupes de travail. Il est totalement inadapté à des assemblées délibérantes de plusieurs centaines de citoyens ! Il suffit d’imaginer à quel point ces assemblées seraient inefficaces si les débats y avaient lieu en levant la main pour partager une idée spontanée.
Une assemblée délibérante de plusieurs centaines de citoyens ne pourra élaborer efficacement des textes complexes que si les débats portent sur des propositions et des amendements rédigés et mis à la disposition de tous les parlementaires. Un peu à la manière de notre Assemblée Nationale actuelle, à ceci près (et la nuance est de taille !) que le règlement intérieur garantira la stricte égalité politique des parlementaires et les obligera à des débats rationnels servant l’intérêt général. Le règlement intérieur à élaborer sera donc lui-même un texte complexe.
5. Le projet en cours et dont nous cherchons à renforcer l’équipe actuellement vise à établir une version simplifiée d’un tel règlement intérieur mais aussi de l’expérimenter pour en garantir la pertinence. L’idée est de conduire ces travaux en simulant, à effectif réduit, les travaux d’une telle assemblée qui mettrait au point son propre règlement intérieur, travaux qui seront eux-mêmes régis par le règlement intérieur en cours d’élaboration.
Nous en sommes pour le moment à la phase de préparation et, du fait du départ d’un nombre important des membres de l’équipe (principalement des départs volontaires et des exclusions du fait de l’absence de contributions), nous souhaitons renforcer l’équipe de 5 à 10 membres. Par la suite, un peu avant le début des simulations, nous ferons à nouveau appel à des volontaires car nous aurons besoin d’être plus nombreux.
Ce projet est totalement indépendant de l’écriture de la Constitution mais, en même temps, il lui est complémentaire. Il s’annonce comme une véritable aventure politique passionnante mais aussi exigeante.
Pour bien le comprendre, il faut prendre le temps de se documenter à son sujet.
Une vidéo très didactique en 10 parties explique le déroulement et les attendus du projet à l’aide de nombreux schémas. Elle se trouve dans la page vidéo du site dédié au projet : www.exp-demo.jimdo.com
Pour ceux que le projet intéresse ou interpelle, des Mumble d’information (réunions d’information) auront lieu régulièrement dans les semaines à venir pour leur permettre de poser leurs questions et présenter leurs commentaires et objections qui leur seront venus à l’esprit pendant le visionnage de cette vidéo. Maxime Péroud animera ces réunions et répondra à chaque fois aussi clairement que possible à ces questions et objections.
Les Mumble seront annoncés en tant qu’événement sur Facebook postés sur la page FB de Maxime.
L’avenir ne se construit pas seulement dans les ateliers constituants et assez peu en discutant de l’actualité. Nous devons aussi élaborer les textes de demain et nous organiser pour être capables de le faire en grand nombre, en complément de nos actions dites « de terrain ».
Maxime Peroud.
Je cautionne autant que je le peux ce projet qui m’apparaît comme absolument nécessaire pour préparer la démocratie de demain.
Je vous encourage à vous y intéresser et, pour commencer, à regarder cette vidéo puis à participer à l’un des prochains Mumble d’information.
Étienne.
PS : je vous ai déjà parlé, en 2017, du travail démocratique impressionnant de Maxime Péroud : https://www.chouard.org/2017/09/09/projet-dexperimentation-democratique-elaborer-ensemble-le-reglement-interieur-de-nos-prochaines-assemblees-democratiques-avec-maxime-peroud
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La juge Emma Arbuthnot refuse de se récuser dans le simulacre de procès de Julian Assange ! La séparation des pouvoirs ne suffit pas pour garantir les Droits de l’Homme ! il faut instituer UN POUVOIR POPULAIRE au-dessus de TOUS les pouvoirs.
La juge Emma Arbuthnot refuse de se récuser dans le simulacre de procès de Julian Assange
Par Thomas Scripps
12 juillet 2019
La juge Emma Arbuthnot a refusé de se récuser des audiences d’extradition de Julian Assange, le fondateur de WikiLeaks. Voilà à quoi ressemble la «justice de classe».
Arbuthnot, magistrat en chef et juge de district supérieur pour l’Angleterre et le Pays de Galles, bafoue les principes juridiques fondamentaux pour s’assurer qu’elle préside un simulacre de procès contre Assange. Le procès doit reprendre au Tribunal de première instance à Westminster le 24 février prochain. En cas d’extradition, Assange fait face à des accusations en vertu de la Loi sur l’espionnage aux États-Unis et encourt une peine d’emprisonnement de 175 ans. D’autres accusations sont en instance, qui pourraient inclure la peine de mort.

La juge Emma Arbuthnot, magistrat en chef et juge de district supérieur pour l’Angleterre et le Pays de Galles.
Le «Guide sur la conduite des juges» («Guide to Judicial Conduct) en Angleterre et au Pays de Galles, publié en 2018, stipule que «l’indépendance judiciaire est une pierre angulaire de notre système de gouvernement dans une société démocratique et une protection de la liberté et des droits du citoyen dans le cadre de l’État de droit. La magistrature doit être perçue comme indépendante des organes législatif et exécutif du gouvernement, tant à titre individuel que dans son ensemble».
Arbuthnot aurait dû se récuser d’office sur cette base.
Son mari, James Norwich Arbuthnot, est un membre conservateur de la Chambre des Lords. Il est intimement lié aux forces armées et aux services de sécurité britanniques, dont les opérations criminelles ont été exposées par WikiLeaks.
En tant que député conservateur, Lord Arbuthnot a présidé, entre 2005 et 2014, le Comité spécial de la défense, l’organe qui supervise le ministère de la Défense et les forces armées britanniques. Il était en poste lors des opérations militaires en cours en Afghanistan et en Irak, ainsi que des guerres pour le changement de régime en Libye et en Syrie.
Il est actuellement coprésident du conseil consultatif du fabricant britannique de matériel de défense Thales et membre du conseil consultatif de l’Institut royal des services unis pour les études de défense et de sécurité (RUSI). Lord Arbuthnot est également un ancien directeur d’une société de conseil en sécurité et en renseignement, SC Strategy, où il a travaillé pendant deux ans aux côtés des codirecteurs Lord Carlile et Sir John Scarlett.
Carlile est un éminent défenseur du MI5 qui a soutenu la Loi sur les pouvoirs d’enquête de 2016 (surnommée la «Charte des fouineurs») qui permet à l’État britannique d’accéder aux dossiers de connexion Internet sans mandat. Il a fait valoir que les révélations d’Edward Snowden sur la surveillance de masse perpétrée illégalement par l’État «équivalaient à un acte criminel». Il a supervisé la mise en œuvre de la législation antiterroriste et examiné les procédures de sécurité nationale en Irlande du Nord.
Scarlett est l’ancien directeur du MI6 et l’ancien président du Comité mixte du renseignement (JIC) du gouvernement. Il a supervisé la production d’un rapport qui plaide en faveur du droit des services secrets à «collecter des données de communication en masse». Enfin, il a eu la responsabilité de compiler le «dossier douteux» sur les armes de destruction massive en Irak.
Les activités de Lord Arbuthnot et de ses collègues ont fait l’objet de milliers de révélations de WikiLeaks. La base de données de WikiLeaks contient près de 2.000 références à Thales et près de 450 à RUSI. Lord Arbuthnot lui-même peut être trouvé dans plus de 50 entrées.
Comme l’ont fait valoir l’équipe juridique d’Assange et le rapporteur de l’ONU sur la torture, Nils Melzer, ce «conflit d’intérêts grave» oblige Lady Arbuthnot à se retirer de l’affaire Assange. Son mari a consacré toute sa vie politique à écraser la transparence et la responsabilité préconisées par WikiLeaks.
Le «Guide sur la conduite des juges» stipule explicitement que «Lorsqu’un proche membre de la famille d’un juge est politiquement actif, le juge doit garder à l’esprit la possibilité que, dans certaines procédures, cette activité politique puisse soulever des préoccupations quant à l’impartialité du juge et son détachement du processus politique et doit agir en conséquence».
De plus, «une animosité personnelle à l’égard d’un parti est aussi une raison impérieuse de disqualification».
L’animosité d’Arbuthnot envers Assange a été rendue publique.
Aucun argument juridique ne convaincra Arbuthnot de se récuser. Ses liens familiaux avec les services de sécurité sont la raison pour laquelle elle a été choisie pour superviser cette affaire. La classe dirigeante britannique exige qu’un fonctionnaire approuve le transfert d’Assange aux États-Unis, ce qui équivaut à une restitution extraordinaire.
Deux précédents cas de juges qui se sont récusés d’affaires judiciaires anglaises offrent un contraste frappant avec l’affaire du fondateur de WikiLeaks.
La première concerne Arbuthnot elle-même. En août 2018, elle a été contrainte de se retirer d’un procès contre Uber après que l’Observateur eut révélé que son mari avait un intérêt commercial dans la société de transport via SC Strategy et son client, la Qatar Investment Authority. Un porte-parole judiciaire a déclaré: «Dès que ce lien lui a été signalé, elle a confié l’affaire à un autre juge. C’est essentiel que les juges soient non seulement absolument impartiaux, mais qu’ils soient perçus comme tels.»
Ces préoccupations ne semblent pas exister dans le cas d’Assange. Aucun article dans les médias grand public n’a fait état de la contradiction flagrante entre les actions d’Arbuthnot en 2018 et celles d’aujourd’hui.
