Une constitution digne de ce nom (d’origine populaire) permettrait à un peuple digne de ce nom (composé de citoyens constituants) de s’opposer aux représentants qui veulent lui imposer la guerre

16/11/2015 | 49 commentaires

Une constitution digne de ce nom (d’origine populaire) permettrait à un peuple digne de ce nom (des citoyens constituants) de s’opposer — à tout moment, souverainement — aux représentants qui veulent lui imposer la guerre.

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Étienne

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49 Commentaires

  1. etienne

    Restez bien concentrés sur LA CAUSE de votre impuissance, je vous en prie, dans vos réflexions et dans vos commentaires.
    Cessons de nous disperser sur les (infinies) conséquences de cette impuissance populaire première.
    • De quand date votre dernier entraînement à instituer vous-même votre puissance politique ?
    • Quel rythme, de votre côté, personnellement ?
    • Quelle contagion, à votre actif ?
    • Où en est votre action personnelle quotidienne, sur le plan de l’entraînement constituant ?

    Réponse
  2. binnemaya

    Manuel Valls COP21 que de la négo?
    Je pense que notre sympathique GVT est entrain d’appliquer la théorie du choc a la méthode CIA/PINOCHET.
    Nous devons comme tu dis amplifier nos relations et la diffusion du message car cà sent le plan pourrit a plein nez genre:
    GVT d’union nationale qui va s’y opposer dans la concorde générale sera anti france….pourquoi faire des élections vu que tous le monde est d’accord…la justice en temps de guerre passons etc…

    Réponse
    • joss

      S’ils veulent un gouvernement d’union nationale, ils ne peuvent qu’adhérer à la démocratie directe. Elle est la seule à pouvoir représenter l’union nationale.

      Réponse
  3. nlesca

    contagion? on fait ce qu’on peut, ce qui n’est probablement pas suffisant.
    Entrainement? j’ai plein d’idées, mais je ne sais pas bien qui a part moi adhère a mes trucs…

    Par contre je suis étonné de trouver souvent autours de moi des gens qui sont en fait déjà contaminés, qui connaissent le taf d’Étienne, des gens dont l’apparence et le profil ne permettait pas de repérer au premier coup d’œil le coté démocrate. La semaine dernière j’ai découvert qu’une mère de famille musulmane avec qui je bosse connais Etienne et adhère au projet. J’ai trouvé ça encourageant… c’est pas forcément elle qui viendra commenter dans les post ou que l’on croisera dans les ateliers… mais elle est conta et elle attend de pied ferme de pouvoir voter ses lois, ça fait plaisir.

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  4. annostt

    A voir:
    Mensonge, guerre et vidéo
    httpv://www.youtube.com/watch?v=x8sg0Dqc3_I

    Réponse
  5. etienne

    À qui la faute ?
    Par Jacques-François Bonaldi
    http://www.les-crises.fr/a-qui-la-faute-par-jacques-francois-bonaldi/

    « Qui, en France, au sein de la classe politique, de ce qu’on appelle maintenant d’un terme qui ne veut rien dire : la société civile, au sein des mouvements organisés (syndicats, partis, etc.) a, depuis maintenant cinq ans, cinq terribles et longues années, « compati » à la douleur des Syriens, qui vivent au quotidien l’effroi, l’horreur, la barbarie… Leur président, que les politiciens français vouent d’un bel unisson aux gémonies, vient, devant des députés français, de prononcer une phrase que tout le monde, si les œillères n’empêchaient pas de voir, devrait accepter comme une vérité douloureusement exacte : ‘Paris a connu ce que nous, les Syriens, nous vivons depuis cinq ans’ ! » […]

    Réponse
  6. Anno Nymous

    Bonjour à tous,

    Je voullais juste prévenir que la strategie d’etre bordelique dans pour ne pas pouvoir tuer le mouvement dans l’oeuf, ne tiens pas selon moi, en tous les cas tel que l’on s’organise actuellement.

    En effet, les pouvoirs ont accès à qui consulte quel contenu tant que nous ne prenons pas un minimum de précautions. En pratique, l’établissement d’une liste des défenseurs de l’idée de l’écriture citoyenne d’une constitution (ou d’un autre mouvement sur internet) est triviale pour les pouvoir type NSA, il leur suffit de regarder qui a consulté de manière consistante les contenus qui y sont relatif (ce blog, les vidéos d’Etienne, lemessage.org, les citoyens constituants, et divers autres site). Et en pratique je suis sûr qu’aucun défenseur de l’idée n’échappe aujourd’hui à une telle liste, ou presque. Il serait donc tout aussi facile de tuer le mouvement dans l’oeuf (et c’est vrai pour n’importe quel autre mouvement).

    Une solution technique qui pourrait potentiellement nous protéger de cela est l’utilisation de Tor. Personnellement, j’ai décidé à partir d’aujourd’hui de ne plus consulter de contenu politique que via le torbrowser (duquel j’écris ce commentaire), même s’il est surement déjà trop tard pour moi, du fait de mes activités passées sur le net.

    Je conseille à tout le monde, par précaution, d’utiliser le torbrowser pour se protéger son anonymat lors de la consultation de contenu politique, et également d’utiliser du logiciel libre. Si vous utilisez Windows ou Mac toutes vos actions sont pistées à la source (surtout avec Windows 10), et toute autre mesure prise par dessus est potentiellement vaine.

    Au passage, je ne sais pas jusqu’à quel point la sécurité des dissidents, pourraient être menacée dans le futur en France, et dans quelle mesure ça peut être de la pure paranoïa. Mais, étant donné que l’on semble rentrer dans une phase un peu plus dangereuse, en terme de sécurité autant prendre des précautions.

    Réponse
    • Ronald

      Je pense que prendre le chemin de la clandestinité est peine perdue. Qu’est-ce qu’on va tenter ? De faire une course au secret avec la NSA ? On ne sera jamais gagnant sur ce plan-là. Il faut dès lors compter que tout ce que l’on fait où dit est public à tout moment (en pratique c’est largement le cas). Il faut jouer sur la possibilité de toucher le maximum de gens, et en même temps éviter de faire ou dire quelque chose de potentiellement répréhensible. Alors, évidemment, je sais bien que s’Ils veulent vraiment mettre des gens hors d’état de nuire, Ils ne vont pas s’encombrer de formalités. Plusieurs politiciens ont déjà proposé ces derniers jours d’assigner à résidence toutes les personnes identifiées comme >radicalisées< (Etienne en fait peut-être partie). Mais je pense qu'il sera toujours plus difficile d'étouffer un mouvement en pleine lumière qu'un mouvement souterrain.

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      • Anno Nymous

        En fait je penses que l’idéal n’est pas d’avoir un mouvement souterain, mais d’avoir les deux composantes.

        C’est à dire qu’il y a une composante de gens qui sont publique et qui assume des actions publique et c’est très bien. (à chacun de juger s’il y a un risuqe, si oui lequel, et s’il est pret à la prendre, il y a à cela c’est extremement difficile à dire de manière objective).

        Mais à coté il y actuellement, comme dans tout mouvement, toute une catégorie de gens, pour qui déja aujourd’hui les seules actions notables on été de regarder beucoup de contenu, d’etre convaincu et d’en parler en privé avec leur amis. Et il me parrait très dommage que ceux-ci soient sur liste, car c’est non-nécessecaire, et que potentiellement le mouvement serait moins facilement controlable avec les deux composantes présentes.

        Réponse
  7. binnemaya

    totalement d’accord il faut en plus rajouter le cryptage de ce emails.
    Par contre TOR pose un PB tout bète mais usant c’est le ralentissement du web qu’il génère

    Réponse
  8. barbe

    bonjour
    pourquoi ne pas définir le terrorisme, dans un esprit de pacifisme radical visible dans la clameur de Etienne, comme toute démarche violente ou non qui vise à forcer des gens à prendre position (sur un terrain qui leur est étranger)? Sartre, en ce sens, serait un terroriste, et l’assumerait je pense.
    Naguère, quand on était encore en république, pour ne pas même parler de la démocratie, on aurait été démissionné pour le principe ? Ah, à moins que le terrorisme permette de ne pas imputer les responsabilités? Il serait une forme de plus à ajouter à l’éthique de la provocation, qui a remplacé, dans la vie publique, l’éthique de la responsabilité…

    Réponse
  9. Gaudefroy

    Pardonnez-moi, encore un copier-coller, mais qui me paraît central au niveau argumentaire :

     » L’agression mondialiste dont sont victimes les peuples de Syrie, d’Irak, du Yemen, d’Ukraine, concerne donc l’ensemble des populations du globe. Il s’agit d’un système idéologique d’oppression nouveau, qui a subverti les anciens concepts de guerre et de crime de guerre, d’État et de liberté des peuples, pour imposer, avec ses armes de destruction massive dont il conserve jalousement le monopole, un terrorisme intellectuel fait de notions telles que le terrorisme et le crime contre l’humanité. Ces deux notions relèvent assurément de la même strate parasite qui vise la domination mondiale par le chaos.  » (Damien Viguier, avocat)

    http://www.egaliteetreconciliation.fr/Crime-contre-l-humanite-terrorisme-et-mutation-du-droit-international-35564.html

    « Nous voudrions en savoir plus sur ce concept de légitime défense qui prévoit des frappes aériennes réalisées contre un Etat qui n’agresse personne, sans avoir obtenu l’accord de cet Etat, ainsi que sur sa conformité au droit international », a écrit la porte-parole de la diplomatie russe sur sa page Facebook.

