[Magnifique François Ruffin !] « En quelle langue faut-il donc vous le dire ? Le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) est une gabegie ! »

31/10/2018 | 22 commentaires

À faire pas­ser par­tout, à retrans­crire et à relire, à affi­cher par­tout, dans les écoles et dans les facul­tés, dans les bureaux, dans les usines, dans les maga­sins, chez les méde­cins, dans les palais de jus­tice, dans les pri­sons, dans les com­mis­sa­riats, dans les casernes, dans les hôpi­taux et les hos­pices, dans toutes les salles d’at­tente, le long de toutes les files d’at­tente, chez nous dans l’en­trée au salon et ailleurs, à pla­car­der dans les rues et les ave­nues, sur les portes cochères des ban­quiers et des grands bour­geois, sur les murs de toutes les salles de rédac­tion ven­dues aux milliardaires…

httpv://www.youtube.com/watch?v=2UyaNPzu4W4

Mer­ci François !

Étienne.


Le texte (à pla­car­der par­tout) est là :
https://​fran​cois​ruf​fin​.fr/​c​i​c​e​-​c​y​r​a​no/

« Madame la ministre, mon­sieur le ministre, mon­sieur le rap­por­teur géné­ral, en quelle langue faut-il donc vous le dire ? 

En anglais : what a waste ! En ita­lien :che spre­co ! Je veux bien, même, essayer en chi­nois : touome lang fei ! 

En fran­çais, tout de même : quelle gabe­gie ! Quel gâchis colossal ! 

J’ai décou­vert le scan­dale, un matin, en écou­tant la radio – je rou­lais dans mon Ber­lin­go : « D’après un rap­port de France Stra­té­gie, le cré­dit d’impôt pour la com­pé­ti­ti­vi­té et l’emploi aurait per­mis de créer ou de sau­ve­gar­der 100 000 emplois. » C’est le genre de cal­cul que j’aime bien faire dans ma tête ; ça fait pas­ser le temps au volant. Allons‑y ensemble : le CICE coûte aux alen­tours de 20 mil­liards d’euros par an ; si l’on divise cette somme par 100 000 emplois, on obtient 200 000. 

J’ai dit à mon col­la­bo­ra­teur, Vincent, qui était à côté de moi : « Tu te rends compte : 200 000 euros par emploi et par an ! C’est pas pos­sible, j’ai dû m’emmêler dans les zéros… » Sur le siège pas­sa­ger, Vincent a véri­fié sur son télé­phone por­table : « C’est bien ça : 200 000 euros par an pour un emploi. »

Cela parais­sait tel­le­ment incroyable, tel­le­ment déli­rant, tel­le­ment sur­réa­liste ! Si j’étais infor­ma­ti­cien, je fabri­que­rais un « conver­tis­seur de CICE ». Vous sai­si­riez le nom d’un métier, « infir­mier » par exemple. C’est la débâcle dans les hôpi­taux, on le sait tous : les patients attendent des nuits entières aux urgences ; les éta­blis­se­ments pari­siens épuisent leurs sala­riés ; dans d’autres, le per­son­nel apporte son propre papier toi­lette. Bref, l’hôpital est au bord de la crise de nerfs. Donc, embau­cher des infir­miers, qui est contre ? Eh bien, ces 20 mil­liards de CICE, ça fait 625 000 infirmiers !

Mais vous avez rai­son : il ne faut pas mettre tous ses œufs dans le même panier. Avec mon conver­tis­seur, cha­cun pour­rait se faire son propre mix, ses embauches idéales : des accom­pa­gnants pour les enfants han­di­ca­pés, des ani­ma­teurs pour le péri­sco­laire, des auxi­liaires pour les per­sonnes âgées, des ins­pec­teurs du tra­vail… et tout ça, par cen­taines de mil­liers. Est-ce que vous sai­sis­sez, main­te­nant, l’énormité de ces 20 milliards ?