Le deuxième cas est celui d’un juge qui ne s’est pas récusé en 1998. Il s’agissait de la tentative d’extradition de l’ancien dictateur, tortionnaire et bourreau chilien Augusto Pinochet pour faire face à des accusations pénales en Espagne.
Lord Hoffmann a été sévèrement attaqué pour ne pas avoir établi clairement ses liens avec le groupe de défense des droits humains Amnesty International, qui était une partie dans l’affaire. Il a été président du service de collecte de fonds de l’organisme de bienfaisance à titre bénévole. Hoffmann avait été l’un des trois juges sur cinq (Lords juristes) à voter en faveur de l’annulation d’une décision de la Haute Cour qui confirmait l’immunité de Pinochet contre les poursuites judiciaires en raison de son statut de chef d’État au moment de ses crimes. Dans un geste sans précédent, le verdict de la Chambre des Lords contre Pinochet (impliquant Hoffmann) a été annulé par cinq juges et n’a été reconfirmé qu’un an plus tard, la plupart des accusations portées contre Pinochet ayant été invalidées par d’importantes réserves.
Les Lords juristes, dirigés par Lord Browne-Wilkinson, ont développé des arguments qui exigeraient absolument qu’Arbuthnot se récuse dans l’affaire Assange. Auparavant, pour qu’un juge soit automatiquement disqualifié d’une affaire, il fallait qu’il ait un intérêt financier dans son issue. La décision de Lord Browne-Wilkinson a étendu le principe de la disqualification automatique aux catégories beaucoup plus larges d’«intérêts» non financiers ou de soutien à des «causes».
Le verdict d’annulation a accepté l’affirmation de Pinochet selon laquelle le droit à un procès équitable lui avait été refusé en vertu de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, qui stipule que «tout juge pour lequel il y aurait raison légitime de craindre un manque d’impartialité doit se retirer».
Les dénonciations d’Hoffmann ont été brutales. Le Guardian a rapporté le 16 janvier 1999 que cinq Lords juristes avaient «critiqué Lord Hoffmann pour avoir bafoué le principe fondamental selon lequel “la justice ne doit pas seulement être rendue, mais doit être vue comme telle”. Cette critique dévastatrice a jeté le doute sur l’avenir de Lord Hoffmann en tant que Lord juriste».
Le Guardian poursuit: «Les juges accusent Lord Hoffmann d’avoir ignoré un principe judiciaire de base appris par chaque étudiant en première année de droit. La règle est si bien connue, a déclaré Lord Hope, qu’aucun tribunal civil du Royaume-Uni n’a vu son jugement annulé pour une violation de cette règle au cours de ce siècle… “Les juges sont bien conscients qu’ils ne devraient pas siéger dans une affaire dans laquelle ils ont le moindre intérêt personnel, que ce soit comme défendeur ou comme procureur”, a déclaré Lord Hope.»
«Lord Hutton a dit que la confiance du public dans l’intégrité de l’administration de la justice serait ébranlée si le vote décisif de Lord Hoffmann selon lequel le général Pinochet pourrait être poursuivi était maintenu.»
En janvier 2000, le ministre de l’Intérieur du gouvernement travailliste de Blair, Jack Straw, est intervenu pour protéger le meurtrier de masse, en annulant la décision de la Chambre des Lords et insistant pour que les procédures d’extradition soient suspendues en raison de la mauvaise santé présumée de Pinochet. Pinochet est revenu au Chili le 3 mars, atterrissant à l’aéroport de Santiago où il s’est levé de son fauteuil roulant aux acclamations de ses partisans fascisants.
De toute évidence, «l’impartialité judiciaire» signifie une chose lorsqu’il s’agit de défendre un dictateur brutal et allié de longue date de l’impérialisme américain et britannique. C’en est une autre quand il s’agit de persécuter un journaliste de renommée mondiale qui a dénoncé les crimes de la classe dirigeante.
Du point vue de l’impérialisme, le scalp d’Assange est absolument nécessaire pour poursuivre ses guerres de conquête de style colonial et la guerre mondiale contre les droits sociaux et démocratiques de la classe ouvrière. Pour le faire taire à jamais, non seulement le pouvoir judiciaire, mais aussi l’appareil d’État tout entier et ses défenseurs dans les médias se débarrassent de toute prétention démocratique et libérale.
Le Parti de l’égalité socialiste soutient les revendications des partisans d’Assange qui demandent à Arbuthnot de se récuser. Mais nous lançons l’avertissement que la seule force capable de libérer Assange est la classe ouvrière internationale mobilisée dans une lutte politique collective contre la classe dirigeante et son appareil judiciaire.
(Article paru en anglais le 11 juillet 2019)
Source : WSWS juillet 2019
—
Mon commentaire:
Cette enquête sur les gravissimes conflits d’intérêts des juges en train de martyriser Assange en toute impunité est consternante.
1) Wikileaks ou RSF ou WSWS ne pourraient-ils pas enquêter et publier le cv complet (avec photo et adresse) de la juge Vanessa Baraitser, pour faire connaître aux citoyens les conflits d’intérêts et raisons personnelles d’être aussi partiale et injuste de ce « juge » stalinien ?
2) Cette totale impunité d’une injustice criante pousse à réfléchir en amont aux institutions mêmes de la justice.
Nous n’avons pas de constitution.
À l’évidence, la séparation des pouvoirs ne suffit pas pour garantir les Droits de l’Homme ! il faut instituer UN POUVOIR POPULAIRE au-dessus de TOUS les pouvoirs.
Ce pouvoir populaire s’exercerait à travers des Chambres de contrôle, tirées au sort et formées pour bien jouer leur rôle, dédiées à chaque pouvoir : Chambre de contrôle des juges, Chambre de contrôle des forces armées, Chambre de contrôle des élus, Chambre de contrôle des banques, Chambre de contrôle de l’information (médias, instituts de sondages et de statistiques, information sur le processus électoral), etc.
La formation des magistrats et leur indépendance doit absolument être reconsidérée par leurs victimes, les citoyens qui les paient pour rendre la Justice.
SEULS les citoyens eux-mêmes (directement) sont LÉGITIMES (et APTES) à écrire puis défendre une vraie constitution (digne de ce nom).
Voilà un beau sujet pour vos prochains ateliers constituants personnels : le pouvoir judiciaire, nomination et contrôle des magistrats.
#FreeAssange
#GrèveGénéraleConstituante
Étienne.
Fil Facebook correspondant à ce billet :
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[Procès stalinien de Moscou à Londres, suite] Compte-rendu du Procès Assange, 3eme jour (26 fév 2020), par Craig Murray
[Procès stalinien de Moscou à Londres, suite]
Compte-rendu du Procès Assange, 3eme jour
Craig MURRAY
photo : illustration par la rédaction du Grand Soir (source indéterminée)
Lors de la procédure d’hier au tribunal, l’accusation a adopté des arguments si catégoriques et apparemment déraisonnables que je me suis demandé comment les rédiger d’une manière qui ne semble pas être une caricature ou une exagération injuste de ma part. Ce à quoi on assiste dans ce tribunal a depuis longtemps dépassé le stade de la caricature. Tout ce que je peux faire, c’est vous donner l’assurance personnelle que ce que je raconte est conforme à la réalité.
Comme d’habitude, je traiterai d’abord des questions de procédure et du traitement réservé à Julian, avant d’exposer clairement les arguments juridiques avancés.
Vanessa Baraitser a pour instruction claire de faire semblant d’être inquiète en demandant, vers la fin de chaque séance, juste avant la pause de toute façon, si Julian se sent bien et s’il souhaite une pause. Elle ignore alors systématiquement sa réponse. Hier, il a répondu assez longuement qu’il n’entendait pas bien dans sa boîte de verre et qu’il ne pouvait pas communiquer avec ses avocats (à un certain moment hier, ils avaient commencé à l’empêcher de passer des notes à son avocat, ce qui, j’apprends, a été le contexte de la prévention agressive de sa poignée de main d’adieu à Garzon).
Baraitser a insisté sur le fait qu’il ne pouvait être entendu que par ses avocats, ce qui, étant donné qu’on l’avait empêché de leur donner des instructions, était plutôt osé de sa part. Ceci dit, nous avons eu un ajournement de dix minutes pendant que Julian et son avocat étaient autorisés à parler dans les cellules – probablement là où ils pourraient être à nouveau mis sur écoute de façon plus pratique.
Au retour, Edward Fitzgerald a fait une demande formelle pour que Julian soit autorisé à s’asseoir à côté de ses avocats dans la cour. Julian était « un homme doux et intellectuel » et non un terroriste. Baraitser répondit que la libération d’Assange du banc des accusés dans le corps du tribunal signifierait qu’il était libre. Pour y parvenir, il faudrait demander une mise en liberté sous caution.
Une fois de plus, l’avocat de l’accusation James Lewis est intervenu du côté de la défense pour tenter de rendre le traitement de Julian moins extrême. Il n’était pas, a-t-il suggéré avec réticence, tout à fait certain qu’il était exact de devoir demander une libération sous caution pour que Julian puisse s’asseoir dans la salle du tribunal, ou que le fait d’être dans la salle du tribunal et encadré d’agents de sécurité signifiait qu’un prisonnier n’était plus en détention. Les prisonniers, même les plus dangereux des terroristes, ont témoigné depuis la barre des témoins dans la salle du tribunal aux avocats et aux magistrats. Au sein de la Haute Cour, les prisonniers s’asseyaient fréquemment avec leurs avocats lors des audiences d’extradition, dans les cas extrêmes de criminels violents menottés à un agent de sécurité.