    « Sur quels fondements agissez-vous sur le territoire d’un Etat souverain en contournant son gouvernement légitime, qui ne soutient pas ce même Etat islamique et qui le combat sans relâche? », s’interroge M.Zakharova.

    Selon elle, les frappes françaises en Syrie peuvent être considérées comme la « destruction du droit international au vu et au su de la communauté internationale ».

    http://fr.sputniknews.com/international/20150928/1018443064/syrie-france-frappes-russie.html

    (Hélas la Russie semble tout récemment être en train d’abandonner son combat tous azimuths sur la défense westphalienne des souverainetés.)

    Réponse
  10. etienne

    Des victimes sans valeur : les quatre millions de musulmans tués dans les guerres occidentales depuis 1990
    http://www.les-crises.fr/quatre-millions-de-musulmans-tues-dans-les-guerres-occidentales-depuis-1990

    Introduction d’Olivier Berruyer au texte de Nafeez Ahmed :

    « Papier fondamental de Nafeez Ahmed, publié en avril dernier.

    Rappelons que Nafeez Ahmed, est un politologue britannique et journaliste d’investigation, qui travaille avec la BBC et le Guardian. Il est le directeur de l’Institute for Policy Research and Development de Brighton, et enseigne à l’université du Sussex. Il a été nominé en 2003 pour le prix Napoli, équivalent du Goncourt français.

    “Pourquoi nous détestent-ils autant ?” Eh bien pour ça, 4 millions de morts environ – bien plus que pour 10 lignes dans un livre même saint…

    • 1ère Guerre du golfe (1991) : 200 000 morts en Irak
    • Sanctions brutales contre l’Irak (1993-2001) : 1 700 000 morts en Irak
    • “Guerre contre le terrorisme” (2001-2014) : 1 300 000 morts :
    – 1 000 000 de morts en Irak,
    – 220 000 en Afghanistan (estimation basse, d’autres sont bien plus importantes),
    – 80 000 au Pakistan ;
    – Yémen et autres pays non étudiés.

    Et si on essayait la fraternité, maintenant qu’on ressent ce que ça fait des morts innocents ?»

    Le texte de Nafeez Ahmed :
    http://www.les-crises.fr/quatre-millions-de-musulmans-tues-dans-les-guerres-occidentales-depuis-1990

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    • nlesca

      D’une part, d’autre part qui a donné du blé aux talibans au départ? Qui bossait avec Ben Laden?

      Ils ont créé un monstre, l’ont nourri, s’en sont servi pour prétexter leur guerres néo coloniales . Encore très récemment ils aimaient bien leur monstre, sensé faire du « bon boulot »…Mais la le monstre est devenu plus gros, il s’attaque aux enfants et aux vielles dames et sa peau épaisse le rend difficile à piquer.

      Ces abrutis-sorciers nous ont mis dedans et on et pas sortis de l’auberge.

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      • joss

        On pourrait dire pareil pour le nucléaire. Ils jouent aux apprentis sorciers, tant qu’il y a du profit ! Et les pots cassés c’est toujours pour les mêmes.

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  11. binnemaya

    Certains me traiterons de complotiste que je ne suis pourtant pas, je suis juste quelqu’un d’insignifiant qui se pose des questions significatives:
    Comme en 2001 on apprend mais cela reste a confirmer que les services secrets algérien ont prévenu les nôtres de l’imminence d’attentats sur paris dans une salle de spectacle avec en prime une personne identifier, qui bien sur l’on ignorer ce qui pose des questions dont nous devrions réclamer les réponses?
    La voix qui a revendiquer les attaques identifié comme étant celle de fabien clain de toulouse avait déjà menacé de s’en prendre au bataclan bien avant?
    Pour c’est comme si on me reprojetai en 2001 avec les mêmes interrogations.

    Réponse
  12. binnemaya

    penser avant d’agir n’a jamais tué personne :

    « La pire séduction du mal, c’est la provocation au combat » (Kafka)

    Réponse
  13. binnemaya

    voici l’extrait d’un texte d’Howard Zinn qui me semble particulièrement bien résumer l’origine du mal :

    « La désobéissance civile n’est pas notre problème. Notre problème c’est l’obéissance civile. Notre problème, ce sont les gens qui obéissent aux diktats imposés par les dirigeants de leurs gouvernements et qui ont donc soutenu des guerres. Des millions de personnes ont été tuées à cause de cette obéissance. Notre problème, c’est l’obéissance des gens quand la pauvreté, la famine, la stupidité, la guerre et la cruauté ravagent le monde. Notre problème, c’est que les gens soient obéissants alors que les prisons sont pleines de petits voleurs et que les plus grands bandits sont à la tête du pays. C’est ça notre problème ».

    Réponse
  14. gilles

    Comment l’élite néo-conservatrice américaine agit pour entraîner l’élite française dans ses guerres en neutralisant son indépendance économique, politique et géo-stratégique, un exemple : la vente d’Alstom. Par Eric Denécé et Jean-Michel Quatrepoint qui reviennent sur la vente d’Alstom à General Electric ainsi que les enjeux de guerre économique qui la sous-tend. Les dirigeants politiques socialistes ou conservateurs obéissent au patronat des entreprises situées dans le pays et si le patronat par son actionnariat est étranger, fatalement, ces dirigeants politiques sont obligés de faire une politique favorables aux intérêts étrangers en oubliant les intérêts des salariés français et l’intérêt de la France.

    httpv://www.youtube.com/watch?v=88cZestFj9c

    https://youtu.be/88cZestFj9c

    Réponse
  15. Jean

    Je voudrais signaler- pour ceux qui peuvent penser que la guerre est nécessaire pour assurer notre sécurité- le miracle incroyable
    du pays suisse dans ce domaine, qui a réussit dans les deux guerres mondiales réunies, en refusant en bloc la guerre, à essuyer moins de 100 pertes humaines, malgré son emplacement géographique stratégique peu avantageux, et la puissance limitée du pays du fait de sa petite taille.

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_la_Suisse_pendant_la_Seconde_Guerre_mondiale
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_la_Suisse_pendant_la_Premi%C3%A8re_Guerre_mondiale
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Pertes_humaines_pendant_la_Seconde_Guerre_mondiale
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Pertes_humaines_de_la_Premi%C3%A8re_Guerre_mondiale

    La suisse semble aussi assez largement avoir été épargnée par les attentats meurtiés depuis un sciècle.

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_d%27attentats_meurtriers#XIXe_si.C3.A8cle

    Ca me parait assez notable pour le rappeler.

    Réponse
    • Ronald

      Cela fait déjà longtemps que Houellebecq est opposé au régime électif. Il l’évoque notamment dans l’interview sur Europe 1 (2013) :
      https://youtu.be/FXBAO1nAX-w
      et dans l’interview dans Lui (2014) :
      http://www.luimagazine.fr/culture/livres-bd/michel-houellebecq-par-frederic-beigbeder/3/
      Plus quelques allusions dans Soumission.
      Mais je n’ai pas d’indice qu’il ait une connaissance d’Etienne ou d’autres partisans du tirage au sort. Il n’évoque toujours que le recours à la démocratie directe et au référendum. Je pense que ce qui lui a ouvert les yeux est la (re)lecture de la Démocratie en Amérique (2011) :
      https://youtu.be/ZtiJQZTqu9M
      Peut-être prépare-t-il un texte sur ces questions ? A suivre.

      Réponse
      • binnemaya

        merci pour ces précisions il faut dire qu’il me rebute toujours car il dégage un truc pas clair genre pervers et surement très torturé ce qui ne l’empêche pas d’avoir du talent. Mais ne faisons pas la fine bouche tout ce qui permet le débat est bon a prendre.

        Réponse
  16. Gaudefroy

    L’opposition en peau de lapin, anti-impérialiste pour de rire, appelée NPA soutient le combat  » antifa  » (traduisez ici néoconservateur) d’Ornella Guyet. Saluons leur lucidité et leur rigueur intellectuelle par un amer ricanement.

    http://tantquillefaudra.org/debats/article/michel-collon-un-militant-de-la-347

    Confusionnisme.info, une bonne source d’infos à l’envers. Exemple : découvrez une vraie journaliste en la personne de Diana Jonhstone

    http://confusionnisme.info/2015/10/29/jean-bricmont-et-diana-johnstone-a-la-librairie-resistances/

    Une France vraiment laïque, ce serait une bonne idée. Quelle régression depuis 40 ans où le wahabisme et le sionisme sont devenus le nouveau marxisme des damnés de la terre. D’ailleurs dans ce conflit, les pauvres citoyens occidentaux non confessionnalisés n’existent même plus, ils crèvent dans le silence et dans la honte.

    http://www.egaliteetreconciliation.fr/La-tragedie-peut-elle-apporter-le-changement-36184.html

     » J’accuse  » de Michel Collon va tout de même beaucoup plus loin que le déplumé Houellebecque. Quand donc le peuple Français se soulèvera ?

    http://www.michelcollon.info/Terrorisme-Michel-Collon-accuse-et.html?lang=fr

    Réponse
    • etienne

      « À présent domine en France une forme abâtardie de la pensée de Nietzche (il en aurait d’ailleurs été le premier horrifié) qui invite continuellement le lecteur à remplacer la question « Que dit-il ? » par « Qui parle ? » (Certains sites web se sont même spécialisés – sous le masque de « l’antifascisme » – dans cet exercice purement policier).