Et à qui pro­fite ce CICE ? Pour moi­tié aux mul­ti­na­tio­nales. Le pre­mier béné­fi­ciaire dans le pri­vé, c’est Car­re­four, Car­re­four qui licen­cie 4 500 cais­sières et autres employés, Car­re­four qui reçoit, néan­moins, 130 mil­lions d’euros au titre du CICE, le cré­dit d’impôt pour la com­pé­ti­ti­vi­té et l’emploi.

Emploi, emploi… Ça ne vous choque pas ? Dans tout le pays, il n’y a qu’ici que ça ne choque pas ! Tous les experts vous le disent : le cré­dit d’impôt pour la com­pé­ti­ti­vi­té et l’emploi est une gabe­gie. Le comi­té de sui­vi de France Stra­té­gie le dit. La fédé­ra­tion « Tra­vail, emploi et poli­tiques publiques » du CNRS le dit. Le labo­ra­toire inter­dis­ci­pli­naire d’évaluation des poli­tiques publiques le dit. Toutes ces études abou­tissent à la même conclu­sion : un effet quasi-nul.

Mal­gré ces rap­ports, ces études, ces éva­lua­tions, que déci­dez-vous ? Que déci­dez-vous après la sup­pres­sion de l’impôt de soli­da­ri­té sur la for­tune, après la flat tax, après la sup­pres­sion de l’exit tax, après la baisse de l’impôt sur les socié­tés ? Vous déci­dez de pour­suivre le CICE, de le péren­ni­ser en allé­ge­ments de charges et même, pour cette année, de le dou­bler, en le fai­sant pas­ser à 40 mil­liards d’euros. Qua­rante mil­liards, c’est, pour 2018, douze fois le bud­get de l’agriculture, qua­torze fois celui de la culture, quatre fois celui de l’écologie !

Mais vous êtes sourds. 

Vous êtes sourds aux faits ; vous êtes sourds aux Fran­çais ; vous êtes aveu­glés par votre dogme. Ces cher­cheurs, de France Stra­té­gie ou du CNRS, devraient aban­don­ner leur langue conve­nue et conve­nable. Ils devraient vous l’écrire en très grand, en lettres cli­gno­tantes, tout en klaxon­nant : gas­pillage ! Gas­pillage ! Gas­pillage !

Ou alors, comme Cyra­no de Ber­ge­rac, ils devraient vous le déclamer. 

Géné­reux : « Moi, si j’avais un tel magot dans ma besace, /Il fau­drait sur le champ que je le par­ta­geasse ! »

Curieux : « Dites-moi, de quoi sert ce fabu­leux pécule ? /Ai­mez-vous à ce point les très grandes for­tunes / Que pater­nel­le­ment vous vous pré­oc­cu­pâtes / De leur tendre ce chèque de 40 000 patates ? »

Dra­ma­tique : « Ô rage ! Ô déses­poir ! C’est le peuple que l’on saigne ! /Mais pour les mil­lion­naires, quelle for­mi­dable aubaine ! »

Agres­sif : « Le voi­là donc, mon­sieur, votre « pognon de dingue » /Pour que l’oligarchie fasse fol­le­ment la bringue ! »

Qua­rante mil­liards, donc ! Qua­rante mil­liards ! Et en même temps, vous osez. En même temps, vous osez geler les pen­sions de retraite. En même temps, vous osez geler les allo­ca­tions familiales.

En même temps, vous osez geler les pen­sions d’invalidité.

Vous vous rat­tra­pez sur les familles pauvres, sur les per­sonnes âgées, sur les per­sonnes han­di­ca­pées. Sur elles, vous allez grat­ter 7 mil­liards. À elles, vous criez la néces­si­té de l’effort bud­gé­taire. Vous osez. Bra­vo ! Cha­peau !

Victor Hugo écrivait : « C’est de l’enfer des pauvres qu’est fait le paradis des riches. »
[Aujourd’hui,] vous êtes les maîtres d’œuvre de cette injustice ! Vous êtes le bras armé de cette iniquité ! »

Fran­çois Ruffin. 