Baraitser a répondu qu’Assange pouvait représenter un danger pour le public. Il s’agit d’une question de santé et de sécurité. Comment Fitzgerald et Lewis pensaient-ils qu’elle avait la capacité d’effectuer l’évaluation des risques nécessaire ? Il faudrait que le groupe 4 décide si cela est possible.
Oui, elle a vraiment dit cela. Le groupe 4 devrait décider.
Baraitser s’est mis à balancer du jargon comme un Dalek devenu incontrôlable. L’ »évaluation des risques » et la « santé et la sécurité » ont beaucoup fait parler d’eux. Elle a commencé à ressembler à quelque chose de pire qu’un Dalek, un fonctionnaire local particulièrement stupide et de très mauvaise qualité. « Pas de juridiction » – « Jusqu’au groupe 4 ». Se ressaisissant un peu, elle a affirmé fermement que la remise en détention ne peut signifier que la remise au banc des accusés, nulle part ailleurs dans la salle. Si la défense voulait qu’il soit dans la salle d’audience où il pourrait mieux entendre la procédure, elle ne pourrait que demander la mise en liberté sous caution et sa libération de détention en général. Elle a alors regardé les deux avocats dans l’espoir que cela les aurait fait s’asseoir, mais tous deux sont restés debout.
Dans sa manière réservée (qui, je l’avoue, commence à me taper sur le système), Lewis a déclaré : « l’accusation est neutre sur cette demande, bien sûr, mais, euh, je ne pense vraiment pas que ce soit juste ». Il la regardait comme un oncle bienveillant dont la nièce préférée vient de commencer à boire de la tequila à la bouteille lors d’une fête de famille.
Baraitser a conclu l’affaire en déclarant que la défense devrait soumettre des arguments écrits sur ce point avant 10 heures demain matin, et qu’elle tiendrait alors une audience séparée sur la question de la position de Julian au tribunal.
La journée avait commencé avec un Magistrat Baraitser très en colère s’adressant à la galerie publique. Hier, a-t-elle dit, une photo avait été prise à l’intérieur de la salle d’audience. Prendre ou tenter de prendre des photos à l’intérieur de la salle d’audience est un délit. Vanessa Baraitser paraissait à ce moment avoir très envie d’incarcérer quelqu’un. Elle semblait également, dans sa colère, faire l’hypothèse non fondée que celui qui avait pris la photo depuis la galerie publique mardi était encore présent mercredi ; je pense que non. Être en colère contre le public au hasard doit être très stressant pour elle. Je soupçonne qu’elle crie beaucoup dans les trains.
Mme Baraitser n’aime pas les photos – elle semble être la seule personnalité publique en Europe occidentale à ne pas avoir de photo d’elle sur Internet. En effet, n’importe quel pékin a laissé plus de preuves de son existence et de son histoire sur internet que Vanessa Baraitser. Ce qui n’est pas un crime de sa part, mais je soupçonne qu’un tel effacement ne se fait pas sans un effort considérable. [Ndt – Cela demande effectivement soit un travail considérable soit une attention de tous les instants et de longue date] Quelqu’un m’a suggéré qu’elle pourrait être un hologramme, mais je ne pense pas. Les hologrammes ont plus d’empathie qu’elle.
J’ai été amusé par l’infraction pénale consistant à tenter de prendre des photos dans la salle d’audience. Dans quelle mesure faudrait-il être incompétent pour tenter de prendre une photo et ne pas le faire ? Et si aucune photo n’a été prise, comment prouver que vous avez tenté d’en prendre une, plutôt que d’envoyer un SMS à votre mère ? Je suppose que « tenter de prendre une photo » est un crime qui pourrait attraper quelqu’un arrivant avec un grand appareil photo reflex, un trépied et plusieurs lampes d’éclairage, mais aucun ne semble avoir réussi à se glisser dans la galerie publique.
Baraitser n’a pas précisé si la publication d’une photographie prise dans une salle d’audience (ou même la tentative de publier une photographie prise dans une salle d’audience) constituait un délit. Je pense que c’est le cas. Quoi qu’il en soit, Le Grand Soir a publié une traduction de mon rapport hier, et vous pouvez y voir une photo de Julian dans sa cage antiterroriste en verre pare-balles. Et je m’empresse d’ajouter qu’elle n’a pas été prise par moi. [et la Rédaction du Grand Soir s’empresse d’ajouter que cette photo ne nous a pas été fournie par M. Murray ni par les services de renseignements russes et qu’elle circule par-ci par-là sur l’internet]
Nous en arrivons maintenant à l’examen des arguments juridiques d’hier concernant la demande d’extradition elle-même. Heureusement, ils sont assez simples à résumer, car bien que nous ayons eu cinq heures de discussions, elles ont consisté en grande partie à ce que les deux parties s’affrontent en citant des dizaines d’ »autorités », par exemple des juges morts, pour faire valoir leur point de vue, et en répétant ainsi continuellement les mêmes points sans grande valeur d’exégèse des innombrables citations.
Comme l’a préfiguré hier le magistrat Baraitser, le ministère public soutient que l’article 4.1 du traité d’extradition entre le Royaume-Uni et les États-Unis n’a pas force de loi.
Les gouvernements britannique et américain affirment que la Cour applique le droit national, et non le droit international, et que le traité n’a donc aucune valeur. Cet argument a été présenté à la Cour sous forme d’un écrit auquel je n’ai pas accès. Mais d’après les discussions au tribunal, il est clair que le ministère public soutient que la loi sur l’extradition de 2003, en vertu de laquelle le tribunal fonctionne, ne fait pas d’exception pour les infractions politiques. Toutes les lois d’extradition précédentes avaient exclu l’extradition pour des délits politiques, il doit donc être dans l’intention du parlement souverain que les délinquants politiques puissent désormais être extradés.
En ouvrant son argumentation, Edward Fitzgerald a fait valoir que la loi sur l’extradition de 2003 ne suffit pas à elle seule pour procéder à une véritable extradition. L’extradition nécessite la mise en place de deux éléments : la loi générale sur l’extradition et le traité d’extradition avec le ou les pays concernés. « Pas de traité, pas d’extradition » était une règle inviolable. Le traité était la base même de la demande. Dire que l’extradition n’était pas régie par les termes du traité même en vertu duquel elle a été faite, c’était créer une absurdité juridique et donc un abus de procédure. Il a cité des exemples de jugements rendus par la Chambre des Lords et le Privy Council où les droits issus du traité ont été jugés exécutoires malgré leur absence dans la législation nationale, notamment pour empêcher que des personnes soient extradées vers une exécution potentielle dans les colonies britanniques.
Fitzgerald a souligné que si la loi sur l’extradition de 2003 ne contient pas d’interdiction d’extradition pour des délits politiques, elle ne précise pas qu’une telle interdiction ne peut pas figurer dans les traités d’extradition. Et le traité d’extradition de 2007 a été ratifié après la loi d’extradition de 2003.
A ce stade, Baraitser l’a interrompu pour dire qu’il était clair que l’intention du Parlement était qu’il puisse y avoir une extradition pour des délits politiques. Sinon, il n’aurait pas supprimé l’obstacle dans la législation précédente. Fitzgerald a refusé de céder, affirmant que la loi ne disait pas que l’extradition pour des délits politiques ne pouvait pas être interdite par le traité autorisant l’extradition.
Fitzgerald a poursuivi en disant que la jurisprudence internationale avait accepté pendant un siècle ou plus que l’on n’extrade pas les délinquants politiques. C’est précisé dans La Convention européenne d’extradition, le modèle de traité d’extradition des Nations unies et la Convention d’Interpol sur l’extradition. C’est précisé dans chacun des traités d’extradition conclus par les États-Unis avec d’autres pays, et ce depuis plus d’un siècle, sur l’insistance des États-Unis. Le fait que les gouvernements britannique et américain disent qu’il ne s’applique pas est étonnant et créerait un terrible précédent qui mettrait en danger les dissidents et les prisonniers politiques potentiels de Chine, de Russie et de régimes du monde entier qui se sont échappés vers des pays tiers.
Fitzgerald a déclaré que toutes les grandes autorités étaient d’accord sur le fait qu’il y avait deux types de délits politiques. Le délit politique pur et le délit politique relatif. Un délit politique « pur » a été défini comme la trahison, l’espionnage ou la sédition. Un délit politique « relatif » est un acte normalement criminel, comme l’agression ou le vandalisme, commis avec un motif politique. Chacune des accusations portées contre Assange était un délit politique « pur ». Toutes sauf une étaient des accusations d’espionnage, et l’accusation de piratage informatique avait été comparée par l’accusation à la violation de la loi sur les secrets officiels pour répondre au critère de double incrimination. L’accusation primordiale selon laquelle Assange cherchait à nuire aux intérêts politiques et militaires des États-Unis est la définition même d’un délit politique selon toutes les autorités.
En réponse, Lewis déclara qu’un traité ne pouvait pas être contraignant en droit anglais à moins d’être spécifiquement incorporé dans le droit anglais par le Parlement. Il s’agissait là d’une défense démocratique nécessaire. Les traités étaient conclus par l’exécutif qui ne pouvait pas faire la loi. Cela relevait de la souveraineté du Parlement. Lewis a cité de nombreux jugements déclarant que les traités internationaux signés et ratifiés par le Royaume-Uni ne pouvaient pas être appliqués par les tribunaux britanniques. « Les autres pays pourraient être surpris que leurs traités avec le gouvernement britannique n’aient aucune force juridique », a-t-il plaisanté.
Lewis a déclaré qu’il n’y avait pas d’abus de procédure ici et qu’aucun droit n’était donc invoqué au titre de la Convention européenne. C’était le fonctionnement normal de la loi que la disposition du traité sur la non extradition pour des délits politiques n’avait pas de valeur juridique.