      À tel point qu’on peut se demander combien de critiques professionnels seraient encore capables, de nos jours, de juger la valeur philosophique ou littéraire d’un texte anonyme – autrement dit d’un texte dont il leur serait impossible, par définition, de prétendre connaitre à l’avance les sombres arrière-pensées. »

      Jean-Claude Michéa, La gauche et le peuple, 2014.

      Voir aussi :
      Ornella Guyet : L’archétype de la désinformation
      https://anticons.wordpress.com/2015/10/09/ornella-guyet-archetype-de-la-desinformation/

      Réponse
  17. etienne

    Des anciens pilotes de drones se disent « horrifiés » par la cruauté des programmes d’assassinat. (The Intercept)

    « Les pilotes de drones sont en train d’infliger de lourdes pertes civiles et ont développé une culture institutionnelle insensible à la mort d’enfants et d’autres innocents, ont déclaré quatre anciens pilotes lors d’une conférence de presse aujourd’hui à New York. […] »

    http://www.legrandsoir.info/des-anciens-pilotes-de-drones-se-disent-horrifies-par-la-cruaute-des-programmes-d-assassinat-the-intercept.html

    Les meurtres, qui font partie du programme d’assassinat ciblé de l’administration Obama, aident le recrutement de terroristes et sapent ainsi l’objectif du programme qui consiste à éliminer ces combattants, ont-ils ajouté. Les pilotes se réfèrent aux enfants comme des « terroristes miniatures » et comparent leur assassinat à « couper l’herbe avant qu’elle pousse trop haut », a déclaré l’un des pilotes, Michael Haas, ancien officier supérieur de l’Armée de l’Air. Haas a également décrit l’usage largement répandu de drogues et d’alcool, en précisant que certains pilotes avaient effectué des missions sous leur emprise.

    En plus de Haas, les autres pilotes sont l’ancien sergent-major de la Force aérienne, Brandon Bryant ainsi que les anciens pilotes Cian Westmoreland et Stephen Lewis. Ces hommes ont effectué des missions d’assassinat sur un grand nombre des principaux théâtres de la guerre post-11/9 contre le terrorisme, dont l’Irak, l’Afghanistan et le Pakistan.

    « Nous avons été témoins directs des abus », a déclaré Bryant, « et nous sommes horrifiés. »

    Un porte-parole de l’Armée de l’Air n’a pas abordé les allégations précises, mais a écrit dans un courriel que « les exigences auxquelles les pilotes [de drone] sont soumis sont énormes. Une grande partie des efforts sont déployés pour apporter un soulagement, de stabiliser la force, et de maintenir une capacité de combat… Les pilotes sont tenus de respecter les normes de comportement établies. Un comportement jugé incompatible avec les valeurs fondamentales de la Force aérienne est examiné de manière appropriée et, si nécessaire, des mesures disciplinaires sont prises ».

    Au-delà de la conférence de presse, le groupe a également dénoncé hier le programme dans une interview au quotidien The Guardian et dans une lettre ouverte adressée au président Obama.

    Lors de la conférence de presse, M. Bryant a déclaré que le meurtre de civils par drones exacerbe le terrorisme. « Nous en tuons quatre et en créons 10 [militants], » a déclaré M. Bryant. « Si vous tuez un père, un oncle ou un frère qui n’a rien à voir avec quoi que ce soit, leurs familles vont vouloir se venger. »

    L’administration Obama a fait de grands efforts pour garder secret les détails du programme de drones, mais dans leurs déclarations aujourd’hui les anciens pilotes ont révélé la culture qui s’est développé entre les responsables de sa mise en œuvre. Haas a dit que les pilotes deviennent acculturés au point de nier l’humanité des personnes visées sur leurs écrans. « Il y avait un très grand détachement quant à qui étaient ces personnes que nous avions dans notre ligne de mire, » a-t-il dit. « Ouvrir le feu était grandement salué et encouragé »

    La morts d’enfants et d’autres non-combattants lors des frappes a été rationalisée par de nombreux pilotes de drones, a dit Haas. En tant qu’instructeur de vol, Haas a affirmé avoir été officieusement réprimandé par ses supérieurs pour avoir recalé un étudiant qui avait exprimé sa « soif de sang, » et une envie irrésistible de tuer.

    Haas a également décrit l’usage répandu d’alcool et de drogues chez les pilotes de drones. Les pilotes de drones, a-t-il dit, étaient souvent ivres et utilisaient des sels de bain et de la marijuana synthétique pour échapper aux dépistages éventuels et dans une tentative de « changer la réalité et d’essayer d’imaginer être ailleurs. » Haas a dit qu’il connaissait au moins une demi-douzaine de personnes dans son unité qui utilisaient des sels de bain et que l’usage de drogues avait « compromis leurs facultés » au cours des missions.

    Le programme d’assassinat de l’administration Obama a fait l’objet d’un examen accru au cours des derniers mois. Au mois d’octobre dernier, The Intercept a publié un lot de documents classifiés, transmis par un lanceur d’alertes du gouvernement, qui montre comment le programme a tué des gens sur la base de renseignements non fiables, que la grande majorité des personnes tuées dans la campagne d’Afghanistan, qui dure depuis des années, n’étaient pas les cibles visées et que l’armée a classé par défaut les personnes tuées par erreur non comme des civils mais comme des ennemis.

    Les pilotes ont dit qu’ils se sentaient encore plus en devoir de parler au lendemain des attentats terroristes meurtriers à Paris la semaine dernière ; ils croient que les assassinats par drones ont alimenté la montée du groupe extrémiste l’Etat islamique qui a revendiqué la responsabilité des attaques.

    Westmoreland a déclaré à propos des drones : « A court terme, ils sont efficaces pour tuer des gens, mais à long terme, ils ne le sont pas. Il y a des gamins de 15 ans qui ont grandi sans avoir connu une seule journée sans vols de drones au-dessus de leurs têtes, mais vous avez aussi ceux qui vivent à l’étranger et qui regardent ce qui se passe dans leur pays d’origine et qui voient régulièrement les violations qui s’y déroulent, et ça c’est quelque chose qui peut les radicaliser ».

    Dans leur lettre ouverte à Obama, les anciens pilotes de drones ont exprimé un point de vue similaire, en écrivant que pendant leur service, ils « ont fini par réaliser que l’assassinat de civils innocents ne faisait qu’alimenter les sentiments de haine qui sont à l’origine du terrorisme et des groupes comme l’EI, » et en décrivant plus loin le programme comme « une des forces motrices les plus dévastatrices du terrorisme et de déstabilisation dans le monde entier. »

    Lors de la conférence de presse, les pilotes ont exprimé ces sentiments. « Il semble que nos actions ces derniers temps n’ont fait qu’aggraver le problème… Les drones sont efficaces pour tuer des gens, mais pas pour tuer les bons », a déclaré M. Bryant. « Avons-nous perdu notre humanité dans notre poursuite de vengeance et de sécurité ? »

    Murtaza Hussain

    Traduction « sommes-nous réellement conscients de ce que nous faisons ailleurs ? » par VD pour le Grand Soir avec probablement toutes les fautes et coquilles habituelles.

    Source : http://www.legrandsoir.info/des-anciens-pilotes-de-drones-se-disent-horrifies-par-la-cruaute-des-programmes-d-assassinat-the-intercept.html

    Réponse
    • Jacques

      « […] Sur une sous-période de cinq mois pendant cette opération, 90% des personnes tuées n’étaient pas des personnes visées, poursuit The Intercept. […]» http://www.lexpress.fr/actualite/monde/amerique-nord/en-cinq-mois-les-drones-americains-ont-tue-90-de-civils-plutot-que-des-terroristes_1726392.html

      Les américains se targuent d’avoir redécouvert Galula (« devenu une référence majeure pour la génération d’officiers de l’US Army aux prises avec les insurrections modernes. » http://www.amazon.fr/Contre-insurrection-Th%C3%A9orie-pratique-David-Galula/dp/2717855092) ; mais en vrai ils font tout le contraire :

      « […] «Si l’insurgé [ou le loyaliste] parvient à dissocier la population du loyaliste [ou de l’insurgé], à la contrôler physiquement et à obtenir son soutien actif, il gagnera la guerre». […] »

      « […] À cet égard, il est intéressant de noter que les élections locales n’arrivent qu’en 5ème étape et l’organisation d’un parti national en 7ème étape, ce qui implique que la contre-insurrection soit à un état avancé dans de nombreuses autres régions. Cela inciterait certainement à la prudence au regard de la pratique occidentale plutôt inverse dans les opérations récentes comme en Irak et en Afghanistan où les élections ont été organisées rapidement et présentées comme le couronnement d’un processus alors même que le travail de pacification n’était pas réellement en voie d’achèvement. […] »

      http://www.penseemiliterre.fr/lieutenant-colonel-david-galula-peut-on-etre-prophete-en-son-pays-_2013596.html

      Réponse
      • Jacques

        Toujours sur ce dernier lien :

        « Pour lui, la guerre contre-insurrectionnelle est marquée par la prépondérance permanente du politique au cours de la guerre, alors que dans un conflit traditionnel, une fois la guerre déclarée les opérations prennent souvent l’ascendant.

        Cette prépondérance a une double dimension opérationnelle et institutionnelle.