Sa chaîne You­tube : https://​www​.you​tube​.com/​c​h​a​n​n​e​l​/​U​C​I​Q​G​S​p​7​9​v​V​c​h​0​v​O​3​E​f​q​i​f_w

 

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Étienne

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22 Commentaires

  1. etienne

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    • ève

      Halte à la pub gra­tuite ! lol
      Il y a tel­le­ment de choses qui coïn­cident avec la venue de Macron , et nous ne sommes pas au bout !
      Chaque per­sonne qui passe à la pré­si­dence de la Répu­blique a qque chose à don­ner aux ricains , inca­pables de créer autre chose que des armes et des men­songes d’É­tat ! Un quelque chose qui res­sem­ble­rait à un contrat , un échange , un dû ???

      Réponse
    • éve

      Il essayait des lunettes là ; non ?

      Réponse
    • Alain Guillou

      Voi­ci le rond dodu que je ne peux paraître
      Espé­rant qu’on ne le pren­dra pas à la lettre :
      Ni trop glis­sez « rhi­no­cé­ros », allez‑y mollo !
      Nil impos­sible, cacha­lot tête à vau l’eau…
      « Et en même temps », je dois être un par­fait traître …

      Si vous mani­fes­tez je vous enver­rai paître
      Sui­vez mon bel exemple, où j’obéis au Maître
      De la haute finance en par­fait gigolo
      Voi­ci le rond dos dû

      Cette taxe gon­flée il me faut vous la mettre
      Même si l’on doit faire l’Empire renaître
      Le Qua­trième Empire serait jeune et beau
      Car il faut savoir vivre avec son temps les gos !
      Si bol en avez ras je sais qu’alors y mettre…
      Voi­ci le ron­deau dû

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  2. zedav

    Encore une fois, pour­quoi se pri­ve­raient-ils, puisque les membres des peuples se révèlent inca­pables de se mettre d’ac­cord sur un plus petit déno­mi­na­teur com­mun et de faire conver­ger leurs forces sur ce point ?

    Le besoin de domi­na­tion, chez ceux qui sont en posi­tion de domi­na­tion, est inex­tin­guible, et ils iront tou­jours plus loin, avec à l’ho­ri­zon les camps de tra­vail, tant que les peuples se lais­se­ront faire…

    Ce n’est pas eux qui sont grands, c’est nous qui sommes à genoux.

    L’eau, com­pri­mée et foca­li­sée dans un jet très fin mais à très haute pres­sion découpe d’é­paisses plaques de métal…

    La ministre des lob­bies phar­ma­ceu­tiques, la Buzyn, s’en trouve mani­fes­te­ment un peu mal à l’aise, du moins durant le dis­cours de Ruf­fin. Gageons que ça ne lui cou­pe­ra pas l’appétit et que son psy­chisme, via des méca­nismes de double pen­sée, aura rapi­de­ment su rendre le CICE accep­table au regard de ses privilèges.

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  3. joss

    Si on dit que les élec­tions sont « démo­cra­tiques », alors élire un dic­ta­teur c’est « démo­cra­tique », mais ce n’est pas de la « démo­cra­tie ». Ce n’est pas les « élec­tions » ni le « suf­frage uni­ver­sel » qui fait que nous vivons en démocratie.
    Dans une vraie démo­cra­tie, il serait impos­sible d’a­voir un dic­ta­teur qui nous gou­verne tous.
    On com­prend bien qu’on nous prend pour des demeu­rés. Ce qui fait que notre sys­tème poli­tique est une démo­cra­tie ou non, c’est le fait qu’il serait impos­sible d’a­voir une dic­ta­ture en place du fait de la grande dif­fu­sion du pou­voir et des contrôles en place, c’est le fait éga­le­ment que cha­cun pour­rait prendre part à la déci­sion, c’est le fait que l’on pour­rait cor­ri­ger les déci­sions choi­sies par erreur.