Selon M. Lewis, le gouvernement américain conteste que les infractions commises par Assange soient politiques. Au Royaume-Uni, en Australie et aux États-Unis, la définition du délit politique est différente de celle du reste du monde. Nous avons considéré que les infractions politiques « pures » que sont la trahison, l’espionnage et la sédition n’étaient pas des infractions politiques. Seules les infractions politiques « relatives » – des crimes ordinaires commis avec un motif politique – étaient considérées comme des infractions politiques dans notre tradition. Dans cette tradition, la définition du terme « politique » se limitait également au soutien d’un parti politique concurrent dans un État. Lewis poursuivra demain avec cet argument.
Voilà qui conclut mon compte rendu de la procédure. J’ai un commentaire important à faire à ce sujet et j’essaierai de faire un autre article plus tard dans la journée. Je me précipite maintenant au tribunal.
Avec mes remerciements à ceux qui ont fait des dons ou qui se sont abonnés pour rendre ce reportage possible.
Cet article est entièrement libre de reproduction et de publication, y compris en traduction, et j’espère vivement que les gens le feront activement. La vérité nous rendra libres.
Craig Murray
Traduction « quoi ma photo ? qu’est-ce qu’elle a ma photo ? » par VD pour le Grand Soir avec probablement toutes les fautes et coquilles habituelles
Source : Viktor Dedaj, Le Grand Soir,
https://www.legrandsoir.info/compte-rendu-du-proces-assange-3eme-jour.html
Fil Facebook correspondant à ce billet :
https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=10157946334312317&id=600922316
[Pire que les procès de Moscou : les procès de Londres et de Washington] Compte-rendu du Procès Assange, 2eme jour
Compte-rendu du Procès Assange, 2eme jour
Par Craig MURRAY
Cet après-midi, l’avocat espagnol de Julian, Baltasar Garzon, a quitté le tribunal pour retourner à Madrid. En sortant, il s’est naturellement arrêté pour serrer la main de son client, en faisant passer ses doigts par l’étroite fente de la cage de verre pare-balles. Assange, à moitié debout, a pris la main de son avocat. Les deux gardes de sécurité dans la cage avec Assange se sont immédiatement levés, mettant la main sur Julian et le forçant à s’asseoir, empêchant la poignée de main.
Ce n’était pas le pire aujourd’hui, loin de là, mais c’est une image frappante de la force brute insensée utilisée continuellement contre un homme accusé de publier des documents. Le fait qu’un homme ne puisse même pas serrer la main de son avocat est contraire à l’esprit dans lequel les membres du système juridique aiment à faire semblant de pratiquer le droit. Je vous offre ce moment étonnant comme un résumé des événements d’hier au tribunal.
Le deuxième jour, la procédure avait commencé par une déclaration d’Edward Fitzgerald, avocat d’Assange, qui nous a brutalement secoué. Il a déclaré qu’hier, le premier jour du procès, Julian avait été déshabillé et fouillé à deux reprises, menotté à onze reprises et enfermé cinq fois dans différentes cellules de détention. De plus, tous les documents judiciaires lui ont été retirés par les autorités de la prison, y compris les communications privilégiées entre ses avocats et lui-même, et il n’a pas pu se préparer à participer au procès d’aujourd’hui.
La magistrate Baraitser a regardé Fitzgerald et a déclaré, d’une voix empreinte de dédain, qu’il avait déjà soulevé de telles questions auparavant et qu’elle lui avait toujours répondu qu’elle n’avait aucune compétence sur le domaine de la prison. Il devrait en parler avec les autorités de la prison. Fitzgerald resta sur ses positions, ce qui lui valut un air très renfrogné de la part de Baraitser, et lui répondit qu’il allait bien sûr recommencer, mais que ce comportement répété des autorités pénitentiaires menaçait la capacité de la défense à se préparer. Il a ajouté que, quelle que soit la juridiction, il était d’usage, selon son expérience, que les magistrats et les juges transmettent leurs commentaires et leurs demandes à l’administration pénitentiaire lorsque le déroulement du procès en était affecté, et que normalement les prisons prêtaient une oreille sympathique.
Baraitser a nié catégoriquement toute connaissance d’une telle pratique et a déclaré que Fitzgerald devrait lui présenter des arguments écrits exposant la jurisprudence en matière de compétence sur les conditions de détention. C’en était trop même pour l’avocat de l’accusation James Lewis, qui s’est levé pour dire que l’accusation voudrait aussi qu’Assange ait une audience équitable, et qu’il pouvait confirmer que ce que la défense suggérait était une pratique normale. Même alors, Baraitser refusait toujours d’intervenir auprès de la prison. Elle a déclaré que si les conditions carcérales étaient si mauvaises qu’elles rendaient impossible un procès équitable, la défense devrait présenter une motion de rejet des accusations pour ce motif. Dans le cas contraire, elle devrait laisser tomber.
L’accusation et la défense ont toutes deux semblé surprises par l’affirmation de Baraitser selon laquelle elle n’avait pas entendu parler de ce qu’elles qualifiaient toutes deux de pratique courante. Lewis a peut-être été sincèrement préoccupé par la description choquante du traitement de la prison d’Assange hier ; ou il a peut-être juste eu des alarmes qui se sont déclenchées dans sa tête en criant « annulation du procès ». Mais le résultat net est que Baraitser ne fera rien pour empêcher les abus physiques et mentaux de Julian en prison, ni pour essayer de lui donner la possibilité de participer à sa défense. La seule explication réaliste qui me vienne à l’esprit est que Baraitser a été prévenue, car ce mauvais traitement continu et la confiscation de documents relèvent de la haute autorité du gouvernement.
Un dernier petit incident à relater : après avoir fait la queue à nouveau dès les premières heures, j’étais dans la dernière file d’attente avant l’entrée de la galerie publique, lorsque le nom de Kristin Hrnafsson, rédacteur en chef de Wikileaks, avec qui j’étais en train de parler, a été prononcé. Kristin s’est identifié, et le fonctionnaire du tribunal lui a dit qu’il lui était interdit d’entrer dans la galerie publique.
J’étais avec Kristin pendant toute la procédure la veille, et il n’avait rien fait de mal – c’est un homme plutôt calme. Lorsqu’il a été appelé, c’était par son nom et par son titre professionnel – ils interdisaient spécifiquement le rédacteur en chef de Wikileaks de participer au procès. Kristin a demandé pourquoi et on lui a répondu que c’était une décision de la Cour.
À ce stade, John Shipton, le père de Julian, a annoncé que dans ce cas, les membres de la famille allaient tous partir aussi, et ils l’ont fait, en sortant du bâtiment. Ils ont alors commencé, avec d’autres, à tweeter la nouvelle du départ de la famille. Cela a semblé causer une certaine consternation parmi les fonctionnaires du tribunal, et quinze minutes plus tard, Kristin a été réadmise. Nous ne savons toujours pas ce qui se cache derrière tout cela. Plus tard dans la journée, les journalistes ont été informés par les fonctionnaires que c’était simplement pour avoir resquillé, mais cela semble improbable car il a été renvoyé par le personnel qui l’a appelé par son nom et son titre, plutôt que de l’avoir repéré comme un resquilleur.
Aucune de ces informations ne concerne l’affaire officielle. Tout ce qui précède vous en dit plus sur la nature draconienne du simulacre de procès politique qui se déroule que sur la mascarade qui se déroule dans la salle du tribunal. Il y a eu des moments aujourd’hui où j’ai été happé par l’argumentaire judiciaire et où suspendu aux levres comme on peut l’etre au théâtre, et où j’ai commencé à penser « Wow, cette affaire se passe bien pour Assange ». Puis un événement tel que ceux relatés ci-dessus se produit, une froideur s’empare de votre cœur, et vous vous souvenez qu’il n’y a pas de jury a convaincre. Je crois que rien de ce qui sera dit ou prouvé dans la salle d’audience aura un impact sur le verdict final de ce tribunal.
Passons donc à la procédure proprement dite.
Pour la défense, Mark Summers a déclaré que les accusations des États-Unis dépendaient entièrement de trois accusations factuelles de comportement d’Assange :
1) Assange a aidé Manning à décoder une clé de cryptage pour accéder à du matériel classifié.
Summers a déclaré qu’il s’agissait d’une allégation fausse prouvée lors de la cour martiale de Manning.
2) Assange a sollicité le matériel auprès de Manning
M. Summers a déclaré que les informations publiques prouvaient que cela était faux
3) Assister a sciemment mis des vies en danger
M. Summers a déclaré qu’il était prouvé que cela était faux, tant à partir d’informations accessibles au public qu’en raison de l’implication spécifique du gouvernement américain.
En résumé, M. Summers a déclaré que le gouvernement américain savait que les allégations formulées étaient fausses quant aux faits et qu’il était prouvé qu’elles avaient été formulées de mauvaise foi. Il s’agit donc d’un abus de procédure qui devrait conduire au rejet de la demande d’extradition. Il a décrit les trois chefs d’accusation ci-dessus comme « de la foutaise, de la foutaise et de la foutaise ».