        En termes opérationnels, la politique prend une place essentielle car le militaire ne représente guère que 20% environ de l’ensemble des missions à accomplir du déclenchement des hostilités à la victoire finale. En effet, la population étant le centre de l’attention, cela nécessite de maintenir un seuil de violence le plus bas possible afin de gêner le moins possible la vie normale et la reconstruction d’un état de paix. Il écrit même : «La politique devient par elle-même une fonction opérationnelle. Les interactions entre le politique et le militaire deviennent si fortes qu’on ne peut plus nettement les séparer».

        De là réside la tentation, qui est pour Galula une erreur, de vouloir faire faire aux militaires l’ensemble des tâches parce qu’ils ont la maîtrise du terrain, et de leur donner de surcroît l’autorité sur l’ensemble du processus. Au contraire, le pouvoir civil doit conserver la primauté sur le militaire à tous les échelons, même le plus bas, et assurer la coordination avec l’administration civile. Il s’agit notamment de la police et de la justice mais pas seulement, ce sont toutes les dimensions de l’appareil administratif qui sont concernées et qui permettront le rétablissement d’un processus politique normal. »

        A comparer avec :

        http://forums.futura-sciences.com/mathematiques-superieur/701172-lentropie-dune-organisation-terroriste.html

        « ce qui ressemble vraisemblablement à la fonction entropique d’un processus de Bernouilli » […] « Donc q est le pourcentage de pertes occasionnées à l’organisation terroriste et Q est la probabilité que l’organisation s’effondre. Si vous prenez q=50% vous trouvez que l’organisation terroriste a 100% de chances de s’effondrer immédiatement. Si vous prenez q=25% vous arrivez déjà à Q=80%. »

        Réponse
  18. etienne

    Va-t-en-guerre

    http://www.contretemps.eu/interventions/va-t-en-guerre

    Il est peut-être temps de prendre suffisamment de recul pour admirer le génie de la stratégie antiterroriste occidentale, évidemment marquée par sa grande cohérence stratégique et tactique.

    1) Combattre les assassinats aveugles et les tirs contre des civils par des assassinats aveugles et des tirs contre des civils ;

    2) Combattre les atteintes aux droits démocratiques et aux libertés publiques par des atteintes aux droits démocratiques et aux libertés publiques ;

    3) Combattre les tentatives des djihadistes de promouvoir une vision de deux camps opposés et irréconciliables – l’Islam, d’un côté, et l’Occident, de l’autre – en faisant la promotion d’une vision qui présente deux camps opposés et irréconciliables – en l’occurrence l’Islam et l’Occident ;

    4) Combattre le discours des djihadistes sur l’islamophobie maladive de l’Occident en nourrissant l’islamophobie maladive en Occident ;

    5) Combattre la propagation d’une forme réactionnaire de l’islam politique en faisant affaire et en établissant des alliances politiques avec les États les plus investis dans la propagation de la forme la plus réactionnaire de l’islam politique ;

    6) Combattre l’idée que les pouvoirs occidentaux agissent dans leur seul intérêt et de manière néocoloniale lorsqu’ils soutiennent les États les plus autoritaires et les plus corrompus, en soutenant les États les plus autoritaires et les plus corrompus de manière néocoloniale et dans le seul intérêt des pouvoirs occidentaux ;

    7) Combattre le fait que Daesh se présente comme un véritable État en guerre contre les pays occidentaux, en déclarant que les pays occidentaux sont en guerre contre l’État islamique ;

    8) Combattre la propagande de Daesh qui veut que l’Occident soit le lieu d’une décadence sans âme et vaine, seulement marqué par son attachement aux pratiques hédonistes, en mettant en avant des pratiques hédonistes en tant que caractéristiques déterminantes pour distinguer l’Occident de Daesh ;

    9) Combattre le fait que les djihadistes prétendent que les courants islamistes réformistes sont naïfs de croire qu’ils pourront prendre le pouvoir par le biais des élections, en soutenant un coup d’État contre un président islamiste réformiste arrivé au pouvoir par le biais d’élections démocratiques ;

    10) Combattre le prétendu antisionisme des islamistes radicaux qui se nourrit de l’argument qui veut que l’Occident maintiendrait deux poids, deux mesures à l’égard d’Israël, qui se voit doté d’argent et d’armes quel que soit le sort des Palestiniens, en maintenant deux poids, deux mesures à l’égard d’Israël, qui se voit doté d’argent et d’armes quel que soit le sort des Palestiniens.

     

    Les choses ainsi posées, comment pourraient-elles mal tourner ?

     

    Sebastian Budgen est éditeur chez Verso (Londres). Il est également membre fondateur de l’espace de recherche critique marxiste Historical Materialism. Quelques uns de ses articles sont disponibles dans la New Left Review.

    Source : http://www.versobooks.com/blogs/2350-the-war-must-go-on-sebastian-budgen-on-the-west-s-strategy-after-paris

    Source en français : http://www.contretemps.eu/interventions/va-t-en-guerre

    Réponse
  19. etienne
    S’il n’y avait qu’un billet à lire sur les racines des attentats, c’est celui-ci, tout y est.
    Mathieu Aron, Benoit Collombat et Jacques Monin, l’Honneur du journalisme français, chapeau bas !
    Merci à tous ceux qui ont aidé à préparer ce billet INDISPENSABLE…
    Source : France Inter, Matthieu Aron, 20/11/2015