    Réponse
    • ève

      Un lan­ceur ‑fai­seur d’a­lertes .…. aller , en zonzon !

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  4. etienne

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  5. etienne

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  6. etienne

    L’immense scandale de la vente des autoroutes françaises aux barons voleurs

    Source : Le Canard enchaîné

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    • etienne

      En payant les déci­deurs (les pdg des grandes entre­prises) comme les action­naires (les « stocks options » don­nées aux pdg sont des actions qui ren­dront des divi­dendes aux pdg en fonc­tion des déci­sions de dis­tri­bu­tion de divi­dendes prises par… les pdg), les action­naires ont mis en place un cri­mi­nel et mon­dial siphon à pognon (des tra­vailleurs vers les para­sites) : plus de divi­dendes, c’est moins de salaires et plus de mal­heur sur terre. 

      C’est donc aus­si moins de débou­chés pour la pro­duc­tion (puisque les riches ne dépensent pas mais « placent » leurs reve­nus supplémentaires).

      Et nous ne pou­vons rien à ce pro­gres­sif retour vers l’es­cla­vage parce que nous démis­sion­nons sot­te­ment du pro­ces­sus consti­tuant : avec une consti­tu­tion digne de ce nom, les peuples auraient la puis­sance poli­tique à la fois d’in­ter­dire les socié­tés par actions (et les bourses) et d’or­ga­ni­ser un finan­ce­ment des inves­tis­se­ments qui n’ait pas besoin de l’argent des riches.

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  7. etienne

    Tsipras, révélé dès son élection en bourreau des électeurs grecs, transforme aujourd’hui son pays en régime policier brutal et arbitraire : la trahison du peuple par la prétendue « extrême gauche » pro-UE est totale. Elle sera la même en France car ses chefs ne veulent pas non plus sortir du carcan unioneuropéen. L’UE est une construction antisociale criminelle. Il faut en sortir, vite. #frexit

    httpv://youtu.be/LY1rTFekveU

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  8. etienne

    François Ruffin : « UNE FOIS N’EST PAS COUTUME, J’AI FÉLICITÉ LE GOUVERNEMENT. ENFIN PRESQUE… »

    httpv://youtu.be/PXSF1FeQipQ

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  9. etienne

    COMMENT ACHETER UN ÉLECTEUR – JULIA CAGÉ :

    httpv://youtu.be/3eg9dLYyGko

    JULIA CAGÉ – Le prix de la démocratie :


    https://​www​.fayard​.fr/​d​o​c​u​m​e​n​t​s​-​t​e​m​o​i​g​n​a​g​e​s​/​l​e​-​p​r​i​x​-​d​e​-​l​a​-​d​e​m​o​c​r​a​t​i​e​-​9​7​8​2​2​1​3​7​0​4​616

    Mon com­men­taire (l’an­tienne d’É­tienne) : le faux « suf­frage uni­ver­sel » (élire des maîtres au lieu de voter les lois) donne tou­jours le pou­voir aux plus riches.

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  10. joss

    LA CASTE, COMMENT S’EN DÉBARRASSER ? COMMENT LA REMPLACER ?
    httpv://www.youtube.com/watch?v=5svq2j34jVY

    Entre­tien entre Fran­çois Ruf­fin, Laurent Mau­duit, Monique Pin­çon-Char­lot et Denis Robert.
    La Légion d’Hon­neur pour François 😉

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  11. etienne

    Dans « Com­prendre le mal­heur fran­çais », Mar­cel Gau­chet met ses talents d’analyse pour une approche claire et his­to­rique de notre déclin, notam­ment sur l’UE dans l’indispensable cha­pitre « Le piège euro­péen » : à lire d’urgence !
    https://​twit​ter​.com/​C​R​E​_​S​c​i​e​n​c​e​s​P​o​/​s​t​a​t​u​s​/​1​0​6​3​3​8​3​1​0​0​2​5​4​7​6​9​152

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