Summers a ensuite passé en revue les faits. Il a déclaré que les accusations des États-Unis divisent en trois catégories les documents divulgués par Manning à Wikileaks qui sont :
a) Câbles diplomatiques
b) Les notes d’évaluation des détenus de Guantanamo
c) Règles d’engagement pour la guerre en Irak
d) Journaux de guerre afghans et irakiens
Les Summers ont ensuite méthodiquement passé en revue les points a), b), c) et d) en les reliant chacun à leur tour aux comportements allégués 1), 2) et 3), en douze explications et démonstrations en tout. Ce compte rendu exhaustif a pris environ quatre heures et je ne tenterai pas de le reproduire ici. Je vais plutôt en donner les grandes lignes, mais je me référerai occasionnellement au numéro du comportement allégué et/ou à la lettre de l’allégation. J’espère que vous suivrez cette méthode – il m’a fallu un certain temps pour le faire !
Pour 1) Summers a démontré de façon concluante que Manning avait accès à chaque matériel a) b) c) d) fourni à Wikileaks sans avoir besoin d’un code d’Assange, et qu’il avait cet accès avant même de contacter Assange. Manning n’avait pas non plus besoin d’un code pour dissimuler son identité comme l’alléguait l’accusation – la base de données des analystes du renseignement à laquelle Manning pouvait accéder – comme des milliers d’autres – ne nécessitait pas de nom d’utilisateur ou de mot de passe pour y accéder à partir d’un ordinateur militaire professionnel. Summers a cité le témoignage de plusieurs officiers de la cour martiale de Manning pour le confirmer. Le fait de casser le code d’administration du système ne donnerait pas non plus à Manning l’accès à d’autres bases de données classifiées. Summers a cité le témoignage de la cour martiale de Manning, où cela avait été accepté, selon lequel la raison pour laquelle Manning voulait accéder à l’administration des systèmes était de permettre aux soldats de mettre leurs jeux vidéo et leurs films sur les ordinateurs portables du gouvernement, ce qui en fait se produisait fréquemment.
Le magistrat Baraitser a procédé à deux reprises à des interruptions importantes. Elle a fait remarquer que si Chelsea Manning ne savait pas qu’elle ne pouvait pas être tracée comme l’utilisateur qui avait téléchargé les bases de données, elle aurait pu par ignorance demander l’aide d’Assange pour cracker un code afin de dissimuler son identité ; même si elle n’avait pas besoin de le faire, l’aide d’Assange constituerait une infraction.
Summers a souligné que Mme Manning savait qu’elle n’avait pas besoin de nom d’utilisateur et de mot de passe, car elle avait en fait accédé à tous les documents sans en avoir. Baraitser a répondu que cela ne constituait pas une preuve qu’elle savait qu’elle ne pouvait pas être pistée. Summers a déclaré qu’il n’était pas logique de soutenir qu’elle cherchait un code pour dissimuler son nom d’utilisateur et son mot de passe, alors qu’il n’y avait pas de nom d’utilisateur et de mot de passe. Baraitser a répondu à nouveau qu’il ne pouvait pas le prouver. C’est à ce moment que Summers est devenu quelque peu irritable avec Baraitser, et a énuméré de nouveau les preuves présentées à la cour martiale.
Baraitser a également fait remarquer que même si Assange aidait Manning à craquer un code d’administrateur, même si cela ne lui permettait pas d’accéder à d’autres bases de données, il s’agissait toujours d’une utilisation non autorisée et cela constituerait le crime de complicité d’utilisation abusive d’un ordinateur, même si dans un but innocent.
Après une brève pause, Baraitser est revenue avec quelques bien bonnes. Elle a dit à Summers qu’il avait présenté les conclusions de la cour martiale américaine de Chelsea Manning comme des faits. Mais elle n’était pas d’accord avec le fait que son tribunal devait considérer les preuves présentées devant une cour martiale américaine, même les preuves agréées ou non contestées ou les preuves de l’accusation, comme des faits. Summers a répondu que les preuves convenues ou les preuves à charge devant la cour martiale américaine étaient clairement considérées comme des faits par le gouvernement américain, et que la question était de savoir si le gouvernement américain lancait de fausses accusations en toute connaissance de cause. Baraitser a déclaré qu’elle reviendrait sur ce point une fois les témoins entendus.
Baraitser ne cherchait pas à dissimuler son hostilité envers l’argument de la défense, et semblait irritée qu’ils aient eu la témérité de le formuler. Cela paru évident lors de la discussion sur le point c), les règles d’engagement de la guerre en Irak. Summers a fait valoir que celles-ci n’avaient pas été sollicitées auprès de Manning, mais qu’elles avaient plutôt été fournies par Manning dans un dossier d’accompagnement avec la vidéo Collateral Murder qui montrait le meurtre d’enfants et de journalistes de Reuters. L’objectif de Manning, comme elle l’a déclaré lors de sa cour martiale, était de montrer que les actions visibles dans Collateral Murder violaient les règles d’engagement, même si le ministère de la défense affirmait le contraire. Summers a déclaré qu’en n’incluant pas ce contexte, la demande d’extradition américaine tentait délibérément de tromper car elle ne mentionnait même pas du tout la vidéo Collateral Murder.
À ce stade, Baraitser ne pouvait pas dissimuler son mépris. (…) Ceci une citation littérale :
« Suggérez-vous, M. Summers, que les autorités, le gouvernement, devraient fournir le contexte de leurs accusations ? »
Un Summers infatigable a répondu par l’affirmative et a ensuite montré où la Cour suprême l’avait dit dans d’autres affaires d’extradition. Baraitser semblait totalement perdue devant l’idée qu’on pouvait prétendre faire une distinction entre le gouvernement et Dieu.
L’essentiel de l’argumentation de Summers consistait à réfuter le comportement 3), la mise en danger de vies. Cela n’a été revendiqué qu’en relation avec les éléments a) et d). Summers a longuement décrit les efforts déployés par Wikileaks avec ses partenaires médiatiques pendant plus d’un an pour mettre en place une campagne de rédaction massive sur les câbles. Il a expliqué que les câbles non expurgés n’ont été disponibles qu’après que Luke Harding et David Leigh du Guardian aient publié le mot de passe de l’archive en tête du chapitre XI de leur livre sur Wikileaks, publié en février 2011.
Personne n’avait n’avait fait le rapprochement avec le mot de passe jusqu’à ce que la publication allemande Die Freitag le fasse et annonce en aout 2011 qu’elle avait toutes les câbles non expurgés. Summers a ensuite présenté les arguments les plus percutants de la journée.
Le gouvernement américain avait participé activement à l’exercice de rédaction des câbles. Ils savaient donc que les allégations de publication imprudente étaient fausses.
Une fois que Die Freitag a annoncé qu’ils avaient les documents non expurgés, Julian Assange et Sara Harrison ont immédiatement téléphoné à la Maison Blanche, au Département d’Etat et à l’Ambassade des Etats-Unis pour les avertir que les sources nommées pouvaient être mises en danger. Summers a lu les transcriptions des conversations téléphoniques alors qu’Assange et Harrison tentaient de convaincre les responsables américains de l’urgence d’activer les procédures de protection des sources – et ont exprimé leur perplexité face à l’obstruction des responsables. Ces preuves ont complètement miné le dossier du gouvernement américain et ont prouvé la mauvaise foi en omettant des faits extrêmement pertinents. Ce fut un moment très frappant.
En ce qui concerne le même comportement 3) sur les documents d), Summers a montré que la cour martiale de Manning avait admis que ces documents ne contiennent pas de noms de sources en danger, mais a montré que Wikileaks avait de toute façon activé un exercice de rédaction pour une approche « ceinture et bretelles ». La défense a dit bien plus.
Pour l’accusation, James Lewis a indiqué qu’il répondrait de manière approfondie plus tard dans la procédure, mais a souhaité déclarer que l’accusation n’accepte pas les preuves de la cour martiale comme des faits, et en particulier n’accepte aucun des témoignages « égoïstes » de Chelsea Manning, qu’il a dépeint comme un criminel condamné se prévalant à tort de nobles motifs. L’accusation a généralement rejeté toute idée selon laquelle cette cour devrait examiner la vérité ou les faits car ceux-ci ne pouvaient être décidés que lors d’un procès aux États-Unis.
Ensuite, pour conclure la procédure, Baraitser a lancé une bombe. Elle a déclaré que bien que l’article 4.1 du traité d’extradition entre les États-Unis et le Royaume-Uni interdise les extraditions politiques, cela ne figure que dans le traité. Cette exemption n’apparaît pas dans la loi britannique sur l’extradition. À première vue, l’extradition politique n’est donc pas illégale au Royaume-Uni, car le traité n’a pas de force juridique devant la Cour. Elle a invité la défense à aborder cet argument dans la matinée.
Il est maintenant 6h35 et je suis en retard pour commencer à faire la queue…
Avec nos remerciements à ceux qui ont fait des dons ou qui se sont inscrits pour rendre ce reportage possible.
Cet article est entièrement libre de reproduction et de publication, y compris en traduction, et j’espère vivement que les gens le feront activement. La vérité nous rendra libres.
Craig Murray
traduction « avec une envie de gerber » par VD pour le Grand Soir avec probablement toutes les fautes et coquilles habituelles
Source : Le Grand Soir, Viktor Dedaj,
https://www.legrandsoir.info/compte-rendu-du-proces-assange-2eme-jour.html
Fil Facebook correspondant à ce billet :
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[IMPORTANT et révoltant. Naufrage de la justice anglaise. Procès truqué du journalisme] Compte-rendu du Procès Assange à Londres, 1er jour (lundi 24 fév 2020), par Craig MURRAY
Woolwich Crown Court est conçu pour imposer le pouvoir de l’État. Les tribunaux normaux de ce pays sont des bâtiments publics, délibérément placés par nos ancêtres en plein centre-villes, presque toujours à proximité d’une rue principale. Le but principal de leur positionnement et de leur architecture était de faciliter l’accès au public, avec la conviction qu’il est vital que la justice soit visible par le public.