    L’émission Daesh : autopsie d’un monstre

    Matthieu Aron : Ce soir, enquête sur la fabrication du monstre Daesh, quel a été l’implication de pays comme l’Arabie Saoudite et le Qatar ? Nous allons voir dans une enquête signée Jacques Monin et Benoît Collombat que l’enjeu pétrolier a pu jouer un rôle considérable.
    extrait Hocham Daoud : “Tout le monde a joué avec Daesh. Tout le monde voulait jouer a travers Daesh pour s’imposer. En fait, on a créé Frankestein, aujourd’hui tout le monde essaye de trouver un moyen pour l’arrêter. Oui il y a des moyens, s’il y a une volonté politique.”
    Matthieu Aron : Pour commencer cette émission, je vous propose d’écouter cet extrait d’interview :
    extrait Marc Trévidic : Si l’Émir du Katiba en Syrie de l’EI demande à main levée à ses recrues “Qui veut aller faire un attentat en France ?” vous allez avoir 200 bras qui vont se lever en une demi seconde.
    Matthieu Aron : 200 candidats au martyr. C’est le chiffre effrayant donné par le juge Marc Trévidic. Vous suivez l’enquête sur les attentats. Et ce qui nous a tous frappé, c’est ces opérations kamikazes qui se sont déroulées pour la première fois en France.
    Elodie Guéguen : Oui, encore qu’il soit plus juste de parler d’attentats suicides pour être très précis, le terme Kamikaze désignait ces pilotes japonais qui s’écrasaient volontairement sur des cibles militaires. Là, il s’agit d’autre chose, d’ailleurs Daesh a conceptualisé ce type d’attaques dès le début de la guerre en Syrie. Daesh a même créé un terme spécifique (inrimassi ?!), il désigne des combattants qui, les armes à la main, se rapproche de la foule ou de leur cible et qui déclenchent leur ceinture explosive. Soit quand ils sont encerclés soit lorsqu’ils n’ont plus de munitions. C’est donc précisément le scénario de vendredi dernier.
    Matthieu Aron : Et le juge Marx Trévidic, qui dans son cabinet d’instruction, a entendu des dizaines de terroristes, nous dit “il y a pléthore de candidats” et il n’est pas le seul à le dire…
    Elodie Guéguen : Non il s’agit malheureusement d’une réalité, ça semble presque inconcevable mais selon les experts, les candidats au martyr seraient même trop nombreux, c’est ce qu’a observé le chercheur le chercheur Romain Caillet. L’un des meilleurs spécialistes des milieux djihadistes.
    extrait Romain Caillet : “C’est pas seulement de la propagande, c’est une réalité. Il y a même des listes d’attentes. En tout cas en Syrie et en Irak, il y a des listes d’attentes de gens qui sont prêt à faire des opérations martyr, des attentats suicides, aussi bien des jeunes qui viennent de quartiers sensibles en France ou des gens de bonnes familles, des ressortissants du Golfe qui sont fortunés ou des tunisiens issus de régions déshéritées du sud de la Tunisie”.
    Elodie Guéguen : Les origines, les profils, sont variés, vous l’avez entendu. Mais ces kamikazes de l’EI ont un point commun, ils sont volontaires. Ce choix, ils le manifestent dès leur arrivée dans les camps d’entrainements. Deux filières existent et Daesh demande aux combattants de choisir leur filière, explique le journaliste David Thomson, auteur de livres “Les Français Djihadistes”.
    extrait David Thomson : “Dès qu’on arrive en Syrie, on pose la question aux combattants au sein de l’EI : Est-ce que vous voulez être un combattant “normal” ou combattant “(inrimassi ?!)”, ça veut dire combattant, candidat, pour une opération kamikaze. Et ensuite ils suivent une sélection particulière parce que l’EI peut pas se permettre de voir au dernier moment un kamikaze flancher, c’est une question de crédibilité aussi pour eux.”
    Matthieu Aron : Ils suivent une formation particulière, dit David Thomson, ça signifie quoi ?
    Elodie Guéguen : Et bien ça veut dire qu’ils vont être isolés du reste du groupe, ils vont être placés dans un camp d’entrainement spécifique. Comme les autres, ils recevront une formation religieuse, théologique, ils suivront aussi un entraînement militaire, mais ils seront mieux encadrés psychologiquement, mieux encadrés ou plus endoctrinés.
    Matthieu Aron : Est-ce qu’on sait en quoi consistent précisément ces techniques, parce qu’il faut les appeler comme ça, de lavage de cerveau ?
    Elodie Guéguen : Alors ça dans les détails, malheureusement on l’ignore. Il n’existe pas à notre connaissance de témoignages de djihadistes de Daesh qui seraient passés par ces camps de kamikazes, qui auraient ensuite renoncés à commettre une attaque suicide, puis qui auraient raconté leur expérience. A l’image de ce qu’on fait certains repentis, comme on les appelle.
    Matthieu Aron : Alors ce que l’on sait en revanche, c’est que ces candidats aux attaques suicides sont très très bien traités par les cadres de l’EI.
    Elodie Guéguen : Oui c’est d’ailleurs une des raisons qui motivent certains djihadistes à se porter candidat pour commettre une action kamikaze selon le chercheur Roman Caillet.
    extrait Roman Caillet : “Ils sont traités avec beaucoup plus d’égard que les autres combattants, ce qui fait que peut-être psychologiquement ils ont une dette envers ceux qui les ont accueillis dans ces centres. Et puis une certaine culpabilité, ils pensent ne pas avoir fait assez donc ils veulent se rattraper en faisant une grosse opération. On peut aussi penser, que certains veulent passer à la postérité. Être finalement, celui qui a permis de remporter la bataille, de prendre telle ou telle ville.”
    Matthieu Aron : Vouloir passer à la postérité en se suicidant, pourtant le suicide, à ma connaissance, il est interdit par l’Islam.
    Elodie Guéguen : Et bien pas dans l’esprit de ceux qui commettent ces actes au nom de Daesh. C’est ce que nous explique Fethi Benslama, il est professeur de psychopathologie à l’université Paris Diderot.
    extrait Fethi Benslama : “Pour eux ce n’est pas un suicide, c’est un auto-sacrifice. Comme le dit le communiqué qui revendique les attentats. Il utilise le mot “divorcé du monde d’ici-bas”. Divorcé du monde d’ici-bas pour se marier avec l’autre monde. Dans l’autre monde, ils vivent, ils jouissent, et même ils sont une jouissance absolu, extrême, ce qui est le processus interne par lequel quelqu’un accepte d’aller jusqu’au bout de cet acte-là.”
    Matthieu Aron : En conclusion, que sait-on ce soir sur ceux qui sont mort en martyr vendredi à Paris et ensuite à Saint Denis ?
    Elodie Guéguen : Alors tous ou presque, on le sait, sont passés par des camps d’entrainements en Syrie. Maintenant il y a deux hypothèses. Soit c’est un groupe de terroristes dont les membres se connaissaient, qui se sont former et entrainés ensemble pour mener cette attaque. Soit, et c’est une hypothèse privilégiée, soit ils ont été soigneusement sélectionnés, “castés” les uns après les autres par Daesh, ce qui montrerait un degré de préparation encore plus sophistiqué.
    extrait François Hollande : “Notre ennemi en Syrie, c’est Daesh. Il ne s’agit donc pas de contenir, mais de détruire cette organisation. La Syrie est devenue la plus grande fabrique de terroristes que le monde ai connue et la communauté internationale est divisée et incohérente.”
    Matthieu Aron : Face au terrorisme, une communauté divisé et incohérente, dit François Hollande. Et bien nous allons revenir ce soir sur la fabrication du monstre Daesh. A-t-on fermé les yeux sur la montée en puissance de ce groupe terroriste ? Quelle est l’implication de l’Arabie Saoudite et du Qatar et quel rôle a joué la diplomatie française ? Avec Benoit Collombat, vous avez donc enquêté et pour bien comprendre il faut revenir au début de l’histoire. Tout part de la guerre en Irak.
    Jacques Monin : Oui, de la chute de Saddam Hussein parce que lorsqu’ils le renversent, les Américains commettent deux erreurs. D’abord, ils mentent sur les armes de destructions massives et sur les liens supposés entre Saddam Hussein et al-Qaida. Mais surtout ils marginalisent les Sunnites pour mettre les Chiites au pouvoir et Paul Bremer, qui est alors le gouverneur américain à Bagdad, commet une faute qui va jeter des dizaines de milliers de soldats aguerris dans les bras du futur EI. Cette faute, un des hommes le plus mieux informés de France, Alain Juillet, l’ex patron du renseignement de la DGSE, nous la raconte.
    extrait Alain Juillet : “Brener fait une erreur colossale. C’est qu’il donne l’ordre de licencier tous les militaires de l’armée irakienne. On envoie, je ne sais plus combien ils étaient, 200 000 ou 300 000 gens, qui vivaient avec une solde de l’armée. Ils partent avec leurs armes, ils n’ont plus rien. Et comme ils sont Sunnites et qu’on fait la chasse aux Sunnites, il va y avoir l’impossibilité pour eux de retrouver des emplois et autres. Donc ça va créer un ressentiment, une frustration, une haine terrible envers l’occupant et envers les Occidentaux.”
    Matthieu Aron : Les Américains produisent donc un terrain de haine et un terreau sur lequel va se développer l’EI.
    Jacques Monin : Oui. D’autant plus facilement qu’il n’y a plus de véritable État, les services publics n’existent plus, l’économie est moribonde, la corruption est devenue la norme. C’est donc effectivement sur ces cendres que le groupe EI va prendre racine et pour Myriam Benraad, qui est docteur en science politique et spécialiste de l’Irak, c’est un peu comme dans la jungle, ce sont les plus forts qui émergent dans ce chaos.
    extrait Myriam Benraad : “Il y aura un certain nombre de groupes qui vont pulluler, les milices, les djihadistes, la tendance al-Qaïda, c’est une nébuleuse d’acteurs mais le fait est que les combattants d’al-Qaïda Irak deviendra l’EI sont les plus zélés, les plus déterminés. Donc l’État Islamique va faire le vide, va coopter un certain nombre de chefs de tribus, qui de fait parfois même quitte leur tribu pour rejoindre l’organisation. Donc d’une mouvance hétéroclite on a un processus d’unification et ils ont fait à mon avis fortune, bâti beaucoup de leur succès, sur cette unité qu’ils ont su construire dans un terrain qui était par ailleurs très divisé, très morcelé.”
    Jacques Monin : Et sur ce terrain, une personnalité va émerger, c’est Abou Bakr al-Baghdadi qui règne toujours d’ailleurs aujourd’hui en maitre sur Daesh. L’autre groupe djihadiste dominant dans la région, c’est al-Nosra, qui est plus proche d’al-Qaïda.
    Matthieu Aron : Et ces groupes qui montent en puissance, et bien on les voit dans un premier temps plutôt d’un bon oeil chez les voisins de la Syrie et notamment en Arabie Saoudite.
    Jacques Monin : Oui parce que l’Arabie Saoudite est sunnite, elle a donc très mal vécu l’arrivé au pouvoir des chiites en Irak et l’avènement des groupes djihadistes, c’est un peu à ses yeux une manière de freiner un axe chiite (Liban Syrie, Irak, Iran) qui commence à prendre un peu trop d’espace à son gout. C’est ce qu’analyse Alain Chouet, un autre ex-patron du renseignement de la DGSE.
    extrait Alain Chouet : “L’Arabie Saoudite essaye de s’opposer à la création de ce que l’on appelle le croissant chiite au Moyen-Orient et de maintenir un axe sunnite à travers l’Arabie, la Jordanie et la Turquie. Ces mouvements salafistes, sunnites, sont le seul moyen actuellement pour l’Arabie de s’opposer à la création d’un vaste ensemble chiite qui lui serait évidemment hostile. Il y a aussi l’enjeu pour l’Arabie Saoudite de s’opposer à toutes possibilités de dérives démocratiques et nationalistes dans les pays arabes. L’État Islamique l’a dit x fois, la démocratie est une abomination.”
    Matthieu Aron : Voilà donc pour le contexte géopolitique, mais ce qu’il faut préciser c’est que derrière cette toile de fond, il y a aussi des enjeux économiques absolument considérables.
    Jacques Monin : C’est un aspect qui était assez peu évoqué jusqu’ici mais il y a effectivement en arrière-plan le pétrole et le gaz, parce que jusqu’ici l’Arabie Saoudite domine la production de pétrole et le Qatar celle du Gaz. Hors ces deux pays apprennent que l’Iran, leur plus farouche rival, projette de construire un pipeline qui traverserait l’Irak et la Syrie pour s’assurer un débouché vers la Méditerranée, alors ça redistribuait totalement les cartes du marché du pétrole et du gaz, et pour Alain Juillet c’est un des éléments qui vont pousser ces deux pays à déstabiliser Bachar el-Assad.
    extrait Alain Juillet :” L’Arabie Saoudite et le Qatar prennent très mal l’idée d’un pipeline qui pourrait aller depuis l’Iran jusqu’à la Méditerranée et qui pourrait donc concurrencer leurs livraisons de pétrole. Ils vont dire “mais dans le fond, le problème c’est Bachar, Bachar est en train de signer un accord qu’il ne devrait pas signer avec l’Iran, donc c’est un personnage extrêmement dangereux, donc il faut renverser Bachar. “