Woolwich Crown Court, qui accueille le Belmarsh Magistrates Court, est construit sur un principe totalement opposé. Il n’a pas d’autre but que d’exclure le public. Rattaché à une prison située dans un marais balayé par les vents, loin de tout centre social normal, une île accessible uniquement en naviguant dans un labyrinthe de routes à double voie, tout l’emplacement et l’architecture du bâtiment sont pensés pour décourager l’accès au public. Il est entouré par la même barrière de palissage en acier extrêmement résistant qui ceinture la prison. C’est une chose extraordinaire, un palais de justice qui fait partie du système carcéral lui-même, un lieu où l’on est déjà considéré comme coupable et incarcéré dès son arrivée. Le Woolwich Crown Court n’est rien d’autre que la négation physique de la présomption d’innocence, l’incarnation même de l’injustice coulée dans du béton, de l’acier, et des vitres blindées. Il a précisément la même relation à la justice que Guantanamo Bay ou la Lubyanka. Il n’est en réalité que l’aile de condamnations de la prison de Belmarsh.
Lorsqu’il s’est renseigné sur les possibilités de participation du public à l’audience, un militant d’Assange s’est fait dire par un membre du personnel du tribunal que nous devrions nous rendre compte que Woolwich est un « tribunal antiterroriste ». C’est vrai de facto, mais en réalité, un « tribunal antiterroriste » est une institution inconnue de la constitution britannique. En effet, il suffit de passer une seule journée passée au tribunal de la Couronne de Woolwich pour se rendre à l’évidence que la démocratie libérale est désormais un mensonge.
Les audiences d’extradition ne se tiennent pas à la Magistrates Court de Belmarsh, au sein de la Woolwich Crown Court. Elles ont toujours lieu à la Magistrates Court de Westminster, car la demande est réputée avoir été remise au gouvernement à Westminster. A vous de tirer les conclusions. Cette audience se tient à la Westminster Magistrates Court. Elle est tenue par les magistrats de Westminster et le personnel de la cour de Westminster, mais elle se déroule à la Magistrates Court de Belmarsh, à l’intérieur de la Crown Court de Woolwich. Cette étrange convolution a précisément pour but de leur permettre d’utiliser la « cour antiterroriste » pour limiter l’accès au public et imposer la peur du pouvoir de l’État.
L’une des conséquences est que, dans la salle d’audience elle-même, Julian Assange est confiné au fond du tribunal derrière un écran de verre pare-balles. Il a fait remarquer à plusieurs reprises au cours de la procédure qu’il lui était ainsi très difficile de voir et d’entendre les débats. La magistrate, Vanessa Baraitser, a choisi d’interpréter cela, avec une malhonnêteté étudiée, comme un problème dû au très faible bruit des manifestants à l’extérieur (160 gilets jaunes venus de France dans la nuit], par opposition à un problème causé par le fait qu’Assange est enfermé à l’écart dans une énorme boîte de verre pare-balles.
Or, il n’y a aucune raison pour qu’Assange se trouve dans cette boîte, conçue pour contenir des terroristes extrêmement violents physiquement. Il pourrait siéger, comme le ferait normalement un accusé à une audience, au sein du tribunal à côté de ses avocats. Mais la lâche et vicieuse Baraitser a refusé les demandes répétées et persistantes de la défense pour qu’Assange soit autorisé à s’asseoir avec ses avocats. Baraitser n’est bien sûr qu’une marionnette, étant supervisée par la magistrate en chef Lady Arbuthnot, une femme tellement imbriquée dans l’establishment des services de défense et de sécurité que son implication dans cette affaire ne pourrait être plus corrompue.
Peu importe à Baraitser ou Arbuthnot s’il est vraiment nécessaire d’incarcérer Assange dans une cage pare-balles, ou si cela l’empêche de suivre la procédure judiciaire. L’intention de Baraitser est d’humilier Assange, et de nous inspirer de l’horreur face à l’énorme pouvoir d’écrasement de l’État. La force inexorable de l’aile des condamnations de la cauchemardesque prison de Belmarsh doit être affirmée. Si vous êtes ici, c’est que vous êtes coupable.
C’est la Lubyanka. Vous ne pouvez être qu’un prisonnier en détention préventive. Il ne peut s’agir que d’une audience, pas d’un procès. Vous pouvez n’avoir aucun antécédent de violence et ne pas être accusé de violence. Vous pouvez avoir trois des plus éminents psychiatres du pays qui soumettent des rapports sur vos antécédents de dépression clinique sévère et qui avertissent d’un risque de suicide. Mais moi, Vanessa Baraitser, je vais quand même vous enfermer dans une boîte conçue pour le plus violent des terroristes. Pour montrer ce que nous pouvons faire aux dissidents. Et si vous ne pouvez pas suivre les procédures judiciaires, tant mieux.
Vous accepterez peut-être mieux ce que je dis de la Cour si je vous dis que, pour une audience suivie dans le monde entier, ils ont décidé de la tenir dans une salle d’audience qui a un nombre total de seize sièges disponibles pour les membres du public. 16. Pour être sûr d’avoir l’une de ces seize places et de pouvoir être votre témoin, je me suis présenté à l’extérieur de cette grande clôture de fer cadenassée, à faire la queue dans le froid, l’humidité et le vent dès 6 heures du matin. À 8 heures, la porte a été déverrouillée et j’ai pu entrer dans la clôture pour faire une autre queue devant la salle d’audience, où, malgré le fait que des avis indiquent clairement que la cour est ouverte au public à 8 heures, j’ai dû faire la queue à l’extérieur du bâtiment pendant encore une heure et quarante minutes. Ensuite, j’ai dû passer par des sas blindés, une sécurité de type aéroport, et faire de nouveau la queue derrière deux autres portes verrouillées, avant d’arriver enfin à mon siège au moment où le tribunal commençait à 10 heures. À ce stade, nous aurions dû être complètement intimidés, sans parler du fait d’être trempés et de risquer l’hypothermie.
Il y avait une entrée séparée pour les médias et une salle de presse avec retransmission en direct des débats dans la salle d’audience, et il y avait tellement de médias que j’ai pensé pouvoir me détendre et ne pas m’inquiéter car les faits le plus élémentaire allaient être largement diffusés. Grossière erreur. J’ai suivi les arguments très attentivement à chaque minute de la journée, et pas un seul des faits et arguments les plus importants aujourd’hui n’a été rapporté dans les médias grand public. C’est une affirmation audacieuse, mais je crains qu’elle ne soit parfaitement vraie. J’ai donc beaucoup de travail à faire pour que le monde sache ce qui s’est réellement passé. Le simple fait d’être un témoin honnête est soudain extrêmement important, alors que l’ensemble des médias ont abandonné ce rôle.
James Lewis a fait la déclaration d’ouverture pour l’accusation. Elle était composée de deux parties, aussi extraordinaires l’une que l’autre. La première partie, la plus longue, était vraiment remarquable car elle ne contenait aucun argument juridique et s’adressait non pas au magistrat mais aux médias. Il n’était pas seulement évident que c’était à eux que ses remarques étaient destinées, il a en fait déclaré à deux reprises au cours de sa déclaration d’ouverture qu’il s’adressait aux médias, une fois en répétant une phrase et en disant spécifiquement qu’il la répétait à nouveau parce qu’il était important que les médias comprennent.
Je suis franchement étonné que Baraitser ait permis cela. Il est tout à fait inadmissible qu’un avocat adresse des remarques non pas à la cour mais aux médias, et il ne pourrait y avoir de preuve plus claire qu’il s’agit d’un procès politique à grand spectacle et que Baraitser en est complice. Je n’ai pas le moindre doute que la défense aurait été arrêtée très rapidement si elle avait commencé à adresser des remarques aux médias. Baraitser ne prétend nullement être autre chose qu’une marionnette de la Couronne, et par extension du gouvernement américain.
Les points que Lewis souhaitait faire connaître aux médias étaient les suivants : il n’est pas vrai que les grands médias comme le Guardian et le New York Times sont également menacés par les accusations portées contre Assange, car ce dernier n’était pas accusé d’avoir publié les câbles, mais seulement d’avoir publié les noms des informateurs, et d’avoir encouragé Manning et de l’avoir aidée à tenter de pirater les ordinateurs. Seul Assange avait fait ces choses, et non les grands médias.
Lewis a ensuite lu une série d’articles des grands médias attaquant Assange, comme preuve que les médias et Assange n’étaient pas dans le même bateau. Pendant toute une heure, l’accusation s’est adressée aux médias pour tenter de creuser un fossé entre les médias et Wikileaks et ainsi réduire leur soutien à Assange. Il s’agissait d’un discours politique, et non d’une simple soumission juridique. En même temps, l’accusation avait préparé des copies de cette partie de l’intervention de Lewis, qui ont été distribuées aux médias et transmises électroniquement pour qu’ils puissent les copier-coller.
Après un ajournement, la magistrate Baraitser a interrogé l’accusation sur la véracité de certaines de ces affirmations. En particulier, l’affirmation selon laquelle les journaux ne se trouvaient pas dans la même situation parce qu’Assange était accusé non pas de publier, mais d’avoir « aidé et encouragé » Chelsea Manning à obtenir le matériel, ne semblait pas cohérente avec la lecture que faisait Lewis de la loi de 1989 sur les secrets officiels, selon laquelle le simple fait d’obtenir et de publier un secret gouvernemental constitue une infraction. Cela signifiait certainement, selon Baraitser, que les journaux qui se contentent de publier les fuites de Manning seraient aussi coupables d’un délit.
Lewis a paru complètement pris au dépourvu. La dernière chose à laquelle il s’attendait, c’était la perspicacité de Baraitser, dont le travail consistait simplement à faire ce qu’il disait [dont la mission convenue était seulement de lui obéir. ÉC]. Lewis a grommelé, bafouillé, enlevé et remis ses lunettes plusieurs fois, ajusté son microphone à plusieurs reprises et a ramassé une succession de morceaux de papier dans son dossier, chacun semblant le surprendre par son contenu, alors qu’il les agitait en l’air d’un air malheureux et disait qu’il aurait vraiment dû citer l’affaire Shayler mais qu’il ne la trouvait pas. C’était comme regarder un épisode (du feuilleton) Columbo mais sans le charme et sans la question qui tue à la fin.
Soudain, Lewis a semblé prendre une décision. Oui, a-t-il dit d’une voix beaucoup plus ferme. La loi de 1989 sur les secrets officiels avait été introduite par le gouvernement Thatcher après l’affaire Ponting, précisément pour éliminer la défense d’intérêt public et faire de la possession non autorisée d’un secret officiel un crime de responsabilité stricte – ce qui signifie que peu importe comment vous l’avez obtenu, le fait de le publier et même de le posséder vous rendait coupable. Par conséquent, en vertu du principe de la double incrimination, Assange était passible d’extradition, qu’il ait ou non aidé et encouragé Manning. Lewis a ensuite ajouté que tout journaliste et toute publication qui publierait le secret officiel commettrait donc également une infraction, quelle que soit la manière dont il l’aurait obtenu, qu’il ait ou non nommé des informateurs.
Lewis venait ainsi de contredire carrément toute sa déclaration d’ouverture aux médias en déclarant qu’ils n’avaient pas à s’inquiéter puisque les accusations d’Assange ne pouvaient jamais leur être appliquées. Et il l’a fait immédiatement après l’ajournement, juste après que son équipe ait distribué des copies de l’argumentation qu’il venait de contredire. Je ne peux pas croire qu’il soit souvent arrivé au tribunal qu’un avocat chevronné se révèle de façon si évidente et si vite être un menteur invétéré et peu motivé. Ce fut sans aucun doute le moment le plus époustouflant de l’audience d’aujourd’hui.
Pourtant, il est remarquable que je ne trouve nulle part dans les médias grand public la moindre mention de ce qui s’est passé. Ce que je peux trouver, partout, c’est que les médias grand public rapportent, par le biais du copier-coller, la première partie de la déclaration de Lewis sur les raisons pour lesquelles l’accusation d’Assange ne constitue pas une menace pour la liberté de la presse ; mais personne ne semble avoir rapporté qu’il a totalement abandonné son propre argument cinq minutes plus tard. Les journalistes étaient-ils trop stupides pour comprendre les échanges ?
L’explication est très simple. La clarification provenant d’une question que Baraitser a posée à Lewis, il n’y a pas d’enregistrement imprimé ou électronique de la réponse de Lewis. Sa déclaration originale a été fournie aux médias sous forme de copier-coller. Sa contradiction exigerait qu’un journaliste écoute ce qui a été dit au tribunal, le comprenne et l’écrive. De nos jours, aucun pourcentage significatif de journalistes des médias grand public ne maîtrise cette capacité élémentaire. Le « journalisme » consiste à couper et coller uniquement des sources approuvées. Lewis aurait pu poignarder Assange à mort dans la salle d’audience, et cela n’aurait pas été rapporté à moins de figurer dans un communiqué de presse du gouvernement.
Je n’étais pas sûr de l’objectif de Baraitser dans cette affaire. Il est clair qu’elle a très mal traité Lewis sur ce point, et semblait plutôt apprécier de le faire. D’un autre côté, le point qu’elle a soulevé n’est pas nécessairement utile à la défense. Ce qu’elle a dit, c’est essentiellement que Julian pouvait être extradé en vertu de la double incrimination, du point de vue britannique, uniquement pour avoir publié, qu’il ait ou non conspiré avec Chelsea Manning, et que tous les journalistes qui ont publié pouvaient être inculpés également. Mais ce point est certainement si extrême qu’il serait forcément invalide en vertu de la loi sur les droits de l’homme. A-t-elle poussé Lewis à formuler une position si extrême qu’elle serait intenable – en lui donnant assez de corde pour se pendre – ou a-t-elle alimenté l’idée de non seulement extrader Assange, mais aussi de poursuivre en masse les journalistes ?
La réaction d’un certain groupe a été très intéressante. Les quatre avocats du gouvernement américain assis juste derrière Lewis ont eu la grâce de paraître très mal à l’aise, car Lewis a déclaré sans ambages que tout journaliste et tout journal ou média qui publiait ou même possédait un secret gouvernemental commettait un délit grave. Toute leur stratégie avait consisté à faire semblant de dire le contraire.
Lewis est ensuite passé à la conclusion des arguments de l’accusation. Le tribunal n’avait aucune décision à prendre, a-t-il déclaré. Assange doit être extradé. L’infraction répondait au critère de la double incrimination puisqu’il s’agissait d’un délit à la fois aux États-Unis et au Royaume-Uni. La loi britannique sur l’extradition interdit expressément au tribunal de vérifier s’il existe des preuves à l’appui des accusations. S’il y avait eu, comme l’a fait valoir la défense, un abus de procédure, le tribunal devait quand même procéder à l’extradition et examiner l’abus de procédure comme une affaire distincte. (Cet argument est particulièrement spécieux car il n’est pas possible pour le tribunal d’engager une action contre le gouvernement américain en raison de l’immunité souveraine, comme Lewis le sait bien). Enfin, Lewis a déclaré que la loi sur les droits de l’homme et la liberté d’expression n’étaient absolument pas pertinentes dans les procédures d’extradition.
Edward Fitzgerald s’est ensuite levé pour faire la déclaration d’ouverture pour la défense. Il a commencé par déclarer que le motif de l’accusation était entièrement politique, et que les infractions politiques étaient spécifiquement exclues en vertu de l’article 4.1 du traité d’extradition entre le Royaume-Uni et les États-Unis. Il a souligné qu’au moment du procès de Chelsea Manning et de nouveau en 2013, l’administration Obama avait pris des décisions spécifiques de ne pas poursuivre Assange pour les fuites de Manning. Cette décision a été annulée par l’administration Trump pour des raisons entièrement politiques.
Concernant l’abus de procédure, M. Fitzgerald a fait référence aux preuves présentées devant les tribunaux pénaux espagnols selon lesquelles la CIA avait chargé une société de sécurité espagnole d’espionner Julian Assange à l’ambassade, et que cet espionnage comprenait spécifiquement la surveillance des réunions privilégiées d’Assange avec ses avocats pour discuter de son extradition. Que l’État qui demande l’extradition espionne les consultations client-avocat de l’accusé est en soi un motif de rejet de l’affaire. (Ce point est sans aucun doute vrai. Tout juge digne de ce nom rejetterait sommairement l’affaire pour cause d’espionnage scandaleux des avocats de la défense).
Fitzgerald a poursuivi en disant que la défense présenterait des preuves que la CIA a non seulement espionné Assange et ses avocats, mais qu’elle a activement envisagé de l’enlever ou de l’empoisonner, et que cela montrait qu’il n’y avait aucun engagement en faveur d’un véritable État de droit dans cette affaire.
Fitzgerald a déclaré que l’accusation avait délibérément déformé les faits, ce qui constituait également un abus de procédure. Il n’est pas vrai qu’il existe des preuves de préjudice causé aux informateurs, et le gouvernement américain l’a confirmé à d’autres occasions, par exemple lors du procès de Chelsea Manning. Il n’y a pas eu de complot pour pirater des ordinateurs et Chelsea Manning a été acquittée de cette accusation devant la cour martiale. Enfin, il est faux que Wikileaks soit à l’origine de la publication de noms d’informateurs, car d’autres organisations de médias l’avaient déjà fait avant.
Encore une fois, pour autant que je sache, si l’allégation américaine de préjudice aux informateurs a été largement diffusée, la réfutation totale de la défense sur les faits et l’affirmation selon laquelle la fabrication de faits équivaut à un abus de procédure n’ont pas du tout été rapportées.
Fitzgerald a enfin évoqué les conditions de détention aux États-Unis, l’impossibilité d’un procès équitable aux États-Unis et le fait que l’administration Trump a déclaré que les ressortissants étrangers ne bénéficieront pas des protections du premier amendement, comme autant de raisons pour lesquelles l’extradition doit être refusée. Vous pouvez lire toute la déclaration de la défense ci-dessous, mais à mon avis, le passage le plus fort a porté sur les raisons pour lesquelles il s’agit d’un procès politique, ce qui interdit l’extradition.
Aux fins de l’article 81(a), je dois ensuite aborder la question de savoir comment cette poursuite à motivation politique satisfait au critère d’être dirigée contre Julian Assange à cause de ses opinions politiques. L’essence de ses opinions politiques qui ont provoqué ces poursuites sont résumées dans les rapports du professeur Feldstein [pièce 18], du professeur Rogers [pièce 40], du professeur Noam Chomsky [pièce 39] et le professeur Kopelman :
i. Il est l’un des principaux partisans d’une société ouverte et de la liberté d’expression.
ii. Il est anti-guerre et anti-impérialiste.
iii. Il est un champion de renommée mondiale de la transparence politique et du droit du public à l’information sur des questions importantes – des questions telles que la corruption politique, les crimes de guerre, la torture et les mauvais traitements des détenus à Guantanamo.5.4 Ces croyances et ces actions le mettent inévitablement en conflit avec des États puissants, y compris l’actuelle administration américaine, pour des raisons politiques. Ce qui explique pourquoi il a été dénoncé comme terroriste et pourquoi le président Trump a, par le passé, réclamé la peine de mort.