    Jacques Monin : Et preuve qu’un mouvement se met en route, le prince qui dirige les services de renseignements saoudiens va alors voir Vladimir Poutine, chez lui en Russie, pour lui demander de ne plus soutenir Bachar el-Assad, vous comprenez qu’il sera éconduit sans ménagement.
    Matthieu Aron : Avec ou sans l’appui des Russes, une opération de déstabilisation de Bachar el-Assad est donc lancée pour des raisons économiques liées à l’acheminement du pétrole, ça on l’a compris, mais pas uniquement.
    [ALERTE ALERTE, un journaliste s’est introduit à France Inter !!!!]
    Jacques Monin : Non, l’Arabie Saoudite et le Qatar financent aussi les rebelles pour faire tomber le régime laïc de la Syrie et pour y instaurer un régime islamique extrêmement sévère, explique encore Alain Juillet.
    extrait Alain Juillet : “Les opposants religieux, c’est-à-dire les Frères Musulmans, dont le Qatar est un des support reconnu hein, les Frères Musulmans et les saoudiens ne vont pas hésiter à financer des gens pour réinstaller dans ce pays laïque la vrai religion, la religion vue par les salafistes en définitive. Et c’est ça qui va se passer, donc on va voir le Qatar financer des mouvements, Jabhat al-Nosra en particulier, qui est proche d’al-Qaïda et qui va se battre au niveau religieux, en disant “il faut imposer l’islam”. Et puis il y a Daesh, là encore au départ c’est un groupement qui reçoit beaucoup d’argent, de la part, on le sait bien, de la part des saoudiens et des qataris. Mais qui n’a pas encore pris l’ampleur qu’il a pris, mais qui démarre.
    [ALERTE ALERTE, deux journalistes se sont introduits à France Inter !!!!]
    Jacques Monin : Oui vous avez donc compris, on a deux mouvements terroristes principaux, Daesh et al-Nosra, qui sont financés par le Qatar et par l’Arabie Saoudite, et ça a d’ailleurs encore été relevé très récemment, c’était en mai 2015 dans un rapport du Congrès américain.
    Matthieu Aron : Cela dit, le souci, Jacques Monin, c’est que ce financement, tout le monde en parle, mais que personne jusqu’ici n’a réussi à en apporter la preuve.
    Jacques Monin : Alors plus ou moins, mais c’est très difficile parce que les circuits financiers sont compliqués à établir. Mais Pierre Conesa, qui lui est un ex haut-fonctionnaire du Quai d’Orsay, et donc un spécialiste de l’islam, croit savoir comment cet argent sort des comptes des haut dignitaires du Golfe pour arriver jusqu’aux groupes djihadistes.
    extrait Pierre Conesa : “L’Arabie Saoudite est poreuse, en terme financier, parce que l’argent public et l’argent privé n’existent pas, la distinction n’existe pas. Quand il manque de l’argent dans la caisse public, c’est le roi qui verse. Et quand il y en a trop, c’est lui qui ramasse. Et donc toutes les familles des 10 000 princes qui tournent autour, c’est exactement pareil. Et pourquoi c’est poreux ? Parce que si vous voulez, l’Arabie Saoudite, c’est une espèce de Disney World de l’islam, c’est-à-dire que tout est faux. Vous croyez que les gens sont religieux etc., en fait c’est une espèce de ghetto dans lequel il n’y a aucun cinéma, aucun théâtre. Et quand les Saoudiens sortent à l’étranger à ce moment-là ils s’éclatent, évidemment ils font tout ce qui est interdit là-bas. Et quand ils reviennent, comme ils se sentent coupable, ils achètent des indulgences. Et ces indulgences, ils ne disent pas “cet argent doit aller à al-Nosra” ou “il doit aller à Daesh”. Simplement cet argent va de fait vers ces groupes islamistes.
    Jacques Monin : Vous avez compris, des indulgences. C’est en fait de l’argent qu’on donne a des fondations, des ONG saoudiennes, dont les objectifs sont parfois plus que discutables.
    Matthieu Aron : L’Arabie Saoudite et le Qatar ont donc aidé des groupes djihadistes. Mais au même moment, nous aussi, la France, nous avons aidé des groupes rebelles.
    Jacques Monin : Oui. L’ASL l’Armée Syrienne Libre, qu’on décrit alors à Paris comme une alternative démocratique possible, crédible, à Bachar el-Assad. Mais en fait, dès le départ, la France prend fait et cause pour les rebelles, contre le dictateur syrien. Rappelez-vous “le départ de Bachar el-Assad ce n’est qu’une question de semaines”, expliquait Laurent Fabius. Et en aout 2012, lors d’un déplacement a la frontière turque. Le ministre des affaires étrangères français prononcent ces phrases désormais célèbres.
    extrait Laurent Fabius : “Les personnes que je viens de voir, qui sont des syriens d’un village qui a été bombardé juste de l’autre côté de la frontière. Euh… Ces témoignages sont absolument bouleversants, j’ai dit à mes interlocuteurs que quand on entend ça, et je suis conscient de la force que je suis en train de dire. Monsieur Bachar el-Assad ne méritait pas d’être sur la Terre.
    Matthieu Aron : “Ne méritait pas d’être sur la Terre.” Les mots sont terribles et ça justifie, et bien que l’on arme les rebelles.
    OB : Je me permets de rappeler que c’est juste totalement illégal au regard du Droit International, qu’on est censé défendre en tant que membre permanent du Conseil de Sécurité de l’ONU hein, je dis ça, je dis rien…
    Jacques Monin : Effectivement, c’est ce qu’on pense à ce moment-là. Alors officiellement on livre des gilets pare-balles, des outils de cryptage pour les communications, des masques contre les armes chimiques, ou des lunettes de vue nocturnes, mais en fait ce sont bien des canon 20mm, des mitrailleuses, des lances roquettes et des missiles anti-char que nous avons livré à ces groupes.
    OB : 90 000 morts à ce jour dans l’armée syrienne et les milices, à savoir les troufions appelés du contingent et les volontaires comme vous ou moi… Mais attention, on défend la Démocratie et les Droits de l’Homme (blanc)
    Matthieu Aron : Ces armes, officiellement destinées à l’Armée Syrienne Libre, et pourtant dans les faits, on ne sait pas trop dans quelles mains elles sont tombées.
    OB : Non, on ne sait pas hélas… C’est un mystère absolu…

    Ici, un islamiste de la brigade salafiste Ahrar al-Sham avec un missile Milan français
    Jacques Monin : Bah non. On le réalise aujourd’hui. L’ASL ne pesait rien. Ce qu’on appelle les rebelles, c’est une nébuleuse illisible. Certaines de ces armes sont donc effectivement passées dans les mains d’al-Nosra, le groupe proche d’al-Qaïda, et c’est ce qui fait dire à l’ex-patron du renseignement extérieur de la France, Alain Juillet, qu’on s’est planté sur toute la ligne.
    OB : Mais qui, qui, qui, aurait pu s’en douter ?
    Robert Baer, l’ancien chef de région de la CIA au Moyen-Orient (dont le rôle est tenu par Clooney dans le film Syriana) a indiqué ”Les États-Unis ont été incapables d’identifier le moindre groupe syrien dit « modéré » lorsque la guerre civile a débuté.” (Source : L’Humanité).
    extrait dialogue Alain Juillet et Jacques Monin :
    Alain Juillet : Moi je pense qu’il y a eu une faillite des services de renseignements dans ce domaine. Et ça se comprend, puisqu’une des premières réactions qu’on a faite, ça a été de couper les ponts, fermer l’ambassade. Une première réaction c’est de fermer l’ambassade en Syrie et de ne plus avoir de contact avec les services syriens. Mais dans ce genre de choses, il faut avoir des contacts en permanence.
    Jacques Monin : On a livré des armes aux rebelles ?
    Alain Juillet : Bien sûr.
    Jacques Monin : La France a livré des armes à al-Qaïda ? A l’État Islamique ?
    Alain Juillet : Les Américains ont livré des armes pour empêcher la progression de l’armée de Bachar contre Jabhat al-Nosra et Daesh. Les Américains ont livré des missiles anti-char encore récemment. La question, c’est qu’on entendait à ce moment-là “Nous soutenons les Syriens libres”. Mais quand on regarde sur le terrain ce que c’est que les Syriens libres, c’est rien du tout.
    OB : Je rappelle que François Hollande a avoué en 2014
    Matthieu Aron : La France se serait donc totalement trompée dans son évaluation de la situation. On a quand même du mal à le comprendre. Comment, au sommet de l’État français, on ait été aussi mal informé ? Comment on a pu croire que l’ASL pouvait peser face à ces groupes djihadistes ?
    Jacques Monin : Alors, il y a plusieurs aspects dans cette question. D’abord, pour Pierre Conesa, qui lui connait bien les rouages du quai d’Orsay. C’est tout l’appareil diplomatique qui s’est laissé aveugler. C’est donc un système, un fonctionnement, le fonctionnement même du Ministère des Affaires Étrangères, qui dit-il, est à revoir.
    extrait Pierre Conesa : “D’abord il y a eu un axe diplomatique qui a été dès le début extrêmement insistant sur le thème “notre ennemi c’est Assad”. À partir de ce moment-là, l’analyse de la crise a été monologique. Ça allait dans le sens de ce qu’avait décidé Fabius, et pas en fonction de ce qu’était la réalité du terrain. C’était “qu’est-ce que dit notre chef ?” et on va effectivement conforter ce que dit notre chef. C’est-à-dire “c’est Assad, il faut se battre contre Assad”. Et donc pour ne pas subventionner les groupes islamistes, c’était “on va subventionner l’ASL”. Mais c’est vrai que c’est une faillite terrible.”
    Matthieu Aron : Et cette faillite elle a peut-être aussi d’autres explications.
    Jacques Monin : Oui. Économique par exemple. Là aussi, l’Arabie Saoudite et le Qatar, ce sont des partenaires économiques de la France. Et face à eux la Syrie ne pèse pas lourd. Alain Chouet, l’ancien patron du renseignement de la DGSE, qui s’est rendu plusieurs fois en Syrie, se souvient de ce qu’on lui répondait au début de la crise lorsqu’il alertait les autorités françaises sur la réalité de la situation sur le terrain.
    extrait Alain Chouet : “La réaction que j’avais en général, en rentrant de Syrie, où je venais un peu raconter ce que j’avais vu, ce que j’avais entendu, les messages qu’on avait essayé de me faire passer. La réaction, une fois, la plus caricaturale, a été “écoute tu ne vas pas nous embêter avec la Syrie, c’est même pas le PNB de la Slovénie, alors on a mieux à faire avec nos amis Qataris et Saoudiens !”
    OB : j’ai toujours pensé qu’avec la globalisation, on finirait par payer dans notre chair tout le mal qu’on a fait… – oui, je sais ça fait Miss France.
    Matthieu Aron : Bon, sans commentaire… Et en plus Jacques Monin, ce n’est pas la première fois qu’on se trompe.
    RIP Diplomatie Française, 1958-2007
    Jacques Monin : Non. Rappelez-vous, au moment de l’intervention en Libye. On a commis le même type d’erreur de jugement. Écoutez ce que raconte a ce sujet Patrick Haimzadeh, qui est un ancien diplomate à Tripoli [Patrick Haimzadeh a travaillé à l’ambassade de France à Tripoli durant de nombreuses années. Cet ancien officier de l’Armée de l’air française est un parfait connaisseur de la Libye], qui a rencontré Benoit Collombat. À l’époque, Paris s’engage contre Kadhafi, on s’en souvient. Mais c’est le Qatar qui tire les ficelles en s’appuyant sur sa chaine de télévision Al Jazeera.
    extrait dialogue Patrick Haimzadeh et Benoit Collombat :
    Patrick Haimzadeh : Dès le départ, l’objectif c’était effectivement de faire sauter Kadhafi. Al Jazeera avait dès le départ mis en place une cellule de désinformation, en tout cas pour relayer les paroles de libyens qui étaient en fait dans les studios d’Al Jazeera à Doha et qui ont évoqué notamment l’histoire des bombardements. Qui a été centrale, parce que l’histoire des bombardements c’est ce qui a été repris par Nicolas Sarkozy le 21 février, 4 jours après le début de l’insurrection, à Bruxelles, pour déclarer la logique de guerre contre Kadhafi. Mais les bombardements, il n’y en a jamais eu.
    Benoit Collombat : Des bombardements de populations civiles imputés aux kadhafistes ?
    Patrick Haimzadeh : oui. Donc ça c’est le premier volet de l’intervention qatari, c’est l’intervention médiatique. La deuxième intervention, c’est le soutien à une certaine frange de l’insurrection, à certains courants islamistes, qui ne sont pas tous maintenant des gens qui se reconnaissent dans l’État Islamique, mais qui sont des gens qui ont été soutenus par le Qatar. Des livraisons d’armes, françaises d’ailleurs, par le Qatar, ça s’est fait.
    Benoit Collombat : Est-ce que la France savait, selon vous, le jeu que jouait le Qatar ?
    Patrick Haimzadeh : Bien sûr. On avait des hommes sur le terrain, on savait très bien. Il fallait que ça aille vite et l’objectif militaire premier c’était la chute de Kadhafi, donc à ce moment-là personne ne voulait voir ce qui commençait à se dessiner en Libye.
    OB : Énorme, et zou, ça glisse comme rien… Par ailleurs, pas de souci, la parité a été respectée : si les armes étaient françaises, les morts étaient bien libyens.
    Matthieu Aron : Voilà pour la Libye donc. Retour maintenant en Syrie. On a un groupe, l’État Islamique, qui monte en puissance grâce à l’argent des Qataris et des Saoudiens, mais cette aide va peu à peu s’interrompre.
    Jacques Monin : Oui parce que le groupe État Islamique devient de plus en plus dangereux, il va s’approcher des frontières saoudiennes, il devient si incontrôlable que ses alliés vont finir par couper effectivement les ponts avec lui. Et selon Alain Chouet, l’ex patron du renseignement de la DGSE. A la mi-2013, les Saoudiens prennent en fait conscience que ces rebelles, les rebelles qu’ils ont aidés, peuvent se retourner contre eux.
    extrait Alain Chouet : “A l’été 2013, le cabinet royal saoudien a coupé les vivres complètement aux frères d’Égypte, mais aussi aux mouvements violents qui agissaient aussi bien dans le nord de l’Irak qu’en Syrie. C’est là qu’apparait d’ailleurs l’État Islamique, parce que jusque-là, il n’existe pas l’État Islamique. Il y a un État Islamique en Irak, mais il n’y a pas d’État Islamique en Irak et au Levant. C’est important de le comprendre parce qu’à partir du moment où l’Arabie et le Qatar coupent les vivres au mouvement, il est obligé de sortir du bois. Et on le voit sortir du bois, sa première action, ça a été d’aller piller la banque centrale de Mossoul. Ils ont raflé 500 millions de dollars en billets et en lingots d’or avec lesquels ils se sont payés des chefs de tribus du nord de l’Irak. Qui paie, commande. N’étant plus payé par l’Arabie Saoudite, l’État Islamique échappe à son créateur et reprend la stratégie classique des Frères Musulmans, qui est de condamner la famille Saoud. Le monstre a échappé à ses créateurs.
    Matthieu Aron : L’Arabie Saoudite prend donc conscience qu’elle a enfanté un monstre, et cette analyse, Jacques Monin, ce n’est pas simplement celle d’anciens patrons du renseignement français.
    OB : telle mère, telle fille…
    Jacques Monin : Non. À ce moment-là, même les plus hauts dignitaires d’Arabie Saoudite reconnaissent qu’ils ont commis des erreurs. Prenez par exemple le prince et homme d’affaires saoudien al-Walid Ben Talal. C’est l’un des plus grands investisseurs saoudiens en France, c’est la vingtième fortune du monde, il possède entre-autre le George V à Paris et plusieurs hôtels de DisneyLand. Et bien écoutez ce qu’il répond en octobre 2014 a une journaliste de CNN lorsqu’elle l’interroge sur le sujet.
    extrait journaliste de CNN et Al-Walid Ben Talal
    journaliste de CNN : Quand est-il du financement du terrorisme par des grandes fortunes saoudiennes ? Est-ce qu’il est autorisé ? Est-ce qu’on réprime le financement des groupes terroristes quels qu’ils soient ?
    Al-Walid Ben Talal : Très honnêtement, je dois vous dire que oui, on avait une faiblesse de ce côté-là. Malheureusement quelques éléments extrémistes en Arabie Saoudite ont financé des éléments extrémistes en Syrie mais l’Arabie Saoudite a pris des mesures très sévères pour y mettre fin. Et maintenant tout ça c’est terminé.
    Matthieu Aron : “C’est terminé.” Explique ce prince saoudien. Les choses sont peut-être un peu plus complexes.
    Jacques Monin : Oui parce que comme souvent, il y a ce que l’on dit et ce que l’ont fait, ou plutôt en l’occurrence ce que l’on ne fait pas. Parce que si les Saoudiens ne font plus rien pour aider le groupe État Islamique, ils ne font plus rien non plus pour lutter contre lui. Et c’est ce que remarque l’ancien haut-fonctionnaire du quai d’Orsay Pierre Conesa
    extrait Pierre Conesa : “L’Arabie Saoudite ne combat pas Daesh. En fait ce sont des pays de l’OTAN qui vont battre Daesh. Il y a 12 pays de l’OTAN, y compris l’Australie, plus 5 pays arabes. En fait surtout la Jordanie plus quelques pays du Golfe. Mais en fait quand on regarde la composition des forces aériennes, on s’aperçoit que l’Arabie Saoudite met autant d’avions que la Hollande et le Danemark additionnés. Mais par contre elle met 5 fois plus d’avions pour se battre au Yémen contre les Houthis, c’est-à-dire contre les chiites. Donc l’Arabie Saoudite fait la même politique que Daesh, c’est-à-dire la persécution des chiites, mais il n’y a aucune raison de se battre entre eux. La société saoudienne ne comprendrait pas pourquoi on va essayer de faire disparaitre une société qui leur ressemble autant, celle-là même qui décapite, qui crucifie, qui coupe les mains des voleurs, qui opprime les femmes et qui interdit les autres religions.
    Matthieu Aron : L’Arabie Saoudite ne fait donc rien pour intervenir véritablement et en coulisse son rôle pourrait être encore plus trouble ?
    Mais qui, qui, qui aurait pu s’en douter ?