5.5 Mais je dois ajouter que ses révélations sont loin de se limiter aux méfaits des États-Unis. Il a dénoncé la surveillance exercée par la Russie et a publié des articles sur M. Assad en Syrie ; et on dit que les révélations de WikiLeaks sur la corruption en Tunisie et la torture en Égypte ont été le catalyseur du printemps arabe lui-même.
5.6 Les États-Unis affirment qu’il n’est pas journaliste. Mais vous trouverez un compte-rendu complet de son travail dans le dossier M. Il est membre du syndicat des journalistes australiens depuis 2009, il est membre de la NUJ et de la Fédération européenne de journalistes. Il a remporté de nombreux prix dans le domaine des médias, notamment la plus haute distinction pour les journalistes australiens. Son travail a été reconnu par The Économiste, Amnesty International et le Conseil de l’Europe. Il est le lauréat du prix Martha Gelhorn et a été nominé à plusieurs reprises pour le prix Nobel Prix de la paix, y compris l’année dernière et cette année. Vous pouvez voir qu’il a écrit des livres, des articles et des documentaires. Il a eu des articles publiés dans le Guardian, le New York Times, le Washington Post et le New Statesman, pour n’en citer que quelques-uns. Certaines des publications pour lesquelles l’extradition est demandée ont été évoquées et invoquées dans les tribunaux du monde entier, y compris la Cour Suprême du Royaume-Uni et la Cour européenne des droits de l’homme. En bref, il a défendu la cause de la transparence et la liberté d’information dans le monde entier.
5.7. Le professeur Noam Chomsky s’exprime ainsi : – « en soutenant courageusement des opinions politiques que la plupart des personnes déclarent partager, il a rendu un énorme service à tous ceux qui, dans le monde, chérissent les valeurs de la liberté et la démocratie et qui réclament donc le droit de savoir ce que font leurs représentants élus » [voir onglet 39, paragraphe 14].
L’impact positif de Julian Assange sur le monde est donc indéniable. L’hostilité qu’il a provoqué de la part de l’administration Trump est tout aussi indéniable.Le test juridique pour les « opinions politiques »
5.8. Je suis sûr que vous connaissez les standards en la matière, à savoir si une demande est faite en raison des opinions politiques de l’accusé. Une approche large doit être adoptée lors de l’application du test. Pour ce faire, nous nous appuyons sur l’affaire Re Asliturk [2002] EWHC 2326 (autorités chargées des abus, onglet 11, paragraphes 25 – 26) qui établit clairement qu’une approche aussi large devrait être appliquée au concept d’opinions politiques. Et cela couvrira clairement les positions idéologiques d’Assange. En outre, nous nous appuyons également sur des cas tels que Emilia Gomez contre SSHD [2000] INLR 549, onglet 43 du dossier infraction politique des autorités. Celles-ci montrent que la notion d’ »opinions politiques » s’étend aux opinions politiques imputées au citoyen par l’État qui le poursuit. C’est pourquoi la caractérisation de Julian Assange et WikiLeaks en tant qu’ »agence de renseignement hostile non étatique » par M. Pompeo établit clairement qu’il a été ciblé pour ses opinions politiques. Tous les les experts dont vous avez les rapports montrent que Julian Assange a été pris pour cible en raison de la position politique qui lui a été attribuée par l’administration Trump – comme un ennemi de l’Amérique qui doit tomber.
Demain, la défense poursuivra. Je ne sais vraiment pas ce qui va se passer car je me sens pour l’instant bien trop épuisé pour être présent dès 6 heures du matin et faire la queue pour entrer. Mais j’espère que d’une manière ou d’une autre, j’arriverai à rédiger un autre rapport demain soir.
Je remercie vivement ceux qui ont fait des dons ou qui se sont inscrits pour rendre ce rapport possible.
Cet article est entièrement libre de reproduction et de publication, y compris en traduction, et j’espère vivement que les gens le feront activement. La vérité nous rendra libres.
Craig Murray
Traduction « avec plaisir, M. Murray » par VD pour le Grand Soir avec probablement toutes les fautes et coquilles habituelles
»» https://www.craigmurray.org.uk/archives/2020/02/your-man-in-the-public…
Source : Viktor Dedaj, Le Grand Soir,
https://www.legrandsoir.info/compte-rendu-du-proces-assange-1er-jour.html
«Chapeau !» : le père de Julian Assange remercie ses soutiens français. On y retourne ce soir 😇
«Je pense qu’en France vous dites : « Chapeau ! »», c’est par ces mots que le père de Julian Assange a tenu à remercier les Français, dont nombre de Gilets jaunes qui étaient venus manifester sous les fenêtres de sa prison de Belmarsh en janvier.
Interrogé à Paris le 20 février par le journaliste de RT France Thomas Bonnet sur cette question, le père du lanceur d’alerte a expliqué que son fils avait entendu les cris des manifestants.
«L’autre jour, quand il y avait des Français devant la prison […] Julian m’a dit qu’il pouvait entendre les manifestants depuis sa cellule. C’est très encourageant. La prison vous enlève votre indépendance et votre humanité. Cette humanité vous revient quand vous vous rendez compte que les gens à l’extérieur de la prison vous aime et vous soutiennent», a-t-il déclaré.
Et à John Shipton d’adresser un «Chapeau !», en français aux Gilets jaunes ayant fait le déplacement jusqu’en Angleterre pour soutenir son fils.
Le père du lanceur d’alerte qui risque jusqu’à 175 ans de prison aux Etats-Unis, était présent en France avec d’autres défenseurs de son fils pour faire un point sur sur sa situation. Ses nouveaux avocats français Eric Dupond-Moretti et Antoine Vey, ont annoncé souhaiter rencontrer Emmanuel Macron afin d’obtenir l’asile politique en France de Julian Assange.
Ce dernier, âgé de 48 ans, est détenu dans la prison de haute-sécurité de Belmarsh, au sud de Londres, depuis son arrestation en avril 2019 à l’ambassade d’Equateur où il était resté cloîtré pendant sept années. Outre-Manche, les soutiens de Julian Assange sont mobilisés pour pousser le Premier ministre britannique à ne pas procéder à son extradition. Une grande manifestation le samedi 22 février à cet effet a réuni plusieurs personnalités comme l’ancien ministre grec des Finances Yanis Varoufakis, l’ex-membre des Pink Floyd Roger Waters, le producteur et musicien Brian Eno ou encore la créatrice de mode Vivienne Westwood.
«Chapeau !» : le père de Julian Assange remercie ses soutiens français. On y retourne ce soir 😇
https://francais.rt.com/france/71497-le-pere-de-julian-assange-remercie-ses-soutiens-francais/amp?__twitter_impression=truetrue
«Je pense qu’en France vous dites : « Chapeau ! »», c’est par ces mots que le père de Julian Assange a tenu à remercier les Français, dont nombre de Gilets jaunes qui étaient venus manifester sous les fenêtres de sa prison de Belmarsh en janvier.
Interrogé à Paris le 20 février par le journaliste de RT France Thomas Bonnet sur cette question, le père du lanceur d’alerte a expliqué que son fils avait entendu les cris des manifestants.
«L’autre jour, quand il y avait des Français devant la prison […] Julian m’a dit qu’il pouvait entendre les manifestants depuis sa cellule. C’est très encourageant. La prison vous enlève votre indépendance et votre humanité. Cette humanité vous revient quand vous vous rendez compte que les gens à l’extérieur de la prison vous aime et vous soutiennent», a-t-il déclaré.
Et à John Shipton d’adresser un «Chapeau !», en français aux Gilets jaunes ayant fait le déplacement jusqu’en Angleterre pour soutenir son fils.
Le père du lanceur d’alerte qui risque jusqu’à 175 ans de prison aux Etats-Unis, était présent en France avec d’autres défenseurs de son fils pour faire un point sur sur sa situation. Ses nouveaux avocats français Eric Dupond-Moretti et Antoine Vey, ont annoncé souhaiter rencontrer Emmanuel Macron afin d’obtenir l’asile politique en France de Julian Assange.
Ce dernier, âgé de 48 ans, est détenu dans la prison de haute-sécurité de Belmarsh, au sud de Londres, depuis son arrestation en avril 2019 à l’ambassade d’Equateur où il était resté cloîtré pendant sept années. Outre-Manche, les soutiens de Julian Assange sont mobilisés pour pousser le Premier ministre britannique à ne pas procéder à son extradition. Une grande manifestation le samedi 22 février à cet effet a réuni plusieurs personnalités comme l’ancien ministre grec des Finances Yanis Varoufakis, l’ex-membre des Pink Floyd Roger Waters, le producteur et musicien Brian Eno ou encore la créatrice de mode Vivienne Westwood.
Source : RT, https://francais.rt.com/france/71497-le-pere-de-julian-assange-remercie-ses-soutiens-francais/amp?__twitter_impression=true
[RIC LOCAL NATIONAL] Des Gilets jaunes vont organiser un référendum national sur le projet de réforme des retraites
Des Gilets jaunes vont organiser un référendum national sur le projet de réforme des retraites :
sur @RTenfrancais : https://t.co/tdwePwoZbP
— Étienne Chouard (@Etienne_Chouard) February 23, 2020