    « Le rapport [de la Commission parlementaire que j’ai présidée sur les services de renseignement durant le 11 septembre] montre la participation directe du gouvernement saoudien dans le financement du 11 septembre. Nous savons au moins que plusieurs des 19 kamikazes ont reçu le soutien financier de plusieurs entités saoudiennes, y compris du gouvernement. Le fait de savoir si les autres ont aussi été soutenus par l’Arabie saoudite n’est pas clair, car cette information a été cachée au peuple américain. On nous dit que cela ne peut être fait pour des raisons de sécurité nationale, mais c’est exactement le contraire. Publier est important précisément pour notre sécurité nationale.

    Les Saoudiens savent ce qu’ils ont fait, ils savent que nous savons. La vraie question est la manière dont ils interprètent notre réponse. Pour moi, nous avons montré que quoi qu’ils fassent, il y aurait impunité. Ils ont donc continué à soutenir Al-Qaïda, puis plus récemment dans l’appui économique et idéologique à l’État islamique. C’est notre refus de regarder en face la vérité qui a créé la nouvelle vague d’extrémisme qui a frappé Paris. » [Sénateur Bob Graham, ancien Président de la Commission du Renseignement du Sénat américain, Le Figaro, 02/02/2015]

    Jacques Monin : Si l’on en croit des sources bien informées, comme on dit, l’Arabie Saoudite continuerait indirectement de financer Daesh en achetant son pétrole au marché noir avec la complicité de la Turquie. C’est ce que soutient en tout cas un fin connaisseur du sujet, l’ancien patron d’Elf, Loïk Le Floch-Prigent, qui a lui-même longtemps travaillé en Irak et en Syrie.
    extrait Loïk Le Floch-Prigent et Benoit Collombat
    Loïk Le Floch-Prigent : Le pétrole de Daesh ne peut sortir, ne peut être payé, que par des gens qui sont près a le payer et à étouffer son existence. C’est forcément un mélange de Turc et de Saoudiens. Il n’y a pas d’autres solutions. C’est-à-dire que c’est les deux pays qui sont en contact et qui ont la possibilité de le faire.
    Jacques Monin : Qu’est-ce qu’ils en font les Saoudiens de ce pétrole ? Ils le blanchissent ?
    Loïk Le Floch-Prigent : Oh, ils l’utilisent forcément, ils ne peuvent pas le blanchir. Je vous rappelle qu’un pétrole a un ADN et par conséquent on sait d’où il vient si jamais il est sur le marché. Si jamais ils exportaient ce pétrole, ce serait su. Ce pétrole ne vient jamais sur le marché donc ils l’utilisent, c’est tout. La laverie s’appelle une raffinerie.
    Matthieu Aron : Voilà donc pour les éléments qui jettent le doute sur l’implication du Qatar et de l’Arabie Saoudite. Et pourtant la France continue d’entretenir les meilleurs rapports avec ces pays.
    Jacques Monin : Rappelez-vous, François Hollande s’est rendu dans le Golfe, c’était en mai dernier. il signe avec le Qatar un contrat qui porte sur la vente de 24 Rafales. Et puis il y a un mois, il y a un mois à peine, en octobre dernier, Manuel Valls se rend à son tour à Ryad pour signer des promesses de contrat et voilà d’ailleurs ce qu’il lance devant un parterre de dignitaires saoudiens.
    extrait Manuels Valls : Avec l’Arabie Saoudite nous avançons en confiance, nous approfondissons une relation économique que nous tournons résolument vers l’avenir. Venez investir dans notre pays au coeur de l’Europe, c’est le moment, plus que jamais.”
    Matthieu Aron : À ce stade de votre enquête, Jacques Monin, ce que l’on peut retenir c’est qu’en Syrie de très nombreux pays ont joué avec le feu.
    Jacques Monin : Les États-Unis qui ont déstabilisé l’Irak, les pays du Golfe qui ont financé des mouvements djihadistes, la France qui a joué les rebelles contre le pouvoir syrien sans voir qui elle avait véritablement en face d’elle et la Turquie qui laisse prospérer les trafics sur son territoire. Bref, pour Hocham Daoud qui est anthropologue au CNRS, les responsabilités sont multiples.
    extrait Hocham Daoud : “Tout le monde a joué avec Daesh. Tout le monde voulait jouer à travers Daesh pour s’imposer. En fait, on a créé Frankestein, aujourd’hui tout le monde essaye de trouver un moyen pour l’arrêter. Oui il y a des moyens, on peut avoir des forces de coordinations pour venir à bout de Daesh s’il y a une volonté politique.”
    Matthieu Aron : Une réponse politique, sans doute, mais en attendant c’est une réponse militaire qui est apportée.
    Jacques Monin : C’est d’abord un signe adressé à l’opinion française, c’est un signe de fermeté et de détermination. Mais sur le terrain l’efficacité des frappes est limitée et rien ne dit d’ailleurs qu’elles n’auront pas des effets pervers. Écoutez ce que pense à ce sujet, l’ancien colonel de marine Michel Goya, toujours interrogé par Benoit Collombat.
    extrait Michel Goya et Benoit Collombat :
    Michel Goya : Vous savez, les frappes françaises c’est 3 % du total de toutes les frappes de la coalition qui n’a pas détruit l’État Islamique. Des 200 et quelques frappes que nous avons réalisées, en réalité c’est un petit coup porté à l’État Islamique, donc on peut imaginer d’augmenter les doses je dirais, mais fondamentalement ça ne va pas changer grand-chose.
    Benoit Collombat : Et est-ce que ça n’alimente pas le terrorisme encore un peu plus ?
    Michel Goya : Oui, cette campagne de frappes c’est un sergent recruteur remarquable pour l’État I’Islamique. La campagne aérienne, la coalition dans son ensemble a peut-être tué 400 civils. Donc tout ça, ça alimente globalement le ressentiment sur place, ça alimente l’idée que ce sont toujours les arabes sunnites qui se prennent des bombes dessus. Le bilan de la coalition, on a tué 10 000 combattants, c’est un chiffre invérifiable en réalité. 10 000 combattants mais elle en a recruté aussi un certain nombre.
    Matthieu Aron : Voilà, c’est ce que l’on appelle un cercle infernal, mais comment faire autrement ? Aucune solution simple ne semble, au moins à court terme, se dégager. Reste l’autre question, qu’il est peut-être aussi tant de poser. C’est celle de nos alliances, avec Jacques Monin, notamment le Qatar et l’Arabie Saoudite.
    Jacques Monin : Oui, peut-on adopter une posture morale lorsqu’il s’agit de Damas et fermer les yeux sur ce que font Doha et Riyad ? Comment peut-on être crédible si l’on fait du commerce avec des pays qui soutiennent que l’on dénonce par ailleurs. Là-dessus le spécialiste du renseignement Alain Chouet est catégorique.
    extrait Alain Chouet : “On ne pourra pas continuer éternellement dans une politique schizophrène qui consiste à vouloir imposer la démocratie dans certains pays en maintenant une alliance entre nos démocraties et la démocratie qui est la plus grande du monde, et les états théocratiques les plus réactionnaires de la région. On a fermé les yeux sur l’idéologie prônée par ces pays, parce qu’on ne la voyait pas, parce qu’on n’en voyait pas les effets. On n’en mesurait pas les effets parce que rien ne se passait chez nous, ou s’il se passait des choses on ne les voyait pas, eh bien maintenant on les voit.
    Jacques Monin : Oui alors question. La France va-t-elle évoluer de ce côté-là ? Rien n’est moins sûr, pour l’instant Matignon affiche un embarras prudent et préfère insister sur l’évolution de ses alliés, plutôt que sur ses turpitudes.
    Matthieu Aron : Merci Jacques Monin pour cette enquête réalisée en collaboration avec Benoit Collombat. Enquête à retrouver sur notre site internet franceinter.fr et la page Facebook de Secret d’Infos.
    Source : France Inter, Matthieu Aron, 20/11/2015

    (merci de signaler les coquilles…)

    Source : Le blog d’Olivier Berruyer, les-crises.fr :
    http://www.les-crises.fr/france-inter-daesh-autopsie-dun-monstre/

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  20. etienne

    Pierre Conesa (ex Affaires Stratégiques) :
    Arabie Saoudite, Théâtre de Dupes, Stratégie planétaire.

    httpv://youtu.be/d22EkRIxowI

    Réponse
  21. joss

    Les dix stratégies de manipulation de masses (tirées de Noam Chomsky) :
    http://www.sylviesimonrevelations.com/article-les-dix-strategies-de-manipulation-de-masses-112673939.html

    ex. la stratégie N°2:
    2/ Créer des problèmes, puis offrir des solutions

    Cette méthode est aussi appelée « problème-réaction-solution ». On crée d’abord un problème, une « situation » prévue pour susciter une certaine réaction du public, afin que celui-ci soit lui-même demandeur des mesures qu’on souhaite lui faire accepter. Par exemple: laisser se développer la violence urbaine, ou organiser des attentats sanglants, afin que le public soit demandeur de lois sécuritaires au détriment de la liberté.

    (Ou encore : créer une crise économique pour faire accepter comme un mal nécessaire le recul des droits sociaux et le démantèlement des services publics.).

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  22. joss

    Digithèque de matériaux juridiques et politiques
    http://mjp.univ-perp.fr/

    On y retrouve les constitutions de différents pays (texte en FR).
    Et bien d’autres choses intéressantes.

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